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23/06/2015 | FRANCE | N°14LY02427

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 23 juin 2015, 14LY02427


Vu la requête, enregistrée le 30 juillet 2014, présentée par le préfet de la Haute-Savoie ;

le préfet de la Haute-Savoie demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400520 du 19 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 30 décembre 2013 par lequel il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A...C..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné un pays de destination ;

2°) de rejeter les conclusions de M. C...tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 décemb

re 2013 ;

il soutient que :

- M. C...n'a pas présenté de demande de titre de séjour sur le ...

Vu la requête, enregistrée le 30 juillet 2014, présentée par le préfet de la Haute-Savoie ;

le préfet de la Haute-Savoie demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400520 du 19 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 30 décembre 2013 par lequel il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A...C..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné un pays de destination ;

2°) de rejeter les conclusions de M. C...tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 décembre 2013 ;

il soutient que :

- M. C...n'a pas présenté de demande de titre de séjour sur le fondement de la vie privée et familiale ;

- le jugement est insuffisamment motivé s'agissant de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- ni le jugement attaqué, ni les pièces du dossier ne démontrent que la présence de M. C... auprès de son père et de sa soeur serait indispensable ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Grenoble, aucune irrégularité procédurale ne saurait lui être reprochée dans le traitement de la demande de titre de séjour de M. B...en qualité de parent d'enfant malade ; c'est à tort que le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 30 décembre 2013 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M.B... ; dès lors, l'arrêté litigieux ne peut être regardé comme portant une atteinte disproportionnée au droit de M. C...au respect de sa vie privée et familiale ;

- l'enfant Antigona peut bénéficier d'un traitement adapté à son état de santé au Kosovo ; les médicaments nécessaires au traitement psychiatrique sont accessibles gratuitement ;

- M. C...ne fait état d'aucune circonstance humanitaire exceptionnelle justifiant que lui soit délivré un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les membres de la famille de M. C...séjournent de manière irrégulière en France et ont fait l'objet de refus de titre de séjour assortis d'obligations de quitter le territoire français ; les mesures d'éloignement prises à leur encontre étant légales et l'enfant Antigona pouvant bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé au Kosovo, l'arrêté litigieux n'a pas pour effet de séparer M. C...de ses parents et de sa fratrie ni d'empêcher que la cellule familiale se reconstitue dans leur pays d'origine ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée à M.C..., qui n'a pas produit d'observations ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2015 :

- le rapport de Mme Peuvrel, premier conseiller ;

1. Considérant que M. A...C..., ressortissant kosovar né le 22 juin 1992, est entré irrégulièrement en France le 28 décembre 2009 en compagnie de ses parents adoptifs allégués, M. et MmeB..., et de leurs trois filles ; que sa demande d'asile a été rejetée le 11 octobre 2010 par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides et le 27 juillet 2011 par la Cour nationale du droit d'asile ; que le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine par un arrêté du 30 décembre 2013 ; que le préfet de la Haute-Savoie relève appel du jugement du 19 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que le jugement attaqué expose les motifs sur lesquels se sont fondés les premiers juges pour décider que l'arrêté du 30 décembre 2013 méconnaissait le droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale ; qu'il est, ainsi, suffisamment motivé s'agissant de la transmission du rapport médical au médecin de l'agence régionale de santé et de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Considérant que, par un arrêt n° 14LY02423 de ce jour, la cour administrative d'appel de céans a annulé le jugement n° 1400499 du tribunal administratif du 19 juin 2014 ayant annulé l'arrêté du 30 décembre 2013 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a refusé de délivrer un titre de séjour à M.B..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné un pays de destination et rejeté les conclusions de M. B...dirigées contre cet arrêté ; que, par suite, le préfet de la Haute-Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a, tirant les conséquences de l'annulation de l'arrêté prononcé contre M.B..., annulé l'arrêté du 30 décembre 2013 du préfet de la Haute-Savoie refusant à M. C...un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays où il serait légalement admissible ;

4. Considérant qu'il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés contre cet arrêté par M. C... devant le tribunal administratif de Grenoble ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

6. Considérant que M.C..., qui, n'ayant pas présenté de demande de titre de séjour sur ce fondement, ne peut utilement se prévaloir des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'il fait valoir qu'il réside en France avec ses parents adoptifs et ses trois soeurs, nées en 1992, 1996 et 2002, qu'il a obtenu un certificat d'aptitude professionnelle (CAP) de restauration en juillet 2012 et que deux de ses soeurs sont scolarisées, est entré récemment sur le territoire français, où il ne justifie pas de son insertion personnelle et professionnelle, alors que ses parents adoptifs et sa soeur majeure ont également fait l'objet de refus de titre de séjour assortis d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 de ce même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...). " ; qu'aux termes de l'article R. 312-2 du même code : " Le préfet ou, à Paris le préfet de police saisit pour avis la commission lorsqu'il envisage de refuser de délivrer ou de renouveler l'un des titres mentionnés aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 à l'étranger qui remplit effectivement les conditions qui président à leur délivrance (...). " ;

8. Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 312-2 et R. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues notamment à l'article L. 313-11 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; que, comme il a été dit précédemment, M. C...ne démontre pas être au nombre des étrangers qui peuvent obtenir de plein droit un titre de séjour en application du 7° ou du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet de la Haute-Savoie n'était pas tenu, en application de l'article L. 312-2, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Haute-Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 30 décembre 2013 ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1400520 du 19 juin 2014 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : La demande de M. C...présentée devant le tribunal administratif est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...C....

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2015, à laquelle siégeaient :

M. Martin, président de chambre,

Mme Courret, présidente-assesseur,

Mme Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 juin 2015.

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N° 14LY02427


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02427
Date de la décision : 23/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTIN
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. CLEMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-06-23;14ly02427 ?
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