Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...E...A...D...épouse B...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du préfet de l'Allier en date du 7 septembre 2015 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.
Par un jugement n° 1501842 du 29 décembre 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 janvier 2016, présentée par Me Presle, Mme B...demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 29 décembre 2015 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de l'Allier du 7 septembre 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, à verser à son conseil, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- elle remplit l'ensemble des conditions permettant d'obtenir de plein droit un titre de séjour en qualité de conjoint de français et vit notamment avec son compagnon depuis plus de six mois, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal ; le préfet lui a opposé une condition supplémentaire en relevant qu'elle ne démontrait pas ne plus avoir d'attache dans son pays d'origine.
Par un mémoire enregistré le 23 février 2016, le préfet de l'Allier conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 février 2016.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Samson-Dye a été entendu au cours de l'audience.
1. Considérant que Mme B...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Allier en date du 7 septembre 2015 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 4°A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. " ; qu'aux termes de l'article L. 211-2-1 dudit code : " La demande d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois donne lieu à la délivrance par les autorités diplomatiques et consulaires d'un récépissé indiquant la date du dépôt de la demande. / Sous réserve des conventions internationales, pour lui permettre de préparer son intégration républicaine dans la société française, le conjoint de Français âgé de moins de soixante-cinq ans bénéficie, dans le pays où il sollicite le visa, d'une évaluation de son degré de connaissance de la langue et des valeurs de la République. Si cette évaluation en établit le besoin, les autorités mentionnées au premier alinéa organisent à l'intention de l'intéressé, dans le pays où il sollicite le visa, une formation dont la durée ne peut excéder deux mois, au terme de laquelle il fait l'objet d'une nouvelle évaluation de sa connaissance de la langue et des valeurs de la République. La délivrance du visa est subordonnée à la production d'une attestation de suivi de cette formation. Cette attestation est délivrée immédiatement à l'issue de la formation. Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application de ces dispositions, notamment le délai maximum dans lequel l'évaluation et la formation doivent être proposées, le contenu de l'évaluation et de la formation, le nombre d'heures minimum que la formation doit compter ainsi que les motifs légitimes pour lesquels l'étranger peut en être dispensé. (...) Outre le cas mentionné au deuxième alinéa, le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. Dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, par dérogation à l'article L. 311-1, le visa délivré pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois au conjoint d'un ressortissant français donne à son titulaire les droits attachés à la carte de séjour temporaire prévue au 4° de l'article L. 313-11 pour une durée d'un an. " ; que ces dispositions législatives ouvrent la possibilité à un étranger entré régulièrement en France et devenu par mariage en France conjoint d'un ressortissant français, de présenter au préfet une demande de visa de long séjour, sans avoir à retourner à cette fin dans son pays d'origine, à condition d'avoir séjourné en France plus de six mois avec son conjoint ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la requérante, de nationalité nicaraguayenne et dispensée en cette qualité de visa touristique, est entrée régulièrement en France le 9 juillet 2014 ; qu'elle a épousé, le 16 octobre 2014 à Vichy, M. B..., de nationalité française ; qu'elle a sollicité, le 12 mai 2015, un titre de séjour en qualité de conjoint d'un ressortissant français, qui lui a été refusé par l'arrêté litigieux ; que, si le préfet conteste, dans l'arrêté litigieux, l'existence et l'ancienneté d'une vie commune, il ressort de l'ensemble des pièces du dossier, produites tant en première instance qu'en appel, que le couple justifie d'une vie commune depuis, au moins, la fin de l'année 2014 ; que la requérante remplit ainsi l'ensemble des conditions permettant l'instruction de sa demande de visa de long séjour par l'autorité préfectorale ; qu'à supposer que le préfet ait entendu invoquer un nouveau motif, tiré de la fraude, pour justifier un refus de visa, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une telle fraude serait établie, le parquet ayant d'ailleurs classé sans suite la procédure introduite à la demande du préfet, pour absence d'infraction ;
4. Considérant que, dans ces conditions, en estimant qu'elle ne relevait pas des dispositions du sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de l'Allier a entaché le refus de titre de séjour litigieux d'une erreur d'appréciation ; que l'annulation de cette décision entraîne, par voie de conséquence, celle de l'obligation de quitter le territoire français ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant que, si le présent arrêt n'implique pas, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que le préfet de l'Allier délivre une carte de séjour temporaire à MmeB..., il y a lieu, en revanche, de prescrire au préfet de se prononcer à nouveau sur sa demande de titre de séjour dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt après lui avoir délivré, dans un délai de quinze jours, une autorisation provisoire de séjour ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que Me Presle, avocat de Mme B..., peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros, au profit de Me Presle, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1501842 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 29 décembre 2015 et l'arrêté du préfet de l'Allier du 7 septembre 2015 portant refus de titre de séjour à Mme A...D...épouse B...et obligation de quitter le territoire français sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Allier de délivrer une autorisation provisoire de séjour à Mme C...E...A...D...épouse B...dans le délai de quinze jours et de se prononcer sur sa demande de titre de séjour dans le délai de deux mois, suivant la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 000 euros à Me Presle sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A...D...épouse B...est rejeté.
Article 5: Le présent arrêt sera notifié à Mme C...E...A...D...épouseB..., à Me Presle, au ministre de l'Intérieur et au préfet de l'Allier.
Délibéré après l'audience du 29 septembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,
Mme Samson-Dye, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 octobre 2016.
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N° 16LY00273