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02/07/2015 | FRANCE | N°15LY00023

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 02 juillet 2015, 15LY00023


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... G...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du préfet du Puy-de-Dôme du 28 janvier 2014 lui refusant son admission provisoire au séjour au titre de l'asile et les décisions du même préfet du 22 mai 2014 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai.

Par un jugement nos 1401269 - 140

1272 du 14 octobre 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... G...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du préfet du Puy-de-Dôme du 28 janvier 2014 lui refusant son admission provisoire au séjour au titre de l'asile et les décisions du même préfet du 22 mai 2014 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai.

Par un jugement nos 1401269 - 1401272 du 14 octobre 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes.

Mme A... B...épouse G...et Mme C... E...épouse G...ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions du préfet du Puy-de-Dôme du 28 janvier 2014, leur refusant leur admission provisoire au séjour au titre de l'asile.

Par un jugement nos 1401270 - 1401271 du 14 octobre 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leurs demandes.

Mme A... B...épouse G...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions du préfet du Puy-de-Dôme du 22 mai 2014 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1401647 du 17 novembre 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Mme C... E...épouse G...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions du préfet du Puy-de-Dôme du 22 mai 2014, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1401646 du 17 novembre 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 15LY00023 le 5 janvier 2015, M. F... G..., représenté par Me D...H..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 14 octobre 2014 ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte, et dans l'attente, de lui délivrer un récépissé avec autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, dont 13 euros de droit de plaidoirie, à son profit, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant refus d'admission provisoire au séjour :

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, l'Albanie ne pouvant pas être considérée comme un pays sûr ;

S'agissant de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

- elle méconnaît les stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 39 de la directive 2005/85 CE du Conseil du 1er décembre 2005 ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 39 de la directive 2005/85 CE du Conseil du 1er décembre 2005 ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale du fait de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 39 de la directive 2005/85 CE du Conseil du 1er décembre 2005 ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par ordonnance du 28 mai 2015, l'affaire a été dispensée d'instruction.

M. G... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 novembre 2014.

II. Par une requête, enregistrée sous le n° 15LY00025 le 5 janvier 2015, Mme A... B... épouse G...et Mme C... E...épouseG..., représentées par Me D...H..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 14 octobre 2014 ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme, à titre principal, de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour en qualité de demandeur d'asile, dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de leur situation, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte, et dans l'attente, de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros, au profit de leur conseil, en application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros, au profit de Mme C... G..., en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que les décisions portant refus d'admission provisoire au séjour sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation, l'Albanie ne pouvant pas être regardée comme un pays d'origine sûr.

Par ordonnance du 28 mai 2015, l'affaire a été dispensée d'instruction.

Par décisions du 25 novembre 2014, le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale a été accordé à Mme A... G...et son bénéfice a été refusé à Mme C...G....

III. Par une requête, enregistrée sous le n° 15LY00487 le 10 février 2015, Mme A... B... épouseG..., représentée par Me D...H..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 17 novembre 2014 ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou à défaut un récépissé de dépôt de demande d'asile, dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte, et dans l'attente, de lui délivrer un récépissé avec autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros dont 13 euros de droit de plaidoirie, à son profit, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle invoque, à l'appui de ses conclusions, les mêmes moyens que ceux, énoncés ci-avant, soulevés par son époux à l'appui de sa propre requête contre les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi.

Par ordonnance du 28 mai 2015, l'affaire a été dispensée d'instruction.

Mme G... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 janvier 2015.

IV. Par une requête, enregistrée sous le n° 15LY00488 le 10 février 2015, Mme C... E... épouseG..., représentée par Me D...H..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 17 novembre 2014 ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou à défaut un récépissé de dépôt de demande d'asile, dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte, et dans l'attente, de lui délivrer un récépissé avec autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros dont 13 euros de droit de plaidoirie, à son profit, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle invoque, à l'appui de ses conclusions, les mêmes moyens que ceux, énoncés ci-avant, soulevés par son fils et sa belle-fille à l'appui de leurs propres requêtes dirigées contre les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi.

Par ordonnance du 28 mai 2015, l'affaire a été dispensée d'instruction.

Mme G... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 janvier 2015.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive n° 2005/85 CE du Conseil du 1er décembre 2005 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pruvost ;

1. Considérant que M. F... G..., né le 14 novembre 1974, son épouse, Mme A...G..., née le 27 mars 1977 et sa mère, Mme C...G..., née le 1er mai 1951, tous trois de nationalité albanaise, sont arrivés en France le 1er décembre 2013, selon leurs déclarations ; qu'ils ont présenté une demande d'asile ; que, par décisions du 28 janvier 2014, le préfet a refusé de les admettre provisoirement au séjour au titre de l'asile ; que leurs demandes d'asile ont été rejetées par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 10 avril 2014 qu'ils ont contestées devant la Cour nationale du droit d'asile ; que, par arrêtés du 22 mai 2014, le préfet du Puy-de-Dôme leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour, a assorti chacune des décisions de refus d'admission au séjour d'une obligation de quitter le territoire français sous trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être éloignés ; que, par les requêtes susvisées, M.G..., son épouse et sa mère relèvent appel des jugements, en date du 14 octobre et du 17 novembre 2014, par lesquels le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions susmentionnées ; que ces requêtes sont présentées par les membres d'une même famille et présentent à juger des questions similaires ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;

