La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/12/2016 | FRANCE | N°16LY03226

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 15 décembre 2016, 16LY03226


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 15 avril 2014 par laquelle le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer une carte de résident.

Par un jugement n° 1405968 du 3 mai 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 septembre 2016, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 3 mai 201

6 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet de la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 15 avril 2014 par laquelle le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer une carte de résident.

Par un jugement n° 1405968 du 3 mai 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 septembre 2016, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 3 mai 2016 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer une carte de résident dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil d'une somme de 1 300 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le préfet a méconnu l'obligation de consulter le maire, qu'impose l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- sa décision est insuffisamment motivée ;

- en sollicitant la production de justificatifs de ses ressources, alors qu'il savait qu'il est bénéficiaire de l'allocation aux adultes handicapés, le préfet a porté une atteinte excessive à son droit au respect de la vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- en imposant une condition de ressources à une personne ne pouvant pas travailler en raison de son état de santé et bénéficiant de l'allocation pour adulte handicapé, la décision est discriminatoire et méconnaît le principe d'égalité devant la loi ;

- en se croyant à tort tenu de rejeter sa demande de carte de résident, le préfet a commis une erreur de droit ;

- il a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire de régularisation, compte tenu notamment de ce qu'il dispose de ressources de plus de 570 euros par mois.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, l'affaire a été dispensée d'instruction.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 juillet 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 2003 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

M. B... a été régulièrement averti du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Clot, président.

1. Considérant que M.B..., né le 25 juillet 1973 en Serbie, pays dont il possède la nationalité, est titulaire depuis 2009 d'une carte de séjour temporaire délivrée sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le 12 septembre 2013, il a sollicité la délivrance d'une carte de résident et qu'un refus lui a été opposé par le préfet de la Loire le 15 avril 2014 ; qu'il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce refus ;

2. Considérant, en premier lieu, que la décision en litige, qui comporte l'énoncé des éléments de fait et de droit qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Tout étranger qui justifie d'une résidence ininterrompue d'au moins cinq années en France, conforme aux lois et règlements en vigueur, sous couvert de l'une des cartes de séjour mentionnées aux articles L. 313-6, L. 313-8 et L. 313-9, aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 313-10, aux articles L. 313-11, L. 313-11-1, L. 313-14 et L. 314-9, aux 2°, 3°, 4°, 5°, 6°, 7° et 9° de l'article L. 314-11 et aux articles L. 314-12 et L. 315-1 peut obtenir une carte de résident portant la mention " résident de longue durée - CE " s'il dispose d'une assurance maladie. La décision d'accorder ou de refuser cette carte est prise en tenant compte des faits qu'il peut invoquer à l'appui de son intention de s'établir durablement en France, notamment au regard des conditions de son activité professionnelle s'il en a une, et de ses moyens d'existence. / Les moyens d'existence du demandeur sont appréciés au regard de ses ressources qui doivent être stables et suffisantes pour subvenir à ses besoins. Sont prises en compte toutes les ressources propres du demandeur indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues aux articles L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles et L. 351-9, L. 351-10 et L. 351-10-1 du code du travail. Ces ressources doivent atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance et sont appréciées au regard des conditions de logement. / Le caractère suffisant des ressources au regard des conditions de logement fait l'objet d'un avis du maire de la commune de résidence du demandeur. Cet avis est réputé favorable à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la saisine du maire par l'autorité administrative. " ;

4. Considérant que le refus de la carte de résident opposé par le préfet de la Loire à M. B... est motivé par le caractère insuffisant de ses ressources ; que l'intéressé, qui est handicapé, se trouve dans l'incapacité de travailler et perçoit l'allocation aux adultes handicapés, fait valoir que cette décision est discriminatoire et contraire au principe d'égalité devant la loi ;

