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20/06/2017 | FRANCE | N°16LY01637

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 20 juin 2017, 16LY01637


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...a demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) d'annuler l'arrêté du 12 décembre 2013 par lequel le maire de La Chapelle de Guinchay l'a licenciée pour inaptitude physique à compter du 1er janvier 2014 ;

2°) d'enjoindre à la commune de La Chapelle de Guinchay de procéder à sa réintégration et à la reconstitution de sa carrière et de ses droits à compter du 1er janvier 2014, dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de

100 euros par jour de retard ;

3°) de condamner la commune de La Chapelle de Guinchay à lui ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...a demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) d'annuler l'arrêté du 12 décembre 2013 par lequel le maire de La Chapelle de Guinchay l'a licenciée pour inaptitude physique à compter du 1er janvier 2014 ;

2°) d'enjoindre à la commune de La Chapelle de Guinchay de procéder à sa réintégration et à la reconstitution de sa carrière et de ses droits à compter du 1er janvier 2014, dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de condamner la commune de La Chapelle de Guinchay à lui verser une somme de 33 437,67 euros correspondant à la perte de rémunération subie à compter du 1er janvier 2014 ;

4°) de condamner la commune de La Chapelle de Guinchay à lui verser la somme de 10 000 euros au titre du préjudice moral subi du fait de son licenciement illégal ;

5°) de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1500143 du 3 mars 2016, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 12 décembre 2013, enjoint à la commune de La Chapelle de Guinchay de prononcer la réintégration de Mme A...dans ses effectifs et de la placer dans une position conforme à son statut dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et mis à la charge de la commune le versement d'une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 13 mai 2016, et un mémoire, enregistré le 22 novembre 2016, MmeA..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 3 mars 2016 en tant qu'il rejette ses conclusions indemnitaires ;

2°) de condamner la commune de La Chapelle de Guinchay à lui verser une indemnité de 33 437,67 euros au titre du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la perte de son traitement depuis la date de son licenciement le 1er janvier 2014 ;

3°) de condamner la commune à lui verser une indemnité de 10 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle estime avoir subi ;

4°) de mettre à la charge de la commune de La Chapelle de Guinchay le versement d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de ce que la commune n'avait pas respecté son obligation de reclassement ;

- son licenciement illégal est à l'origine d'un préjudice financier de 33 437,67 euros lié au titre de l'indemnité d'éviction qu'elle n'a pas perçue, correspondant aux traitements non perçus depuis la date de son licenciement, ainsi que des pertes de traitements, de droits sociaux et de droits à pension qu'elle a subies ; c'est à tort que le tribunal administratif a considéré qu'elle devait être placée en disponibilité pour la période du 1er janvier 2014 au 31 mars 2014, dès lors qu'elle aurait très probablement été reconnue apte au travail ; son aptitude a d'ailleurs été reconnue en mai et novembre 2016 ;

- elle est fondée à demander une indemnité de 10 000 euros au titre du préjudice moral qu'elle a subi, la faute de la commune l'ayant privée d'emploi à un âge et dans une situation où retrouver un poste n'a pas été possible et l'illégalité de la décision de licenciement ayant entraîné un sentiment de dénigrement dû à l'impossibilité de reprendre son travail ; elle a été évincée alors qu'elle avait clairement indiqué vouloir poursuivre son activité professionnelle sur un poste compatible avec son état de santé ; son licenciement illégal est à l'origine de sa situation de surendettement ; l'inertie de la commune pour le versement de son allocation de chômage a aggravé sa situation financière ; alors qu'elle souhaitait travailler, la commune ne l'a pas invitée à présenter une demande de reclassement et n'a pas recherché si elle était apte à ses fonctions ou à un autre poste dans le cadre d'un reclassement lorsqu'elle a été licenciée ;

- le licenciement est illégal, dès lors qu'à la date du 12 décembre 2013, elle n'était pas inapte à reprendre son activité professionnelle ; la durée de la disponibilité n'ayant pas excédé trois années, elle aurait dû être réintégrée dans ses fonctions ;

- aucune procédure de reclassement n'a été mise en oeuvre, ni en 2010/2011, ni avant la décision de licenciement, en 2013.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juillet 2016, et un mémoire, enregistré le 6 mars 2017, la commune de La Chapelle de Guinchay, représentée par MeD..., de la SCP Adida et Associés, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Dijon du 3 mars 2016 en tant qu'il annule l'arrêté du 12 décembre 2013 et au rejet de la demande de MmeA..., ou, à titre subsidiaire, au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de cette dernière en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir :

- à titre principal, que le licenciement de MmeA..., qui n'a pu bénéficier d'un reclassement, n'était pas physiquement apte à occuper son poste et dont l'admission à la retraite a été refusée par la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), n'est pas illégal ; que la procédure de reclassement a été respectée ; qu'en l'absence de faute, les conclusions indemnitaires de Mme A...ne peuvent qu'être rejetées ;

- à titre subsidiaire, pour le cas où la cour estimerait le licenciement illégal, que les conclusions indemnitaires de Mme A...sont infondées ;

- à titre infiniment subsidiaire, que le montant de ses prétentions doit être réduit.

