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03/01/2017 | FRANCE | N°16LY01134

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 03 janvier 2017, 16LY01134


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 18 février 2016 par lesquelles le préfet de la Nièvre a décidé son transfert aux autorités néerlandaises et l'a assigné à résidence.

Par un jugement nos 1600533, 1600546 du 25 février 2016, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 mars 2016, M. C..., représenté par Me B..., de

mande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 février 2016 ;

2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 18 février 2016 par lesquelles le préfet de la Nièvre a décidé son transfert aux autorités néerlandaises et l'a assigné à résidence.

Par un jugement nos 1600533, 1600546 du 25 février 2016, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 mars 2016, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 février 2016 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du 18 février 2016 par lesquelles le préfet de la Nièvre a décidé son transfert aux autorités néerlandaises et l'a assigné à résidence ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Nièvre, dans un délai de 24 heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour au titre de l'asile et de l'autoriser à saisir l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, à payer à son conseil, la somme de 1 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle, ou, à défaut, si l'aide juridictionnelle ne lui était pas accordée, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 300 euros à lui verser en application de ce même article.

M. C... soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- il n'a pas été destinataire des arrêtés des 20 juillet 2015 et 12 mars 2016 visés dans le jugement et permettant de justifier de la délégation de signature du signataire de la décision litigieuse ;

Sur la décision de transfert :

- le signataire de la décision ne justifie pas d'une délégation de signature régulièrement publiée ;

- le préfet, qui n'a pas fait état du fait qu'il était père d'un enfant mineur malade, n'a pas procédé à l'examen de sa situation personnelle au regard des dispositions de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, des possibilités d'application de la clause humanitaire et de la clause de souveraineté et des dérogations et du respect du droit d'asile ;

- la situation de son fils Exos justifiait que le préfet reconnaisse la responsabilité de la France pour l'examen de sa demande d'asile sur le fondement de l'article 17 du règlement UE n° 604/2013 et de l'article 53-1 de la Constitution ;

- le préfet a méconnu l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur l'assignation à résidence :

- cette décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision de transfert.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2016, le préfet de la Nièvre conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2016, le préfet de le Nièvre conclut au non-lieu à statuer.

Il fait valoir qu'à la suite du jugement n° 1503224 du tribunal administratif de Dijon du 21 juin 2016, ayant constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 2 octobre 2015 par laquelle le préfet de la Côte-d'Or a refusé l'admission provisoire au séjour de M. C...au motif que la France était devenue responsable de l'examen de la demande d'asile de l'intéressé, le préfet de la Côte-d'Or a enregistré la demande d'asile du requérant et lui a remis une attestation de demande d'asile.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, par courrier du 28 novembre 2016, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence du préfet de la Nièvre pour prendre la décision de transfert de M. C...eu égard à la rédaction des articles R. 741-1 et R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'arrêté du ministre de l'intérieur du 20 octobre 2015, publié au Journal officiel de la République française n° 0247 du 24 octobre 2015, désignant les préfets compétents pour enregistrer les demandes d'asile et déterminer l'Etat responsable de leur traitement.

Le préfet de la Nièvre a présenté le 30 novembre 2016 des observations sur le moyen relevé d'office. Il les a renouvelées, dans les mêmes termes, le 5 décembre 2016.

M. C...a présenté le 2 décembre 2016 des observations sur le moyen relevé d'office, moyen qu'il a repris à son compte.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (refonte) ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public ;

1. Considérant que M. C..., né le 7 avril 1977, ressortissant de la République démocratique du Congo, est entré irrégulièrement en France, accompagné de son fils mineur, le 21 septembre 2015 selon ses déclarations ; que, par un arrêté du 2 octobre 2015, le préfet de la Côte-d'Or, en application des dispositions du 1° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a refusé de l'admettre provisoirement au séjour en qualité de demandeur d'asile et l'a informé que les autorités néerlandaises étaient saisies d'une demande de reprise en charge en application de l'article 12.4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; que, par décisions du 18 février 2016, le préfet de la Nièvre a ordonné la remise de M. C... aux autorités néerlandaises, responsables de l'examen de sa demande d'asile, et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours ; que M. C... relève appel du jugement du 25 février 2016 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 18 février 2016 du préfet de la Nièvre ;

Sur l'exception de non-lieu à statuer opposée par préfet de la Nièvre :

2. Considérant que le 19 août 2016, le préfet de la Côte-d'Or a accepté d'enregistrer la demande d'asile de M. C... et lui a délivré une attestation de demande d'asile en France ; que les décisions litigieuses du 18 février 2016 du préfet de la Nièvre ordonnant la remise de M. C... aux autorités néerlandaises et l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours ont nécessairement été abrogées par cette décision du préfet de la Côte-d'Or ; que, toutefois, du fait de l'assignation à résidence de M. C..., les décisions litigieuses ont produit des effets jusqu'à leur abrogation ; que, par suite, la requête de M. C... n'est pas devenue sans objet ;

