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11/04/2017 | FRANCE | N°15LY03919

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 11 avril 2017, 15LY03919


Vu la procédure suivante :

I)

Procédure contentieuse antérieure

La SCI du Chablais a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et pénalités y afférentes mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 mars 2010.

Par un jugement n° 1405132 du 12 octobre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 décembre 2015 sous le n° 15LY03919, la SCI du Chablais, représentée pa

r MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 octobre 2015 ;

2°) de prononcer la déch...

Vu la procédure suivante :

I)

Procédure contentieuse antérieure

La SCI du Chablais a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et pénalités y afférentes mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 mars 2010.

Par un jugement n° 1405132 du 12 octobre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 décembre 2015 sous le n° 15LY03919, la SCI du Chablais, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 octobre 2015 ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et pénalités litigieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- ayant régularisé sa situation au regard de ses obligations en matière de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée fin 2011 et en 2012 et ayant payé les sommes dues à ce titre, l'administration, qui a engagé la vérification de comptabilité postérieurement à cette régularisation, et sans inclure dans son contrôle les exercices 2011 et 2012, aurait dû en tenir compte, et déduire les sommes réglées, certes tardivement, de celles restant éventuellement dues ;

- une vérification de sa situation en matière de taxe sur la valeur ajoutée pour l'ensemble de la période concernée aurait permis de clarifier les choses et d'éviter une double imposition et relevait de la loyauté attendue des services de l'Etat ;

- l'administration n'ayant pas démontré sa volonté de minorer la taxe sur la valeur ajoutée, les pénalités ne sont pas dues.

Par un mémoire en défense, enregistrés le 15 février 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requérante n'a pas démontré que les conditions pour opérer une compensation entre les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les sommes versées en régularisation étaient remplies ;

- outre, la déclaration souscrite au titre du 2ème trimestre 2012 a été déposée postérieurement à la réception de la proposition de rectification et de la réponse aux observations du contribuable ;

- les régularisations spontanées dont se prévaut la société requérante n'ont pas pu être identifiées en tant que telles sur les déclarations souscrites au 3ème trimestre 2011 et au 2ème trimestre 2012 ;

- l'administration fiscale n'avait aucune obligation d'étendre la période de contrôle aux exercices ultérieurs ;

- la mauvaise foi de la requérante est établie, eu égard, notamment au caractère répétitif et à l'importance des minorations.

II)

Procédure contentieuse antérieure

La SCI du Chablais a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a déclarée au titre du second semestre de l'année 2012, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1302856 du 12 octobre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 décembre 2015 sous le numéro 15LY03920, la SCI du Chablais, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 octobre 2015 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition litigieuse ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la déclaration à laquelle elle a procédé le 10 octobre 2012 fait double emploi avec les rappels de taxe sur la valeur ajoutée résultant du contrôle dont sa comptabilité a été l'objet du 1er janvier 2009 au 31 mars 2010 ;

- il en va de même de la régularisation effectuée au 3ème trimestre 2011.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 mars 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- il appartient à la requérante, qui a spontanément déclaré et acquitté la taxe sur la valeur ajoutée sur la période du 3ème trimestre 2011 et a déclaré sans paiement la taxe sur la valeur ajoutée relative au second trimestre 2012, de démontrer que ladite taxe doit lui être restituée, alors qu'elle n'a pas présenté ces déclarations comme correspondant à la correction d'insuffisances ;

- la déclaration déposée en octobre 2012 l'a été postérieurement à la proposition de rectification ayant fait suite à la vérification de sa comptabilité et ne mentionne d'ailleurs qu'un chiffre d'affaire, sans faire référence à une quelconque régularisation ;

- dans la mesure où il n'existe aucun élément justificatif permettant de rattacher la taxe sur la valeur ajoutée déclarée aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis en recouvrement à l'issue du contrôle, il appartient à la requérante d'établir la reconstitution de son chiffre d'affaires déclaré spontanément lors du dépôt de la déclaration du 2ème trimestre 2012 et d'identifier les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui feraient double emploi avec ceux mis en recouvrement à l'issue de la vérification de comptabilité.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vinet,

- les conclusions de M. Besse, rapporteur public ;

