Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...D..., représentée par sa curatrice Mme C...D..., a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2008, pour des montants de 23 695 euros en droits, et de 3 507 euros en intérêt de retard, soit pour un montant global de 27 202 euros, selon avis de mise en recouvrement du 24 mai 2012.
Par un jugement n° 1201902 du 19 novembre 2013, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 14 janvier 2014, le 9 mai 2014 et le 25 juillet 2014, Mme B...D..., représentée par sa curatrice Mme C...D..., représentée par MeE..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 19 novembre 2013 ;
2°) de la décharger de ces impositions et des pénalités y afférentes à proportion de la réduction de la base d'imposition de 201 085,09 euros correspondant aux dépenses d'amélioration de son bien ;
3°) de lui accorder les intérêts moratoires légaux ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme D... soutient que :
- elle était en droit, en application de l'article 150 VB II 4° du code général des impôts, de majorer le prix d'acquisition de son bien du coût des travaux entrepris qui :
. constituent des dépenses d'amélioration du bien, formant une opération globale unique après l'acquisition de la maison pour permettre de mettre cette maison dans des normes d'habilité modernes, chacune des opérations étant indissociable du projet de réhabilitation ;
. sont suffisamment justifiés, aucune disposition n'imposant la production de factures comportant les mentions obligatoires de l'article 289 du code général des impôts et la justification du paiement des factures ;
. ont été préalablement acceptés puis contrôlés par le juge des tutelles ;
- elle justifie, s'agissant du montant des dépenses à prendre en compte, après déduction de deux dépenses redondantes, d'un montant de travaux de 204 200,68 euros, dont 201 085,09 euros de dépenses d'amélioration, l'écart correspondant aux factures 47 et 48 qui ne devaient pas être prises en compte eu égard à leur objet ;
- elle est bien fondée à invoquer la doctrine administrative - instruction du 14 janvier 2004 8 M-1-04 fiche 5 N° 3 à 6 - qui vise les dépenses permettant de remettre en état une habitation acquise, dont il est justifié qu'elle doit être rénovée pour lui permettre de répondre à des conditions d'habitabilité moderne.
Par des mémoires en défense enregistrés le 11 avril 2014 et le 19 juin 2014 le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions aux fins de condamnation de l'Etat au versement d'intérêts moratoires.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.
1. Considérant que Mme B...D..., représentée par sa curatrice légale, Mme C...D..., sa mère, a acquis le 20 décembre 1997 un bien immobilier, sis 2 chemin de Rozé à Bergonne dans le Puy-de-Dôme, pour un prix de 198 184 euros ; qu'elle a revendu ce bien à ses parents le 27 août 2008 pour 450 000 euros après avoir procédé à d'importants travaux ; qu'à l'occasion de cette cession, après avoir ajouté au prix d'acquisition du bien le montant des travaux qu'elle avait fait réaliser, l'intéressée a déclaré une plus value imposable de 14 850 euros ; qu'à la suite d'un contrôle sur pièces, ayant estimé que certains travaux ne pouvaient être pris en compte et que certains justificatifs n'étaient pas suffisants, l'administration fiscale lui a adressé le 17 novembre 2011 une proposition de rectification portant sur le calcul de la plus value-immobilière, en recalculant celle-ci en retenant comme montant des travaux une somme forfaitaire égale à 15% du prix d'acquisition, soit 29 728 euros ; que Mme D... ayant présenté des observations le 6 décembre 2011 et le 6 février 2012, l'administration fiscale a maintenu sa proposition de rectification et mis en recouvrement le 24 mai 2012 la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu pour un montant de 23 695 euros en droits et 3 507 euros en intérêts de retard ; que Mme D... a alors présenté une réclamation préalable auprès de l'administration fiscale qui l'a rejetée ; que Mme D... relève appel du jugement du 19 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette cotisation supplémentaire et des pénalités y afférentes ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 150 V du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " La plus ou moins-value brute réalisée lors de la cession de biens ou droits mentionnés aux articles 150 U à 150 UC est égale à la différence entre le prix de cession et le prix d'acquisition par le cédant. " ; qu'aux termes de l'article 150 VB du même code, dans sa rédaction alors applicable : " I. - Le prix d'acquisition est le prix effectivement acquitté par le cédant, tel qu'il a été stipulé dans l'acte. (...)