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21/04/2015 | FRANCE | N°14LY00068

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 21 avril 2015, 14LY00068


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 janvier 2014, présentée pour M. A... C..., domicilié ...;

M. A...C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004386 du 7 novembre 2013 du Tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à obtenir la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2002 à 2004, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;


3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 janvier 2014, présentée pour M. A... C..., domicilié ...;

M. A...C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004386 du 7 novembre 2013 du Tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à obtenir la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2002 à 2004, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. C...soutient que :

- la réclamation contentieuse qu'il a adressée à l'administration fiscale le 17 décembre 2009 n'est pas tardive dès lors qu'il n'a reçu la proposition de rectification au titre de l'année 2002 que le 3 janvier 2006 et que la copie des avis d'imposition qui lui a été adressée ne comportait que le recto et aucune mention des délais de recours ;

- l'action de l'administration fiscale est prescrite en ce qui concerne l'année 2002 dès lors que le droit de reprise de l'administration ne pouvait s'exercer que jusqu'au 31 décembre 2005 et que la seule adresse à laquelle l'administration devait lui notifier les propositions de rectification était celle qu'il avait déclarée en Suisse ;

- les propositions de rectification datées du 21 décembre 2005, du 6 juin 2006 et du 7 juin 2006, ne sont pas motivées au sens des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales et, en application de la documentation administrative 13L-1513 n° 90 du 1er juillet 2002, elles auraient dû reproduire les redressements qui ont justifié les redressements de la société Paper Industry consulting ;

- sa résidence fiscale était fixée en Suisse au titre des années d'imposition en litige ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2014, présenté par le ministre de l'économie et des finances qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre de l'économie et des finances soutient que :

- la non distribution de la proposition de rectification envoyée à Gières, avant l'expiration du délai de reprise, est imputable à M. C...et que la notification de cette proposition a valablement interrompu la prescription conformément à l'article L. 189 du livre des procédures fiscales ;

- la requête de M. C...concernant les impositions relatives à l'année 2002 est irrecevable, cette dernière ayant été reçue le 22 décembre 2009 par l'administration alors que le délai expirait le 31 décembre 2008 ;

- pour les années 2002 à 2004, M. C...était résident fiscal français conformément aux dispositions de l'article 4 B du code général des impôts ;

- les différentes propositions de rectification adressées à M. C...étaient bien motivées conformément à l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dès lors qu'elles mentionnent les motifs de droit et de fait sur lesquels se fondent les rehaussements envisagés, précisent le montant des rectifications et mentionnent que ce montant procède de la taxation d'office de la société Paper Industry consulting à l'impôt sur les sociétés ;

Vu les mémoires en réplique, enregistrés le 13 mars 2015, présentés pour M. C...qui maintient ses conclusions par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 mars 2015, présenté par le ministre des finances et des comptes publics qui maintient ses écritures précédentes ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la convention fiscale du 9 septembre 1966 modifiée, signée entre la France et la Suisse ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2015 :

- le rapport de Mme Bouissac, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Lévy Ben Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant qu'à la suite d'un examen de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2002 à 2004, M. C...a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorties de pénalités ; que M. C...relève appel du jugement du 7 novembre 2013 en tant que le Tribunal administratif de Grenoble n'a que partiellement fait droit à ses conclusions tendant à la décharge desdites impositions ;

Sur la fin de non- recevoir opposée par l'administration en ce qui concerne l'année 2002 et sans qu'il soit besoin de statuer sur la prescription :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : a) De la mise en recouvrement du rôle ou de la notification d'un avis de mise en recouvrement ; (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 196-3 du même livre : " Dans le cas où un contribuable fait l'objet d'une procédure de reprise ou de redressement de la part de l'administration des impôts, il dispose d'un délai égal à celui de l'administration pour présenter ses propres réclamations " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'absence de mention sur l'avis d'imposition que l'administration adresse au contribuable de l'existence et du caractère obligatoire de la réclamation contre les impositions prévue à l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales, ainsi que des délais dans lesquels le contribuable doit exercer cette réclamation, est de nature à faire obstacle à ce que les délais prévus par les articles R. 196-1 et R. 196-3 du livre des procédures fiscales soient opposables au contribuable ;

4. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que le pli contenant la proposition de rectification du 21 décembre 2005 dont procède le supplément d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2002 adressé au domicile de M. C...à Meylan a été retourné au service avec la mention " n'habite pas à l'adresse indiquée " puis a été adressé à Grenoble à l'adresse du siège de la SCI Papel dont l'intéressé est associé et a été retourné au service avec la mention " non réclamé " ; que, toutefois, l'administration fiscale a également notifié les redressements litigieux par lettre recommandée avec accusé de réception le 23 décembre 2005 à l'adresse du siège social de la société Arte à Gières dont le requérant est le dirigeant et principal associé ; que si le pli n'a pas été retiré auprès de l'administration postale mais est revenu à l'administration fiscale avec les mentions " non réclamé ", " avisé " et " retour à l'envoyeur ", ces mentions précises et concordantes établissent clairement que M. C...a été régulièrement avisé de ce que le pli était à sa disposition au bureau de poste de Gières ; que, d'autre part, si M. C... soutient que les avis d'imposition relatifs aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises en recouvrement le 30 novembre 2006 au titre de l'année 2002 n'étaient pas complets dès lors qu'ils ne comportaient pas le verso des pages des documents et qu'ainsi il n'a pas été informé de la mention des délais dans lesquels il devait exercer la réclamation prévue à l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales, l'administration a produit les avis d'imposition complets, comportant le verso des pages desdits documents ; que faute d'avoir engagé une démarche auprès de l'administration après la réception des avis en cause, M. C...doit être présumé avoir reçu un document complet ; qu'il n'apporte pas la preuve contraire ;

