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10/11/2016 | FRANCE | N°15LY00958

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 10 novembre 2016, 15LY00958


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL FLEGO a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 janvier 2006, 31 janvier 2007 et 31 janvier 2008 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er février 2005 au 31 janvier 2008.

Par un jugement n° 1203637 du 27 janvier 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
> Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mars 2015, la SARL FLEGO, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL FLEGO a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 janvier 2006, 31 janvier 2007 et 31 janvier 2008 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er février 2005 au 31 janvier 2008.

Par un jugement n° 1203637 du 27 janvier 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mars 2015, la SARL FLEGO, représentée par Me Aujoulat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 27 janvier 2015 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle ne conteste pas le rejet de sa comptabilité, mais uniquement la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires employée par l'administration ;

- cette méthode de reconstitution comporte de nombreuses incohérences dans la détermination des familles et sous-familles de produits permettant de pondérer les coefficients de marge obtenus ; ainsi, le postulat selon lequel les coefficients de marge sont d'autant plus élevés que le prix d'achat des articles est faible, qui a justifié l'établissement de sous-familles, n'est pas une règle absolue ; la répartition par sous-famille au regard de la fourchette de prix et de la détermination des coefficients y afférents est aléatoire ; de plus, l'administration a commis une erreur de saisie dans le prix d'achat de ceintures ;

- en ce qui concerne la période de soldes, les prix pratiqués pendant la première démarque aboutissent à un taux de remise moyen de 28,32 % contre 25 % retenus par le service ; le taux de 50 % retenu pour la deuxième marque est vraisemblablement entaché des mêmes imprécisions ; les nombreuses erreurs et incohérences relevées démontrent le caractère vicié dans son principe de la méthode de reconstitution retenue par l'administration ;

- à titre subsidiaire, elle propose une autre méthode de reconstitution consistant à supprimer les sous-familles et à ne retenir qu'un seul coefficient de marge pour chaque famille ; le coefficient de marge peut être déterminé en réalisant la moyenne des coefficients obtenus pour chaque produit d'une même famille ; après reconstitution du chiffre d'affaires pour chaque exercice, les soldes sont pris en compte, au regard de l'application d'un pourcentage de 28,32 % pour la première démarque ; cette méthode aboutit à une diminution des bases de l'impôt sur les sociétés, ainsi que des droits dus en matière de taxe sur la valeur ajoutée.

Par un mémoire enregistré le 10 septembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la reconstitution de chiffre d'affaires proposée a été opérée en fonction des données propres de l'entreprise, en tenant compte des spécificités des conditions d'exercice de l'activité et des indications fournies par la société au cours des opérations de contrôle ;

- les relevés de prix ont porté sur un échantillon représentatif, par sa composition, de l'ensemble des achats effectués sur une année ; la répartition en familles et sous-familles tient compte du fait que le coefficient de marge appliqué est propre à chaque produit et est déterminé par le gérant en fonction d'un nombre important de paramètres ; les sous-familles constituent des groupes homogènes, tant au regard de la nature des articles que des coefficients appliqués ; leur création est justifiée par la disparité des coefficients appliqués ; la règle selon laquelle les coefficients appliqués sont d'autant plus élevés que le prix d'achat des articles est faible se vérifie au sein de la quasi-totalité des sous-familles ; l'erreur matérielle qui ne porte que sur le prix d'achat d'un unique article ne saurait affecter significativement les résultats de la reconstitution ;

- alors que la société n'a pu présenter aucun justificatif concernant les taux de démarque appliqués sur la période vérifiée et qu'au cours du débat oral et contradictoire, le gérant avait indiqué que les pourcentages de remise s'établissaient entre 20 % et 30 % la première semaine, puis entre 40 % et 50 % les semaines suivantes, il ne peut être sérieusement soutenu que les valeurs retenues par l'administration, de 25 % pour la première démarque et de 50 % pour les démarques suivantes, seraient dépourvues de tout fondement ; la valeur de 28,32 % proposée par la société pour la première démarque ne tient pas compte du volume des articles vendus ;

- la société ne présente aucun élément probant susceptible d'entraîner une diminution des rectifications opérées.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche,

- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public,

- et les observations de Me Aujoulat, avocat de la SARL FLEGO.

1. Considérant que la SARL FLEGO, qui exploite un commerce de vente au détail de vêtements pour hommes dans le centre commercial de la Part-Dieu, à Lyon, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er février 2005 au 31 janvier 2008 ; que le vérificateur a rejeté sa comptabilité comme irrégulière et non probante et procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires de son activité ; que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés ont été mises à sa charge au titre des exercices clos les 31 janvier 2006, 31 janvier 2007 et 31 janvier 2008 ; que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée lui ont été réclamés au titre de la période du 1er février 2005 au 31 janvier 2008 ; que l'ensemble de ces rappels d'impôts a été effectué selon la procédure de rectification contradictoire ; que la SARL FLEGO relève appel du jugement du 27 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. / Elle incombe également au contribuable à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu, comme en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69. " ; que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'ayant pas été saisie, la charge de démontrer le bien-fondé des impositions repose sur l'administration ;

