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03/03/2016 | FRANCE | N°14LY02665

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 03 mars 2016, 14LY02665


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 18 juin 2012 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Rhône-Alpes a rejeté sa demande tendant à ce qu'elle soit autorisée à faire usage du titre de psychothérapeute, et d'enjoindre au directeur général de l'ARS Rhône-Alpes de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 250 euros par jour de ret

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Par un jugement n° 1204287 du 13 juin 2014, le tribunal administratif de Gr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 18 juin 2012 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Rhône-Alpes a rejeté sa demande tendant à ce qu'elle soit autorisée à faire usage du titre de psychothérapeute, et d'enjoindre au directeur général de l'ARS Rhône-Alpes de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 250 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1204287 du 13 juin 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 août 2014, présentée pour Mme A...B...domiciliée " ..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1204287 du 13 juin 2014 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au directeur général de l'ARS Rhône-Alpes de procéder à une nouvelle instruction de la demande d'autorisation dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification à intervenir, sous astreinte de 250 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure en ce qu'elle a été adoptée par une commission irrégulièrement composée ;

- en remettant en cause la durée d'exercice de MmeB..., les premiers juges ont procédé à une substitution de motifs qui n'était pas sollicitée par l'ARS Rhône-Alpes ;

- le directeur général de l'ARS Rhône-Alpes a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que la requérante justifie d'une formation et d'une expérience équivalente aux exigences prévues par l'article 16 du décret du 20 mai 2010 ;

- le directeur général de l'ARS aurait du, a minima, utiliser sa faculté de subordonner l'autorisation sollicitée à l'accomplissement d'une formation complémentaire prévue à l'article 16 du décret du 20 mai 2010 ;

Par un mémoire, enregistré le 25 septembre 2014, le ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la décision attaquée n'est entachée d'aucun vice de procédure ni d'erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n°2004-806 du 9 août 2004 ;

- le décret n°2010-534 du 20 mai 2010 ;

- le décret n°2006-672 du 8 juin 2006 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public.

1. Considérant que, par un courrier en date du 21 juin 2011, Mme B...a demandé son inscription à titre dérogatoire sur le registre national des psychothérapeutes ; qu'à la suite de la réunion du 26 avril 2012, la commission régionale d'inscription des psychothérapeutes a émis un avis défavorable à l'unanimité à cette demande d'autorisation, au motif que " les formations validées par l'intéressée et son expérience professionnelle ne peuvent être admises ni en équivalence de la formation initiale en psychopathologie prévue à l'article 1er du décret du 20 mai 2010, ni d'un diplôme prévu à l'article 6 dudit décret " ; qu'à la suite de cet avis, le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Rhône-Alpes a, par une décision du 18 juin 2012, rejeté la demande de Mme B... tendant à être autorisée à faire usage du titre de psychothérapeute ; que l'intéressée fait appel du jugement du 13 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de cette décision ;

Sur la régularité du jugement

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour refuser l'usage du titre de psychothérapeute à Mme B...par la décision en litige du 18 juin 2012, le directeur général de l'ARS Rhône-Alpes s'est fondé sur le motif tiré de ce que les formations validées et l'expérience professionnelle de l'intéressée ne pouvaient être admises en équivalence ni de la formation minimale en psychopathologie, ni du diplôme correspondant, prévus par le décret du 20 mai 2010 ; que pour rejeter sa demande dirigée contre cette décision, le tribunal a estimé que les pièces du dossier ne permettaient pas d'admettre que la durée de formation et de stage de Mme B...consacrés à la psychopathologie clinique étaient suffisantes au regard des exigences de l'article 16 du décret susvisé du 20 mai 2010 ; qu'ainsi, l'autre motif sur lequel se sont également fondés les premiers juges, tiré de ce que Mme B... ne justifiait pas avoir exercé la psychothérapie depuis plus de cinq ans à la date de la publication du décret du 20 mai 2010, présente un caractère surabondant ; que, par suite le moyen tiré par la requérante de ce qu'en rejetant sa demande d'annulation en se fondant d'office sur un tel motif, lié à la durée d'exercice de son activité de psychothérapeute, qui n'avait pas été invoqué par l'administration, le tribunal administratif a entaché son jugement d'irrégularité, ne saurait être accueilli ;

