La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/06/2017 | FRANCE | N°15LY02011

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 01 juin 2017, 15LY02011


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme C...B...ont demandé au tribunal administratif de Dijon de leur accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1401435 du 16 avril 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 juin 2015, M. et MmeB..., représentés par Me A..., demandent à la

cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 avril 2015 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) de l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme C...B...ont demandé au tribunal administratif de Dijon de leur accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1401435 du 16 avril 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 juin 2015, M. et MmeB..., représentés par Me A..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 avril 2015 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) de leur accorder la décharge des impositions contestées et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement, qui ne se prononce pas sur le bien-fondé des pénalités et majorations, est entaché d'une omission à statuer ;

- l'administration fiscale a adressé la proposition de rectification du 15 mars 2013 à l'ancienne adresse professionnelle de M. B..., alors qu'elle connaissait leur adresse en Belgique, et cette proposition de rectification ne leur est pas parvenue en temps utile pour qu'ils puissent présenter leurs observations ;

- l'administration ne pouvait remettre en cause les déductions opérées au titre de la " loi Madelin " dès lors que les montants déduits sont ceux retenus par l'association agréée les ayant assistés et ne dépassent pas les plafonds prévus par la loi ;

- l'administration ne pouvait remettre en cause les déductions d'intérêts d'emprunt pour leur résidence principale située à Mons (Belgique), acquise le 1er septembre 2010, dès lors que M. B... possède son domicile fiscal en France et que cet emprunt a été contracté en France ;

- l'administration a violé le champ d'application de la loi et le principe de non discrimination garanti par le droit de l'Union européenne en refusant lesdites déductions ;

- l'administration aurait dû déduire des impositions en litige les sommes de 17 376 euros au titre des sommes déjà acquittées, 15 074,81 euros au titre des sommes déjà saisies par l'administration et 13 207 euros au titre de la pension alimentaire ;

- les pénalités mises à leur charge sont dues au retard de l'administration quant à la mise en recouvrement des impositions supplémentaires.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions concernant l'avis à tiers détenteur du 24 février 2014, les revenus de l'année 2009 et les taxes d'habitation de 2012 et 2013 ne concernent pas les impositions en litige et sont, par suite, irrecevables ;

- les intérêts d'emprunt pour l'acquisition de la résidence située à Mons (Belgique) ne sont pas déductibles dès lors que celle-ci ne constituait pas la résidence principale de M. et Mme B... au titre des années 2010 et 2011 ;

- les déductions opérées au titre de la " loi Madelin " ont déjà été retenues pour la détermination des bénéfices non commerciaux et ne pouvaient à nouveau être déduites du revenu global des contribuables ;

- les impositions supplémentaires n'ont pas été mises en recouvrement tardivement du fait de l'administration.

Par une ordonnance du 13 mars 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 14 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pourny, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public ;