/ II. - Le prix d'acquisition est, sur justificatifs, majoré : (...) 4° Des dépenses de construction, de reconstruction, d'agrandissement ou d'amélioration, supportées par le vendeur et réalisées par une entreprise depuis l'achèvement de l'immeuble ou son acquisition si elle est postérieure, lorsqu'elles n'ont pas été déjà prises en compte pour la détermination de l'impôt sur le revenu et qu'elles ne présentent pas le caractère de dépenses locatives. Lorsque le contribuable, qui cède un immeuble bâti plus de cinq ans après son acquisition, n'est pas en état d'apporter la justification de ces dépenses, une majoration égale à 15 % du prix d'acquisition est pratiquée. (...) " ;
3. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si les dépenses effectuées sur un bien immobilier constituent des dépenses de construction, de reconstruction, d'agrandissement ou d'amélioration ; que lorsqu'un immeuble est ancien ou vétuste et qu'il nécessite une remise en état, la circonstance que des travaux sont entrepris pour le réhabiliter ne fait pas obstacle à ce que l'administration fiscale distingue, au sein des dépenses engagées dans le cadre de cette rénovation, les dépenses d'amélioration du bien, des dépenses d'entretien, lorsque ces dernières dépenses sont dissociables des premières ; qu'en l'espèce, Mme D... fait valoir que l'ensemble des dépenses qu'elle a comptabilisées, à l'exception des dépenses figurant sur les justificatifs numérotés 47 et 48 dont elle reconnait qu'elles n'auraient pas dû être comptabilisées compte tenu de leur nature, se rapportent à une opération d'ensemble de rénovation de son bien et que ces dépenses doivent, de ce fait, être qualifiées de dépenses d'amélioration de son bien ; qu'elle produit à ce titre deux courriers, émanant d'artisans ayant réalisé une partie des travaux et de son architecte conseil, datés respectivement du 5 novembre 2012 et du 24 septembre 2013, qui, en des termes généraux, soulignent l'état de vétusté dans lequel se trouvait le bien lors de son achat et le fait que les travaux entrepris, qui se sont déroulés entre 1998 et 2002 pour la plupart, certains d'entre eux ayant été réalisés en 2007, ont permis de le rénover pour le rendre habitable ; qu'aucun descriptif de la maison avant et après travaux, ni aucun plan d'ensemble ne permet d'apprécier, précisément, dans leur globalité, la nature et l'ampleur des travaux entrepris ; que, dans ces conditions, la seule circonstance que l'état de la maison nécessitait qu'elle soit rénovée ne saurait suffire à qualifier l'ensemble des travaux entrepris de dépenses d'amélioration du bien ; que, par suite, l'administration fiscale a pu, à bon droit examiner pour les différentes dépenses qui lui étaient présentées, si elles satisfaisaient aux conditions sus rappelées du 4° du II de l'article 150 VB du code général des impôts ou si elles étaient indissociables de dépenses répondant à ces conditions ;
4. Considérant que les dispositions précitées de l'article 150 V du code général des impôts impliquent que le contribuable qui entend en bénéficier soit en mesure de justifier tant de la nature précise des dépenses comptabilisées que le fait qu'il les a effectivement supportées, c'est-à-dire acquittées ; qu'à ce titre, c'est à bon droit que l'administration fiscale a écarté l'ensemble des dépenses pour lesquelles Mme D... n'a produit qu'un devis, qu'un courrier ou qu'un état de situation de travaux ne permettant pas, à eux seuls, d'établir qu'ils se rapportaient à des dépenses effectivement supportées par Mme D... ; qu'il en va ainsi des pièces numérotées n° 2, 4, 8, 12, 14 à 17, 23 à 30, 33, 35, 38, 42, 43, 45 et 46 ; que c'est également à bon droit que l'administration a écarté les factures numérotées n° 1, 3, 34, 36, 39, 41, 44, 47 et 48 pour lesquelles aucune pièce du dossier, et en particulier pas la procédure de certification annuelle des comptes de Mme D... par le juge des tutelles, qui fait seulement apparaître un montant total de dépenses pour l'entretien de la propriété, ne permettait d'établir qu'elles avaient été acquittées ; qu'enfin, ainsi que l'a reconnu MmeD..., les factures numérotées 47 et 48, qui correspondent à l'achat d'une machine à bois et de matériel de cuisine, ne pouvaient pas être prises en compte eu égard à leur objet ;