1. Considérant que la SCI du Chablais, société de construction-vente, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui s'est déroulée du 20 avril au 5 juillet 2012 et a porté sur la période du 1er janvier 2009 au 31 mars 2010 ; que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ont été notifiés à la société dans le cadre d'une proposition de rectification du 12 juillet 2012 et ont été maintenus dans la réponse aux observations du contribuable du 21 septembre 2012 ; que le 15 octobre 2012, la société requérante a déposé sa déclaration de TVA du 2ème trimestre 2012 sans y joindre de paiement, en précisant dans un courrier annexé qu'elle était obligée d'attendre l'issue du contrôle pour établir le décompte définitif de TVA et que, dans l'attente, elle faisait parvenir la déclaration ; que, par une lettre du 31 octobre 2012, l'administration a notifié à la société le montant des pénalités qu'elle devait verser pour non-respect du délai de dépôt de sa déclaration et du délai de paiement ; que par une réclamation du 17 décembre 2012, la SCI du Chablais a demandé la décharge de la somme 156 736 euros correspondant à la TVA déclarée au titre du 2ème trimestre 2012 et aux pénalités correspondantes au motif qu'elle ferait double emploi avec les rappels de TVA mis à sa charge à l'issue de la vérification de sa comptabilité ; que, par une lettre du 4 avril 2013, l'administration a rejeté sa réclamation en raison de l'absence de justificatif permettant de rattacher la TVA déclarée au titre du 2ème trimestre 2012 aux rappels de TVA mis en recouvrement à l'issue de la vérification de comptabilité ; que les rappels de TVA notifiés à l'issue de la vérification de comptabilité ont été mis en recouvrement le 22 avril 2013 ; que, le 5 juin 2013, la SCI du Chablais a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à la décharge de la somme de 156 736 euros correspondant à la TVA déclarée au titre du 2ème trimestre 2012 et aux pénalités y afférentes ; que, par une réclamation du 26 décembre 2013, la SCI du Chablais a également demandé la décharge des rappels et pénalités mis à sa charge à l'issue de la vérification de comptabilité déjà mentionnée ; que, par décision du 24 juin 2014, l'administration a refusé de faire droit à sa demande ; que, le 25 août suivant, la SCI du Chablais a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une seconde demande, tendant cette fois à la décharge des rappels de TVA et pénalités mis à sa charge à l'issue de la vérification de sa comptabilité ; qu'elle relève appel des deux jugements du 12 octobre 2015 par lesquels le tribunal administratif a rejeté ses demandes ;

2. Considérant que les deux requêtes susvisées amènent à se prononcer sur le point de savoir si la SCI du Chablais a fait l'objet d'une double imposition à la TVA au titre des opérations visées par la proposition de rectification émise à l'issue de la vérification de comptabilité mentionnée ci-dessus ; qu'il y a lieu, par suite, de joindre ces deux affaires pour qu'il y soit statué par un seul arrêt ;

3. Considérant qu'aux termes du b) du 1 du 7° de l'article 257 du code général des impôts, les ventes d'immeubles en état futur d'achèvement sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'aux termes de l'article 287 du même code : " 1. Tout redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est tenu de remettre au service des impôts dont il dépend et dans le délai fixé par arrêté une déclaration conforme au modèle prescrit par l'administration. 2. Les redevables soumis au régime réel normal d'imposition déposent mensuellement la déclaration visée au 1 indiquant, d'une part, le montant total des opérations réalisées, d'autre part, le détail des opérations taxables. La taxe exigible est acquittée tous les mois. / Ces redevables peuvent, sur leur demande, être autorisés, dans des conditions qui sont fixées par arrêté du ministre de l'économie et des finances, à disposer d'un délai supplémentaire d'un mois. / Lorsque la taxe exigible annuellement est inférieure à 4 000 euros, ils sont admis à déposer leurs déclarations par trimestre civil. (...) S'il estime que le montant des acomptes déjà versés au titre de l'année ou de l'exercice est égal ou supérieur au montant de la taxe qui sera finalement due, le redevable peut se dispenser de nouveaux versements en remettant au comptable chargé du recouvrement de ladite taxe, avant la date d'exigibilité du prochain versement à effectuer, une déclaration datée et signée. (...) S'il estime que la taxe sera supérieure d'au moins 10 % à celle qui a servi de base aux acomptes, il peut modifier le montant de ces derniers. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande. " ; qu'aux termes de l'article L. 204 du même livre : " La compensation peut aussi être effectuée ou demandée entre les impôts suivants, lorsque la réclamation porte sur l'un d'eux : 1° A condition qu'ils soient établis au titre d'une même année, entre l'impôt sur le revenu, l'impôt sur les sociétés, la contribution prévue à l'article 234 nonies du code général des impôts, la taxe sur les salaires, la taxe d'apprentissage, la cotisation perçue au titre de la participation des employeurs à l'effort de construction. 2° Entre les droits d'enregistrement, la taxe de publicité foncière exigible sur les actes qui donnent lieu à la formalité fusionnée en application de l'article 647 du code général des impôts et les droits de timbre, perçus au profit de l'Etat. " ; qu'aux termes de l'article L. 205 de ce livre : " Les compensations de droits prévues aux articles L. 203 et L. 204 sont opérées dans les mêmes conditions au profit du contribuable à l'encontre duquel l'administration effectue une rectification lorsque ce contribuable invoque une surtaxe commise à son préjudice ou lorsque la rectification fait apparaître une double imposition. " ;

