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27/04/2017 | FRANCE | N°15LY02375

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 27 avril 2017, 15LY02375


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 5 décembre 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1500090 du 23 juin 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 15 juillet 2015, M. B..., repré

senté par Me Sabatier, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 5 décembre 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1500090 du 23 juin 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 15 juillet 2015, M. B..., représenté par Me Sabatier, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 23 juin 2015 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " l'autorisant à travailler ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil d'une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, le tribunal administratif ayant omis de statuer sur le moyen tiré de l'incompétence du médecin de l'agence régionale de santé ;

- le médecin de l'agence régionale de santé qui a donné un avis était incompétent ; le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il méconnaît l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence ; elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence.

Par un mémoire enregistré le 24 janvier 2017, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. B... d'une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

La clôture de l'instruction a été fixée au 7 février 2017 par une ordonnance du 17 janvier 2017.

Par une décision du 22 septembre 2015, le bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de M.B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Clot, président ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant de la République démocratique du Congo, né le 26 novembre 1973 à Kinshasa, déclare être entré en France le 7 février 2010, afin de demander l'asile ; que l'asile lui a été refusé par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 6 juillet 2010 et par la Cour nationale du droit d'asile le 5 avril 2011 ; que le 5 août 2011, le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que l'intéressé a sollicité le 3 mars 2014 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le 5 décembre 2014, le préfet du Rhône lui a opposé un refus, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que M. B...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

3. Considérant que devant le tribunal administratif, M. B...a fait valoir que le préfet n'avait pas recueilli l'avis du médecin de l'agence régionale de santé et que, s'il l'avait fait, cet avis avait été émis par une autorité incompétente ; que toutefois la décision en litige vise l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; que le préfet a produit cet avis, du 22 avril 2014, signé par un médecin de l'agence régionale de santé de Rhône-Alpes ; que si le tribunal administratif a, en conséquence, écarté le moyen tiré du défaut de consultation d'un médecin de l'agence régionale de santé, il a omis de répondre au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de l'incompétence du médecin signataire de cet avis ; que, dès lors, le jugement attaqué, qui est entaché d'irrégularité, doit être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Lyon ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

5. Considérant que l'avis ci-dessus mentionné du 22 avril 2014 a été formulé par le docteur Marquis, médecin de l'agence régionale de santé de Rhône-Alpes, désigné à cette fin par décision du directeur général de cette agence du 28 octobre 2013, publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture du 19 novembre 2013 ;

6. Considérant que selon cet avis, si l'état de santé de M. B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il existe un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, vers lequel il peut voyager sans risque ; qu'aucune des pièces produites par l'intéressé, qui souffre de diabète nécessitant quotidiennement une injection d'insuline, ne permet de douter du bien-fondé de cet avis médical ; que, dès lors, le préfet du Rhône n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui refusant un titre de séjour sur ce fondement ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

9. Considérant que M. B...fait valoir qu'il est entré le 7 février 2010 sur le territoire français, où il séjournait depuis près de cinq ans à la date de la décision contestée et qu'il est le père d'un enfant, né le 19 février 2013 de son union avec une personne dont il est séparé ; que toutefois, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de la durée et des conditions de son séjour en France, le refus de titre de séjour qui lui a été opposé ne porte pas au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette mesure a été prise et, par suite, ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les même motifs, ce refus ne méconnaît pas l'intérêt de son enfant, garanti par l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre qui lui a été opposé ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ; que, pour les motifs mentionnés ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour en litige, la décision faisant obligation à M. B...de quitter le territoire français ne méconnaît pas ces dispositions, non plus que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision désignant le pays de destination :

12. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions en litige ; que ses conclusions à fin d'injonction doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

14. Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse une somme au conseil de M. B... au titre des frais exposés à l'occasion du litige ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 23 juin 2015 est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions de M. B... est rejeté.

Article 3 : Les conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 6 avril 2017 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Pourny, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 avril 2017.

N° 15LY02375 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY02375
Date de la décision : 27/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-04-27;15ly02375 ?
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