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20/06/2017 | FRANCE | N°16LY00180

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 20 juin 2017, 16LY00180


Vu la procédure suivante :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La cour administrative d'appel de Lyon

(3ème chambre)

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...C...épouse E...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté n° 2015-VR 05 du 2 février 2015 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire et de régulariser son séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a prescrit son renvoi en Tunisie, et d'enjoi

ndre audit préfet, dans le délai d'un mois et sous astreinte journalière de 200 euros de lui délivrer un ...

Vu la procédure suivante :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La cour administrative d'appel de Lyon

(3ème chambre)

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...C...épouse E...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté n° 2015-VR 05 du 2 février 2015 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire et de régulariser son séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a prescrit son renvoi en Tunisie, et d'enjoindre audit préfet, dans le délai d'un mois et sous astreinte journalière de 200 euros de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1503746 du 6 octobre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 15 janvier 2016, MmeE..., représentée par Me Fraquet, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1503746 du 6 octobre 2015 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler l'arrêté n° 2015-VR 05 du 2 février 2015 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours et a désigné un pays de destination ;

3°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant du refus de titre de séjour :

- l'arrêté est entaché d'incompétence;

- il est insuffisamment motivé ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison des relations intenses qu'elle entretient avec sa belle-famille et alors qu'elle n'a plus de lien en Tunisie ;

- il méconnaît l'article L. 313-11,11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant en raison de l'état de santé de son fils qui nécessite un suivi médical lourd et particulier non disponible en Tunisie ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en raison de la difficulté d'accès aux soins en Tunisie;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité entachant le refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'incompétence

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen sérieux de sa demande ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est entachée d'incompétence

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à sa situation personnelle.

Mme E...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 10 décembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Samuel Deliancourt, premier conseiller ;

1. Considérant que MmeE..., ressortissante tunisienne née le 22 février 1984, a déposé une demande de titre de séjour auprès des services de la préfecture de l'Isère le 20 novembre 2014 sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11,11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle relève appel du jugement du 6 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2015-VR 05 du 2 février 2015 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a prescrit son renvoi en Tunisie ;

Sur les conclusions à fin d'annulation du refus du titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué a été signé par M. Lapouze, secrétaire général de la préfecture de l'Isère, qui disposait à cet effet d'une délégation de signature par arrêté du 17 avril 2014, régulièrement publié ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que la décision de refus de délivrance de titre de séjour énonce clairement les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et est, dès lors, régulièrement motivée au regard des exigences des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du même code : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger (...) dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). " ;

5. Considérant que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;

6. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ;

7. Considérant que s'il ressort des pièces du dossier que le jeuneD..., né le 17 avril 2013 à Grenoble, souffre de troubles du développement neurologique et d'un retard de développement psychomoteur, l'avis du 2 décembre 2014 rendu par le médecin de l'agence régional de santé indique, sans que ces éléments soient sérieusement contredits, que l'état de santé de cet enfant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'un traitement approprié existe dans son pays d'origine et qu'il n'existe aucun contre-indication médicale au voyage ; qu'en l'absence de tout élément pertinent produit par Mme E...au soutien de ses écritures de nature à remettre en cause ces appréciations, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Isère a méconnu ces dispositions doit être écarté ;

8. Considérant, en quatrième lieu, que si Mme E...soutient être entrée en France le 11 juillet 2011 pour y rejoindre son époux, M. B...E..., ressortissant tunisien né le 12 mai 1987, dont il n'est pas contesté qu'il n'a pas déposé de demande de titre de séjour, et y résider depuis, elle ne justifie aucunement de la réalité de ses allégations ; que si l'intéressée soutient ne plus avoir de liens familiaux effectifs en Tunisie où résident ses parents et son frère à la suite d'un différend relatif à son mariage, elle n'en justifie pas davantage ; qu'elle ne démontre pas non plus être particulièrement intégrée dans la société française ; que, ainsi qu'il a été dit au point précédent, un traitement approprié existe en Tunisie pour son filsD... ; que, par suite, la décision contestée de refus de titre de séjour n'a pas porté au droit de Mme E... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus et n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de l'intéressée ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant la Tunisie comme pays de destination :

9. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Isère ne se serait pas livré à un examen particulier de la situation personnelle de Mme E... ;

10. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points précédents que Mme E...n'est pas fondée à exciper, à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi, de l'illégalité de la décision rejetant sa demande de titre de séjour ;

11. Considérant, en troisième lieu, que la requérante reprend les mêmes moyens que ceux soulevés à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour ; que, pour les motifs exposés dans le cadre de l'examen de la légalité de cette décision, ces moyens ne peuvent qu'être écartés ;

12. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ; que, toutefois, la décision par laquelle le préfet de l'Isère a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme E...n'implique pas, par elle-même, la séparation de l'intéressée avec son enfant dès lors que, comme il a été dit ci-dessus, il n'est fait état d'aucun élément qui pourrait légitimement faire obstacle à la poursuite de sa vie privée et familiale dans son pays d'origine ; qu'ainsi, la décision litigieuse ne peut être réputée porter atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant au sens de l'article 3-1 de la convention de New-York ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme E...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent également être rejetées les conclusions présentées aux fins d'injonction comme celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme E...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...E..., à Me Fraquet et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 30 mai 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

- M. Hervé Drouet, président-assesseur.

- M. Samuel Deliancourt, premier conseiller.

Lu en audience publique le 20 juin 2017.

6

N° 16LY000180


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY00180
Date de la décision : 20/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Samuel DELIANCOURT
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : FRAQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-06-20;16ly00180 ?
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