5. Considérant que Mme D... n'a produit en dehors, d'une part, des factures qui décrivent de façon sommaire les travaux et, d'autre part, des deux attestations très générales mentionnées au point 3 décrivant un état de vétusté de la maison avant la réalisation des travaux, aucun document permettant d'apprécier l'état initial de la maison et la consistance exacte de ces travaux ; que, dans ces conditions, compte tenu des mentions portées sur les factures numérotées, dans le cadre du présent litige, n° 9, 10, 13, 18, 20, 21, 22, 31, 32 et 40, les travaux visés sur lesdites factures, portant respectivement sur la pose de carrelage et de parquets, sur de la plomberie et sur la pose de volets doivent être regardés comme ayant été engagés en vue du maintien du bien en état et afin d'en permettre l'usage normal ; que la requérante ne démontrant pas que ces travaux excéderaient l'entretien normal d'un bâtiment ancien, les dépenses s'y rapportant ne sauraient être qualifiés de dépenses d'amélioration ;
6. Considérant que seuls les travaux relatifs à l'aménagement de la piscine, justifié par les factures numérotés n° 5, 6, 7, ceux relatifs à la reprise des abords extérieurs de la propriété, établis par la facture numérotée n° 11, ceux relatifs à la pose de fenêtres en double vitrage alors qu'il n'existait qu'un simple vitrage jusqu'alors, visés par la facture n° 37 et enfin les travaux portant sur les installations sanitaires, justifiés par la facture n°19, dont il est suffisamment établi par les pièces versées au dossier qu'elles ont été acquittées, sont relatifs à des dépenses d'amélioration au sens du 4° du II précité de l'article 150 VB du code général des impôts ; que le montant de l'ensemble de ces dépenses d'amélioration supportées par Mme D... s'élève à 32 512 euros ; que, par suite, Mme D... est fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a limité à 29 727 euros, correspondant à 15 % du prix d'acquisition du bien, les travaux à prendre en compte pour déterminer le montant de la plus-value à retenir ;
En ce qui concerne la doctrine :
7. Considérant que Mme D... se prévaut, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction du 14 janvier 2004 8-M-A... -04 ; que toutefois cette instruction n'ajoute rien à la loi fiscale ;
Sur les intérêts moratoires demandés :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : " Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés " ;
9. Considérant que les intérêts moratoires, prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, sont, en vertu des dispositions de l'article R. 208-1 du même code, " payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts " ; qu'il n'existe aucun litige né et actuel entre le comptable et la requérante au sujet de ces intérêts ; que, dès lors, les conclusions de la requête qui tendent au versement par l'Etat d'intérêts moratoires sont sans objet et, par suite, irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme D... et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu de Mme D... au titre de l'année 2008 est réduite d'une somme de 2 785 euros correspondant au montant des travaux d'amélioration du bien non pris en compte par l'administration fiscale.
Article 2 : Mme D... est déchargée, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre de l'année 2008, correspondant à la réduction de base définie à l'article 1er.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 19 novembre 2013 est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Mme D... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié Mme B...D... et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 23 juin 2015, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Bouissac, président-assesseur,
Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 juillet 2015.
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N° 14LY00106
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