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02/05/2017 | FRANCE | N°15LY01462

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 02 mai 2017, 15LY01462


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... F...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône, du 30 octobre 2014, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1409307 du 18 mars 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête,

enregistrée le 29 avril 2015, et un mémoire ampliatif, enregistré le 11 avril 2016, M. F..., repré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... F...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône, du 30 octobre 2014, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1409307 du 18 mars 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 avril 2015, et un mémoire ampliatif, enregistré le 11 avril 2016, M. F..., représenté par la SCP Couderc-Zouine, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 18 mars 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 30 octobre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire au séjour avec autorisation à travailler, à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée.

M. F... soutient que :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- cette décision est intervenue au terme d'une procédure irrégulière, en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle a été prise en violation du point 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 20 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle méconnaît les dispositions du l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle a été prise en violation du point 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 20 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

Par une intervention, enregistrée le 20 mai 2015, M. A... D...et Mme G... B...C..., agissant en qualité de représentants légaux de leur fille, Anaëlle Leana BougnaC..., représentés par la SCP Couderc-Zouine, demandent à la cour d'admettre leur intervention et de faire droit à la requête de M. F....

Par un mémoire, enregistré le 27 septembre 2016, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête en s'en rapportant à ses écritures de première instance.

Par une ordonnance du 8 septembre 2016 la clôture d'instruction a été fixée au 10 octobre 2016 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.

M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 mai 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mear, président- rapporteur,

- les conclusions de M. Besse, rapporteur public,

- et les observations de Me Zouine représentant M. F... ;

1. Considérant que M. F..., ressortissant congolais, né le 23 février 1975, est, selon ses déclarations, entré irrégulièrement en France le 21 novembre 2002 ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office de protection des réfugiés et apatrides du 29 juillet 2003, qui a été confirmée, le 30 juin 2004, par une décision de la Commission des recours des réfugiés ; qu'il a fait l'objet de deux mesures d'éloignement successives les 29 novembre 2004 et 22 mars 2005 ; que M. F... a ensuite bénéficié d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade valable du 18 avril 2008 au 17 avril 2009 dont le renouvellement a été refusé ; qu'il a ensuite fait l'objet de nouvelles mesures d'éloignement le 20 janvier 2010 et le 18 mars 2011 ; que, le 26 mars 2014, M. F... a sollicité son admission au séjour au regard de sa vie privée et familiale ; que, par arrêté du 30 octobre 2014, le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ; que M. F... fait appel du jugement du 18 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur la recevabilité de l'intervention volontaire :

2. Considérant que M. A... D...et Mme G... B...C..., agissant en qualité de représentants légaux de leur fille, Anaëlle Leana BougnaC..., n'ont pas intérêt à intervenir pour leur enfant au soutien des conclusions de M. F... tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Lyon du 18 mars 2015 dès lors que ce dernier n'est pas le parent de cet enfant ; que leur intervention en défense est dès lors irrecevable ;

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " et qu'aux termes de l'article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications " ;

4. Considérant que M. F... fait valoir que ses parents et sa soeur résident en France sous couvert d'une carte de résident et que son frère est de nationalité française ; qu'il justifie par les pièces jointes au dossier vivre en concubinage avec Mme B... C..., une ressortissante camerounaise, titulaire d'une carte de séjour temporaire en France portant la mention " vie privée et familiale ", dont il a eu une enfant née le 14 février 2014 et qui est mère d'une autre enfant, de nationalité française, née le 9 mai 2012 d'une précédente union avec M. A...D..., ressortissant français ; que M. F..., qui résidait avec sa compagne et les enfants de cette dernière, dont l'enfant née de leur couple, contribuait ainsi à l'entretien et à l'éducation de son enfant à la date de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que le requérant établit à la date de cette décision l'existence d'une communauté de vie ancienne et stable avec sa compagne ; que, dans les circonstances particulières de l'espèce, M. F... est fondé à soutenir que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise et ainsi méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, cette décision doit être annulée ainsi que, par voie de conséquence, les décisions lui faisant obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. F... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant que le présent arrêt implique qu'il soit enjoint au préfet du Rhône de délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " à M. F... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à Me Zouine, avocat de M. F..., au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Zouine renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de M. A... D...et de Mme G... B...C..., agissant en qualité de représentants légaux de leur fille, Anaëlle Leana BougnaC..., n'est pas admise.

Article 2 : Le jugement n° 1409307 du tribunal administratif de Lyon du 18 mars 2015 est annulé.

Article 3 : L'arrêté du préfet du Rhône du 30 octobre 2014 est annulé.

Article 4 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer à M. F... une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à Me Zouine, conseil de M. F..., une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Zouine renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 6 : Le surplus des conclusions de M. F... est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. F..., à M. A... D..., à Mme G... B...C..., au ministre de l'intérieur et au préfet du Rhône. Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Lyon en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2017, à laquelle siégeaient :

M. Mear, président,

Mme Terrade, premier conseiller,

Mme Vinet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 mai 2017.

2

N° 15LY01462


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY01462
Date de la décision : 02/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: Mme Josiane MEAR
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : SCP COUDERC - ZOUINE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-05-02;15ly01462 ?
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