Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...D..., a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2014 du préfet de l'Yonne refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant son pays de reconduite d'office.
Par un jugement nos 1403399-1403400-1403401 du 3 février 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 23 mars 2015, M.D..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 3 février 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de ce réexamen, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- cette décision méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que celles de l'article L. 313-14 du même code ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- cette mesure d'éloignement méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 avril 2016, le préfet de l'Yonne, représenté par MeE..., conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- la requête est irrecevable, en l'absence de production de la lettre de notification du jugement attaqué ;
- les moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.
M. B...D..., Mme A...F..., épouseD..., et M. H...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 avril 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Meillier,
- et les observations de MeG..., représentant le préfet de l'Yonne.
1. Considérant que M. B...D..., ressortissant géorgien né en 1991, est entré en France le 17 novembre 2011 selon ses déclarations ; qu'il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile ; que sa demande d'asile a été rejetée le 21 décembre 2012 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, puis le 27 juin 2013 par la Cour nationale du droit d'asile ; que sa demande de réexamen a également été rejetée le 27 septembre 2013 par l'Office précité ; que, par arrêté du 22 septembre 2014, le préfet de l'Yonne a refusé de délivrer un titre de séjour à M.D..., a obligé ce dernier à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné son pays de destination ; que, par jugement du 3 février 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de l'intéressé tendant à l'annulation de cet arrêté ; que M. D...relève appel de ce jugement ;
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée, alors en vigueur : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; / (...) - refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions des deuxième à cinquième alinéas de l'article 6 de la loi n° 78-753 du 11 juillet 1978 (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;
3. Considérant, d'une part, qu'il résulte des termes de l'arrêté attaqué que, tirant les conséquences du rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile de la demande d'asile ainsi que de la demande de réexamen de M. D..., le préfet a entendu refuser à l'intéressé le titre de séjour prévu par le 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet de l'Yonne se trouvant en situation de compétence liée pour refuser ce titre de séjour, le requérant ne peut utilement soutenir que ledit refus serait insuffisamment motivé ;
4. Considérant, d'autre part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé aurait effectivement saisi le préfet d'une autre demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de l'article L. 313-14 du même code et que le préfet aurait statué sur une telle demande ; qu'en tout état de cause, en admettant que le courrier en date du 7 août 2013 produit par M. D...et par lequel son épouse sollicitait pour eux deux un titre de séjour afin de pouvoir travailler, s'occuper de son père et trouver une solution de logement, soit effectivement parvenu au préfet, le préfet a suffisamment répondu à la demande de régularisation, qui n'était présentée sur aucun fondement particulier, contenue dans ce courrier en indiquant dans son arrêté que l'intéressé n'entrait dans aucun autre cas de délivrance d'un titre de séjour en application du code précité et que sa situation ne présentait aucune circonstance exceptionnelle ou humanitaire permettant d'y déroger, nonobstant la naissance de son enfant Zauri le 12 août 2014 à Auxerre ; qu'ainsi, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour à titre de régularisation comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de titre de séjour, au regard des exigences des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 alors en vigueur, ne peut qu'être écarté ;
5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;
6. Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, la demande de titre de séjour de M. D... n'a été ni présentée ni examinée sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non plus que sur celles de l'article L. 313-14 du même code ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de ces articles est inopérant ;
7. Considérant, en tout état de cause, que l'intéressé est entré en France moins de trois années avant l'arrêté attaqué ; que son beau-père et son épouse font l'un et l'autre l'objet d'un arrêté de refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'en particulier, il n'apparaît ni que son beau-père ne puisse pas être soigné en Géorgie ni que la présence de son épouse auprès de ce dernier soit indispensable ; que, dans ces conditions, et même si M. D...et son épouse ont eu un enfant né en France en août 2014, soit quelques semaines avant l'arrêté contesté, la décision de refus de titre de séjour n'a pas porté, eu égard aux buts qu'elle poursuit, une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale ; que l'intéressé ne justifie pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels de nature à permettre son admission exceptionnelle au séjour ; que, par suite, le refus de titre de séjour opposé à M. D...n'a pu méconnaître ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni celles de l'article L. 313-14 du même code ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
8. Considérant, en premier lieu, que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, M. D... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
10. Considérant qu'au vu de ce qui a été dit précédemment au point 7 du présent arrêt et en l'absence de circonstance particulière, la décision faisant obligation à M. D...de quitter le territoire français n'a pas porté, eu égard aux buts qu'elle poursuit, une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;
En ce qui concerne le choix du pays de destination :
11. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, le requérant n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet, M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
13. Considérant que le présent arrêt de rejet n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. D...doivent être rejetées ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
14. Considérant que les dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. D...demande pour son conseil au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D..., et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.
Délibéré après l'audience du 30 juin 2016 à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président,
Mme Bourion, premier conseiller,
M. Meillier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 août 2016.
''
''
''
''
5
N° 15LY00989