3. Considérant que, pour reconstituer le chiffre d'affaires et déterminer les bénéfices réalisés par la société FLEGO, l'administration a appliqué aux achats revendus des taux de marge brut déterminés à partir d'un relevé des prix de 87 articles réalisé le 5 janvier 2009, hors période de soldes, et un second réalisé le 12 janvier 2009, pendant les soldes, en fonction des différentes catégories d'articles et de prix ; que pour tenir compte de l'importance de la fourchette des coefficients de marge constatés, compris entre 1,81 et 8,43, et du fait que les coefficients de marge étaient d'autant plus élevés que les prix d'achat étaient faibles, l'administration a réuni les produits en familles puis en sous-familles en fonction de leur nature et de leur prix, et en fonction de coefficients de marge pouvant les rapprocher ; qu'un coefficient de marge moyen a été appliqué pour chaque sous-famille d'articles ; qu'enfin, pour tenir compte des périodes de soldes dans la reconstitution du chiffre d'affaires de la société, l'administration a appliqué des taux de remise de 25 % pour la première démarque et de 50 % pour les suivantes ;

4. Considérant, en premier lieu, que la SARL FLEGO, qui ne conteste plus en appel le rejet de sa comptabilité comme étant irrégulière et non probante, soutient que le classement en sous-familles des produits vendus ne serait pas pertinent ; que si elle fait valoir qu'une paire de chaussures " Galax " a un coefficient de marge inférieur à une paire de chaussure " Dazawa ", pour un prix d'achat du premier produit inférieur au second, et que cette remarque est également valable pour deux blousons de marques différentes, ces deux exemples ne suffisent pas à eux seuls à infirmer le constat établi par l'administration selon lequel les coefficients de marge appliqués sont d'autant plus élevés que les prix d'achat des articles concernés sont faibles, constat qui a pu être vérifié sur la quasi totalité des sous-familles d'articles constituées ; que la pertinence de la répartition des articles similaires en sous-familles, justifiée par l'écart des coefficients de marge appliqués, ne saurait être remise en cause du seul fait qu'un seul échantillon, dont il n'est pas allégué qu'il ne serait pas représentatif, a permis de déterminer l'ensemble " jeans 3+ ", alors que quatre articles ont été associés à l'ensemble " jeans 3- " ; qu'également, l'incohérence de la répartition des articles en sous-familles ne saurait être déduite de la différence entre les fourchettes de prix constatée entre les sous-familles ; que sur ce point, la requérante fait valoir que la distinction de sous-familles à l'intérieur de la famille " gilets ", qui comporte des prix d'achat très proches, n'est pas justifiée ; que toutefois, il résulte de l'instruction que ces articles, alors même qu'ils relèvent de la même famille, se distinguent entre eux par l'existence d'un écart de coefficient de marge ; que, de la même façon, s'agissant de la sous-famille "9- cuir ", qui comporte des articles dont le prix d'achat est compris entre 1 et 79 euros et supérieur à 50 euros en ce qui concerne la majorité des produits qui la composent, l'incohérence de la méthode ne peut-être établie par la seule circonstance que deux articles rattachés à cette sous-famille ont été achetés à moins de 15 euros et un à plus de 80 euros ; qu'enfin, si la société requérante relève l'erreur commise par l'administration dans la saisie du prix d'achat des produits, cette erreur, qui n'a concerné qu'un seul article, n'est pas de nature à révéler l'absence de cohérence de la répartition des articles en sous-familles pour tenir compte des différences de coefficients de marge observées entre des produits similaires ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que pour définir les taux de remise retenus pendant les période de soldes, soit 25 % pour la première démarque et 50 % pour les démarques suivantes, l'administration s'est fondée sur les indications fournies par le gérant de la société lors de la vérification de comptabilité ; que si la requérante demande en appel que le taux de 28,32 % soit retenu pour la remise appliquée au cours de la première période de démarque, cette proposition, qui porte sur une valeur très proche de celle retenue par l'administration, ne repose sur aucune justification précise et ne saurait, par suite prévaloir sur celle de l'administration ;

6. Considérant, en dernier lieu, que la requérante propose une méthode alternative de reconstitution de ses recettes fondée sur la suppression de la répartition des articles en sous-familles et sur la prise en compte d'un taux de 28,32 % pour la période de soldes ; que toutefois, cette méthode, qui ne repose sur aucun élément de justification et qui n'est pas plus précise que celle retenue par l'administration fiscale, ne peut, dès lors, être retenue ;

7. Considérant que, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la méthode de reconstitution des recettes de la SARL FLEGO retenue par l'administration ne saurait être regardée comme étant radicalement viciée ou excessivement sommaire ; que, dès lors, l'administration apporte la preuve, qui lui incombe, du bien-fondé des impositions en litige ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL FLEGO n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL FLEGO est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL FLEGO et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 20 octobre 2016, à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Pourny, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

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N° 15LY00958


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY00958
Date de la décision : 10/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-01-06-01-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Établissement de l'impôt. Bénéfice réel. Redressements.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : SOCIETE FISCAVOC AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-11-10;15ly00958 ?
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