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27/08/2015 | FRANCE | N°14LY03312

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 27 août 2015, 14LY03312


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté en date du 31 octobre 2013 par lequel le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a prescrit l'obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours et a désigné un pays de destination.

Par un jugement n° 1400451 du 16 avril 2014, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du préfet de l'Ain du 31 octobre 2013 en tant qu'il rend possible l

'éloignement de Mme A... à destination d'un pays différent du pays de renvoi de son ép...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté en date du 31 octobre 2013 par lequel le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a prescrit l'obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours et a désigné un pays de destination.

Par un jugement n° 1400451 du 16 avril 2014, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du préfet de l'Ain du 31 octobre 2013 en tant qu'il rend possible l'éloignement de Mme A... à destination d'un pays différent du pays de renvoi de son époux.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 octobre 2014, Mme A..., représenté par Me Robin avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 16 avril 2014 tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler l'arrêté du 31 octobre 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an renouvelable, dans le délai d'un mois à compter du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, en application de l'article L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 300 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Mme A...soutient :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- que la décision est intervenue au terme d'une procédure irrégulière, faute pour le préfet de justifier d'avoir saisi le directeur général de ladite agence alors qu'elle faisait état de circonstances exceptionnelles humanitaires tirées de son appartenance à la communauté Rom ;

- qu'elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que la préfecture ne justifie pas, par la seule référence à la note du consulat du 11 juin 2013, de la disponibilité de son traitement en Serbie, que son état est en lien avec l'oppression dont elle a été victime en Serbie et qu'en tant que Rom, elle ne pourra accéder à des soins ni en Serbie ni au Kosovo ;

- qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, compte tenu de la double nationalité du couple, de l'état de santé de sa fille Arijana, de leur intégration sur le territoire national, de la scolarité et de la prise en charge dont leurs enfants bénéficient ; que pour les mêmes motifs, elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- que la décision méconnaît l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle aurait dû bénéficier d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant malade.

En ce qui concerne la décision l'obligeant à quitter le territoire français :

- qu'elle est illégale en raison de l'illégalité entachant la décision par laquelle le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

- qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 8 la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle dès lors que la décision attaquée entraîne nécessairement une séparation des enfants de leurs parents.

Le préfet de l'Ain, à qui la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 septembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le rapporteur public a été, sur sa proposition, dispensé de prononcer ses conclusions à l'audience en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bourion,

- les observations de MeB..., substituant Me Robin, pour MmeA....

1. Considérant que Mme C...A..., née le 5 septembre 1977, de nationalité serbe, est entrée en France le 10 mars 2009 ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 24 juin 2010 de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides confirmée, le 31 janvier 2011, par la Cour nationale du droit d'asile ; que par arrêté du 15 février 2011, le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français ; qu'à la suite du rejet de sa demande de réexamen, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en tant qu'étranger malade ; que, par arrêté du 27 février 2013, le préfet de l'Ain a refusé de faire droit à sa demande, lui a prescrit l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être renvoyée d'office ; que, par jugement du 13 juin 2013, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays de destination ; qu'en exécution de ce jugement, le préfet de l'Ain a réexaminé la situation de l'intéressée et a, par arrêté du 31 octobre 2013, refusé de délivrer à Mme A...un titre de séjour, lui a prescrit l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être renvoyée d'office ; que, par un jugement du 16 avril 2014, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du préfet de l'Ain du 31 octobre 2013 en tant qu'il rend possible l'éloignement de Mme A... à destination d'un pays différent du pays de renvoi de son époux ; que Mme A... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation des décisions lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l' agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). Le médecin de l'agence régionale de santé (...) peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. Quand la commission médicale régionale a été saisie dans les conditions prévues à l'article R. 313-26, l'avis mentionne cette saisine. / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...). " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Ain, avant de prendre la décision litigieuse, a sollicité à nouveau l'avis du médecin de l'agence régionale de santé sur l'état de santé de la requérante ; que, pour s'écarter de l'avis rendu par le médecin de l'agence régionale de santé le 16 juillet 2013 et opposer un refus à sa demande de titre de séjour, le préfet de l'Ain, que Mme A... avait directement informé de l'état de stress post-traumatique qu'elle présente ainsi que de son traitement, s'est appuyé sur une note de l'ambassade de France en Serbie selon laquelle le traitement qui lui est prescrit est facilement disponible, que toutes les maladies peuvent être prises en charge et que l'accès aux soins est accessible, y compris aux minorités les plus vulnérables ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des certificats médicaux produits, que la maladie dont souffre Mme A..., qui au demeurant s'est vu refuser le bénéfice de l'asile à deux reprises par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, est liée à des violences subies dans son pays d'origine et qu'un retour dans ce pays risque de provoquer une aggravation de son état de santé ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313­11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que Mme A...soutient que la décision est intervenue au terme d'une procédure irrégulière, faute pour le préfet d'avoir saisi pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé alors qu'elle faisait état de circonstances exceptionnelles tirées de son appartenance à la communauté rom ; que toutefois, son origine Rom et la seule différence de nationalité avec son époux, ressortissant kosovar, ne peuvent être regardées comme constituant des éléments relatifs à sa situation personnelle susceptibles d'être qualifiés de circonstances humanitaires exceptionnelles au sens des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite le moyen tiré du défaut de consultation du directeur général de l'agence régionale de santé doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, que, par les mêmes motifs que ceux retenus par le juge de première instance, qu'il y a lieu pour la cour d'adopter, les moyens tirés de ce que la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, doivent être écartés ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, que Mme A...ne peut utilement invoquer la méconnaissance de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne constitue pas le fondement de sa demande ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que, compte tenu de ce qui précède, la décision refusant à Mme A...un titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité ; que, dès lors, Mme A...n'est pas fondée à soulever, par voie d'exception, l'illégalité de ladite décision à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

8. Considérant, en troisième et dernier lieu, que, par les mêmes motifs que ceux retenus par le juge de première instance, qu'il y a lieu pour la cour d'adopter, les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, doivent être écartés ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par MmeA..., n'appelle pas de mesures d'exécution ; que ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent, dès lors, être rejetées ;

Sur les frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens :

10. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante ou son conseil du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par Mme A...doivent, dès lors, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre de l'intérieur. Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2015 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Bourion, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 août 2015.

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N° 14LY03312


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY03312
Date de la décision : 27/08/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Isabelle BOURION
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : SCP ROBIN VERNET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/09/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-08-27;14ly03312 ?
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