1. Considérant que M.B..., de nationalité belge, exerce en France une activité de médecin anesthésiste-réanimateur ; qu'il a déposé ses déclarations de revenus au titre des années 2010 et 2011 au centre des finances publiques de Cosne-Cours-sur-Loire ; qu'après un contrôle sur pièces de la situation fiscale de M. et Mme B..., l'administration fiscale leur a adressé, rue Waldeck Rousseau à Cosne-Cours-sur-Loire, une proposition de rectification en date du 15 mars 2013 concernant, au titre des années 2010 et 2011, une pension alimentaire, des enfants à charge, des cotisations de retraite complémentaire et des intérêts d'emprunt ; qu'à la suite de cette proposition de rectification, sur laquelle les intéressés n'ont pas présenté d'observations, le pli la contenant n'ayant pas été retiré, M. et Mme B... ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2010 et 2011, assorties de la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du code général des impôts et des intérêts de retard ; que M. et Mme B... contestent le jugement du 16 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions laissées à leur charge après le rejet partiel de leur réclamation préalable ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que par un mémoire enregistré le 21 janvier 2015 au greffe du tribunal administratif de Dijon, M. et Mme B... ont contesté les pénalités dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu en litige, en soutenant que l'importance de ces pénalités résulte de retards de l'administration dans la mise en recouvrement de ces impositions ; que le tribunal administratif de Dijon n'a pas répondu à ce moyen, qui n'était pas inopérant ; que, par suite, son jugement doit être annulé en tant qu'il statue sur ces pénalités ; qu'il y a lieu pour la cour de statuer par voie d'évocation sur les conclusions tendant à la décharge de ces pénalités et de statuer dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions présentées pour M. et Mme B... ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Considérant que M. B...a déclaré ses revenus des années 2010 et 2011 en mentionnant une adresse à Cosne-Cours-sur-Loire ; qu'il a encore mentionné cette adresse dans un courrier du 10 mars 2013 adressé au service des impôts des particuliers en réponse à une demande de renseignements concernant les pensions alimentaires qu'il a versées et le statut de ses enfants ; que, dès lors, les intéressés ne justifiant pas avoir informé l'administration d'un changement d'adresse en 2011, 2012 ou 2013, avant l'envoi de la proposition de rectification du 15 mars 2013, cette proposition de rectification a pu valablement leur être envoyée à leur adresse de Cosne-Cours-sur-Loire, même si l'administration fiscale leur connaissait également une adresse en Belgique ; que le moyen tiré de ce que les intéressés auraient été privés de la possibilité de présenter utilement leurs observations sur cette proposition de rectification du fait de l'envoi de celle-ci à ce qui était alors l'adresse de leur domicile fiscal doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions du I de l'article 154 bis du code général des impôts : " I.- Pour la détermination des bénéfices industriels et commerciaux et des bénéfices des professions non commerciales, sont admises en déduction du bénéfice imposable les cotisations à des régimes obligatoires, de base ou complémentaires, d'allocations familiales, d'assurance vieillesse, y compris les cotisations versées en exercice des facultés de rachat prévues aux articles L. 633-11, L. 634-2-2, L. 642-2-2, L. 643-2 et L. 723-5 du code de la sécurité sociale, invalidité, décès, maladie et maternité (...) " ;

5. Considérant que l'administration fiscale a refusé la déduction du revenu global de M. et Mme B... des cotisations versées au titre d'un régime de retraite dans le cadre d'un contrat dit " Madelin " au motif que ces sommes avaient déjà été déduites des bénéfices non commerciaux de M. B..., comme l'atteste la déclaration professionnelle 2035 annexée à la décision du 14 mai 2014 ; que, dès lors, en se bornant à invoquer le fait qu'ils ont été assistés par une association agréée pour leur déclaration de revenus et que l'administration ne démontre pas que les plafonds légaux de déduction n'étaient pas respectés, M. et Mme B... ne contestent pas utilement le motif du refus de déduction invoqué par l'administration fiscale ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'administration leur aurait refusé à tort la réduction de leurs bases imposables du montant de ces cotisations doit être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions du I de l'article 200 quaterdecies du code général des impôts : " I.-Les contribuables fiscalement domiciliés en France au sens de l'article 4 B qui acquièrent un logement affecté à leur habitation principale, directement ou par l'intermédiaire d'une société non soumise à l'impôt sur les sociétés qui le met gratuitement à leur disposition, peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt sur le revenu au titre des intérêts des prêts contractés auprès d'un établissement financier à raison de cette opération, tels que définis à l'article L. 312-2 du code de la consommation. (...) " ; que le bénéfice de ces dispositions est expressément soumis à la condition que le prêt contracté, dont la déduction des intérêts est possible, se rapporte à l'acquisition de l'habitation principale du contribuable ; que cette condition s'apprécie à la date de versement des intérêts ;

7. Considérant, d'une part, que l'administration fiscale a remis en cause le bénéfice du crédit d'impôt relatif aux intérêts du prêt contracté par M. et Mme B... pour l'acquisition d'une résidence à Mons (Belgique) au seul motif que cette habitation ne constituait pas leur résidence principale ; qu'elle ne s'est à aucun moment fondée sur le fait que l'immeuble soit situé en Belgique ou sur la nationalité belge des requérants pour leur refuser le bénéfice des dispositions de l'article 200 quaterdecies du code général des impôts ; que, par suite, les moyens tirés de ce que ce refus aurait méconnu le champ d'application de la loi et le principe de non discrimination garanti par le droit de l'Union européenne doit être écarté ;