Sur la légalité des décisions portant refus d'admission provisoire au séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 722-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'office est administré par un conseil d'administration (...). Le conseil d'administration fixe les orientations générales concernant l'activité de l'office ainsi que, dans les conditions prévues par les dispositions communautaires en cette matière, la liste des pays considérés au niveau national comme des pays d'origine sûrs, mentionnés au 2° de l'article L. 741-4. (...) " ; et qu'aux termes de l'article L. 741-4 du même code : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) / 2° L'étranger qui demande à bénéficier de l'asile a la nationalité d'un pays pour lequel ont été mises en oeuvre les stipulations du 5 du C de l'article 1er de la convention de Genève susmentionnée ou d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr. Un pays est considéré comme tel s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande ; (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, si le préfet peut refuser l'admission provisoire au séjour à l'étranger demandeur d'asile qui a la nationalité d'un pays considéré comme sûr, il doit néanmoins procéder à l'examen particulier de sa situation ;

3. Considérant que par une décision de son conseil d'administration du 16 décembre 2013, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a inscrit l'Albanie sur la liste des pays d'origine sûrs arrêtée en application de l'article L. 722-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le 28 janvier 2014, date à laquelle le préfet du Puy-de-Dôme a décidé de leur refuser l'admission provisoire au séjour le temps de l'instruction de leurs demandes d'asile, sur le fondement du 2° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les requérants, de nationalité albanaise, entraient dans le champ d'application de ces dispositions ; qu'en se bornant à faire valoir de simples généralités sur la situation de corruption qui prévaudrait en Albanie, ils n'établissent pas que le préfet du Puy-de-Dôme, qui a pris cette décision après examen particulier de la situation personnelle des intéressés, aurait commis une erreur d'appréciation ;

Sur la légalité des décisions portant refus de délivrance de titre de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...) " ; qu'aux termes de l'article 13 de la même convention : " Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles " ; et qu'aux termes de l'article 39 de la directive n° 2005/85 CE du Conseil du 1er décembre 2005 : " 1. Les Etats membres font en sorte que les demandeurs d'asile disposent d'un droit à un recours effectif devant une juridiction contre les actes suivants : a) une décision concernant leur demande d'asile (...) 3. Les Etats membres prévoient le cas échéant les règles découlant de leurs obligations internationales relatives : a) à la question de savoir si le recours prévu en application du paragraphe 1 a pour effet de permettre aux demandeurs d'asile de rester dans l'Etat membre concerné dans l'attente de l'issue du recours ; b) à la possibilité d'une voie de droit ou de mesures conservatoires si le recours visé au paragraphe 1 n'a pas pour effet de permettre aux demandeurs de rester dans l'Etat membre concerné dans l'attente de l'issue de ce recours. Les Etats membres peuvent aussi prévoir une procédure d'office (...) " ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'office statue sur les demandes d'asile dont il est saisi (...) / L'office statue par priorité sur les demandes émanant de personnes auxquelles le document provisoire de séjour prévu à l'article L. 742-1 a été refusé ou retiré pour l'un des motifs mentionnés aux 2° à 4° de l' article L. 741-4, ou qui se sont vu refuser pour l'un de ces motifs le renouvellement de ce document " ; et qu'aux termes de l'article L. 742-6 du même code : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2º à 4º de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office (...) " ;

6. Considérant que le recours formé contre une décision refusant à un étranger un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français ou fixant son pays de destination n'étant relatif ni à une contestation sur des droits et obligations de caractère civil, ni à une accusation en matière pénale, les requérants ne peuvent utilement invoquer les stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant que l'étranger dont la demande d'asile fait l'objet d'un traitement selon la procédure prioritaire prévue à l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose du droit de contester la décision de rejet qui lui est opposée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides devant la Cour nationale du droit d'asile, juridiction devant laquelle, au demeurant, il peut faire valoir utilement l'ensemble de ses arguments dans le cadre d'une procédure écrite et se faire représenter à l'audience par un conseil ou par toute autre personne ; que cet étranger dispose également de la possibilité de saisir le tribunal administratif d'un recours en référé-liberté contre le refus d'admission provisoire au séjour opposé pour l'un des motifs mentionnés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4, ainsi que d'un recours pour excès de pouvoir suspensif d'exécution jusqu'à l'intervention du jugement du tribunal administratif contre les mesures d'obligation de quitter le territoire français et de fixation du pays de renvoi prises à la suite du rejet de sa demande d'asile ; que, dans ces conditions, le droit au recours effectif, tel que garanti par l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, n'implique pas nécessairement que l'étranger puisse se maintenir sur le territoire français jusqu'à l'issue de son recours devant la Cour nationale du droit d'asile ;

