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11/06/2015 | FRANCE | N°14LY02127

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 11 juin 2015, 14LY02127


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2013 du préfet de l'Isère refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et désignant, comme pays de reconduite d'office à l'expiration de ce délai, le pays dont elle a la nationalité, ou tout pays pour lequel elle établit être légalement admissible.

Par un jugement n° 1306472 du 18 avril 2014, le tribunal administratif de Greno

ble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2013 du préfet de l'Isère refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et désignant, comme pays de reconduite d'office à l'expiration de ce délai, le pays dont elle a la nationalité, ou tout pays pour lequel elle établit être légalement admissible.

Par un jugement n° 1306472 du 18 avril 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2014, Mme A..., représentée par Me Cans, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 18 avril 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", " sous astreinte de 100 euros par jour de retard ", ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer, dans l'attente de sa décision, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour, qui ne mentionne pas les articles L. 313-11 (7°) et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est insuffisamment motivée ;

- le préfet a commis une erreur de droit et omis de procéder à un examen particulier de sa situation personnelle en examinant sa demande de titre de séjour sur le fondement du seul article L. 313-11 (11°) de ce code, alors que cette demande était également présentée sur le fondement des articles L. 313-11 (7°) et L. 313-14 du même code ;

- le refus de titre de séjour contesté a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, dans la mesure où le préfet ne justifie pas avoir effectivement saisi le médecin de l'agence régionale de santé ;

- ce refus méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 (11°) du code précité ;

- il méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 (10°) dudit code ;

- cette obligation méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention précitée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Une mise en demeure a été adressée le 18 mars 2015 au préfet de l'Isère, qui n'a pas produit de mémoire.

Par ordonnance du 18 mars 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 3 avril 2015.

Mme B... C...A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel), en date du 26 mai 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Meillier ;

1. Considérant que Mme B... C...A..., ressortissante ivoirienne née en 1951, est entrée en France au printemps 2011 ; qu'elle s'est présentée en préfecture le 11 avril 2011 afin de solliciter la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-11 (7°) et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a confirmé, par courriers des 8 juillet 2011 et 25 avril 2012, sa demande de titre de séjour ainsi que son fondement ; qu'elle s'est à nouveau présentée en préfecture le 5 juin 2012, afin que sa demande soit également examinée au regard de l'article L. 313-11 (11°) du même code, et s'est en conséquence vu remettre une " fiche médecin " destinée au médecin de l'agence régionale de santé ; que, par courrier de son conseil du 6 juin 2012, elle a précisé que sa demande devrait donc être examinée au regard tant de l'article L. 313-11 (11°) que des articles L. 313-11 (7°) et L. 313-14 ; que, le 11 mars 2013, elle s'est personnellement présentée en préfecture dans le cadre de l'instruction de sa demande présentée au titre de son état de santé ; que, par arrêté du 16 juillet 2013, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a désigné, comme pays de reconduite d'office à l'expiration de ce délai, le pays dont elle a la nationalité, ou tout pays pour lequel elle établit être légalement admissible ; que, par jugement du 18 avril 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de Mme B...tendant à l'annulation de cet arrêté ; que Mme B...relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 612-6 du code de justice administrative : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions, que lorsque un étranger justifie, à l'appui de sa demande de titre de séjour, d'éléments suffisamment précis sur la nature et la gravité des troubles dont il souffre, le préfet est tenu, préalablement à sa décision, de recueillir l'avis du médecin de l'agence régionale de santé qui statue dans les conditions prévues par l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé ;

5. Considérant qu'à l'appui de sa requête, Mme A...soutient que le préfet a omis de saisir pour avis le médecin de l'agence régionale de santé ; qu'une copie de cette requête a été communiquée au préfet de l'Isère, qui a été mis en demeure le 18 mars 2015 de produire un mémoire en défense ; que cette mise en demeure est demeurée sans effet ; que l'inexactitude des faits allégués par Mme A...ne ressort d'aucune des pièces versées au dossier ; qu'en particulier, la seule mention dans l'arrêté attaqué d'un avis qui aurait été rendu le 10 avril 2013 par le médecin de l'agence régionale de santé, ne saurait, en l'absence de production par le préfet en première instance ou en appel dudit avis, établir qu'un avis aurait été régulièrement rendu par ce médecin ; que, dans ces conditions, le préfet doit être réputé avoir admis l'exactitude matérielle des faits allégués par Mme A...conformément aux dispositions précitées de l'article R. 612-6 du code de justice administrative ; que le préfet, qui n'a produit aucune écriture en première instance ou en appel, ne conteste pas que l'intéressée, à qui il a remis le 5 juin 2012 une " fiche médecin " destinée au médecin de l'agence régionale de santé, disposait à la date de sa demande d'éléments suffisamment précis de nature à justifier la saisine de ce médecin ; que, dès lors, l'arrêté attaqué, en tant qu'il refuse de délivrer un titre de séjour à MmeA..., a été pris à la suite d'une procédure irrégulière et doit, par suite, être annulé, y compris, par voie de conséquence, en tant qu'il oblige l'intéressée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et désigne son pays de destination ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

7. Considérant que, compte tenu du motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement la délivrance d'un titre de séjour à Mme A...mais seulement le réexamen de sa demande ainsi que la délivrance, dans l'attente de ce réexamen, d'une autorisation provisoire de séjour en application des dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Isère de procéder à ce réexamen dans un délai fixé, dans les circonstances de l'espèce, à deux mois, et à cette délivrance dans un délai fixé, dans les circonstances de l'espèce, à quinze jours, sans qu'il soit besoin d'assortir ces injonctions d'une astreinte ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, le versement à Me Cans, avocat de MmeA..., d'une somme de 1 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

DECIDE :

Article 1er : L'arrêté du 16 juillet 2013 du préfet de l'Isère refusant de délivrer un titre de séjour à MmeA..., l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et désignant, comme pays de reconduite d'office à l'expiration de ce délai, le pays dont elle a la nationalité, ou tout pays pour lequel elle établit être légalement admissible, ainsi que le jugement n° 1306472 du 18 avril 2014 du tribunal administratif de Grenoble, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Isère de réexaminer la situation de Mme A...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de cette notification.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à Me Cans, avocat de MmeA..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Cans renonce à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2015 à laquelle siégeaient :

Mme Mear, président,

Mme Bourion, premier conseiller,

M. Meillier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juin 2015.

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N° 14LY02127


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02127
Date de la décision : 11/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: M. Charles MEILLIER
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : CANS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-06-11;14ly02127 ?
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