La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/04/2017 | FRANCE | N°15LY01898

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 06 avril 2017, 15LY01898


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Me D...A..., agissant en qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la société Zephyrin et fils, a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la communauté de communes du pays de Romans à lui verser la somme de 322 220,91 euros toutes taxes comprises, ou à titre subsidiaire la somme de 85 999,95 euros, au titre du solde du marché qui lui avait été attribué pour la création de la cité de la musique de Romans-sur-Isère.

Par un jugement n° 1204384 du 8 avril 2015, le tribunal

administratif de Grenoble a rejeté sa demande et rejeté les conclusions de la comm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Me D...A..., agissant en qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la société Zephyrin et fils, a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la communauté de communes du pays de Romans à lui verser la somme de 322 220,91 euros toutes taxes comprises, ou à titre subsidiaire la somme de 85 999,95 euros, au titre du solde du marché qui lui avait été attribué pour la création de la cité de la musique de Romans-sur-Isère.

Par un jugement n° 1204384 du 8 avril 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande et rejeté les conclusions de la communauté d'agglomération Valence Romans Sud Rhône-Alpes, venant aux droits de la communauté de communes, présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires enregistrés les 5 juin, 14 octobre et 16 novembre 2015, Me A..., liquidateur de la société Zephyrin et fils, représenté par la SELARL Pragma Juris, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 8 avril 2015 ;

2°) de condamner la communauté d'agglomération Valence Romans Sud Rhône-Alpes à lui verser, à titre principal, la somme de 319 560,85 euros toutes taxes comprises, outre intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, la somme de 85 999,95 euros toutes taxes comprises, outre intérêts au taux légal majoré de deux points à compter du 30 mars 2012 ;

3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Valence Romans Sud Rhône-Alpes une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande comme irrecevable ; le tribunal n'a pas tenu compte de la notification du décompte par ordre de service en date du 15 février 2012, ni de sa réclamation adressée le 28 février suivant, dans le délai de 45 jours, en réponse au décompte qui lui a été adressé par courrier électronique du 14 février ; le courrier du 1er mars 2012 de la communauté d'agglomération ne pouvait être regardé comme un ordre de service valant notification d'un décompte général définitif, car il précisait qu'il répondait à sa réclamation du 28 février ; il n'a pas eu notification du procès-verbal de réception signé par le maître d'oeuvre et le maître d'ouvrage, contrairement aux dispositions visées par le tribunal, mais uniquement du procès-verbal des opérations préalables à la réception, signé le 13 juin 2012, par le seul maître d'oeuvre ; la notification du décompte de liquidation n'est pas intervenue au plus tard deux mois suivant la date de signature du procès-verbal prévu à l'article 47.1.1 du cahier des clauses administratives générales ; il appartient au maître d'ouvrage de justifier de la délégation dont disposait M. C...pour signer et notifier le décompte général ;

- l'entreprise a droit, à titre principal, à une somme de 319 560,85 euros TTC ; le maître d'oeuvre a établi et validé un certificat de paiement n° 8 confirmant l'état d'avancement des travaux mentionné dans la situation n° 8, de 77 %, ainsi que l'acompte mensuel réclamé ; la situation n° 7, qui faisait état d'un avancement global du chantier à 66 %, a également été validée ; en retenant un avancement du chantier à 67 % pour établir le décompte de résiliation du marché, la communauté d'agglomération ne tient pas compte des travaux qui ont été effectués dans le mois suivant l'établissement de la situation n° 7 ; la collectivité elle-même avait estimé, dans sa mise en demeure adressée le 22 décembre 2011, que l'avancement du chantier était de plus de 75 % ; le décompte doit, dès lors, être établi en retenant un avancement du chantier de 77 %, soit 1 500 961 euros HT, auquel s'ajoute 32 973,41 euros au titre de la révision, et en déduisant 1 266 743,06 euros HT au titre des acomptes reçus ; le montant demandé tient compte de la retenue de garantie qui a été imputée au fur et à mesure de l'établissement des situations de travaux ;

