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28/04/2016 | FRANCE | N°14LY04015

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 28 avril 2016, 14LY04015


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C..., épouseB..., a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 27 février 2014 du préfet du Rhône refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant, comme pays de reconduite d'office à l'expiration de ce délai, le pays dont elle a la nationalité, ou tout pays pour lequel elle établit être légalement admissible.

Par un jugement n° 1404512 du 24 septembre 2014, le tribunal adm

inistratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C..., épouseB..., a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 27 février 2014 du préfet du Rhône refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant, comme pays de reconduite d'office à l'expiration de ce délai, le pays dont elle a la nationalité, ou tout pays pour lequel elle établit être légalement admissible.

Par un jugement n° 1404512 du 24 septembre 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2014, MmeC..., représentée par Me Paquet, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 24 septembre 2014 ;

2°) d'annuler les décisions du 27 février 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une " autorisation provisoire de séjour " portant la mention " vie privée et familiale " ou " malade " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans un délai de huit jours à compter de cette notification, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour, dont les motifs sont contradictoires avec ceux de la décision notifiée à son époux, est insuffisamment motivée et est entachée d'une " erreur manifeste d'appréciation des faits " ;

- cette décision a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dans la mesure où, d'une part, l'avis du médecin de l'agence régionale de santé a été transmis directement au préfet, sans être soumis au directeur de l'agence régionale de santé et où, d'autre part, le préfet n'a pas d'office saisi ledit directeur ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet n'ayant pas examiné sa situation au regard des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et s'étant cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ;

- la décision désignant l'Arménie comme pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par ordonnance du 2 décembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 8 janvier 2016.

Un mémoire présenté par le préfet du Rhône a été enregistré le 17 février 2016, postérieurement à la clôture de l'instruction.

Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 novembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Meillier.

1. Considérant que Mme A...C..., ressortissante arménienne née en 1989, déclare être entrée en France, avec son époux et ses deux filles, en octobre 2011 ; qu'elle a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile ; que sa demande d'asile a été rejetée par décision du 31 mai 2013 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée le 20 décembre 2013 par la Cour nationale du droit d'asile ; qu'elle a sollicité le 8 octobre 2013 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, son époux ayant, le même jour, sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° du même article ; que, par décisions du 27 février 2014, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des articles L.314-11 (8°), L. 313-13 et L. 313-11 (11°) du code précité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination ; que, par jugement du 24 septembre 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de l'intéressée tendant à l'annulation de ces décisions ; que Mme C...relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité des décisions contestées :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision de refus de titre de séjour prise à l'encontre de Mme C...comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; qu'elle précise, en particulier, que l'intéressée ne remplit pas les conditions de délivrance d'un titre de séjour en application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 dans la mesure où, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il existe un traitement approprié dans son pays d'origine vers lequel elle peut voyager sans risque ; que si la décision de refus de titre de séjour prise le même jour à l'encontre de son époux, M.B..., indique que le traitement approprié à l'état de santé de Mme C... " existe pas " dans le pays d'origine de cette dernière, cette erreur de plume, commise dans une décision distincte, n'a pu induire en erreur Mme C...sur les motifs pour lesquels la délivrance d'un titre de séjour lui a été refusée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée est insuffisamment motivée au regard des exigences des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 alors en vigueur doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis (...) / Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. / Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois. " ;

4. Considérant, d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé en date du 20 octobre 2013 ait été transmis au préfet du Rhône sous couvert du directeur général de cette agence, comme le prévoit l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 ; que toutefois, cet avis, s'il s'interrogeait sur l'existence d'un " risque politique ' ", ne faisait pas état de considérations humanitaires exceptionnelles, au sens des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour ; qu'en outre, il n'est pas établi que Mme C...ait porté à la connaissance du médecin de l'agence régionale de santé ou du préfet des circonstances de cette nature ; qu'enfin et en tout état de cause, en se bornant à soutenir qu'elle souffre d'une " pathologie particulièrement grave " et qu'elle suit un " traitement médicamenteux lourd ", sans apporter aucune précision sur la nature de cette pathologie et de ce traitement, la requérante ne justifie pas que de telles circonstances aient existé ; que, dans ces conditions, d'une part, la transmission directe au préfet de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, bien qu'irrégulière, n'a, en l'espèce, ni exercé d'influence sur le sens de la décision prise ni privé l'intéressée d'une garantie et, d'autre part, le préfet n'était pas tenu de saisir d'office le directeur général de l'agence régionale de santé avant de statuer sur la demande de MmeC... ; que par suite, les moyens tirés de vices de procédure tenant à la méconnaissance des dispositions de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 doivent être écartés ;

5. Considérant, d'autre part, qu'il est constant que l'état de santé de Mme C...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour l'intéressée des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, toutefois, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé, dans son avis précité, qu'un traitement approprié existe dans le pays dont l'intéressée est originaire ; que Mme C...n'apporte aucun élément tendant à établir l'indisponibilité en Arménie des traitements médicamenteux appropriés à son état de santé, non plus que l'impossibilité pour elle d'être soignée efficacement dans ce pays en raison d'un lien existant entre ses pathologies et des violences qu'elle aurait subies dans cet Etat ; que, dans ces conditions et compte tenu des éléments respectivement apportés par les deux parties, l'absence d'un traitement approprié en Arménie ne ressort pas des pièces du dossier ; qu'ainsi, nonobstant l'erreur de plume contenue dans la décision prise à l'encontre de l'époux de l'intéressée, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation des faits quant à la disponibilité en Arménie d'un traitement approprié à l'état de santé de MmeC... ; que, par ailleurs, en se bornant à faire état de la gravité des pathologies dont elle souffre et du lien sus-évoqué entre ses pathologies et des violences subies dans ce pays, la requérante ne justifie pas davantage, ainsi que cela a été dit au point précédent, de l'existence de circonstances humanitaires exceptionnelles ; que, par suite, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, en troisième lieu, que Mme C...reprend en appel le moyen, qu'elle avait invoqué en première instance, tiré de ce que la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ; qu'alors également que l'intéressée peut être soignée en Arménie, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Lyon ;

7. Considérant, en dernier lieu, que Mme C...reprend également en appel les moyens, qu'elle avait invoqués en première instance, tirés de ce que le préfet a commis une erreur de droit et méconnu l'étendue de sa compétence en n'examinant pas sa situation au regard des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et en se croyant lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Lyon ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

8. Considérant que Mme C...reprend en appel les moyens, qu'elle avait invoqués en première instance, tirés de ce que cette décision méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Lyon ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

10. Considérant que le présent arrêt de rejet n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par Mme C...doivent être rejetées ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme C...demande pour son conseil au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C..., épouseB..., et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2016 à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président,

Mme Bourion, premier conseiller,

M. Meillier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 avril 2016.

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N° 14LY04015


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY04015
Date de la décision : 28/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Charles MEILLIER
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : PAQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-04-28;14ly04015 ?
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