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03/01/2017 | FRANCE | N°16LY00623

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 03 janvier 2017, 16LY00623


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La communauté de communes de Rochebaron à Chalençon a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'avis du conseil de discipline de recours des fonctionnaires territoriaux d'Auvergne en date du 17 décembre 2014 et de condamner le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme à lui verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1500531 du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Cler

mont-Ferrand a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La communauté de communes de Rochebaron à Chalençon a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'avis du conseil de discipline de recours des fonctionnaires territoriaux d'Auvergne en date du 17 décembre 2014 et de condamner le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Puy-de-Dôme à lui verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1500531 du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 février 2016, et un mémoire en réplique, enregistré le 6 octobre 2016, M. A...B..., représenté par Me Laffont, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1500531 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 19 novembre 2015;

2°) d'enjoindre à la communauté de communes de Rochebaron à Chalençon de rétablir M. B...dans ses droits ou de réexaminer son dossier dans un délai de 30 jours sous astreinte de 500 euros par jours de retard ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes de Rochebaron à Chalençon une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la communauté de communes a méconnu l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 dès lors qu'il n'a pas fait l'objet d'une mesure de suspension malgré la connaissance par la collectivité de la procédure pénale engagée à son encontre depuis sa garde à vue en 2009 ;

- son comportement ne fait courir aucun risque pour la population et aucun élément ne prouve l'existence d'un comportement dangereux ou inadapté à l'égard de ses collègues ;

- aucun élément ne justifie le caractère proportionné de la mesure de révocation dont il fait l'objet.

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2016, présenté par la communauté de communes de Rochebaron à Chalençon, représentée par son président en exercice, par Me Mouseghian, avocat, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. B...à lui verser une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- l'avis de la commission est entaché d'une contradiction de motifs dès lors qu'est admise la gravité des faits et que l'avis est défavorable à la sanction ;

- l'avis est illégal en ce que la commission n'a pas proposé de sanction ;

- l'avis est entaché d'une erreur d'appréciation ;

- les faits même commis en dehors de l'exercice des fonctions justifient la sanction prononcée dès lors qu'ils portent atteinte en raison de leur gravité à la dignité de la fonction exercée par M.B... ;

- le fait que la sanction pénale n'a pas été inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire de M. B...ne fait pas obstacle à l'exercice de poursuites disciplinaires ;

- la divulgation des faits relatifs à la vie privée de l'agent et ses répercussions sur la population ne constituent pas une condition préalable à la qualification de faute disciplinaire ;

- les faits ont eu des répercussions au sein de la population composée de 8 000 habitants, même si le nom de l'agent n'a pas été divulgué ;

- la communauté de communes n'a jamais été informée de son placement en garde à vue, ni des motifs d'un tel placement, M. B...n'ayant fait l'objet d'aucun placement en détention provisoire ;

- M. B...ne peut reprocher à son ex-employeur de ne pas l'avoir suspendu dès lors qu'il s'agit pour la collectivité d'une simple faculté, qu'elle n'avait pas connaissance de ces faits avant son incarcération en 2012 et que cette mesure ne présentait plus d'intérêt après ;

- la circonstance que la procédure disciplinaire ait été engagée en 2014 ne remet pas en cause la gravité des faits reprochés ;

- la personnalité de M. B...constitue un risque pour la population locale et ses collègues de travail.

Vu le mémoire, enregistré le 6 décembre 2016, non communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative, présenté pour la communauté de communes de Rochebaron à Chalençon.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 24 février 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux ;

- le code pénal ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Samuel Deliancourt, premier conseiller,

- les conclusions de M. Marc Clément, rapporteur public,

- et les observations de Me Mouseghian, représentant la société CJA Public Chavent-Mouseghian-Cavrois, pour la communauté de communes de Rochebaron à Chalençon.