4. Considérant, en premier lieu, que la SCI du Chablais soutient que, dans la mesure où elle a procédé à des déclarations de TVA au 3ème trimestre 2011 et au 2ème trimestre 2012, qui avaient pour objet de régulariser des insuffisances et omissions de TVA au titre de la période contrôlée, les rappels de TVA mis en recouvrement à l'issue de la vérification de comptabilité procèdent d'une double taxation ; qu'elle en déduit qu'elle doit, soit obtenir la décharge des rappels de TVA mis à sa charge à l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a été l'objet, soit obtenir la décharge de la TVA mise à sa charge suite à sa déclaration du 2ème trimestre 2012 ;

5. Considérant que la seule circonstance que la société requérante, dont l'activité n'a pas cessé postérieurement à la vérification de comptabilité, a renseigné des déclarations relatives à la TVA au 3ème trimestre de l'année 2011 et au 2ème trimestre de l'année 2012, ne permet pas d'établir qu'il s'agissait de déclarations rectificatives, alors que la société n'a jamais indiqué que tel était le cas lors du dépôt desdites déclarations, lesquelles ne se présentaient pas comme telles ; qu'en outre, pas plus en appel qu'en première instance, la SCI du Chablais ne détaille le chiffre d'affaire reporté dans les deux déclarations dont elle se prévaut, afin d'établir qu'il correspondrait pour partie aux opérations ayant donné lieu aux rappels de TVA mis à sa charge à l'issue de la vérification de sa comptabilité ; qu'à cet égard, la seule production d'extraits du grand livre au 31 mars 2010, 2011 et 2012, au demeurant non assortie d'une quelconque explication, ne saurait permettre de démontrer des recoupements entre les déclarations de TVA dont la requérante se prévaut et les rappels de TVA mis à sa charge par l'administration ; qu'à défaut d'établir l'existence d'une double imposition, la requérante n'est fondée ni à demander la décharge des rappels de TVA litigieux, ni à demander la décharge de la TVA à laquelle elle a été assujettie au titre du 2ème trimestre de l'année 2012 et des pénalités y afférentes ; que, pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage fondée à demander une compensation, laquelle, au demeurant, ne peut intervenir que pour des impositions dues et payées au cours de la période ayant fait l'objet de la vérification ; que le moyen tiré de ce que l'administration aurait dû étendre la période de contrôle est, en tout état de cause, inopérant ;

6. Considérant, en second lieu, que pour justifier l'application de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue par les dispositions du a) de l'article 1729 du code général des impôts, dont ont été assortis les rappels de TVA litigieux, l'administration a retenu l'ampleur des insuffisances de déclaration et le fait que, disposant d'une autorisation des services fiscaux pour acquitter la TVA collectée sur les ventes en l'état futur d'achèvement, elle ne pouvait ignorer ses obligations en la matière ; que l'administration a pu déduire de l'ensemble de ces faits une volonté délibérée de la part de la société requérante de se soustraire à l'impôt et a ainsi établi son absence de bonne foi, sans que la société requérante ne puisse utilement se prévaloir des régularisations effectuées a posteriori et au demeurant non établies ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCI du Chablais n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les deux jugements susvisés, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

9. Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par la SCI le Chablais dans l'instance et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes n° 15LY03919 et n° 15LY03920 de la SCI du Chablais sont rejetées.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à la SCI du Chablais et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2017, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Mear, président assesseur,

Mme Vinet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 11 avril 2017.

2

Nos 15LY03919, 15LY03920


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03919
Date de la décision : 11/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Camille VINET
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : SOCIETE FISCALYS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-04-11;15ly03919 ?
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