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23/06/2016 | FRANCE | N°14LY01831

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 23 juin 2016, 14LY01831


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Lyon Loisirs Bowlingstar a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 décembre 2006, 2007 et 2008 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1103209 du 15 avril 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juin 2014, la SARL Lyon Lo

isirs Bowlingstar, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Lyon Loisirs Bowlingstar a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 décembre 2006, 2007 et 2008 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1103209 du 15 avril 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juin 2014, la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon, en date du 15 avril 2014 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions contestées restant à sa charge et des pénalités correspondantes ;

Elle soutient que :

- les premiers juges ont omis de statuer sur le rehaussement de son bénéfice net de 210 982 euros en 2006 et 47 093 euros en 2008 au motif qu'il s'agirait de passifs injustifiés ;

- la proposition de rectification ne permet pas de déterminer l'origine du passif injustifié de 47 093 euros réintégré en 2008 ;

- les facilités consenties sans intérêt à d'autres sociétés, appartenant au même groupe informel qu'elle, ont été effectuées dans un intérêt commun et ne constituent pas, dès lors, un acte anormal de gestion ;

- les charges de location de pistes qu'elle a déduites pour des montants respectifs de 56 000 euros et 84 281 euros au titre des années 2006 et 2007 sont justifiées par la tacite reconduction du contrat de location avec la société Amity Trading Limited ;

- le passif injustifié de 210 982 euros en 2006 correspond à des dettes de loyers dus à la société Amity Trading Limited, qu'elle était fondée à inscrire " en charges à payer " dès lors qu'elles étaient certaines ;

- les sommes de 59 134 euros en 2006 et 141 667 euros en 2007 ont été imputées par erreur en compte de charges à payer, alors qu'elles étaient versées à titre d'avance de trésorerie aux sociétés Bowling Odysseum et Karting Odysseum pour la caution du bailleur des locaux où allaient exercer ces sociétés, qui les ont comptabilisées comme avances dans leurs propres comptabilités ;

- sur les 141 667 euros, 113 160 euros sont des avances et 28 507 euros constituent des profits exceptionnels affectés aux charges à payer, lesquels ne peuvent être réintégrés et imposés une deuxième fois.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 décembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le fait d'avoir consenti des avances, sans facturer ni percevoir de rémunération, à d'autres sociétés du groupe constitue des actes anormaux de gestion en l'absence de justification d'un intérêt pour la requérante à s'abstenir d'une telle facturation ;

- les charges de location de pistes ne sont pas justifiées ;

- s'agissant du passif injustifié, elle ne justifie pas, à l'ouverture de la période vérifiée, du montant des sommes figurant au compte " charges à payer ", ni des paiements intervenus en cours de période au bénéfice, non de la société britannique, mais des sociétés du groupe ;

- s'agissant de la minoration d'actif, la requérante ne justifie pas des paiements effectués.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bourion,

- les conclusions de Mme Chevalier-Aubert, rapporteur public.

1. Considérant que la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar, qui exploite un bowling de quatorze pistes à Lyon et appartient à un groupe familial non intégré fiscalement, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle des rehaussements lui ont été notifiés au titre des exercices clos les 31 décembre 2006, 2007 et 2008 en matière d'impôt sur les sociétés et au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008 en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; que le 24 avril 2009, une demande d'assistance internationale a été transmise aux autorités fiscales britanniques, selon les dispositions de l'article 27 de la convention fiscale franco-britannique du 22 mai 1968, et portant sur les relations commerciales entretenues par la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar avec la société anglaise Amity Trading Limited ; que la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar relève appel du jugement du 15 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006, 2007 et 2008 à la suite de ces rectifications ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar fait valoir que le jugement ne s'est pas prononcé sur le rehaussement de son bénéfice net de 210 982 euros en 2006 et 47 093 euros en 2008 au titre de passifs injustifiés ; qu'il ressort cependant des termes du jugement attaqué, que les premiers juges se sont prononcés sur ces rehaussements au considérant 8 de leur jugement, complété, pour l'année 2008, par le considérant 10 de ce jugement, le rehaussement de 47 093 euros effectué au titre de l'année 2008 procédant de l'application du principe de correction symétrique du bilan, ainsi que le précise la proposition de rectification du 24 juillet 2009 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations ; qu'en revanche, la régularité d'une proposition de rectification ne dépend pas du bien-fondé de ses motifs ;

