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06/12/2016 | FRANCE | N°15LY01420

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 06 décembre 2016, 15LY01420


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté n° 2014-194 du 4 septembre 2014 par lequel le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a prescrit son renvoi dans le pays dont il a la nationalité, d'enjoindre au préfet de la Savoie de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours suivant la notification du présent jugement et de mettre à la charge de l'Etat la so

mme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté n° 2014-194 du 4 septembre 2014 par lequel le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a prescrit son renvoi dans le pays dont il a la nationalité, d'enjoindre au préfet de la Savoie de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours suivant la notification du présent jugement et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1405804 du 12 janvier 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 27 avril 2015, M.C..., représenté par Me Pierot, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1405804 du tribunal administratif de Grenoble du 12 janvier 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté n° 2014-194 du 4 septembre 2014 par lequel le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêté, ou, à défaut, de lui enjoindre de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois sous astreinte définitive de 200 euros par jour de retard et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant du jugement attaqué :

- les premiers juges n'ont pas statué sur la totalité du moyen tiré de l'atteinte excessive portée à sa situation personnelle ;

S'agissant du refus de titre de séjour :

- le refus porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale protégée par l'article 8 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en effet, il réside en France depuis 2011, vit en couple depuis deux ans avec une ressortissante marocaine en situation régulière avec laquelle il est marié et avec laquelle il a eu un enfant, que l'état de santé de son épouse, qui a la garde principale de leur enfant, justifie sa présence à ses côtes, et qu'il justifie d'une promesse d'embauche ;

- le refus méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant puisqu'il réside avec son épouse et est présent pour leur enfant et qu'il réside également avec la fille de son épouse née d'une précédente union.

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale dès lors que cette décision porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'il est titulaire d'un titre de séjour longue durée délivré par les autorités italiennes et ne pouvait dès lors pas faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire prise sur le fondement de l'article L. 511-1 du code de justice administrative.

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale dès lors que cette décision porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et porte atteinte à l'intérêt de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 novembre 2016, le préfet de la Savoie conclut au non-lieu à statuer.

Il fait valoir qu'une carte de séjour va être délivrée à l'intéressé, rendant le recours sans objet.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 18 mars 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Deliancourt a été entendu au cours de l'audience publique.

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement contesté :

Sur les conclusions à fins de non-lieu présentées par le préfet de la Savoie :

1. Considérant que le préfet de la Savoie demande à la cour de prononcer un non-lieu au motif qu'il va délivrer à M. C...une carte de séjour portant la mention "vie privée et familiale" et qu'il en a informé l'intéressé par courrier du 28 octobre 2016 ; que toutefois, et dès lors qu'il ne ressort des pièces du dossier ni que ce titre de séjour a été effectivement délivré à l'intéressé ni, à supposer cette délivrance effective, que cette décision serait devenue définitive, le présent litige ne peut être regardé comme ayant perdu son objet ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

3. Considérant que M.C..., ressortissant marocain né le 28 septembre 1969, soutient être entré en France le 5 mai 2011 sous couvert d'un titre de séjour italien à durée illimitée et y résider depuis ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il s'est marié le 21 décembre 2013 avec Mme A...B..., ressortissante marocaine née le 12 mars 1980, titulaire depuis 2006 d'un certificat de résidence de dix ans en qualité de parent d'un enfant français né le 20 mars 2009 dont elle a la garde ; que M. C...a eu avec cette ressortissante marocaine un enfant, prénommé Nassim, né le 11 décembre 2013, qu'il a reconnu le 28 octobre 2013 ; que, dès lors que son épouse, en situation régulière, est mère d'un enfant de nationalité française dont elle a la garde et de l'enfant mineur de M. C...qui vit avec ceux-ci, le requérant est fondé à soutenir que le refus de titre de séjour que lui a opposé le préfet porte atteinte à son droit à mener une vie familiale normale et, par suite, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; qu'il y dès lors lieu, d'annuler ce jugement ainsi que l'arrêté du 4 septembre 2014 du préfet de la Savoie en toutes ses dispositions ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ;

5. Considérant que l'annulation, par le présent arrêt, de la décision du 4 septembre 2014 refusant à M. C...la délivrance d'un titre de séjour implique nécessairement, compte tenu de ses motifs, qu'une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" lui soit délivrée ; qu'il y a, dès lors, lieu d'enjoindre au préfet de délivrer à M. C... un tel titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que M. C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Pierot, avocat de M.C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Pierot de la somme demandée de 1 200 euros ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1405804 en date du 12 janvier 2015 du tribunal administratif de Grenoble et la décision du 4 septembre 2014 par laquelle le préfet de Savoie a refusé de délivrer un titre de séjour et obligé M. C...à quitter le territoire français sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de Savoie de délivrer à M. C...une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Pierot une somme de 1 200 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Pierot renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C..., à Me Pierot et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Savoie.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- Mme Peuvrel, premier conseiller,

- M. Deliancourt, premier conseiller.

Lu en audience publique le 6 décembre 2016.

4

N° 15LY01420


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY01420
Date de la décision : 06/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Samuel DELIANCOURT
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : PIEROT

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-12-06;15ly01420 ?
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