8. Considérant, d'autre part, que pour établir que la résidence principale de M. et Mme B... se trouvait à Cosne-Cours-sur-Loire, l'administration fiscale relève, sans que cela ne soit contesté, que les requérants ont déposé leurs déclarations de revenus au titre des années 2010 et 2011 au centre des finances publiques de Cosne-sur-Loire et qu'ils n'ont signalé aucun changement d'adresse ; que les circonstances que la proposition de rectification est revenue au service avec la mention " pli avisé non réclamé " et que l'administration fiscale a entretenu avec les requérants une correspondance à leur adresse en Belgique, postérieurement aux années des impositions en litige, ne permettent pas d'établir qu'ils avaient transféré leur résidence principale en Belgique lors de ces années d'imposition ; que, par ailleurs, si le certificat d'inscription de M. B... au registre de la population de Mons depuis le 1er septembre 2010, l'attestation de composition de ménage émise par les autorités belges ainsi que l'avis d'imposition foncière en Belgique au titre de l'année 2011 permettent d'établir que les contribuables bénéficiaient d'une résidence en Belgique, ces documents ne permettent pas, à eux seuls, de retenir qu'il s'agissait de leur résidence principale, alors qu'il n'est pas contesté qu'ils disposaient encore d'une résidence à Cosne-Cours-sur-Loire au titre des années 2010 et 2011 et qu'ils n'ont pas signalé de changement d'adresse à l'administration fiscale ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a pu considérer que le prêt contracté par M. et Mme B... ne se rapportait pas à l'opération d'acquisition de leur résidence principale et leur refuser, en conséquence, le bénéfice d'un crédit d'impôt, sur le fondement de l'article 200 quaterdecies du code général des impôts, à raison des intérêts de ce prêt ;

9. Considérant, en troisième lieu, que l'administration fiscale a fait droit aux observations de M. et Mme B... en abandonnant les impositions supplémentaires qui correspondaient à la pension alimentaire versée au père de M. B... ; que les requérants ne sauraient, par suite, se prévaloir du versement de cette pension pour demander la réduction des impositions supplémentaires restant en litige ;

10. Considérant, en dernier lieu, que les impositions faisant l'objet du présent litige concernent l'impôt sur le revenu au titre des années 2010 et 2011 ; que, par suite, les moyens visant l'avis à tiers détenteur émis le 24 février 2014, les revenus de l'année 2009 et les cotisations de taxe d'habitation au titre des années 2012 et 2013, ainsi que ceux relatifs au montant des impositions effectivement réglées par les intéressés sont sans incidence sur les impositions en litige ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leurs conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 ;

Sur les pénalités :

12. Considérant que M. et Mme B... soutiennent que les pénalités de retard appliquées par l'administration fiscale au titre des impositions supplémentaires pour les années 2010 et 2011 ne sont justifiées que par le retard de l'administration fiscale dans le recouvrement des impositions en litige ;

13. Considérant, toutefois, que le montant complet des impositions en litige n'a pu être mis en recouvrement qu'à la suite du contrôle des déclarations de M. et Mme B... par l'administration fiscale et de la rectification du caractère erroné desdites déclarations ; qu'en raison de ces circonstances, les requérants ne sauraient soutenir que la mise en recouvrement de ces impositions a été retardée par la faute de l'administration fiscale ; que, par suite, ils ne sont, en tout état de cause, pas fondés à demander la décharge des pénalités et majorations correspondant aux impositions demeurant... ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à demander la décharge de ces pénalités ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, verse à M. et Mme B... une somme au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 16 avril 2015 est annulé en tant qu'il se prononce sur les pénalités dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011.

Article 2 : Les conclusions de M. et Mme B... tendant à la décharge des pénalités dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 et le surplus des conclusions de leur requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2017 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Pourny, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er juin 2017.

4

N° 15LY02011


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY02011
Date de la décision : 01/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-01-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Détermination du revenu imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. François POURNY
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : SELARL ISARD AVOCAT CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-06-01;15ly02011 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award