4. Considérant que la proposition de rectification du 24 juillet 2009, adressée à la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar concernant l'année 2008, mentionne l'impôt sur les sociétés de l'année 2008, le montant du passif injustifié à la clôture de l'exercice 2008, les montants rectifiés au titre des exercices 2006 et 2007, aboutissant, après application du principe de correction symétrique du bilan, au montant de 47 093 euros réintégré en 2008 ; que cette proposition de rectification est ainsi suffisamment motivée ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la renonciation à recettes :

5. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale ; que le fait, pour une entreprise, de consentir une avance sans intérêts au profit d'un tiers ne relève pas, en règle générale, d'une gestion normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant un tel avantage, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon d'intérêts constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve si l'auteur de l'abandon n'est pas en mesure de justifier l'existence de contreparties ;

6. Considérant que la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar a consenti des avances sans intérêts aux SARL Bayonne Loisirs, Bowling du Plan, Bowling Carré Sénart, Bowling du Pontet et Bowling Valentine au cours des années 2006, 2007 et 2008 ; que l'administration, estimant être en présence d'actes anormaux de gestion, a rehaussé les résultats de la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar du montant des intérêts qu'elle aurait dû percevoir en raison de ces avances ; que si la requérante fait valoir que les sociétés concernées appartiennent toutes au même groupe informel qu'elle et exercent toutes la même activité de bowling, sous l'égide des mêmes associés, avec une enseigne générique commune qui lie l'image, l'existence et les intérêts de l'ensemble des sociétés du groupe et qu'ainsi les difficultés financières affectant les entreprises du groupe entacheraient sa notoriété, justifiant, dès lors, l'octroi d'avances sans intérêts à ces sociétés, les conventions de trésorerie, qui permettent aux sociétés qui ont des excédents d'aider celles en difficulté, et les comptes de ses sociétés soeurs versés au dossier ne permettent pas de retenir la réalité de l'intérêt commercial et financier allégué et, par suite, l'existence d'une contrepartie aux avances sans intérêts consenties ; que notamment, la requérante n'établit pas l'existence des difficultés financières de ses sociétés soeurs qui l'ont d'ailleurs remboursée rapidement ; qu'ainsi, le service doit être regardé comme établissant que l'octroi des avances litigieuses était étranger à une gestion commerciale normale ; que, par suite, c'est à bon droit qu'il a réintégré une rémunération calculée au taux de l'intérêt légal dans les résultats imposables de la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar pour des montants respectifs de 1 778 euros, 8 318 euros et 22 996 euros au titre des exercices clos de 2006 à 2008 ;

En ce qui concerne les charges comptabilisées au titre de la location des pistes de bowling :

7. Considérant, d'une part, qu'aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés " ; que, d'autre part, aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, il incombe toujours au contribuable de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que, de même, il lui appartient dans tous les cas, quelle que soit la procédure d'imposition suivie, de justifier de l'inscription d'une dette au passif du bilan de son entreprise ;

