Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la commune de Pont de Chéruy à lui verser la somme totale de 10 733,64 euros en réparation du préjudice subi du fait de son licenciement irrégulier, outre la paiement d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1203704 du 10 février 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 10 avril 2015 et un mémoire complémentaire enregistré le 21 septembre 2015, MmeA..., représentée par la SELARL Zenou, avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1203704 du tribunal administratif de Grenoble du 10 février 2015 ;
2°) de condamner la commune de Pont de Cheruy à lui verser la somme totale de 10 733,64 euros en réparation du préjudice subi du fait de son licenciement irrégulier ;
3°) de mettre à la charge de ladite commune une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête d'appel est recevable car elle a été accompagnée d'une copie de la décision attaquée ;
- le licenciement prononcé à son encontre est irrégulier car il n'a pas été précédé d'un entretien préalable en méconnaissance de l'article 42 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
- la lettre de licenciement n'a pas été adressée par courrier recommandé avec accusé de réception ;
- le délai de préavis de deux mois prévu par l'article 39 du décret du 15 février 1988 n'a pas été respecté ;
- le licenciement est abusif au fond et lui a occasionné des préjudices divers ;
- Mme A...n'a pu être recrutée pour effectuer un remplacement qui a duré sept ans ;
- elle a fait l'objet d'un licenciement, et non d'un refus de renouvellement de son contrat ;
- Mme A...cumulant six ans d'ancienneté, elle devait bénéficier d'un contrat à durée indéterminée qui ne pouvait être rompu que par un licenciement en application des articles 3-4 de la loi du 26 janvier 1984 et de l'article 12 de la loi du 26 juillet 2005 ;
- la commune aurait dû l'embaucher ainsi que le prévoit l'article 3-1 de la loi du 26 janvier 1984 ;
- la commune ne justifie pas en quoi la réorganisation des services aurait eu un impact sur les fonctions exercées par MmeA... ;
- elle a été remplacée par un agent qui n'a pas été mutée et n'a pas été remplacée en réalité ;
- la réalité des préjudices invoqués est établie dès lors que Mme A...a été victime d'un accident du travail et n'a pu travailler sur ses deux autres employeurs.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 août 2015, présenté par la commune de Pont de Cheruy, représentée par la SELARL Cabinet d'avocats Philippe Petit et Associés, avocat, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de Mme A...à lui verser une somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que la requête est irrecevable en l'absence de production par l'appelante du jugement contesté et qu'aucun des moyens de la requête de Mme A...n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique ;
- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Samuel Deliancourt, premier conseiller,
- les conclusions de M. Marc Clément, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., pour MmeA..., ainsi que celles de Me D..., pour la commune de Pont de Cheruy ;
1. Considérant que MmeA..., veuveE..., relève appel du jugement du 10 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Pont de Chéruy à lui verser la somme totale de 10 733,64 euros en réparation du préjudice subi du fait du licenciement irrégulier dont elle estime avoir fait l'objet ;
Sur les conclusions à fin de condamnation :
2. Considérant que Mme A...soutient qu'elle aurait été illégalement licenciée en méconnaissance des dispositions des articles 38 et 42 du décret susvisé du 15février 1988 dès lors qu'ayant travaillé plus de six ans, elle devait être regardée comme bénéficiant d'un contrat à durée indéterminée ;
3. Considérant que Mme A...a été employée par la commune de Pont de Chéruy par une vingtaine de contrats à durée déterminée successifs à compter du 20 juillet 2004 en qualité d'agent d'entretien, puis à compter du 1er janvier 2007 en qualité d'adjointe technique territorial de 2ème classe non titulaire à temps non complet, à raison de 20 heures hebdomadaire, au sein de la résidence pour personnes âgées "La Résidence du Parc" ; que par courrier du 5 septembre 2011, le maire a indiqué à Mme A...qu'il sera mis fin à son contrat à compter du 31 octobre 2011 "compte tenu de la restructuration des services municipaux liée au changement d'horaire dans les écoles maternelles" ;
4. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 3 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 que les collectivités territoriales ne peuvent recruter par contrat à durée déterminée des agents non titulaires que, d'une part, au titre des premier et deuxième alinéas de cet article, en vue d'assurer des remplacements momentanés ou d'effectuer des tâches à caractère temporaire ou saisonnier définies à ces alinéas, et, d'autre part, au titre des quatrième, cinquième et sixième alinéas du même article, lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois de fonctionnaires susceptibles d'assurer certaines fonctions, lorsque, pour des emplois de catégorie A, la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient et, dans les communes de moins de 1 000 habitants, lorsque la durée de travail de certains emplois n'excède pas la moitié de celle des agents publics à temps complet ; qu'aux termes des septième, huitième et neuvième alinéas de cet article : " Les agents recrutés conformément aux quatrième, cinquième, et sixième alinéas sont engagés par des contrats à durée déterminée, d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables, par reconduction expresse. La durée des contrats successifs ne peut excéder six ans. / Si, à l'issue de la période maximale de six ans mentionnée à l'alinéa précédent, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée (...) " ; qu'aux termes du I de l'article 15 de la loi du 26 juillet 2005, dans sa rédaction alors applicable : " I. - Lorsque l'agent, recruté sur un emploi permanent, est en fonction à la date de la publication de la présente loi (...), le renouvellement de son contrat est soumis aux conditions prévues aux septième et huitième alinéas de l'article 3 de la même loi ";
5. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, pour les agents contractuels de la fonction publique territoriale recrutés sur un emploi permanent en fonction au moment de l'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005, le renouvellement de contrat régi par le I de l'article 15 de cette loi doit intervenir selon les règles fixées par les septième et huitième alinéas de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 et ne peut donc concerner que les titulaires de contrats entrant dans les catégories énoncées aux quatrième, cinquième et sixième alinéas de ce même article ; que cette disposition ne saurait toutefois s'appliquer aux contrats passés au titre du remplacement momentané de titulaires ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi, tels que visés par le premier alinéa du même article 3 de la loi du 26 janvier 1984 ; que, dès lors, seuls les agents bénéficiant de contrats entrant dans les catégories prévues par les quatrième, cinquième et sixième alinéas de ce même article peuvent se voir proposer, par décision expresse et après six années de fonction au moins, un contrat à durée indéterminée ; qu'en revanche, la durée hebdomadaire du travail effectué est sans incidence sur l'appréciation du caractère permanent ou non de l'emploi occupé, résultant seulement de la nature du besoin auquel répond cet emploi ;
6. Considérant, d'autre part, qu'il ne résulte pas des dispositions citées ci-dessus de la loi du 26 janvier 1984, applicables aux agents recrutés sur un emploi permanent en fonction à la date de la publication de la loi du 26 juillet 2005, qu'un contrat à durée déterminée conclu, en méconnaissance de ces dispositions, pour une durée qui, compte tenu de la durée des contrats successifs précédemment conclus avec le même agent, conduit, en cours d'exécution du contrat, à dépasser la durée maximale d'emploi de six années, serait tacitement transformé en contrat à durée indéterminée ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et ainsi que cela ressort notamment des contrats de travail successifs conclus par MmeA..., que cette dernière a été recrutée par la commune de Pont de Cheruy à compter du 20 juillet 2004 afin d'effectuer un remplacement d'un agent au sein de la résidence pour personnes âgées "La Résidence du Parc" ; que, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Grenoble, Mme A...a été recrutée sur le fondement du premier et/ou deuxième alinéa de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, et non sur le fondement de l'un des alinéas 4, 5 ou 6, qui seuls peuvent être de nature à justifier un contrat à durée indéterminée ; qu'en tout état de cause, Mme A...ne peut prétendre au bénéfice de la transformation de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée