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09/06/2015 | FRANCE | N°14LY02379

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 09 juin 2015, 14LY02379


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...épouse D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 18 octobre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1400525 du 27 mai 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 18 octobre

2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...épouse D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 18 octobre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1400525 du 27 mai 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 18 octobre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1400524 du 27 mai 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête enregistrée sous le n° 14LY02379 le 25 juillet 2014, Mme A... C... épouseD..., représentée par Me Cadoux, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400525 du tribunal administratif de Lyon du 27 mai 2014 ;

2°) d'annuler les décisions du 18 octobre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation et de statuer à nouveau sur son droit au séjour dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 11 juillet 1991.

Elle soutient que :

- les décisions en litige sont entachées d'un défaut de motivation ; la décision de refus de séjour comporte des considérations de fait très succinctes ; la décision fixant le pays de destination n'est motivée ni en droit, ni en fait ;

- contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal, le préfet du Rhône n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité dès lors que pour contredire l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé sur la disponibilité du traitement en Bosnie, le préfet ne pouvait se prévaloir d'un mail envoyé en août 2013 par les services de l'ambassade de France à Sarajevo rédigé en termes très généraux ; de même, il ne pouvait se prévaloir d'un document " étrangers admis au séjour pour raisons de santé, offre de soins, accessibilité aux soins ", ni d'un document non traduit émanant de l'agence des médicaments et des dispositifs médicaux de Bosnie-Herzégovine non plus que d'un document de l'Organisation mondiale de la santé daté de 2011 relatif à la Bosnie-Herzégovine, ancien et rédigé en termes généraux ;

- il est constant qu'elle ne pourra bénéficier des soins dont elle a impérativement besoin en cas de retour en Bosnie, son traitement n'y étant pas disponible ;

- elle est fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour concernant la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2014, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme C...une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions attaquées sont suffisamment motivées ;

- il n'a pas méconnu son obligation de procéder à un examen particulier de la situation de la requérante ;

- l'autorité administrative n'est pas liée par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; les documents produits permettent d'établir qu'un traitement existe dans son pays d'origine ; la requérante n'apporte aucun élément remettant en cause la position de l'administration ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire n'est entachée d'aucune illégalité.

Mme C...épouse D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 juillet 2014.

II. Par une requête enregistrée sous le n° 14LY02381 le 25 juillet 2014, et un mémoire complémentaire enregistré le 16 septembre 2014, Mme A...C...épouseD..., représentée par Me Cadoux, demande à la Cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1400525 du tribunal administratif de Lyon du 27 mai 2014 ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 11 juillet 199.

Elle soutient que :

- l'exécution du jugement attaqué entraînera des conséquences difficilement réparables dès lors qu'elle ne peut bénéficier du traitement et du suivi dont elle a besoin en Bosnie ;

- les décisions en litige sont entachées d'un défaut de motivation ; la décision de refus de séjour comporte des considérations de fait très succinctes ; la décision fixant le pays de destination n'est motivée ni en droit, ni en fait ;

- contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal, le préfet du Rhône n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- la réalité de la pathologie psychiatrique dont elle souffre ne peut être remise en cause ;

- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité dès lors que pour contredire l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé sur la disponibilité du traitement en Bosnie, le préfet ne pouvait se prévaloir d'un mail envoyé en août 2013 par les services de l'ambassade de France à Sarajevo rédigé en termes très généraux ; de même, il ne pouvait se prévaloir d'un document " étrangers admis au séjour pour raisons de santé, offre de soins, accessibilité aux soins " ni d'un document non traduit émanant de l'agence des médicaments et des dispositifs médicaux de Bosnie-Herzégovine non plus que d'un document de l'Organisation mondiale de la santé daté de 2011 relatif à la Bosnie-Herzégovine, ancien et rédigé en termes généraux ;

- il n'est pas démontré qu'il existe un traitement pour l'ensemble des pathologies dont elle souffre, à savoir un syndrome psychiatrique grave, une sciatalgie invalidante et une hypertension artérielle sévère ;

- il est constant qu'elle ne pourra bénéficier des soins dont elle a impérativement besoin en cas de retour en Bosnie, son traitement n'étant pas disponible ;

- elle est fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour concernant la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2014, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme C...une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'exécution du jugement attaqué n'aura pas de conséquences difficilement réparables sur la situation de Mme C...dès lors qu'il existe un traitement dans son pays d'origine ;

- les décisions ne sont entachées d'aucune illégalité ;

- les décisions attaquées sont suffisamment motivées ;

- il n'a pas méconnu son obligation de procéder à un examen particulier de la situation de la requérante ;

- l'autorité administrative n'est pas liée par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; les documents produits permettent d'établir qu'un traitement existe dans son pays d'origine ; la requérante n'apporte aucun élément remettant en cause la position de l'administration ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire n'est entachée d'aucune illégalité ;

Mme C...épouse D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 juillet 2014.