5. Considérant que les dispositions de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont issues, notamment, de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 qui transpose la directive 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 2003 ; que le paragraphe 1 de l'article 5 de cette directive subordonne la reconnaissance du statut de résident de longue durée à l'existence, pour le demandeur et les membres de sa famille, de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à leurs besoins sans recourir au système d'aide sociale de l'Etat membre concerné, afin d'éviter, comme le mentionne le considérant n° 7 de la directive, que l'étranger ne devienne une charge pour celui-ci ; qu'une telle exigence est susceptible de constituer une discrimination indirecte à l'égard des personnes qui, du fait de leur handicap, ne sont pas en mesure d'exercer une activité professionnelle ou ne peuvent exercer qu'une activité limitée et peuvent se trouver ainsi dans l'incapacité de disposer de ressources suffisantes pour subvenir à leurs besoins sans recourir au système d'aide sociale de l'Etat membre où elles résident ;

6. Considérant, cependant, que la condition ainsi posée par la directive est liée aux caractéristiques propres du statut de résident de longue durée, dont le titulaire bénéficie, notamment, du droit de séjourner au-delà de trois mois dans un autre Etat membre ; que l'article 13 de la directive permet aux Etats membres de délivrer des titres de séjour à des conditions plus favorables que celles établies au paragraphe 1 de l'article 5, dès lors que de tels titres de séjour ne donnent pas accès au droit de séjour dans les autres Etats membres ; que le refus de délivrance du titre de séjour de résident de longue durée, qui ne fait pas obstacle à la délivrance d'un autre titre de séjour et qui n'emporte, par lui-même, aucune conséquence sur le droit au séjour de l'intéressé, ne porte pas atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui ne saurait être regardé comme imposant à un Etat de délivrer un type particulier de titre de séjour ; que l'exigence fixée par le paragraphe 1 de l'article 5 de la directive, justifiée par l'objectif légitime de n'ouvrir le statut de résident de longue durée qu'aux étrangers jouissant d'une autonomie financière, est nécessaire et proportionnée au but en vue duquel elle a été prise ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile procèdent à l'exacte transposition du paragraphe 1 de l'article 5 de la directive du 25 novembre 2003 en n'autorisant les Etats membres à ne prendre en compte que les ressources propres du demandeur, sans y adjoindre les prestations dont il peut bénéficier au titre de l'aide sociale ; qu'elles doivent être interprétées comme excluant la prise en compte non seulement des prestations qu'elles mentionnent mais également des autres prestations d'aide sociale, notamment l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée aux articles L. 815-1 et suivants du code de la sécurité sociale et l'allocation aux adultes handicapés mentionnée aux articles L. 821-1 et suivants du même code ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision en litige, prise sur le fondement de ces dispositions, méconnaîtrait les principes de non discrimination et d'égalité devant la loi doit être écarté ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'il est constant que les ressources de M.B..., qui ne perçoit que l'allocation aux adultes handicapés, sont inférieures au salaire minimum de croissance ; que, dès lors, le préfet de la Loire n'avait pas à procéder à la consultation, prévue par les dispositions précitées de l'article L. 314-8, du maire de la commune de résidence du requérant pour apprécier le caractère suffisant de ces ressources au regard des conditions de logement ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait estimé tenu de refuser à M. B...la carte de résident sollicitée ni qu'il aurait négligé de se livrer à un examen particulier de sa situation ;

10. Considérant, en cinquième lieu, que, même si le préfet connaissait la situation de M. B..., il n'a porté aucune atteinte à son droit au respect de sa vie privée, garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en lui demandant de justifier de ses ressources ;

11. Considérant, enfin, que si M. B...dispose de ressources de plus de 570 euros par mois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet a entaché d'une erreur manifeste l'appréciation à laquelle il s'est livré des conséquences que son refus est, en l'espèce, susceptible de comporter pour la situation personnelle de l'intéressé ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles de son conseil tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2016 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Pourny, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2016.

5

N° 16LY03226


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY03226
Date de la décision : 15/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : BOUHALASSA

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-12-15;16ly03226 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award