- l'entreprise a droit, à titre subsidiaire, à une somme de 85 999,95 euros TTC, correspondant aux montants dont la collectivité se reconnaît débitrice, en particulier dans son décompte général ; la communauté d'agglomération ne peut ajouter à son propre décompte général, s'il devait être regardé comme définitif, une somme qui a seulement été portée à la connaissance du liquidateur postérieurement, dans le cadre d'une déclaration de créance ; la communauté d'agglomération devrait, à tout le moins, être condamnée à payer la somme qu'elle reconnaît devoir sur la base de son propre calcul ; le décompte général ne doit pas comporter de déduction au titre d'une retenue de garantie ; il ne lui a pas été notifié de décompte général définitif faisant état d'un trop-perçu, le certificat de paiement adressé par la trésorerie ne peut y être assimilé.

Par des mémoires enregistrés les 11 septembre et 28 octobre 2015, la communauté d'agglomération Valence Romans Sud Rhône-Alpes, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de MeA... ;

2°) de mettre à la charge de Me A...une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- faute de notification d'un mémoire en réclamation, le décompte établi par ordre de service du 15 février 2012 et notifié le 1er mars 2012 n'est pas devenu définitif ; la lettre du 28 février 2012, qui se borne à répondre à la lettre de la communauté d'agglomération du 18 janvier 2012, ne comporte aucune contestation du décompte notifié, ne contient pas l'exposé des motifs d'une contestation et ne comporte aucun justificatif, elle ne peut donc être regardée comme un mémoire en réclamation ; au demeurant, elle porte seulement sur le règlement de situations de travaux émises avant la liquidation judiciaire de la société, et non sur le décompte de résiliation établi après la résiliation du marché ; les demandes de Me A...n'ont pas été précédées d'une réclamation préalable ; il appartenait à Me A...d'adresser ses contestations par le biais d'un mémoire en réclamation contestant le décompte, ce qui n'a pas été fait ; les conclusions à fin de condamnation sont donc irrecevables, pour leur montant excédant le solde de 51 590,38 euros TTC figurant au décompte général définitif ; Me A...est réputé avoir accepté sans réserve le constat des ouvrages exécutés, qui emporte réception des travaux ; la réception demeure, par elle-même, sans effet sur les droits et obligations nés de l'exécution du marché ; il est justifié de la compétence de M. C...pour signer le décompte ;

- les demandes ne sont pas fondées pour le surplus et se heurtent au principe selon lequel l'administration ne peut être condamnée à payer une somme qu'elle ne doit pas ; les sommes réglées à titre d'acompte ne constituent pas des paiements définitifs insusceptibles d'être remis en cause ; Me A...n'ayant pas assisté à la réunion du 15 février 2012 sur le constat des ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, à laquelle il a été convoqué, il est réputé avoir accepté sans réserve le constat qui en est résulté, s'agissant de l'achèvement des travaux ; la société Zephyrin et fils a bénéficié d'un trop-perçu ; le décompte de Me A...présente des inexactitudes et incohérences, en ce qui concerne l'avancement retenu, la révision des prix non assortie d'explication et ne tenant pas compte des révisions antérieures, le montant des acomptes, et le défaut de prise en compte des travaux payés à d'autres entreprises, sur demande écrite de la société Zephyrin et fils ;

- si la cour devait considérer que le décompte de liquidation n'a pas acquis de caractère définitif, il lui appartiendrait d'établir elle-même le décompte, dont le solde TTC est de 85 794,50 euros TTC, au débit de l'entreprise, au regard du paiement des délégataires au titre de la situation n°8, qui ne figure pas dans le décompte de liquidation mais qui a bien été mandaté.

Vu :

- le code de marchés publics, alors en vigueur ;

- le code de justice administrative ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Samson-Dye, rapporteur,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,

- les observations de Me F...substituant MeE..., représentant MeA..., et de MeB..., représentant la communauté d'agglomération Valence Romans Sud Rhône-Alpes.

