La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/10/2016 | FRANCE | N°15LY02678

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 13 octobre 2016, 15LY02678


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 9 avril 2015 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite.

Par un jugement n° 1502489 du 16 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté du 9 avril 2015 et enjoint au préfet de la Drôme de procéder à l'examen

de la demande de Mme B...C...dans un délai de deux mois et de lui délivrer une autorisation...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 9 avril 2015 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite.

Par un jugement n° 1502489 du 16 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté du 9 avril 2015 et enjoint au préfet de la Drôme de procéder à l'examen de la demande de Mme B...C...dans un délai de deux mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 juillet 2015, le préfet de la Drôme demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 16 juillet 2015 ;

2°) de rejeter la demande de Mme B...C...devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal n'a pas fait droit à ses conclusions tendant à la suppression de la demande de Mme B...C...de propos diffamatoires, en application des dispositions de l'article L. 741-2 du code de justice administrative ;

- Mme B...C...ne s'étant pas prévalue d'un refus d'enregistrement de sa demande de titre de séjour, le tribunal a donc retenu un moyen qui n'était pas invoqué devant lui ;

- Mme B...C...n'a pas déposé de dossier complet à la préfecture avant le 24 mars 2015, alors qu'elle était âgée de dix-neuf ans ;

- pour les autres moyens soulevés en première instance, il se réfère à ses écritures devant le tribunal administratif.

Par un mémoire enregistré le 7 octobre 2015, Mme B...C..., représentée par Me Bret, conclut:

- au rejet de la requête ;

- à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Drôme lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de deux mois et de lui remettre immédiatement un récépissé comportant l'autorisation de travailler ;

- et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le paiement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- les pratiques de la préfecture de la Drôme sont critiquables ;

- elle a déposé un dossier complet le 19 mars 2015 alors qu'elle était accompagnée de son éducatrice, qui en atteste ;

- elle remplit donc les conditions posées par l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Mme B... C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 octobre 2015

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche ;

- et les observations de MeA..., substituant Me Bret, avocat de Mme B...C....

1. Considérant que Mme B...C..., ressortissante de la République démocratique du Congo, née le 23 mars 1996, déclare être entrée irrégulièrement en France le 22 octobre 2012 ; que par ordonnance du tribunal pour enfants de Valence du 9 novembre 2012, elle a été placée auprès des services de l'aide sociale à l'enfance ; que le 9 avril 2015, le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ; que ledit préfet relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l' aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. (...) " ;

3. Considérant que pour refuser à Mme B...C...la carte de séjour temporaire prévue par ces dispositions, le préfet de la Drôme s'est fondé sur le motif tiré de ce que l'intéressée n'avait sollicité ce titre que le 24 mars 2015, soit plus d'une année après la date de son dix-huitième anniversaire ; que l'intéressée a soutenu devant le tribunal administratif avoir accompli des démarches auprès des services de la préfecture dès le 18 novembre 2014 et avoir déposé un dossier complet le 19 mars 2015 ; que selon l'attestation établie par une éducatrice qui l'accompagnait, son dossier a toutefois été considéré comme incomplet en l'absence de la carte d'identité du responsable de la structure d'accueil ; que Mme B...C...soutient que cette pièce, qu'elle a fournie le 24 mars 2015, n'est pas au nombre de celles qui sont exigées à l'appui d'une demande de carte de séjour ; que le préfet de la Drôme, qui se borne à faire valoir que le dossier complet de la demande de titre de séjour de Mme B...C...n'a été enregistré que le 24 mars 2015, n'apporte aucun élément contredisant le contenu de l'attestation circonstanciée mentionnée ci-dessus, ni n'établit le caractère incomplet du dossier fourni le 19 mars 2015 ; que, dès lors, c'est à bon droit que, pour annuler les décisions en litige, le tribunal administratif, qui n'a pas retenu un moyen qui n'aurait pas été invoqué devant lui, s'est fondé sur le motif tiré de ce que l'intéressée avait déposé un dossier complet de demande de titre de séjour dès le 19 mars 2015 ;

4. Considérant que, contrairement ce que soutient le préfet de la Drôme, aucun passage des écritures de Mme B...C...devant le tribunal administratif ne présentait un caractère injurieux, outrageant ou diffamatoire ; que, dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a refusé d'en prononcer la suppression par application des dispositions de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881, reproduites à l'article L. 741-2 du code de justice administrative ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Drôme n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions en litige et a rejeté ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 741-2 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure, assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;

7. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L.512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. (...) " ;

8. Considérant que Mme B...C...reprend en appel ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour et une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler ;

9. Considérant que l'annulation prononcée n'implique pas, eu égard au motif sur lequel elle repose, la délivrance d'un titre de séjour, mais implique seulement, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, outre la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, un nouvel examen par l'administration de la demande de Mme B...C... ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par celle-ci en appel doivent être rejetées ;

Sur les conclusions du conseil de Mme B...C...tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

10. Considérant que Mme B...C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sous réserve que Me Bret renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à cet avocat d'une somme de 1 000 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Drôme est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Me Bret au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme B...C...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme D...B...C.... Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Pourny , président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique le 13 octobre 2016.

''

''

''

''

5

N° 15LY02678


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY02678
Date de la décision : 13/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : JEAN-YVES BRET -PATRICK BERAS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-10-13;15ly02678 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award