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25/02/2016 | FRANCE | N°15LY02319

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 25 février 2016, 15LY02319


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 20 août 2014 par lesquelles le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et fixé le pays de destination.

Par le jugement n° 1409594 du 24 mars 2015, le tribunal administratif de Lyon, a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 juillet 2015, M. A... représ

enté par Me C...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 20 août 2014 par lesquelles le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et fixé le pays de destination.

Par le jugement n° 1409594 du 24 mars 2015, le tribunal administratif de Lyon, a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 juillet 2015, M. A... représenté par Me C...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 24 mars 2015 ;

2°) d'annuler les décisions préfectorales du 20 août 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard en application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour Me C...de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

M. A... soutient que :

- c'est à tort, à propos du refus de titre, que le tribunal a considéré qu'il ne produisait aucune pièce démontrant son intégration, ni son parcours scolaire pas plus que l'impossibilité de mener une vie privée et familiale dans le pays d'origine ou d'y poursuivre une scolarité ;

- le préfet ne fait qu'évoquer sa situation familiale ce qui dénote un défaut d'examen particulier de sa situation et une erreur manifeste d'appréciation ;

- c'est à tort que le préfet évoque le défaut d'insertion professionnelle, alors qu'il vient juste d'avoir 18 ans, ce qui démontre également un défaut d'examen particulier de sa situation et une erreur manifeste d'appréciation ; le tribunal s'abstient de répondre à son moyen sur ce point ;

- s'agissant de l'obligation de quitter le territoire, le tribunal administratif a repris le même raisonnement que pour le refus de titre, ce qui est tout aussi contestable ;

- le tribunal n'a pas répondu à l'ensemble de ses moyens, en particulier à celui tiré de l'erreur de droit résultant de l'automaticité de l'obligation de quitter le territoire, le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée ;

- la partie du jugement qui statue sur le pays de renvoi est également critiquable en ce qu'elle reprend la même motivation sur la violation de sa vie privée et familiale, les conséquences sur sa situation personnelle, outre les risques en cas de retour.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 décembre 2015, le préfet de l'Ain conclut au rejet de la requête et soutient qu'aucun moyen n'est fondé.

Par courrier du 19 janvier 2016, la cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, qu'elle était susceptible de relever d'office le moyen d'ordre public tiré de ce que le Kosovo, pays dont le requérant a la nationalité, ne faisant pas, à la date de la décision attaquée, partie de la liste des pays d'origine sûrs (décision du Conseil d'État du 10 octobre 2014, n°s 375474 et 375920), M. A... bénéficiait du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile (article L. 742-1 du CESEDA dans sa rédaction alors en vigueur).

Par un mémoire enregistré le 21 janvier 2016, le préfet de l'Ain conclut au non-lieu à statuer dès lors qu'un récépissé constatant le dépôt d'une demande d'asile a été délivré à M. A... le 8 juillet 2015 et que, par décision du 23 décembre 2015, la Cour nationale du droit d'asile a accordé la protection subsidiaire à M.A....

Par un mémoire enregistré le 1er février 2016, non communiqué, M. A...soutient qu'aucun récépissé ne lui a été remis, que la décision de la Cour nationale du droit d'asile ne lui a été notifiée que tout récemment et qu'il n'entend pas se désister.

Le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à M. A...le bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 2 juin 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 7 avril 2010 portant régionalisation de l'admission au séjour des demandeurs d'asile dans la région Rhône-Alpes ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Gondouin, rapporteur.

1. Considérant que M. B... A..., ressortissant kosovar né en mars 1995, est arrivé en France le 28 février 2011 avec sa mère, Mme D...et ses deux frères ; que sa demande d'asile, examinée selon la procédure prioritaire, a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 25 juillet 2014 ; que par des décisions du 20 août 2014, le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et désigné le pays à destination duquel il pourra être éloigné ; que M. A...relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon du 24 mars 2015 qui a rejeté sa demande dirigée contre ces décisions ;

Sur les conclusions à fin de non-lieu :