Sur la légalité de la décision du 18 juin 2012

3. Considérant qu'aux termes de l'article 52 de la loi du 9 août 2004 susvisée : " L'usage du titre de psychothérapeute est réservé aux professionnels inscrits au registre national des psychothérapeutes. / (...) Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du présent article et les conditions de formation théorique et pratique en psychopathologie clinique que doivent remplir les professionnels souhaitant s'inscrire au registre national des psychothérapeutes. (...) / L'accès à cette formation est réservé aux titulaires d'un diplôme de niveau doctorat donnant le droit d'exercer la médecine en France ou d'un diplôme de niveau master dont la spécialité ou la mention est la psychologie ou la psychanalyse. / (...) Le décret en Conseil d'Etat précise également les dispositions transitoires dont peuvent bénéficier les professionnels justifiant d'au moins cinq ans de pratique de la psychothérapie à la date de publication du décret. " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 20 mai 2010 susvisé: " L'inscription sur le registre national des psychothérapeutes mentionné à l'article 52 de la loi du 9 août 2004 susvisée est subordonnée à la validation d'une formation en psychopathologie clinique de 400 heures minimum et d'un stage pratique d'une durée minimale correspondant à cinq mois effectué dans les conditions prévues à l'article 4. L'accès à cette formation est réservé aux titulaires d'un diplôme de niveau doctorat donnant le droit d'exercer la médecine en France ou d'un diplôme de niveau master dont la spécialité ou la mention est la psychologie ou la psychanalyse " ; qu'aux termes de l'article 16 dudit décret: " I. Les professionnels justifiant d'au moins cinq ans de pratique de la psychothérapie à la date de publication du présent décret peuvent être inscrits sur la liste départementale mentionnée à l'article 7 alors même qu'ils ne remplissent pas les conditions de formation et de diplôme prévues aux articles 1er et 6 du présent décret. Cette dérogation est accordée par le directeur général de l'agence régionale de santé de la résidence professionnelle du demandeur après avis de la commission régionale d'inscription. Le professionnel présente cette autorisation lors de sa demande d'inscription sur la liste départementale des psychothérapeutes. / II. La commission mentionnée au I est présidée par le directeur général de l'agence régionale de santé ou par la personne qu'il a régulièrement désignée pour le représenter. Elle comprend six personnalités qualifiées titulaires et six personnalités suppléantes, appartenant à l'une des trois catégories mentionnées au cinquième alinéa de l'article 52 de la loi du 9 août 2004 susvisée, et nommées par le directeur général de l'agence régionale de santé qui les choisit en raison de leurs compétences dans les domaines de la formation et de leur expérience professionnelle dans le champ de la psychiatrie, de la psychanalyse ou de la psychopathologie clinique, sans qu'aucune de ces trois catégories de professionnels ne soit majoritaire au sein de la commission. Ses membres sont nommés pour une durée de trois ans renouvelable une fois / La commission se réunit dans les conditions fixées par le décret du 8 juin 2006 susvisé. (...) La commission s'assure que les formations précédemment validées par le professionnel et son expérience professionnelle peuvent être admises en équivalence de la formation minimale prévue à l'article 1er et, le cas échéant, du diplôme prévu à l'article 6. Elle définit, si nécessaire, la nature et la durée de la formation complémentaire nécessaire à l'inscription sur le registre des psychothérapeutes. (...) " qu'aux termes de l'article 11 du décret du 8 juin 2006 susvisé " Le quorum est atteint lorsque la moitié au moins des membres composant la commission sont présents, y compris les membres prenant part aux débats au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle, ou ont donné mandat ";

4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 9 décembre 2010, le directeur général de l'ARS Rhône Alpes a fixé la composition de la commission régionale d'inscription prévue à l'article 16 du décret du 20 mai 2010 précité, en désignant, en qualité de titulaires, deux psychiatres, deux psychologues et deux psychanalystes ; qu'il s'ensuit que cette composition a été fixée conformément aux dispositions précitées du II de l'article 16 de ce décret qui prévoient qu'aucune de ces trois catégories de professionnels n'est majoritaire ; que si Mme B...fait valoir que lors de la séance du 26 avril 2012, au cours de laquelle sa demande a été examinée, étaient présents, deux psychiatres et un psychologue, mais aussi trois psychanalystes, soient les deux titulaires et un suppléant, il ne ressort pas des pièces du dossier que la présence de ce suppléant a eu une incidence sur l'avis donné par ladite commission et sur la décision prise par le directeur de l'ARS, ou qu'elle a privé l'intéressée d'une garantie, dès lors que le quorum était atteint sans prendre en compte la présence de ce suppléant, que l'intéressée a été entendue et a pu faire part de ses observations, que l'avis de la commission a été donné à l'unanimité et qu'aucune pièce n'établit que la présence de ce suppléant a, d'une façon quelconque, lors du débat ou du vote, exercé une influence sur le sens de l'avis ainsi émis ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté a ainsi été pris à l'issue d'une procédure irrégulière doit être écarté ;

