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26/11/2015 | FRANCE | N°14LY01447

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 26 novembre 2015, 14LY01447


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mlles Stéphanie et Anaïs F...B...ont demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à leur verser une indemnité d'un montant total de 142 314,36 euros en réparation des préjudices subis à la suite du décès de leur mère, Mme Comte, survenu le 18 juin 2012.

Par un jugement n° 1300669 du 6 février 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mlles Stéphanie et Anaïs F...B...ont demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à leur verser une indemnité d'un montant total de 142 314,36 euros en réparation des préjudices subis à la suite du décès de leur mère, Mme Comte, survenu le 18 juin 2012.

Par un jugement n° 1300669 du 6 février 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 avril 2014, présentée pour Mlles Stéphanie et Anaïs F...B..., domiciliées 296 rue Saint Sorlin à Trévoux (01600), il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1300669 du 6 février 2014 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) de prononcer la condamnation demandée et, subsidiairement, d'ordonner une nouvelle expertise afin de déterminer l'origine de la perforation ulcéreuse dont a été victime Mme Comte ;

3°) de leur allouer la somme de 3 000 euros, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré, pour écarter l'imputabilité de l'ulcère perforé au geste chirurgical de cholécystectomie pratiqué le 16 avril 2012 à la clinique du Parc à Autun, que devait être écartée l'hypothèse d'une perforation iatrogène à l'origine d'un ulcère du duodénum, en raison du délai de survenue de cette perforation, alors que des cas cliniques permettent de contredire l'affirmation de l'expert quant au délai d'apparition d'une perforation ;

- même à supposer que soit retenue l'hypothèse d'une perforation d'un ulcère aigu de stress, l'imputabilité de cet ulcère au geste chirurgical doit être regardée comme établie ;

- l'ensemble des conditions permettant la mise en oeuvre du régime d'indemnisation sur le fondement du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique sont remplies ;

- elles sont fondées à demander l'indemnisation des préjudices subis par leur mère avant son décès ainsi que leurs propres préjudices.

Par un mémoire, enregistré le 19 septembre 2014, présenté pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), il est conclu au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à la réduction du montant des indemnisations sollicitées.

Il soutient que :

- la preuve d'un lien de causalité entre la perforation et l'intervention chirurgicale de cholécystectomie n'est pas rapportée, eu égard aux conclusions de l'expert, qui a considéré que l'hypothèse d'une perforation iatrogène apparaissait peu vraisemblable et que l'hypothèse d'un ulcère aigu de stress, qui aurait pu se manifester en dehors de toute intervention chirurgicale, était l'hypothèse la plus vraisemblable, même si l'intervention a joué un rôle de facteur déclenchant, en affirmant qu'il était difficile d'établir un lien direct et certain entre cholécystectomie et ulcère ;

- c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que l'état de santé de Mme Comte n'était pas la conséquence d'un accident médical ou d'une infection nosocomiale ;

- à titre subsidiaire, si une condamnation devait être prononcée, le montant des indemnisations sollicitées devra être réduit à de plus justes proportions.

Par un mémoire, enregistré le 16 octobre 2014, présenté pour Mlles F...B..., elles concluent aux mêmes fins que leur requête par les mêmes moyens.

Par un mémoire, enregistré le 22 octobre 2015, présenté pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), il conclut aux mêmes fins pour les mêmes motifs et, à titre subsidiaire, à l'organisation d'une mesure d'expertise.

Il soutient, en outre, que la juridiction administrative est incompétente pour connaître de la requête, en vertu des dispositions de l'article L. 1142-20 du code de la santé publique, dès lors que la perforation dont a été victime Mme Comte trouverait son origine dans le geste chirurgical de cholécystectomie, soit directement avec une plaie per opératoire, soit indirectement avec l'ulcère de stress, et que cette intervention de cholécystectomie a été réalisée dans un établissement de santé privé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 5 novembre 2015 :

- le rapport de M. Seillet, président ;

- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public.