Sur la régularité du jugement :

3. Considérant que, pour écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions litigieuses, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon, s'est référé à un arrêté en date du 20 juillet 2015, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Nièvre et à un arrêté du 12 février 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du même jour de la même préfecture ; que, dès lors, comme le relève expressément le jugement, que ces arrêtés de délégation avaient été régulièrement publiés au recueil des actes administratifs de la préfecture, et eu égard à leur caractère réglementaire, le magistrat désigné n'a pas méconnu le principe du contradictoire de la procédure en se fondant sur l'existence de ces arrêtés pour écarter le moyen invoqué, sans en ordonner préalablement la production au dossier et la communication au requérant ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le jugement aurait, pour ce motif, été irrégulier doit être écarté ;

Sur la décision de remise :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile, publiée au Journal Officiel de la République française le 30 juillet 2015 : " Les dispositions de l'article L. 531-1 sont applicables, sous la réserve mentionnée à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 741-4, à l'étranger qui demande l'asile, lorsqu'en application des dispositions des conventions internationales conclues avec les Etats membres de l'Union européenne l'examen de cette demande relève de la responsabilité de l'un de ces Etats. " ; qu'aux termes de l'article R. 531-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version antérieure à son abrogation par le décret n° 2015-1166 du 21 septembre 2015 : " L'autorité administrative compétente pour prendre, en application de l'article L. 531-2, la décision de remettre aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne un demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la responsabilité de cet Etat en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne, est le préfet de département et, à Paris, le préfet de police, pour les demandeurs d'asile présents à l'intérieur du territoire français. " ;

5. Considérant qu'il résulte des travaux préparatoires de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 que le législateur n'a entendu abroger les dispositions relatives aux décisions de remise d'un étranger à un autre Etat membre prises sur le fondement du règlement (UE) n° 604/2013, initialement codifiées à l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'à compter de l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, issues de cette loi, relatives aux décisions de transfert d'un demandeur d'asile à un autre Etat membre sur le fondement de ce même règlement et applicables pour les demandes d'asile présentées après le 1er novembre 2015 ; qu'il en va nécessairement de même des dispositions de l'article R. 531-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à l'autorité compétente pour prendre une mesure de remise d'un étranger sur le fondement de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en l'espèce, M. C... ayant présenté sa demande d'asile antérieurement au 1er novembre 2015, c'est sur le fondement des dispositions de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction demeurée temporairement en vigueur, puis reprises à l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le préfet a pris à son encontre une décision de remise aux autorités néerlandaises le 18 février 2016 ; qu'en application des dispositions précitées de l'article R. 531-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, demeurées temporairement en vigueur, le préfet de la Nièvre était compétent pour prendre cette décision ; que l'arrêté du ministre de l'intérieur du 20 octobre 2015, publié au Journal officiel de la République française n° 0247 du 24 octobre 2015, désignant les préfets compétents pour enregistrer les demandes d'asile et déterminer l'Etat responsable de leur traitement, ayant été pris pour l'application des dispositions des articles R. 741-1 et R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'était pas applicable à la situation de M. C... ; que, par suite, M. C...n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux a été pris, eu égard à la rédaction des articles R. 741-1 et R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et à l'arrêté du ministre de l'intérieur du 20 octobre 2015, par une autorité incompétente ;

6. Considérant que M. C... reprend en appel les moyens de première instance tirés, d'une part, de l'incompétence du signataire de la décision litigieuse, faute pour celui-ci de justifier d'une délégation de signature régulièrement publiée, d'autre part, de ce que la situation de son fils Exos justifiait que le préfet reconnaisse la responsabilité de la France pour l'examen de sa demande d'asile sur le fondement de l'article 17 du règlement UE n° 604/2013 et de l'article 53-1 de la Constitution et enfin, de ce que le préfet a méconnu l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, moyens auxquels le tribunal a suffisamment répondu ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par adoption des motifs du premier juge, il doivent être écartés ;

7. Considérant qu'il ne ressort ni des termes de la décision litigieuse, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de la Nièvre, qui n'était pas tenu, bien que M. C... soit père d'un enfant, de motiver la décision sur les éventuelles atteintes qu'elle porterait à l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et sur les raisons qui l'ont conduit à ne pas faire application de la clause humanitaire et de la clause de souveraineté, n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur l'assignation à résidence :

8. Considérant qu'il résulte de l'examen ci-avant de la légalité de la décision de transfert, que M. C... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant assignation à résidence ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et tendant à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme au profit de son conseil au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Nièvre.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

M. Fraisse, président de la cour,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 janvier 2017.

2

N° 16LY01134


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY01134
Date de la décision : 03/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. FRAISSE
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : FYOT

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-01-03;16ly01134 ?
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