5. Considérant en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B..., titulaire d'un diplôme universitaire d'études littéraires (DUEL) de psychologie depuis 1972 et d'un diplôme d'Etat d'éducateur spécialisé depuis 1975, a suivi une formation de musicothérapie au centre international de Musicothérapie entre 1990 et 1993 ; qu'elle a également obtenu un diplôme d'études supérieures d'université en psychopathologie en 2007 à l'université Paris 8 ; qu'elle y a notamment suivi et validé 161 heures d'enseignements théoriques relatifs à la psychopathologie ; que si Mme B...se prévaut de trois stages pratiques sur une période totale de 8 mois, elle n'apporte toutefois aucune précision sur le contenu de ces stages dont la durée s'est limitée à 320 heures ; que la requérante se prévaut par ailleurs d'une expérience de 10 ans dans un centre d'action médico-sociale précoce (CAMSP) où elle a exercé en qualité d'éducatrice spécialisée et au sein duquel elle a mis en place des séances de musicothérapie à destination d'enfants souffrant de troubles de la relation et du comportement ; que toutefois elle ne produit aucun élément précis quant aux contenus de ces différentes interventions ni quant à l'exercice d'une pratique professionnelle de psychothérapie durant ces années ; que si Mme B... affirme de même qu'elle est membre de la fédération française de musicothérapie (FFM), membre affiliée de l'Institut international de la psychanalyse et de la psychothérapie Charles Baudoin et membre du centre d'étude et de recherche sur l'enfant dans le discours analytique (CEREDA), la participation à cette structure d'autoréglementation de la profession mise en place par les syndicats professionnels antérieurement à la loi du 9 août 2004 n'est pas de nature à remettre en cause l'avis sus évoqué de la commission ; qu'enfin si la requérante produit des attestations de médecins généralistes certifiant lui avoir adressé des patients, de telles attestations, rédigées en termes généraux, ne permettent pas d'apprécier le nombre et la nature précise de ces interventions ; qu'ainsi les éléments produits par la requérante ne permettent pas de la regarder comme ayant acquis à la date de la décision litigieuse les connaissances théoriques et pratiques équivalentes à celles exigées par les dispositions précitées de l'article 16 du décret du 20 mai 2010 ; que par suite, le directeur général de l'ARS Rhône Alpes n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant, après avoir été éclairé par l'avis défavorable émis par la commission régionale d'inscription des psychothérapeutes, que Mme B...ne remplissait pas les conditions requises pour se voir autoriser, à titre dérogatoire, à faire usage du titre de psychothérapeute ;

6. Considérant en troisième lieu, que Mme B...soutient que l'administration aurait dû faire usage de la faculté prévue au II de l'article 16 du décret du 20 mai 2010, de prescrire des formations complémentaires ; que, toutefois, ces dispositions n'imposent pas au directeur général de l'ARS de définir, sur proposition de la commission, la nature et la durée de la formation complémentaire nécessaire à l'inscription du demandeur sur le registre des psychothérapeutes ; qu'eu égard au caractère largement insuffisant, en l'espèce, de son expérience professionnelle et des formations précédemment validées par l'intéressée, l'administration, en n'usant pas de cette faculté, n'a pas entaché sa décision d'illégalité ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre des affaires sociales et de la santé. Copie en sera adressée au directeur de l'Agence régionale de santé Rhône-Alpes.

Délibéré après l'audience du 11 février 2016 à laquelle siégeaient :

M. Faessel, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 mars 2016.

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N°14LY02665 6

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02665
Date de la décision : 03/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

61-035 Santé publique. Professions médicales et auxiliaires médicaux.


Composition du Tribunal
Président : M. FAESSEL
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SCP CHENEAU et PUYBASSET

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-03-03;14ly02665 ?
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