2. Considérant que si, à la suite du courrier du 19 janvier 2016 informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de relever d'office un moyen d'ordre public, le préfet de l'Ain fait valoir que le requérant a obtenu un récépissé constatant le dépôt d'une demande d'asile le 8 juillet 2015, il n'en justifie pas par les pièces qu'il produit pour la première fois, le 21 janvier 2016, en réponse au courrier de la cour ; que ses conclusions à fin de non-lieu doivent donc, en conséquence, être rejetées ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 2° L'étranger qui demande à bénéficier de l'asile a la nationalité d'un pays pour lequel ont été mises en oeuvre les stipulations du 5 du C de l'article 1er de la convention de Genève susmentionnée ou d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr. Un pays est considéré comme tel s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande ; (...) " ; qu'en vertu de l'article L. 723-1 du même code dans sa rédaction alors en vigueur, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides " statue sur les demandes d'asile dont il est saisi. (...) L'office statue par priorité sur les demandes émanant de personnes auxquelles le document provisoire de séjour prévu à l'article L. 742-1 a été refusé ou retiré pour l'un des motifs mentionnés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4, ou qui se sont vu refuser pour l'un de ces motifs le renouvellement de ce document " ; qu'aux termes de l'article L. 742-1 dudit code dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsqu'il est admis à séjourner en France en application des dispositions du chapitre Ier du présent titre, l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile se voit remettre un document provisoire de séjour lui permettant de déposer une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. L'office ne peut être saisi qu'après la remise de ce document au demandeur. Après le dépôt de sa demande d'asile, le demandeur se voit délivrer un nouveau document provisoire de séjour. Ce document est renouvelé jusqu'à ce que l'office statue et, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile, jusqu'à ce que la cour statue " ; que la première phrase de l'article L. 742-3 de ce code, dans sa rédaction alors applicable, précise que " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile " ; et, que le premier alinéa de l'article L. 742-6 de ce code dans sa rédaction alors applicable dispose : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office " ;

4. Considérant que, par une décision du 16 avril 2014, le préfet du Rhône a rejeté la demande d'admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile de M. A...sur le fondement des dispositions précitées du 2° de l'article L. 741-4 du code précité au motif que le Kosovo fait partie depuis le 16 décembre 2013 de la liste des pays d'origine sûrs ; que, toutefois, le 10 octobre 2014, le Conseil d'État a annulé la décision du 16 décembre 2013 du conseil d'administration de l'OFPRA en tant qu'elle inscrit sur la liste des pays d'origine sûrs la République du Kosovo ; que, par suite, M. A...qui a régulièrement formé un recours devant la Cour nationale du droit d'asile contre la décision de l'OFPRA du 25 juillet 2014 rejetant sa demande d'asile, bénéficiait du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de cette cour ; que, dès lors, pour ce motif, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête, les décisions du préfet de l'Ain en date du 20 août 2014 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination doivent être annulées ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les autres conclusions :

6. Considérant, en premier lieu, qu'eu égard à la circonstance que la Cour nationale du droit d'asile a accordé à M. A...le bénéfice de la protection subsidiaire par une décision du 23 décembre 2015, il appartiendra au préfet de l'Ain de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", sur le fondement de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant, en second lieu, que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros à verser au conseil de M. A..., sous réserve, pour ce conseil, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1409594 du tribunal administratif de Lyon en date du 24 mars 2015 est annulé.

Article 2 : Les décisions du préfet de l'Ain du 20 août 2014 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A...et portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination sont annulées.

Article 3 : L'État versera à Me C...la somme de 1 200 euros sous réserve, pour celle-ci, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...ainsi qu'au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 4 février 2016 où siégeaient :

- Mme Verley-Cheynel, président de chambre,

- M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

- Mme Gondouin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 février 2016.

Le rapporteur,

G. GondouinLe président,

G. Verley-Cheynel

La greffière,

M.-T. Pillet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 15LY02319


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY02319
Date de la décision : 25/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme VERLEY-CHEYNEL
Rapporteur ?: Mme Genevieve GONDOUIN
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SELARL BERNARDI ESQUERRE MONTEIRO PROUST

Origine de la décision
Date de l'import : 11/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-02-25;15ly02319 ?
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