8. Considérant que figuraient au bilan de clôture de l'exercice 2006, dernier exercice non prescrit, des dettes d'un montant de 210 982 euros que la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar avait comptabilisées à raison des loyers dus, au titre des exercices antérieurs à 2006, à la société de droit britannique Amity Trading Limited pour la location des pistes de bowling en exécution d'un contrat, souscrit pour une durée de quatre ans à compter du 14 juin 2001, tacitement reconductible ; que la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar a, au titre des années 2006 et 2007, aussi comptabilisé à ce titre des charges de 56 000 euros et 77 280 euros, outre 7 000 euros d'intérêts ; qu'estimant ces dettes non justifiées, le vérificateur a rectifié le passif à la clôture de ces exercices ; que, pour justifier les dettes qu'elle a comptabilisées, la société requérante produit le contrat qui la lierait à la société Amity Trading Limited ; que toutefois, d'une part, la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar n'a présenté ni facture du prestataire, ni facture d'intérêts de retard (ainsi que le stipule l'article 6 b et d du contrat) ou de mise en demeure de régler les sommes impayées, ni actes de poursuite de la part de son créancier, en dépit de l'inexécution de ses obligations financières pendant plusieurs années, de nature à établir que le contrat conclu avec la société Amity Trading Limited aurait été prolongé au-delà du 14 juin 2005, alors au demeurant qu'il résulte de la réponse à la demande d'assistance administrative auprès des autorités britanniques que la société Amity Trading Limited n'a été immatriculée que le 5 février 2002, soit postérieurement à la conclusion dudit contrat, que son objet social est la fourniture de services administratifs et non la location de pistes de bowling, que l'adresse de son siège social est utilisée par 1 800 autres sociétés, qu'elle n'employait aucun salarié en 2006 et 2007 et que son chiffre d'affaires de 8 238 euros et 7 262 euros pour les exercices 2006 et 2007 était sans rapport avec les charges comptabilisées par la société requérante ; que, dans ces conditions, la seule production des lettres de rappel de loyers du 10 avril 2007 et du 30 janvier 2008 qui émaneraient de la société Amity Trading Limited ne présentent aucune valeur probante ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a estimé que le passif figurant au bilan de clôture de l'exercice 2006 et les charges déduites en 2006 et 2007 étaient injustifiés et a procédé aux rehaussements contestés ; que la circonstance que la taxe professionnelle de la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar a été rectifiée par l'administration en retenant le montant de la base locative figurant au contrat passé avec la société Amity Trading Limited est sans incidence sur les impositions en litige ;

9. Considérant enfin, qu'à supposer que la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar ait entendu se prévaloir de la doctrine administrative contenue dans la documentation de base sous les références 4 C-131 n° 7-8 et 4 B 211 n° 18 indiquant que lorsqu'une dette présente pour l'entreprise le caractère d'une dette certaine (comme les loyers échus non encore payés), elle peut être retranchée des bénéfices même si elle n'a pas encore été payée, cette société n'a pas établi, ainsi qu'il a été dit plus haut, que ces sommes correspondaient à des dettes certaines ;

En ce qui concerne la minoration d'actif :

10. Considérant que le service a constaté que la société avait comptabilisé au titre des exercices 2006 et 2007 des paiements d'un montant respectif de 59 134 euros et 141 667 euros au profit de la société Amity Trading Limited, alors que ces paiements ont été effectués au profit de deux autres sociétés participant au groupe informel invoqué par la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar ; que l'administration a donc remis en cause la comptabilisation de ces paiements comme constituant une minoration d'actif ; que la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar confirme que les sommes n'ont pas été versées à la société Amity Trading Limited, mais fait valoir qu'elle a seulement commis une erreur comptable et qu'il convient d'imputer lesdits versements aux sociétés concernées ; que, toutefois, la requérante ne pouvait ignorer le caractère irrégulier de la comptabilisation de ces versements en tant que paiements au bénéfice de la société britannique ; que cette erreur a été commise lors de deux exercices et concerne deux sociétés faisant partie de son groupe informel ; que la société requérante a commis une erreur comptable délibérée qui lui est opposable ; qu'en outre, si la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar fait valoir que sur les 141 667 euros, 28 507 euros constituent des profits exceptionnels affectés aux charges à payer, qu'il convient ne pas réintégrer une deuxième fois, elle ne l'établit pas ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a constaté des minorations d'actif et les a imposées en application des dispositions précitées du 2 de l'article 38 du code général des impôts ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar une somme au titre des frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Lyon Loisirs Bowlingstar et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2016 à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président,

Mme Bourion, premier conseiller,

M. Meillier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 juin 2016.

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N° 14LY01831


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01831
Date de la décision : 23/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Isabelle BOURION
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : PARET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-06-23;14ly01831 ?
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