III. Par une requête enregistrée sous le n° 14LY02384 le 25 juillet 2014, M. B... D..., représenté par Me Cadoux, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400524 du tribunal administratif de Lyon du 27 mai 2014 ;

2°) d'annuler les décisions du 18 octobre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation et de statuer à nouveau sur son droit au séjour dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 11 juillet 1991.

Il soutient que :

- les décisions en litige sont entachées d'un défaut de motivation ; la décision de refus de séjour comporte des considérations de fait très succinctes ; la décision fixant le pays de destination n'est motivée ni en droit, ni en fait ;

- contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal, le préfet du Rhône n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité dès lors que pour contredire l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé sur la disponibilité du traitement en Bosnie concernant l'état de santé de son épouse, le préfet ne pouvait se prévaloir d'un mail envoyé en août 2013 par les services de l'ambassade de France à Sarajevo rédigé en termes très généraux ; de même, il ne pouvait se prévaloir d'un document " étrangers admis au séjour pour raisons de santé, offre de soins, accessibilité aux soins ", ni d'un document non traduit émanant de l'agence des médicaments et des dispositifs médicaux de Bosnie-Herzégovine ainsi qu'un document de l'Organisation mondiale de la santé daté de 2011 relatif à la Bosnie-Herzégovine, ancien et rédigé en termes généraux ;

- il est constant que son épouse ne pourra bénéficier des soins dont elle a impérativement besoin en cas de retour en Bosnie, son traitement n'y étant pas disponible ;

- de ce fait, le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée en refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'accompagnant d'étranger malade ; sa vie est en France, auprès de son épouse où elle peut se faire soigner ;

- il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour concernant la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire, pour les mêmes motifs que précédemment, méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2014, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. D...une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions attaquées sont suffisamment motivées ;

- il n'a pas méconnu son obligation de procéder à un examen particulier de la situation du requérant ;

- l'autorité administrative n'est pas liée par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; les documents produits permettent d'établir qu'un traitement existe pour son épouse dans son pays d'origine ; le requérant n'apporte aucun élément remettant en cause la position de l'administration ;

- il n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale du requérant une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire n'est entachée d'aucune illégalité.

M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 juillet 2014.

IV. Par une requête enregistrée sous le n° 14LY02385 le 25 juillet 2014, M. B... D..., représenté par Me Cadoux, demande à la Cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1400524 du tribunal administratif de Lyon du 27 mai 2014 ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 11 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'exécution du jugement attaqué entraînera des conséquences difficilement réparables dès lors que son épouse qui souffre d'un syndrome psychiatrique grave, d'une sciatalgie invalidante et d'une hypertension artérielle sévère ne peut bénéficier du traitement et du suivi dont elle a besoin en Bosnie ;

- les décisions en litige sont entachées d'un défaut de motivation ; la décision de refus de séjour comporte des considérations de fait très succinctes ; la décision fixant le pays de destination n'est motivée ni en droit, ni en fait ;

- contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal, le préfet du Rhône n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité dès lors que pour contredire l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé sur la disponibilité du traitement en Bosnie concernant l'état de santé de son épouse, le préfet ne pouvait se prévaloir d'un mail envoyé en août 2013 par les services de l'ambassade de France à Sarajevo rédigé en termes très généraux ; de même, il ne pouvait se prévaloir d'un document " étrangers admis au séjour pour raisons de santé, offre de soins, accessibilité aux soins " ni d'un document non traduit émanant de l'agence des médicaments et des dispositifs médicaux de Bosnie-Herzégovine non plus que d'un document de l'Organisation mondiale de la santé daté de 2011 relatif à la Bosnie-Herzégovine, ancien et rédigé en termes généraux ;

- il est constant que son épouse ne pourra bénéficier des soins dont elle a impérativement besoin en cas de retour en Bosnie, son traitement n'y étant pas disponible ;

- de ce fait, le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée en refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'accompagnant d'étranger malade ; sa vie est en France auprès de son épouse où elle peut se faire soigner ;

- il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour concernant la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire, pour les mêmes motifs de précédemment, méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme ;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2014, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M.D... une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'exécution du jugement attaqué n'aura pas de conséquences difficilement réparables sur la situation des intéressés dès lors qu'il existe un traitement pour son épouse dans leur pays d'origine ;

- les décisions attaquées sont suffisamment motivées ;

- il n'a pas méconnu son obligation de procéder à un examen particulier de la situation du requérant ;

- l'autorité administrative n'est pas liée par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; les documents produits permettent d'établir qu'un traitement pour son épouse existe dans son pays d'origine ; le requérant n'apporte aucun élément remettant en cause la position de l'administration ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire n'est entachée d'aucune illégalité.

M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 juillet 2014.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Courret.

