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29/10/2015 | FRANCE | N°13LY02531

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 29 octobre 2015, 13LY02531


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile Doua a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005.

Par un jugement n° 1006165 du 4 juillet 2013, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 septembre 2013, et un mémoire complémentaire, enregistré le 2 septembre 2015, la société

civile Doua représentée par Me Besson, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile Doua a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005.

Par un jugement n° 1006165 du 4 juillet 2013, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 septembre 2013, et un mémoire complémentaire, enregistré le 2 septembre 2015, la société civile Doua représentée par Me Besson, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 4 juillet 2013 ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient :

- que le jugement du tribunal administratif est irrégulier en l'absence d'examen et de réponse au nouveau moyen soulevé dans la note en délibéré et entaché d'insuffisance de motivation ;

- que l'administration ne peut valablement soutenir sans se contredire, d'une part, pour le bar-tabac Le Carnot, que la taxe sur la valeur ajoutée facturée n'étant pas exigible chez son redevable (la société Doua), elle ne peut donner lieu à déduction et, d'autre part, rectifier la taxe sur la valeur ajoutée collectée chez ledit redevable au motif qu'elle serait devenue exigible ; qu'en application de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, cette prise de position sur une situation de fait lui est opposable ;

- que les deux factures d'honoraires émises par la société Doua au titre de prestations de services pour le bar-tabac Le Carnot n'ont fait l'objet d'aucun règlement et l'administration fiscale n'ayant pas démontré que les chèques émis par son client lui ont effectivement été remis, la taxe sur la valeur ajoutée n'est pas exigible.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 janvier 2014, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient :

- que le jugement n'est entaché d'aucune irrégularité ;

- que la société Doua ne peut se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales de la prise de position de l'administration lors de l'examen du crédit de la taxe sur la valeur ajoutée du bar-tabac Le Carnot que le vérificateur n'a pas fait mention des chèques, que le rejet des déductions de la taxe sur la valeur ajoutée était fondée sur un autre motif tenant à l'absence de tout élément de preuve de la consistance et la réalité des prestations facturées par la société et que fait défaut la condition de rehaussement d'une imposition antérieure requise par ce texte ;

- que la société Doua a facturé des honoraires pour des prestations au bar-tabac Le Carnot pour 47 361,60 euros en 2004 et 15 888 euros en 2005 et deux chèques ont été émis le 23 septembre 2005 pour le chèque n° 0000752 et le 31 mars 2005 pour le chèque n° 6071300, comme l'indiquent les mentions manuscrites portées sur les factures ; que, s'agissant de la première de ces deux factures, la déclaration n° 2065 relative à l'exercice clos le 31 décembre 2004 souscrite par la Société Doua mentionne des chiffres d'affaires et de taxe sur la valeur ajoutée correspondant au montant exact des prestations porté sur la facture, laquelle précise le moyen et la date du règlement ; que, s'agissant de la facture du 31 mars 2005, une copie du chèque a été remise par l'exploitante de la société Doua ; que dans les deux cas, l'intéressée a indiqué que le Bar Le Carnot avait remis les chèques à la société Doua, lesquels n'avaient pas fait l'objet d'une présentation en banque ; que la remise des chèques suffit à constituer l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 8 octobre 2015 :

- le rapport de Mme Bourion, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Chevalier-Aubert, rapporteur public,

- et les observations de Me Besson pour la société civile Doua.

1. Considérant que la société civile Doua facturait des prestations de service à Mme A..., laquelle, outre ses fonctions de gérante de cette société, exploitait à titre individuel un fonds de commerce de bar-tabac à Saint-Etienne, dans le cadre d'un contrat de mandat ; que la société civile Doua a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005 à l'issue de laquelle, l'administration a rappelé, sur le fondement de la procédure contradictoire, la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur deux factures datées du 31 décembre 2004 et du 31 mars 2005, qui n'avait pas été portée sur les déclarations CA3 souscrites par la société au motif que la taxe était exigible ; que la société civile Doua relève appel du jugement du 4 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés du chef de ces rectifications ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, que lorsque le juge administratif est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et au prononcé des conclusions du rapporteur public, d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il lui appartient dans tous les cas d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision ; que, s'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré, il n'est tenu de le faire à peine d'irrégularité de sa décision que si cette note contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office ;