1. Considérant que la communauté de communes du Pays de Romans a confié à la société Zephyrin et fils l'exécution des travaux du lot n° 2 - maçonnerie- de l'opération de construction de la cité de la musique, à Romans, en janvier 2011 ; que l'entreprise a été placée, en cours de chantier, en liquidation judiciaire, par jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 20 décembre 2011 ; qu'il est constant que, suite à cette liquidation et eu égard à l'impossibilité pour l'entreprise de poursuivre les travaux, le marché a été résilié ; que MeA..., liquidateur de la société Zephyrin et fils, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la communauté d'agglomération Valence Romans Sud Rhône-Alpes, venant aux droits de la communauté de communes, à lui verser une somme au titre du solde de son marché résilié ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant que la demande de Me A...a été rejetée au motif que le décompte de liquidation du marché, notifié le 7 mars 2012, n'avait pas fait l'objet d'un mémoire en réclamation, postérieurement à cette notification et dans le délai de 45 jours prescrit par l'article 50 du cahier des clauses administratives générales applicable au marché en cause (ci-après CCAG) ;

3. Considérant, tout d'abord, que, contrairement à ce que soutient MeA..., le document qui lui a été communiqué par courrier électronique du 14 février 2012 ne constituait qu'un projet de décompte, d'ailleurs présenté comme tel dans le message d'accompagnement, et lui était adressé en vue de préparer la visite qui devait se tenir le lendemain pour constater l'achèvement des travaux réalisés dans le cadre du marché et préalablement à sa résiliation, et non le décompte de liquidation lui-même ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les parties se seraient accordées sur le fait qu'une contestation de ce simple projet de décompte dispenserait la société ou son liquidateur de procéder à la contestation du décompte de liquidation lui-même, par le mémoire en réclamation à adresser dans le délai de 45 jours à compter de la notification du décompte, prévu par l'article 50 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux, approuvé par arrêté du 8 septembre 2009, et auquel renvoie le contrat litigieux, sans y déroger sur ce point ;

4. Considérant, ensuite, que le décompte de liquidation du marché résulte d'un ordre de service daté du 15 février 2012 signé par M.C..., vice-président de la communauté d'agglomération chargé des travaux, qui avait, contrairement à ce que soutient le requérant, reçu compétence pour édicter ce décompte par arrêté du président de la communauté du 21 mai 2008, régulièrement affiché et transmis en préfecture ; que la circonstance que ce document a été notifié avec un courrier d'accompagnement daté du 1er mars 2012, répondant en partie au courrier du 28 février 2012 adressé par Me A...en réaction notamment au projet de décompte précédemment adressé mentionné au point 3, ne peut faire obstacle à ce que ce document soit regardé comme constituant seul le décompte de liquidation du marché ;

5. Considérant, enfin, que la circonstance que ce décompte, validé à l'issue de la réunion destinée à procéder aux constatations relatives aux ouvrages et parties d'ouvrage exécutées prévues par l'article 47.1.1 du CCAG, a été édicté avant qu'un procès-verbal signé par le maître d'ouvrage, valant réception des travaux, n'ait été adressé au liquidateur de l'attributaire du marché résilié, est sans incidence sur sa régularité et sur le fait que ce décompte devait, à peine de ne plus pouvoir être remis en cause par les parties, être contesté dans le délai de 45 jours ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le décompte lui-même aurait fait l'objet d'un mémoire en réclamation ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'aucun des motifs invoqués par Me A...pour contester l'irrecevabilité retenue par les premiers juges n'est fondé ; qu'ainsi, il n'est pas fondé, par les moyens qu'il invoque, à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande comme irrecevable ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la communauté d'agglomération, qui n'est pas la partie perdante en la présente instance, soit condamnée à verser la somme que Me A...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société requérante une somme au titre des frais exposés par la communauté d'agglomération Valence Romans Sud Rhône-Alpes et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de MeA..., liquidateur de la société Zephyrin et fils, est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la communauté d'agglomération Valence Romans Sud Rhône-Alpes tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à MeA..., liquidateur de la société Zephyrin et fils et à la communauté d'agglomération Valence Romans Sud Rhône-Alpes.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2017 à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 avril 2017.

5

N° 15LY01898


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY01898
Date de la décision : 06/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02-01 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Règlement des marchés. Décompte général et définitif.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SOCIETE PRAGMA JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-04-06;15ly01898 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award