1. Considérant que Mme Comte, alors âgée de 49 ans, qui exerçait des fonctions d'agent de service hospitalier dans une maison de retraite privée, et présentait des antécédents d'obésité, d'hypertension artérielle et de diabète, était porteuse, en outre, d'une lithiase vésiculaire, découverte en mai 2011 à l'occasion d'une crise de colique hépatique, à l'origine de plusieurs autres crises, dont l'une l'a conduite à se présenter, le 13 avril 2012, aux urgences du centre hospitalier d'Autun avant son transfert à la clinique du Parc de cette même commune où, le 16 avril 2012, elle a subi une cholécystectomie par coelioscopie sous anesthésie générale ; que si les suites immédiates de cette intervention ont été simples, elle a présenté le lendemain soir, le 17 avril 2012, un état de choc qui a nécessité une nouvelle intervention qui a mis en évidence un épanchement liquidien au siège d'un ulcère perforé au niveau du duodénum ; qu'après son transfert, le 18 avril 2012, dans le service de réanimation du centre hospitalier de Chalon sur Saône, où, le 30 avril 2012, une dégradation clinique et biologique a été constatée, elle a subi une nouvelle intervention qui a mis en évidence un saignement au niveau de l'ulcère ; qu'à la suite d'un autre épisode hémorragique, survenu le 14 mai 2012, Mme Comte a été transférée à l'hôpital de la Croix Rousse à Lyon où des complications hémorragiques et septiques ont entraîné son décès le 18 juin 2012 ; que les filles de la victime, Mlle E... F...B...et Mlle A... F...B..., ont saisi la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CRCI) de Bourgogne qui, après le dépôt, le 20 décembre 2012, du rapport rédigé par l'expert désigné par cette commission, a, par une décision du 4 février 2013, considéré que les préjudices qui lui étaient soumis n'étaient pas en lien direct et certain avec la prise en charge incriminée et n'avaient pas eu des conséquences anormales par rapport à l'état de santé de Mme Comte ou de l'évolution prévisible de cet état ; que Mlles F...B...ont demandé au tribunal administratif de Dijon de mettre la réparation des dommages subis à la suite du décès de leur mère à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au titre de la solidarité nationale ; qu'elles font appel du jugement du 6 février 2014 par lequel cette juridiction a rejeté leur demande ;

2. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire." ; qu'aux termes de l'article L. 1142-20 du même code : " La victime, ou ses ayants droit, dispose du droit d'action en justice contre l'office si aucune offre ne lui a été présentée ou si elle n'a pas accepté l'offre qui lui a été faite./ L'action en indemnisation est intentée devant la juridiction compétente selon la nature du fait générateur du dommage " ;

3. Considérant que pour demander l'indemnisation par l'ONIAM, au titre de la solidarité nationale, des préjudices qu'elles affirment avoir subis en conséquence du décès de leur mère, les requérantes imputent ces préjudices à l'intervention de cholécystectomie par coelioscopie sous anesthésie générale subie par cette dernière, le 16 avril 2012, à la clinique du Parc à Autun ; qu'il est constant que ladite clinique est un établissement privé ; que, dès lors, eu égard à la nature du fait générateur dont se prévalent les requérantes, leurs conclusions relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire, alors même que Mme Comte a également bénéficié, dans plusieurs établissements de santé publics, d'une prise en charge dont elles n'allèguent toutefois pas qu'elle constituerait un fait générateur des préjudices dont elles demandent réparation ; que, dès lors, c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon s'est reconnu compétent pour statuer sur la demande de Mlle E... F...B...et Mlle A... F...B...; que le jugement doit, par suite, être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mlles F...B...devant le tribunal administratif de Dijon ; que, compte tenu de ce qui vient d'être dit, cette demande doit être rejetée comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui au demeurant n'ont été dirigées contre aucune partie à l'instance et sont, dès lors, irrecevables ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 6 février 2014 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mlles F...B...devant le tribunal administratif de Dijon est rejetée comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 3 : Les conclusions de Mlles F...B...tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle E... F...B..., Mlle A... F...B..., à la caisse primaire d'assurance maladie de Saône et Loire et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM).

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2015 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

M. C...et MmeD..., premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 26 novembre 2015.

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N° 14LY01447


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01447
Date de la décision : 26/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : GF AVOCATS -SELARL DE LA GRANGE ET FITOUSSI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-11-26;14ly01447 ?
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