8. Considérant qu'il résulte des termes mêmes des dispositions de l'article 39 de la directive 2005/85/CE susvisée que, si celles-ci imposent aux Etats membres de garantir aux demandeurs d'asile un recours effectif devant une juridiction contre le refus qui leur est opposé, elles leur laissent le soin de déterminer les voies de droit et mesures conservatoires dont peuvent disposer les étrangers qui ne sont pas autorisés à se maintenir sur leur territoire dans l'attente de l'issue de leur recours ; qu'en prévoyant la possibilité pour les demandeurs d'asile faisant l'objet d'une procédure prioritaire de saisir, dans l'attente de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, le tribunal administratif d'un recours pour excès de pouvoir suspensif contre les obligations de quitter le territoire français et les mesures de fixation du pays de destination dont ils font l'objet, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code de justice administrative, quand bien même elles ne confèrent pas d'effet suspensif à l'appel formé à l'encontre du jugement rejetant une demande tendant à l'annulation des mesures d'obligation de quitter le territoire français et de fixation du pays de destination, satisfont aux objectifs fixés par l'article 39 de la directive susmentionnée ;

9. Considérant, dans ces conditions, que les moyens tirés de ce que les décisions contestées ont privé les requérants de la possibilité de se présenter devant la Cour nationale du droit d'asile et de bénéficier, devant cette juridiction, d'un recours effectif contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et ont, en conséquence, méconnu les stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article 39 de la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 doivent être écartés ;

10. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

11. Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers que les requérants sont arrivés sur le territoire français le 1er décembre 2013 ; que s'ils font valoir qu'ils sont parfaitement intégrés dans la société française et ont créé en France des relations amicales avec de nombreuses personnes qui leur apportent régulièrement un soutien tant matériel que financier, moral et affectif, ils ont conservé des attaches familiales dans leur pays d'origine où ils ont vécu la majeure partie de leur existence et où ils n'établissent pas encourir des risques qui les empêcheraient d'y mener une vie privée et familiale normale ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la très faible durée de leur séjour en France, les décisions contestées n'ont pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elles ont été prises ; qu'elles n'ont, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, le préfet du Puy-de-Dôme n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de les admettre au séjour sur le fondement de ces dispositions ;

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français :

12. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;

13. Considérant que M.G..., de nationalité albanaise, son épouse et sa mère, de même nationalité, se sont vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par les décisions du 22 mai 2014 ; qu'ainsi, ils se trouvaient dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans lequel le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

14. Considérant, en deuxième lieu, que compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus quant à la légalité des décisions portant refus de délivrance de titres de séjour, le moyen invoqué, par voie d'exception, tiré de l'illégalité de ces décisions doit être écarté ;

15. Considérant, en troisième et dernier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-avant dans le cadre de l'examen de la légalité des refus de titre de séjour, les moyens invoqués à l'encontre des décisions d'obligation de quitter le territoire français tirés de la violation de l'article 39 de la directive n° 2005/85 CE du Conseil du 1er décembre 2005 et des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ; que les moyens tirés de la violation, par les mesures d'éloignement, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation dont ces mesures seraient entachées doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 11 ci-avant ;

Sur la légalité des décisions désignant le pays de destination :

16. Considérant, en premier lieu, que compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus quant à la légalité des décisions portant refus de délivrance de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, le moyen invoqué, par voie d'exception, tiré de l'illégalité de ces décisions doit être écarté ;

17. Considérant, en deuxième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-avant dans le cadre de l'examen de la légalité des décisions portant refus de titre de séjour, les moyens tirés de la violation, par les décisions fixant le pays de renvoi, des stipulations de l'article 39 de la directive n° 2005/85 CE du Conseil du 1er décembre 2005 et des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ; que le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 11 ci-avant ;

18. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

19. Considérant que si les requérants soutiennent être menacés depuis plusieurs années par des personnes liées aux autorités locales albanaises et ne pas pouvoir bénéficier d'une protection de la part de ces mêmes autorités, ils n'établissent pas, par leur récit et les pièces produites aux dossiers, la réalité des faits allégués et l'existence de risques personnels et actuels auxquels ils seraient exposés en cas de retour en Albanie ; que, par suite, en désignant ce pays comme pays de renvoi, le préfet du Puy-de-Dôme n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que ces décisions sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;

20. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

21. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les requêtes de M. G... et de Mmes A... et C... G...n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, leurs conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint audit préfet de leur délivrer un titre de séjour ou de réexaminer leur situation doivent être rejetées ;

Sur les frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens :

22. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les frais exposés en cours d'instance par les requérants soient mis à la charge de l'Etat, qui dans la présente instance, n'est pas la partie perdante ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. G... et de Mmes A... et C... G...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... G..., Mme A... B...épouseG..., Mme C... E...épouse G...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2015 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Bourion, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 juillet 2015.

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N° 15LY00023 - 15LY00025 - 15LY00487 - 15LY00488


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY00023
Date de la décision : 02/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Dominique PRUVOST
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : FAURE CROMARIAS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-07-02;15ly00023 ?
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