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10/11/2016 | FRANCE | N°15LY00870

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 10 novembre 2016, 15LY00870


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2014 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a désigné le pays à destination duquel il serait reconduit.

Par un jugement n° 1406918 du 17 février 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois et une

autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2014 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a désigné le pays à destination duquel il serait reconduit.

Par un jugement n° 1406918 du 17 février 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois et une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros à verser à son avocat au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 mars 2015, le préfet de l'Isère demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 17 février 2015 ;

2°) de rejeter l'ensemble des conclusions présentées par M.C....

Il soutient que son arrêté ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire enregistré le 16 juin 2015, M. C..., représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale, par voie d'exception de l'illégalité de la précédente, méconnaît également l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de droit, le préfet s'étant cru tenu de refuser le titre de séjour du fait de la possibilité de solliciter le regroupement familial.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Savouré.

1. Considérant que M. C..., ressortissant togolais né en 1977 et entré irrégulièrement en France, a demandé la délivrance d'un titre de séjour le 10 décembre 2012 sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par arrêté du 22 septembre 2014, le préfet de l'Isère a refusé de lui octroyer un titre de séjour et a assorti ce refus de décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; que le préfet de l'Isère relève appel du jugement du 17 février 2015 par lequel tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

4. Considérant que si M. C...affirme qu'il vit en France depuis 2008, sa présence sur le territoire avant 2012 ne peut être regardée comme justifiée par la seule production d'un avis d'impôt sur le revenu 2010 pour les revenus de l'année 2009 et d'une copie de sa déclaration de revenus de l'année 2010 ; qu'il ne justifie donc que d'une durée de présence en France de deux ans à la date de l'arrêté en litige, alors qu'il a vécu l'essentiel de sa vie au Togo où vivent sa mère et ses quatre soeurs ; que s'il fait valoir qu'il s'est marié en 2012 avec une compatriote qui séjourne régulièrement en France, avec laquelle il a eu un enfant, né le 17 avril 2012, et qui est elle-même mère d'un enfant français né d'une union précédente, il ne pouvait ignorer, dès le début de cette relation, que, en l'absence de droit au séjour, ses perspectives d'installation en France étaient incertaines ; que, dès lors, compte tenu de la brièveté et du caractère irrégulier de son séjour, le préfet a pu, sans méconnaitre les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, refuser de lui délivrer un titre de séjour ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le motif tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté du 22 septembre 2014 ;

5. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. C...devant le tribunal administratif et en appel ;

6. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté litigieux a été signé par le secrétaire général de la préfecture de l'Isère, M.B..., qui avait reçu délégation pour signer, notamment, les décisions litigieuses, par arrêté préfectoral du 17 avril 2014, régulièrement publié ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit être écarté ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale " ;

8. Considérant que si M. C...fait valoir qu'il s'occupe de l'éducation de l'enfant qu'il a eu avec son épouse et de celui auquel celle-ci a donné naissance au cours d'une précédente union, la séparation de quelques mois qu'impliquerait une éventuelle demande de regroupement familial ne suffit ni à regarder l'arrêté en litige comme méconnaissant l'intérêt supérieur de son enfant, ni à considérer que le préfet de l'Isère aurait commis une erreur manifeste d'appréciation ;

9. Considérant, en troisième lieu, que contrairement à ce qu'affirme le requérant, le préfet ne s'est pas cru tenu de refuser de lui accorder un titre de séjour au seul motif qu'il pourrait prétendre entrer en France dans le cadre de la procédure de regroupement familial ;

10. Considérant, en quatrième et dernier lieu, que compte tenu de ce qui précède, M. C... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité du refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 22 septembre 2014 ;

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, verse une somme à M. C...au titre des frais qu'il a exposés à l'occasion du litige ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 17 février 2015 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de M. C...sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. D...C.... Il en sera adressé copie au préfet de l'Isère et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Grenoble.

Délibéré après l'audience du 20 octobre 2016 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Pourny, président-assesseur,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 novembre 2016.

4

N° 15LY00870


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY00870
Date de la décision : 10/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : COUTAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-11-10;15ly00870 ?
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