1. Considérant que M.B..., adjoint technique territorial de 2nde classe, a été condamné à cinq ans d'emprisonnement par jugement du tribunal correctionnel du Puy-de-Velay du 30 octobre 2012, confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Riom du 21 mars 2013, pour agression sexuelle commise sur sa fille mineure ; qu'à raison de ces mêmes faits, le président de la communauté de communes de Rochebaron à Chalençon a engagé une procédure disciplinaire à son encontre , à l'issue de laquelle l'intéressé, placé en détention depuis le 30 octobre 2012, a été révoqué à compter du 1er novembre 2014 par arrêté n° CCRC 258/2014 du 2 octobre 2014 après avis du conseil de discipline en date du 5 septembre 2014 ; que le conseil de discipline de recours, saisi par M.B..., a émis un avis défavorable à la révocation par un avis du 17 décembre 2014 ; que la communauté de communes de Rochebaron à Chalençon a déféré cet avis au tribunal administratif de Clermont-Ferrand, qui l'a annulé par un jugement du 19 novembre 2015 dont, par la présente requête, M. B...relève appel ;

2. Considérant que M. B...ne peut utilement se prévaloir, à l'appui de conclusions dirigées contre le jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'avis du conseil de discipline appelé à se prononcer sur la gravité de la sanction qui lui avait été infligée, des vices de procédure dont était entachée, selon lui, la procédure disciplinaire engagée à son encontre par la communauté de communes de Rochebaron à Chalençon ; que le moyen tiré de ce qu'il n'a pas été suspendu de ses fonctions préalablement au prononcé de la sanction doit, par suite et en tout état de cause, être écarté comme inopérant ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. " ; que ne peuvent être sanctionnées que les fautes commises par les fonctionnaires dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions ; que, toutefois, en application des dispositions précitées, les faits commis par un fonctionnaire en dehors du service peuvent constituer une faute passible d'une sanction disciplinaire lorsque, eu égard à leur gravité, à la nature des fonctions de l'intéressé et à l'étendue de ses responsabilités, ils ont eu un retentissement sur le service, jeté le discrédit sur la fonction exercée par l'agent ou ont gravement porté atteinte à l'honneur et à la considération qui lui sont portées ; que, par suite, et contrairement à ce que soutient à tort M.B..., des faits personnels commis en dehors de l'exercice des fonctions peuvent donner lieu à sanction, ainsi que l'a à bon droit jugé le tribunal ;

4. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que les faits d'agression sexuelle sur sa fille mineure qu'il savait particulièrement vulnérable en raison de son état physique ou mental, pour lesquels M. B...a été condamné par la juridiction répressive, ont eu un retentissement important sur le service ; que ces faits sont, en raison de leur nature même et de leur exceptionnelle gravité, de ceux qui jettent le discrédit sur la collectivité publique employeur et portent atteinte à l'honneur et à la considération dues aux fonctions exercées par un agent public ; que c'est par suite à bon droit que le tribunal a retenu que de tels faits, bien qu'ayant été commis en dehors du service, justifiaient légalement l'engagement de poursuites disciplinaires ;

5. Considérant, d'autre part, qu'alors même qu'aucune peine d'interdiction professionnelle ou accessoire ne lui avait été infligée par le juge pénal, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que, eu égard à leur nature et à leur gravité, les faits commis par M. B... justifiaient, sans erreur d'appréciation, la sanction de la révocation qui avait été prise à son encontre par le président de la communauté de communes de Rochebaron à Chalençon et ont annulé, par voie de conséquence, l'avis par lequel le conseil de discipline de recours avait estimé que ces faits, quoique d'une gravité certaine, ne pouvaient pas donner lieu à sanction disciplinaire ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'avis du conseil de discipline de recours des fonctionnaires territoriaux d'Auvergne en date du 17 décembre 2014 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie, des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées par M.B..., partie perdante, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent, dès lors, être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèces, de rejeter également les conclusions présentées à ce titre par la communauté de communes de Rochebaron à Chalençon ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté de communes de Rochebaron à Chalençon au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et à la communauté de communes de Rochebaron à Chalençon.

Délibéré après l'audience du 13 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

- M. Hervé Drouet, président-assesseur,

- M. Samuel Deliancourt, premier conseiller.

Lu en audience publique le 3 janvier 2017.

5

N° 16LY00623


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY00623
Date de la décision : 03/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-05-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Procédure. Conseil de discipline.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Samuel DELIANCOURT
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : LAFFONT

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-01-03;16ly00623 ?
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