3. Considérant que la note en délibéré que la société civile Doua a présenté le 20 juin 2013, a été enregistrée au greffe du tribunal administratif et versée au dossier ; qu'en estimant que cette note ne justifiait pas la réouverture de l'instruction et en se bornant à la viser sans prendre en compte son contenu pour rendre son jugement, le tribunal administratif n'a pas méconnu son office ;

4. Considérant, en second lieu, que le jugement attaqué a répondu au moyen tiré du non encaissement des chèques ; que, dans ces conditions, le jugement était suffisamment motivé alors même qu'il ne répondait pas à tous les arguments présentés par la société requérante ;

Sur le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 269 du code général des impôts : " 2. La taxe est exigible : (...) / c) Pour les prestations de services autres que celles visées au b bis, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en ce qui concerne le paiement par chèque, le contribuable est réputé pouvoir disposer des sommes qui lui sont versées par ses clients dès la remise des chèques ; que, par suite, cette remise constitue l'encaissement au sens des dispositions précitées du c) du 2 de l'article 269 du code général des impôts et que c'est à cette date que la taxe sur la valeur ajoutée est exigible, y compris dans le cas où les chèques n'ont pas fait l'objet d'une remise en banque ;

6. Considérant que, si pour justifier le rappel de la taxe sur la valeur ajoutée collectée portée sur la facture d'un montant de 47 361,60 euros délivrée à Mme A...le 31 décembre 2004 , l'administration fiscale invoque la mention manuscrite d'un paiement par chèque avec sa référence et la date du paiement, il est constant que le numéro indiqué correspond à un chèque daté du 26 septembre 2005 d'un montant de 39 600 euros, émis par l'intéressée au bénéfice de la Seita ; que ni les déclarations que Mme A...aurait faites dans le cadre d'une précédente instance la concernant devant le tribunal administratif de Lyon, ni la circonstance que le chiffre d'affaires correspondant à la facture susmentionnée a été porté sur la déclaration fiscale n° 2065 souscrite par la société civile Doua le 10 octobre 2005 pour l'imposition des résultats de l'exercice clos en 2004 ne sont de nature à établir que cette facture a effectivement donné lieu à la remise à la société civile Doua d'un chèque correspondant au montant figurant sur la facture, valant encaissement au sens des dispositions précitées ; que, dans ces conditions, la société Doua est fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a estimé que le montant facturé avait été encaissé et que la taxe sur la valeur ajoutée collectée portée sur cette facture était devenue exigible ;

7. Considérant, en revanche, que l'administration fiscale, pour justifier le rappel de la taxe sur la valeur ajoutée collectée portée sur la facture du 31 mars 2005 d'un montant de 15 888 euros émise par MmeA..., produit la copie d'un chèque numéroté 6071300 de même montant émis par elle à l'ordre de la société civile Doua ; qu'ainsi, la société requérante ne peut soutenir qu'aucun élément de preuve de la remise de ce chèque n'a été produite et n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a estimé que le montant de la facture avait été encaissé et par suite à contester l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée collectée portée sur cette facture ;

8. Considérant enfin que, si la société requérante soutient que l'administration fiscale a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal, en relevant à l'issue d'une vérification sur place du crédit de taxe sur la valeur ajoutée détenu par Mme A...au 30 juin 2005, que la taxe grevant les factures n'était pas déductible au motif que les factures étaient restées impayées, elle ne peut utilement invoquer l'opinion émise lors de ce contrôle sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales dès lors que la procédure d'imposition dont elle a été l'objet n'a pas conduit au rehaussement d'une imposition antérieure mais à l'établissement d'une imposition primitive à la taxe sur la valeur ajoutée ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Doua est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2004 ;

Sur les frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 750 euros, à verser à la société Doua, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La société civile Doua est déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2004.

Article 2 : Le jugement n° 1006165 du tribunal administratif de Lyon du 4 juillet 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 750 euros à la société civile Doua au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société civile Doua est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile Doua et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2015, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

M. Pourny, président-assesseur,

Mme Bourion, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 octobre 2015.

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N° 13LY02531


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY02531
Date de la décision : 29/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-02-05 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Fait générateur.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Isabelle BOURION
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : AKTHIS SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-10-29;13ly02531 ?
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