Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 22 novembre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit.
Par un jugement n° 1308478 du 27 mars 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 mai 2014, M.B..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 27 mars 2014 ;
2°) d'annuler les décisions litigieuses ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " ou de procéder au réexamen de sa situation à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au bénéfice du conseil de M. B...en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
-la décision portant refus de titre de séjour est signée par une autorité incompétente ;
-cette décision a été prise au terme d'une procédure irrégulière, en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;
-la décision est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
-elle est intervenue en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
-elle est intervenue en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
-le préfet s'est estimé à tort lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile ;
-la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par exception de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
-elle est intervenue en violation de l'article L. 511-4-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
-la décision fixant le pays de destination est illégale par exception de celles lui refusant le droit au séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
-elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juin 2015, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 juin 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Bouissac, présidente.
1. Considérant que M.B..., ressortissant de la République Démocratique du Congo, est entré en France le 20 novembre 2011 ; qu'il a présenté une demande d'asile, qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 24 décembre 2012, puis par la Cour nationale du droit d'asile, le 15 juillet 2013 ; qu'ayant bénéficié d'un titre de séjour en raison de son état de santé valable du 7 janvier 2013 au 6 juillet 2013, il en a sollicité le renouvellement ; que, par décisions du 22 novembre 2013, le préfet du Rhône a opposé un refus à cette demande qu'il a assorti d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que M. B... relève appel du jugement du 27 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;
Sur le refus de séjour :
2. Considérant que Mme E...A..., directrice de la citoyenneté, de l'immigration et de l'intégration de la préfecture du Rhône, qui a signé la décision attaquée, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet du Rhône en date du 14 janvier 2013, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture du Rhône, à l'effet notamment de signer les décisions de refus de délivrance de titre de séjour ; que la circonstance que la signature figurant sur l'arrêté en litige est similaire à celles apposées sur d'autres documents de la préfecture du Rhône mentionnant des signataires différents n'est pas de nature, par elle-même, à remettre en cause l'identité du signataire de l'arrêté en litige ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision contestée manque en fait ;
3. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de la décision contestée que le préfet du Rhône a procédé à un examen attentif et circonstancié de la situation de M.B... ; qu'à cet égard, la référence aux décisions de l'Office français de protection de réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, indispensable à la motivation de cette décision en tant qu'elle statue sur le fondement de l'article L. 314-11 8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers, ne saurait par elle-même révéler l'erreur de droit et l'erreur manifeste d'appréciation alléguées ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général (...) " ;
5. Considérant que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;
6. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
7. Considérant que, par avis du 11 septembre 2013, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de l'intéressé nécessitait des soins dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il n'existe pas de traitement approprié dans son pays d'origine et que les soins nécessités par son état présentent un caractère de longue durée ; que le préfet du Rhône, qui n'était pas lié par cet avis, a toutefois estimé que les soins que l'état de santé de M. B...requiert étaient disponibles en République Démocratique du Congo, au vu notamment des éléments recueillis auprès de l'ambassade de France en République Démocratique du Congo ; que le seul certificat médical daté du 21 mai 2014 produit par M. B...indiquant qu'il souffre de troubles néphrologiques, qu'il poursuit des séances de kinésithérapie à titre pulmonaire et prend des antalgiques pour des douleurs résultant de ses interventions chirurgicales mais ne précise pas la nature du traitement administré en France ne permet pas d'établir qu'il ne pourrait bénéficier des soins appropriés à son état de santé en République Démocratique du Congo ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour litigieux méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
8. Considérant que M. B...n'étant pas en droit, eu égard à ce qui précède, d'obtenir la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale ", le préfet du Rhône n'était pas tenu, avant de lui refuser ce titre, de saisir la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
9. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., entré irrégulièrement en France, à la date déclarée du 20 novembre 2011, ne se prévaut d'aucune attache familiale sur le territoire national ; qu'il a passé la majeure partie de sa vie en République Démocratique du Congo, où résident son épouse et ses quatre enfants ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette mesure a été prise ; que cette décision n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B...;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;
12. Considérant que M. B...s'étant vu refuser, par décision du 22 novembre 2013, la délivrance d'un titre de séjour, il entrait dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;
14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...)10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; " ;
15. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux retenus précédemment, la décision du préfet du Rhône obligeant M.B... à quitter le territoire français n'a pas méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
16. Considérant que, pour les motifs exposés ci-dessus, le moyen tiré de ce que la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
Sur le pays de destination :
17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision rejetant sa demande de titre de séjour et de la décision l'obligeant à quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination ;
18. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
19. Considérant que si M. B...fait valoir qu'il a été emprisonné et a subi de mauvais traitements en République Démocratique du Congo en raison de son adhésion à un parti politique dénommé " Bundu Dia Kongo ", et qu'ayant favorisé l'évasion d'un de ses collaborateurs, il encourt des risques pour sa vie et sa sécurité en cas de retour dans ce pays, il n'apporte pas d'éléments permettant d'établir qu'il serait exposé, en cas de retour en République démocratique du Congo, à un risque réel, personnel et actuel de traitements inhumains et dégradants au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de ces stipulations doit être écarté ;
20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 7 juillet 2015 à laquelle siégeaient :
Mme Bouissac, présidente,
M. Levy Ben-Cheton, premier conseiller,
Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 août 2015.
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N° 14LY01547