En application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité, comme relevant d'un litige distinct du litige soulevé par MmeA..., des conclusions incidentes présentées par la commune de La Chapelle de Guinchay.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions ;

- le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadre, de disponibilité et de congé parental des fonctionnaires territoriaux ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Marc Clément, rapporteur public ;

1. Considérant que MmeA..., agent technique territoriale titulaire depuis le 1er octobre 2004, a exercé en qualité d'agent territorial spécialisé des écoles maternelles de la commune de La Chapelle de Guinchay ; que le maire de cette commune a, par un arrêté du 12 décembre 2013, prononcé son licenciement pour inaptitude physique à compter du 1er janvier 2014 ; que, par un courrier du 23 décembre 2014, reçu le 26 décembre 2014 par la commune, Mme A...a demandé l'annulation de cet arrêté et présenté des demandes indemnitaires ; que Mme A...relève appel du jugement du tribunal administratif de Dijon du 3 mars 2016 en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires et demande que la commune soit condamnée à lui verser une somme globale de 43 437,67 euros au titre des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de l'illégalité fautive de son licenciement ; que la commune de La Chapelle de Guinchay présente des conclusions incidentes tendant à l'annulation du jugement en tant qu'il a annulé l'arrêté du 12 décembre 2013 ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il ressort des termes du jugement attaqué que les premiers juges ont annulé l'arrêté du 12 décembre 2013 du maire de la commune de La Chapelle de Guinchay au motif qu'à cette date, MmeA..., dont il ne ressortait pas des pièces du dossier qu'elle aurait été définitivement inapte à l'exercice de toutes fonctions, n'avait pas épuisé ses droits à disponibilité d'office ; qu'il a, ainsi, et en tout état de cause, suffisamment justifié cette annulation et n'était pas tenu, conformément au principe de l'économie de moyens, de se prononcer sur les autres moyens de la demande, et notamment le moyen tiré de ce que la commune n'aurait pas respecté son obligation de reclassement ; que Mme A...n'est, par suite, pas fondée à soutenir que les premiers juges auraient entaché d'irrégularité leur jugement en omettant de répondre à ce dernier moyen ;

Sur le bien fondé du jugement :

En ce qui concerne les conclusions incidentes de la commune de La Chapelle de Guinchay :

3. Considérant que les conclusions incidentes de la commune de La Chapelle de Guinchay tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Dijon en tant qu'il a annulé l'arrêté du 12 décembre 2013 par lequel le maire de la commune a licencié Mme A...relèvent d'un litige distinct de celui qu'a soulevé cette dernière, laquelle ne demande l'annulation de ce jugement qu'en tant qu'il a rejeté ses demandes indemnitaires ; que, présentées après l'expiration du délai d'appel, de telles conclusions sont irrecevables ;

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires de Mme A...:

4. Considérant, en premier lieu, qu'à la date de son licenciement, Mme A...était en disponibilité d'office ; que, si l'expertise médicale la plus récente, réalisée par le Dr E...le 3 juillet 2013, indiquait que Mme A...n'était "pas dans une incapacité absolue et définitive de continuer ses fonctions", il n'en résulte pas, et il n'est d'ailleurs pas allégué par la requérante, qu'elle aurait été apte à reprendre ses fonctions à la date du 1er janvier 2014, alors qu'il résulte de l'instruction qu'elle souffrait toujours, à cette date, de troubles psychologiques, dépression, asthénie, chutes et pertes de mémoire, pathologies au titre desquelles elle avait d'ailleurs elle-même sollicité son admission à la retraite pour invalidité et avait été reconnue travailleur handicapé par décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées du 7 novembre 2013, à compter du 1er juillet 2013 ; que, dans ces conditions, MmeA..., qui n'établit pas avoir été privée d'une chance sérieuse de reprendre ses fonctions à compter du 1er janvier 2014, n'est pas fondée à demander que la commune La Chapelle de Guinchay soit condamnée à lui verser la somme de 13 331,63 euros au titre du préjudice financier qu'elle aurait subi du fait de son licenciement illégal ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance, à la supposer établie, que la commune n'aurait pas respecté son obligation de reclassement est inopérante, dès lors que Mme A... n'a pas été estimée inapte à ses fonctions par l'expertise médicale du 3 juillet 2013 ; qu'il suit de là que Mme A...n'est pas fondée à demander la condamnation de la commune à l'indemniser au titre de ce chef de préjudice ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que, par courrier du 29 janvier 2015 reçu le 2 février 2015, la commune de La Chapelle de Guinchay a proposé à Mme A...de conclure une transaction au terme de laquelle, en contrepartie de l'abandon de la procédure judiciaire, elle serait réintégrée dans les effectifs de la commune au 1er janvier 2014 avec reconstitution de carrière à compter de cette date, incluant le versement des salaires ; que MmeA..., qui a décliné cette proposition au motif qu'elle ne répondait pas à l'intégralité de ses demandes et qui ne démontre pas avoir recherché en vain un autre emploi, ne conteste pas que la décision de licenciement a fait suite à l'accord susmentionné, négocié avec la commune ; qu'elle n'est, dans ces conditions, pas fondée à soutenir que cette décision aurait entraîné pour elle un préjudice moral susceptible d'être indemnisé, résultant notamment de la perte de son emploi à l'âge qui était le sien, du sentiment de dénigrement dû à l'impossibilité de reprendre son travail alors qu'elle avait indiqué vouloir poursuivre son activité professionnelle sur un poste compatible avec son état de santé sans que la commune, qui n'a pas cherché à la reclasser, l'ait invitée à présenter une demande de reclassement ou de sa situation de surendettement aggravée par l'inertie de la commune pour procéder au versement de son allocation de chômage ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande indemnitaire ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de La Chapelle de Guinchay, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée au titre des frais non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...la somme demandée par la commune de La Chapelle de Guinchay en application de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions incidentes de la commune de La Chapelle de Guinchay et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et à la commune de La Chapelle de Guinchay.

Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 30 mai 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Jean-François Alfonsi, président de chambre ;

- M. Hervé Drouet, président-assesseur ;

- Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 juin 2017.

6

N° 16LY01637


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY01637
Date de la décision : 20/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Licenciement.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : MAILLY

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-06-20;16ly01637 ?
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