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23/06/2015 | FRANCE | N°14LY01808

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 23 juin 2015, 14LY01808


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...épouse C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2013 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1304880 du 23 janvier 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 juin 2014, Mme A...D...épouseC..., représentée par MeB..., demande à la Cour

:

1°) d'annuler ce jugement n° 1304880 du tribunal administratif de Grenoble du 23 janvier 2014 ;

2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...épouse C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2013 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1304880 du 23 janvier 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 juin 2014, Mme A...D...épouseC..., représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1304880 du tribunal administratif de Grenoble du 23 janvier 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2013 du préfet de l'Isère ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt, ou à défaut, de lui enjoindre d'examiner à nouveau sa situation dans un délai d'un mois à compter du prononcé de l'arrêt et de lui délivrer, dans l'attente de cette décision, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler, sous astreinte définitive de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les articles L. 313-11 11° et R. 313-22 à 32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet ne s'est fondé que sur l'avis du médecin de l'agence régionale de santé et qu'il n'a pas pris en compte une circonstance humanitaire exceptionnelle, à savoir qu'elle ne peut avoir accès à son traitement au Kosovo en raison de son coût ; son état de santé justifie une prise en charge médicale en France ;

- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne dès lors qu'elle ne peut bénéficier d'un traitement dans son pays d'origine, qu'elle est suivie en France et que son mari et sa fille se trouvent en France ; elle est entachée sur ce point d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire méconnaît l'article 8 de la convention européenne pour les mêmes motifs que précédemment ainsi que l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme ; elle craint en effet pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine.

Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 avril 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Courret,

1. Considérant que Mme D... épouseC..., ressortissante kosovare née le 10 mai 1966, est entrée irrégulièrement en France le 5 mai 2009, selon ses déclarations ; que, le même jour, Mme D... a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile par décision du 29 octobre 2009, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 24 février 2011 ; que par un arrêté du 12 octobre 2012, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; qu'à la suite de l'annulation de ces décisions par un jugement du 11 avril 2013 du tribunal administratif de Grenoble, le préfet de l'Isère saisi à nouveau de la situation de l'intéressée a, par arrêté du 8 juillet 2013, refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite d'office si elle n'obtempérait pas à l'obligation qui lui était faite ; que la requérante a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande en annulation de la décision de refus de titre de séjour et de celle l'obligeant à quitter le territoire français ; que Mme D...relève appel du jugement du 7 août 2013 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...). " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...). " ;

3. Considérant qu'il ne ressort pas des termes de la décision litigieuse que le préfet de l'Isère, qui a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme D...au regard de l'instruction de son dossier et de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, se serait senti lié par cet avis pour rejeter la demande de l'intéressée ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de l'avis rendu par le médecin de l'agence régionale de santé le 6 février 2013, que si l'état de santé de Mme D...nécessite une prise en charge médicale, son défaut ne devrait pas entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité et il existe dans son pays d'origine un traitement approprié à son état de santé ; que Mme D...fait valoir qu'elle doit être suivie en France et qu'elle ne peut accéder au traitement dont elle a besoin au Kososvo en raison de son coût ; que toutefois, elle ne peut utilement faire valoir qu'elle ne disposerait pas des ressources nécessaires pour accéder à ce traitement ; que, par ailleurs, les certificats médicaux produits qui attestent de sa maladie et de son traitement médicamenteux ne remettent pas en cause la capacité de son pays à prendre médicalement en charge sa pathologie ; que, par suite, Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la décision lui refusant un titre de séjour méconnaîtrait les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

6. Considérant que Mme D...fait valoir que sa vie privée et familiale se situe en France où elle a la possibilité de se faire soigner ; que, toutefois, si la requérante, entrée irrégulièrement en France à l'âge de quarante-trois ans, moins de cinq ans avant les décisions en litige, se prévaut de la présence en France de son époux, il ressort des pièces du dossier que ce dernier est en situation irrégulière, de même que sa fille aînée, dont la demande d'asile est en cours d'examen ; que Mme D... ne démontre pas être dénuée d'attaches dans son pays d'origine, où résident notamment ses trois enfants dont deux mineurs, et où il lui sera possible de poursuivre sa vie privée et familiale ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée de séjour et des conditions d'entrée et de séjour de la requérante en France, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant, en dernier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 ci-avant, le préfet de l'Isère n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et l'état de santé de la requérante en refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant que, pour les motifs exposés ci-dessus, les moyens tirés de ce que la décision obligeant Mme D...à quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle et méconnaîtrait le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ;

Sur la décision désignant le pays de destination :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions dirigées contre la décision désignant le pays de destination :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. " ;

10. Considérant qu'en se bornant à soutenir qu'elle est menacée, comme l'ensemble de sa famille en cas de retour dans son pays d'origine, alors au demeurant que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, Mme D...n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité des risques qu'elle allègue encourir ;

11. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat d'une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...épouse C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2015 à laquelle siégeaient :

M. Martin, président de chambre,

Mme Courret, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 juin 2015.

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N°14LY01808


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01808
Date de la décision : 23/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTIN
Rapporteur ?: Mme Catherine COURRET
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : PIEROT

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-06-23;14ly01808 ?
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