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15/11/2016 | FRANCE | N°16LY01184

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 15 novembre 2016, 16LY01184


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...épouse A...a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- d'une part, d'annuler les décisions du 23 mars 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

- d'autre part, d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou de procéder à

un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...épouse A...a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- d'une part, d'annuler les décisions du 23 mars 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

- d'autre part, d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 1506540 du 20 janvier 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er avril 2016, présentée pour Mme C...B...épouseA..., domiciliée..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1506540 du 20 janvier 2016 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- dès lors qu'elle justifie que sa présence auprès de son époux malade est indispensable, et que ses liens familiaux se trouvent en France, le refus de titre méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, dont elle peut se prévaloir dès lors qu'à la date de cette décision, son époux n'était pas encore titulaire d'un titre de séjour, que ses ressources sont insuffisantes et qu'elle-même se trouve présente sur le territoire français, et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ce refus est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est fondée à exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ; cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et celles de l'article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle est fondée à exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

Par un mémoire, enregistré le 11 octobre 2016, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'il a commis une erreur manifeste d'appréciation et que la décision contrevient aux stipulations de l'article 6-5 de 1'accord franco-algérien, et qu'en sa qualité de conjoint d'un compatriote résidant en France, elle relève de la procédure de regroupement familial.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 février 2016 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel).

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 20 octobre 2016 :

- le rapport de M. Seillet, président-assesseur ;

- et les observations de Me Zoccali, avocat de MmeA....

1. Considérant que Mme B...épouseA..., née le 15 septembre 1968 à Bologhine Alger (Algérie), de nationalité algérienne, est entrée pour la dernière fois en France le 19 juin 2014, sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour délivré par les autorités consulaires néerlandaises, pour rejoindre deux de ses enfants ainsi que son époux, lequel est titulaire d'un certificat de résidence " vie privée et familiale ", valable du 12 juin 2014 au 11 juin 2015, délivré par le préfet du Rhône en raison de son état de santé après l'annulation, par un jugement du tribunal administratif de Lyon du 12 juin 2014, d'une décision de refus de titre de séjour du 22 novembre 2013 ; qu'elle a sollicité, le 5 novembre 2014, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien en invoquant l'état de santé de son époux ; que, par des décisions du 23 mars 2015, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ; que Mme A... fait appel du jugement du 20 janvier 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions préfectorales ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...)" ;

3. Considérant que Mme A... se prévaut de sa présence nécessaire aux côtés de son époux, titulaire d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, ainsi que de la présence en France de deux de ses enfants ; que, toutefois, alors que son époux et ses deux enfants, ces derniers nés respectivement les 14 mars 1996 et 13 mars 2003, scolarisés depuis leur entrée sur le territoire national, sont présents en France depuis le 28 septembre 2012, Mme A... n'est entrée en France que le 19 juin 2014, après avoir vécu séparément et effectué des allers-retours entre la France et son pays d'origine, sous couvert de visas de court séjour ; que les certificats médicaux produits, au demeurant postérieurs à la date de la décision en litige, ne suffisent pas à démontrer la nécessité de la présence de la requérante aux côtés de son époux lequel, ainsi qu'il a été dit, a résidé en France plusieurs années sans son épouse, et dont il n'est pas établi qu'il ne pourrait pas obtenir l'aide d'une tierce personne pour faire face aux actes de la vie quotidienne ; que, par ailleurs, la requérante, qui n'était présente en France que depuis moins de neuf mois à la date de la décision qu'elle conteste, n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident deux de ses enfants majeurs, ses parents, ses quatre frères et ses trois soeurs ; qu'enfin, elle ne justifie pas d'une intégration sociale ou professionnelle particulière en France ; que, dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision de refus de séjour en litige n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a ainsi pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles également précitées de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien susvisé, alors au surplus que, l'époux de la requérante étant titulaire d'un certificat de résidence valable du 12 juin 2014 au 11 juin 2015, Mme A...entrait ainsi dans les catégories ouvrant droit au regroupement familial et ne peut, pour ce motif, se prévaloir des stipulations sus invoquées ; que la décision du préfet n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme A... ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ;

5. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, Mme A..., jusqu'à son entrée en France, le 19 juin 2014, a vécu séparée de ses deux enfants présents avec leur père sur le territoire français, où ils sont scolarisés depuis le 28 septembre 2012 ; que la décision en litige n'a pas pour objet ou pour effet de faire obstacle à ce que Mme A... poursuive avec ses enfants présents en France les relations entretenues avant ladite décision, caractérisées par des visites régulières sous couvert de visas de court séjour ; que, dès lors, ladite décision ne méconnaît pas les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit que Mme A... ne peut exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision préfectorale portant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;

7. Considérant, en second lieu, que pour les motifs exposés précédemment pour les écarter en tant qu'ils étaient soulevés au soutien des conclusions dirigées contre la décision préfectorale de refus de titre de séjour, les moyens, que soulève Mme A... au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, tirés d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle et d'une violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, doivent être écartés ; que doit être également écarté, pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne, selon lesquelles : " (...) 3. Tout enfant a le droit d'entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents, sauf si cela est contraire à son intérêt. " ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit que Mme A... ne peut exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...épouse A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 20 octobre 2016 à laquelle siégeaient :

M. Faessel, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 novembre 2016.

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N° 16LY01184


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY01184
Date de la décision : 15/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FAESSEL
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : ZOCCALI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-11-15;16ly01184 ?
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