1. Considérant que les requêtes susvisées nos 14LY02379, 14LY02381, 14LY02384 et 14LY02385, présentées pour Mme A...C...épouse D...et M. B...D...présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que Mme C...épouse D...et M.D..., ressortissants bosniens nés respectivement le 19 octobre 1980 et le 24 janvier 1975, sont entrés irrégulièrement en France le 28 juin 2012 accompagnés de leurs deux enfants ; que leurs demandes d'asile ont été rejetées par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 15 novembre 2012, rejets confirmés le 18 septembre 2013 par la Cour nationale du droit d'asile ; que, par arrêtés du 18 octobre 2013, le préfet du Rhône a refusé la délivrance du titre de séjour sollicité par Mme C...et M.D..., leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et a désigné le pays de destination ; que Mme C... et M. D... relèvent appel des jugements du 27 mai 2014 par lesquels le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes en annulation de ces décisions ; que les requérants demandent également le sursis à exécution de ces jugements ;

Sur les requêtes d'appel n° 14LY02379 et n° 14LY02384 :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :

S'agissant de la situation de MmeC... :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant le mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ;

4. Considérant que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;

5. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

6. Considérant que, dans son avis rendu le 8 août 2013, le médecin de l'agence régionale de santé Rhône-Alpes a estimé que l'état de santé de Mme C...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'elle ne pouvait pas avoir accès dans son pays d'origine à un traitement approprié et que les soins devaient lui être prodigués pendant encore douze mois ; que pour refuser le titre de séjour sollicité par MmeC..., le préfet du Rhône a mentionné qu'il résultait notamment des éléments fournis par l'ambassade de France en Bosnie en date du 5 août 2013, que les institutions sanitaires bosniaques avaient la capacité de traiter la majorité des maladies courantes, en particulier psychiatriques ; que Mme C...qui produit des certificats médicaux qui attestent qu'elle est atteinte d'un syndrome anxio-dépressif, d'une sciatalgie invalidante et d'une hypertension artérielle sévère fait valoir qu'elle ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que le préfet du Rhône pour attester que les soins requis par son état de santé sont disponibles en Bosnie, se borne à produire d'une part, une réponse sommaire de l'ambassade de France signée par le consul-régisseur, chef du service commun de gestion et, d'autre part, un tableau censé répertorier les soins disponibles dans ce pays dont seuls deux rubriques concernant la liste des pathologies et les protocoles de soins et plateau technique sont remplis et enfin, un simple courriel d'un conseiller santé auprès du directeur général des étrangers en France daté du 4 avril 2014 ; que, par suite, Mme C...est fondée à soutenir que, dans les circonstances particulières de l'espèce, le préfet du Rhône a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il suit de là, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

S'agissant de la situation de M.D... :

7. Considérant qu'aux termes qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...). / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. (...). " ;

8. Considérant que M. D...fait valoir qu'il doit demeurer auprès de son épouse qui est malade et ne peut se faire soigner qu'en France ; qu'il résulte de ce qui précède que M. D... est fondé à rester auprès de son épouse ; que, par suite, en refusant de délivrer un titre de séjour à M.D..., le préfet du Rhône a porté au droit de ce dernier au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux effets de cette mesure, en méconnaissance des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant que, compte tenu du motif de l'annulation, le présent jugement implique nécessairement que le préfet du Rhône délivre une autorisation provisoire de séjour et procède au réexamen de la situation administrative des requérants dans un délai de deux mois à compter de la notification de celle-ci ;

Sur les requêtes n° 14LY02381 et n° 14LY02385 à fin de sursis à exécution des jugements attaqués :

11. Considérant que le présent arrêt statuant sur les requêtes en annulation présentées contre les jugements n° 1400525 et n° 1400524 rendus le 27 mai 2014 par le tribunal administratif de Lyon, les requêtes n° 14LY02381 et n° 14LY02385 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ces jugements sont devenues sans objet ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que Mme C...et M. D...ont obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, leur avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Cadoux, avocate des intéressés, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat une somme globale de 1 000 euros au profit de Me Cadoux au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C...et de M. D...qui ne sont pas parties perdantes, la somme que demande le préfet du Rhône au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a exposés ;

DECIDE :

Article 1er : Les jugements n° 1400525 et 1400524 du tribunal administratif de Lyon du 27 mai 2014, les décisions du préfet du Rhône du 18 octobre 2013 refusant de délivrer un titre de séjour à Mme C...et M.D..., leur faisant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer à Mme C...et M. D...des autorisations provisoires de séjour dans le délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt et de se prononcer à nouveau sur leur situation dans le délai de deux mois à compter de cette notification.

Article 3 : L'Etat versera une somme globale de 1 000 euros à Me Cadoux, avocate de Mme C... et M.D..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Les conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Il n'y a pas lieu à statuer sur les conclusions de Mme C...et M. D...tendant au sursis à exécution des jugements attaqués.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...épouseD..., à M. B...D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2015 à laquelle siégeaient :

M. Martin, président de chambre,

Mme Courret, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 juin 2015.

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Nos 14LY02379-14LY02381-14LY02384-14LY02385


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02379
Date de la décision : 09/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTIN
Rapporteur ?: Mme Catherine COURRET
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : CADOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-06-09;14ly02379 ?
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