5. Considérant que les avis d'imposition relatifs à l'année 2002 ont été adressés à Meylan à l'adresse du domicile de M.C... ; qu'en application des dispositions précitées, M. C... disposait ainsi d'un délai expirant le 31 décembre 2008 pour former sa réclamation ; que la réclamation présentée par ce dernier reçue par l'administration fiscale le 22 décembre 2009 était, ainsi, comme le fait valoir le ministre, tardive et, par suite, irrecevable ; que, dès lors, les conclusions de M. C...tendant à la décharge des impositions auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2002 ne peuvent être accueillies ;

Sur le domicile fiscal :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. / Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française " et qu'aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques. " ; que, pour l'application des dispositions du paragraphe a du 1 de l'article 4B précité, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles, et que le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où celui-ci ne dispose pas de foyer ;

7. Considérant qu'il est constant qu'au cours des années litigieuses, M. C...était titulaire d'un permis d'établissement de type C l'autorisant à résider en Suisse ; que, toutefois, il résulte de l'instruction qu'au cours des années en litige, M. C...disposait au 8 rue des Boisses à Meylan (Isère) d'une résidence acquise en indivision au cours de l'année 2000 avec MmeB..., la mère de ses deux enfants, tous deux scolarisés à Meylan et avec lesquels il résidait ; que, dans l'exercice de son droit de communication, l'administration a pu établir que les courriers étaient délivrés à M. C...à cette adresse ; que ce dernier effectuait régulièrement des dépenses courantes dans les commerces situés à proximité de Meylan ainsi que des retraits et des dépôts d'espèces sur ses comptes bancaires en France ; qu'ainsi, M. C...avait pour les années en litige, son foyer en France au sens du a) du 1. de l'article 4 B du code général des impôts et doit être regardé comme ayant son domicile fiscal en France ; que dès lors, M. C...était passible de l'impôt en France à raison de l'ensemble de ses revenus conformément à l'article 4 A précité ;

En ce qui concerne l'application de la convention franco-suisse :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la convention conclue le 9 septembre 1966 entre la France et la Suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune: " 1. Au sens de la présente convention, l'expression "résident d'un Etat contractant" désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. 2. Lorsque, selon la disposition du paragraphe 1, une personne physique est considérée comme résident de chacun des Etats contractants, le cas est résolu d'après les règles suivantes : a) Cette personne est considérée comme résident de l'Etat contractant où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent, cette expression désignant le centre des intérêts vitaux, c'est-à-dire le lieu avec lequel les relations personnelles sont les plus étroites ; b) Si l'Etat contractant où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, ou si elle ne dispose d'un foyer d'habitation permanent dans aucun des Etats contractants, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant où elle séjourne de façon habituelle ; c) Si cette personne séjourne de façon habituelle dans chacun des Etats contractants ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant dont elle possède la nationalité ; d) Si cette personne possède la nationalité de chacun des Etats contractants ou si elle ne possède la nationalité d'aucun d'eux, les autorités compétentes des Etats contractants tranchent la question d'un commun accord (...) " ;

9. Considérant que M. C...était titulaire d'un permis d'établissement de type C délivré par les autorités helvétiques et a été assujetti, au titre des années en litige, à l'impôt cantonal, communal et fédéral du canton de Vaud et peut-être regardé comme ayant eu au cours de ladite période la qualité de résident suisse au sens de l'article 4.1 de la convention fiscale franco-suisse ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le foyer de M. C...se situait en France où il résidait avec sa famille ; qu'il n'apporte aucun élément permettant de démontrer l'existence de liens personnels plus étroits en Suisse au sens de la convention précitée ; que dès lors, le centre de ses intérêts vitaux tels que définis par la convention franco-suisse se trouvait en France ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition en ce qui concerne les années 2003 et 2004 :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que pour être régulière, la proposition de rectification doit contenir clairement la désignation de l'impôt concerné, de l'année et de la base d'imposition, ainsi que l'énoncé des motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier la rectification ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;

11. Considérant que les propositions de rectification notifiées au mois de juin 2006 à M. C... au titre des années 2003 et 2004 indiquent les raisons pour lesquelles en qualité d'associé de la société Paper Industry Consulting, il devait être regardé comme ayant appréhendé les bénéfices distribués, ainsi que les bases imposables à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des capitaux mobiliers, et se réfèrent à la proposition de rectification 19 décembre 2005 adressée à la société Paper Industry Consulting et dont M. C...a reçu notification à titre personnel, au domicile qu'il avait déclaré à l'administration fiscale, antérieurement aux propositions de rectification en litige ; qu'ainsi le requérant doit être regardé comme ayant disposé des informations auxquelles il avait droit, en application des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédure fiscales ; que M. C...n'est pas fondé à invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le contenu de la documentation administrative 13 L-1513 du 1er juillet 2002, qui est relatif à la procédure d'imposition et ne peut être regardé comme comportant une interprétation d'un texte fiscal au sens de l'article L. 80 A ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation desdites propositions de rectification doit être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble n'a que partiellement fait droit à sa demande ; que les conclusions de M. C...présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2015 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Bouissac, président-assesseur,

M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 avril 2015.

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N° 14LY00068

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00068
Date de la décision : 21/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Textes fiscaux - Conventions internationales.

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Prescription.

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Réclamations au directeur - Délai.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Dominique BOUISSAC
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : CABINET DURAFFOURD- GONDOUIN-PALOMARES BARICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-04-21;14ly00068 ?
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