en l'absence de toute proposition expresse en ce sens de la part de son employeur ; que MmeA..., qui ne peut prétendre être bénéficiaire, à la date de la décision en litige, d'un contrat d'engagement à durée indéterminée, a ainsi fait l'objet d'un refus de renouvellement, et non d'une mesure de licenciement ; qu'elle n'est dès lors pas fondée à soutenir que les garanties procédurales afférentes à une telle mesure et telles que prévues par le décret du 15 février 1988 n'auraient pas été respectées ; qu'elle ne peut pas non plus utilement se prévaloir du bénéfice des dispositions des articles 3-1 et 3-4 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 dans leur rédaction issues de l'article 41 de la loi susvisée du 12 mars 2012 postérieure à la décision contestée du 5 septembre 2011 ;
8. Considérant qu'un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie d'aucun droit au renouvellement de son contrat ; que, par suite, Mme A... ne bénéficiait d'aucun droit au renouvellement de son dernier contrat conclu le 1er septembre 2011 ;
9. Considérant que l'article 38 du décret susvisé du 15 février 1988 dispose : " Lorsqu'un agent non titulaire a été engagé pour une durée déterminée susceptible d'être reconduite, l'administration lui notifie son intention de renouveler ou non l'engagement au plus tard : 1° Le huitième jour précédant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée inférieure à six mois ; (...) " ; que le dernier contrat conclu avec Mme A... le 1er septembre 2011 l'a été d'une durée de deux mois, le terme prévu étant le 31 octobre 2011 ; que le maire de la commune de Pont de Cheruy a informé en temps utile Mme A...de son intention de ne pas renouveler ledit contrat par courrier en date du 5 septembre 2011 ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cette disposition doit être écarté ; que Mme A... ne peut utilement revendiquer le bénéfice du délai de préavis de deux mois qui concerne les agents recrutés pour une durée supérieure à deux ans, ni invoquer les dispositions de l'article 39 de cette même loi qui concerne le cas de l'agent non titulaire démissionnaire ;
10. Considérant que l'administration ne peut légalement décider, au terme d'un contrat, de ne pas le renouveler que pour un motif tiré de l'intérêt du service ; qu'il résulte de l'instruction, sans que ce motif soit sérieusement contesté par MmeA..., que, d'une part, la commune de Pont de Cheruy a décidé de réorganiser les services municipaux à la suite de la modification des horaires de l'école maternelle à l'origine de la réduction des besoins du service des agents municipaux affectés dans les écoles maternelles et chargés de la surveillance dans le cadre des activités périscolaires ; que, d'autre part, l'emploi permanent occupé par Mme A...au sein de la résidence pour personnes âgées a été juridiquement pourvu par un agent titulaire placé en disponibilité d'office et réintégré à temps non complet à raison de 26 heures hebdomadaire, ainsi qu'il ressort de l'arrêté n° 12/2012 du maire en date du 31 janvier 2012 ; que de tels motifs sont légalement de nature à justifier le non-renouvellement du contrat de Mme A...à compter du 1er novembre 2011, ainsi que l'a jugé le tribunal sans inverser la charge de la preuve ;
11. Considérant qu'en l'absence d'illégalité entachant le refus de renouvellement du dernier contrat conclu le 1er septembre 2011 entre la commune de Pont de Cheruy et Mme A..., cette dernière n'est pas fondée à solliciter la réparation des chefs d'indemnisation dont elle se prévaut ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Pont de Cheruy à la requête de MmeA..., que celle-ci n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par Mme A...soit mise à la charge de la commune de Pont de Cheruy, qui n'est pas la partie perdante ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme A...la somme que demande la commune de Pont de Cheruy au titre de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Pont de Cheruy au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et à la commune de Pont de Cheruy.
Délibéré après l'audience du 14 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Hervé Drouet, président de la formation de jugement,
- Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller,
- M. Samuel Deliancourt, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 avril 2017.
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N° 15LY01212
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