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02/05/2017 | FRANCE | N°16LY00030

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 02 mai 2017, 16LY00030


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MmeA... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2014 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1503146 du 9 septembre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 janvier 2016, Mme A...C...

, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MmeA... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2014 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1503146 du 9 septembre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 janvier 2016, Mme A...C..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 septembre 2015 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de l'Isère du 18 décembre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter du prononcé de l'arrêt et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler, sous astreinte définitive de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, à payer à son conseil, la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Mme C... soutient que :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît le préambule, et les articles 3-1, 9-1 et 10 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours :

- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.

Par une ordonnance du 2 novembre 2016 la clôture d'instruction a été fixée au 25 novembre 2016 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 novembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mear, président-rapporteur ;

1. Considérant que MmeA... C..., ressortissante congolaise (République Démocratique du Congo), née le 28 octobre 1978, est, selon ses déclarations, entrée en France le 22 novembre 2012, sous couvert d'un passeport d'emprunt, en compagnie de deux de ses enfants mineurs ; qu'elle a présenté une demande d'asile qui a été rejetée le 21 décembre 2013 par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 26 juin 2014 ; que, par arrêté du 18 décembre 2014, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour au titre de l'asile, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de son renvoi à l'expiration du délai de départ volontaire ; que Mme C...relève appel du jugement, en date du 9 septembre 2015, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que Mme C...soutient qu'elle réside en France depuis 2012, y dispose d'un environnement amical et que ses deux filles y sont scolarisées ; que, toutefois, selon ses déclarations, MmeC... ne résidait ainsi en France que depuis deux ans à la date de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle n'y dispose d'aucune attache familiale alors qu'elle a indiqué avoir trois autres enfants résidant à l'étranger où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente quatre ans ; que, dans ces conditions, nonobstant les attestations amicales produites au dossier et son engagement associatif, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour au titre de l'asile n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, Mme C... n'est fondée à soutenir ni que la décision litigieuse aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

4. Considérant qu'aux termes du préambule de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " (...) l'enfant, pour l'épanouissement harmonieux de sa personnalité, doit grandir dans le milieu familial dans un climat de bonheur, d'amour et de compréhension " ; qu'aux termes du 1 de l'article 9 de la même convention : " Les Etats parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré (...) " ; et qu'aux termes de l'article 10 de ladite convention : " (...) toute demande faite par un enfant ou ses parents en vue d'entrer dans un Etat partie ou de le quitter aux fins de réunification familiale est considéré par les Etats dans un esprit positif, avec humanité et diligence. (...) " ;

7. Considérant que les stipulations du préambule de la convention de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant sont dépourvues d'effet direct et que les stipulations des articles 9 et 10 de cette convention créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés ; que, par suite, Mme C...peut utilement s'en prévaloir à l'encontre de la décision litigieuse ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

9. Considérant qu'il n'est pas établi que les deux filles de Mme C...ne pourraient poursuivre leur scolarité hors de France ; que si la requérante, ressortissante congolaise, fait valoir avoir fui son pays pour faire échapper ses enfants à leur père, ressortissant tchadien, qui souhaiterait les soumettre à l'excision et à des mariages forcés elle n'apporte aucune autre précision ni justification à l'appui de ses dires ; que, par suite, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse méconnaîtrait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ; que Mme C... s'étant vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, elle entrait dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

11. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, les moyens tirés de ce que la décision obligeant Mme C... à quitter le territoire français serait entachée d'une violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de celles du point 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée doivent être écartés comme non fondés ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

12. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

13. Considérant que Mme C...n'établit pas la réalité des menaces que le père de ses enfants, ressortissant tchadien, dont elle est séparée, lui ferait personnellement courir ainsi qu'à ses enfants en cas de retour en République Démocratique du Congo ; que, dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de son renvoi méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles qu'elle présente pour son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2017, à laquelle siégeaient :

Mme Mear, président,

Mme Terrade, premier conseiller,

Mme Vinet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 mai 2017.

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N° 16LY00030


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY00030
Date de la décision : 02/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: Mme Josiane MEAR
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : PIEROT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-05-02;16ly00030 ?
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