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10/03/2015 | FRANCE | N°14LY00666

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 10 mars 2015, 14LY00666


Vu, I, sous le n° 14LY00666, la requête, enregistrée le 5 mars 2014, présentée pour Mme A... B...épouseC..., domiciliée... ;

Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205673-1304070 du 27 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour, ainsi que les décisions prises par l'arrêté du 16 juillet 2013 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a

fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé ...

Vu, I, sous le n° 14LY00666, la requête, enregistrée le 5 mars 2014, présentée pour Mme A... B...épouseC..., domiciliée... ;

Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205673-1304070 du 27 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour, ainsi que les décisions prises par l'arrêté du 16 juillet 2013 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de travail et de lui notifier une nouvelle décision, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

elle soutient que :

- les décisions préfectorales méconnaissent l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que son époux vit régulièrement en France sous couvert d'une carte de résident algérien de dix ans valable jusqu'au 30 novembre 2016 et a toute sa famille en France ; son état de santé nécessite une prise en charge médicale et la présence de son époux ;

- le Tribunal aurait dû tenir compte de ce que préfet avait rejeté la demande de regroupement familial, du seul fait de l'insuffisance des ressources et sans avoir examiné sa situation familiale au regard de l'article 8 de la CEDH, et la rejetterait aujourd'hui pour les mêmes raisons ;

- le préfet a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire au seul motif qu'elle rentre dans les catégories des bénéficiaires du regroupement familial ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations ;

Vu la décision du 5 février 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section cour administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme B...;

Vu, II, sous le n° 14LY01210, la requête, enregistrée le 18 avril 2014, présentée pour Mme A... B...épouseC..., domiciliée... ;

Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401704 du 1er avril 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mars 2014 par lequel le préfet de l'Isère a décidé son assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours et lui a prescrit de se présenter quatre fois par semaine à l'hôtel de police de Grenoble ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation administrative, sous astreinte de 100 euros de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

elle soutient que :

- les décisions d'obligation de quitter le territoire, de désignation du pays de renvoi et d'assignation à résidence méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle et familiale ; elle est mariée depuis le 14 août 2007 ; la vie commune s'est poursuivie depuis cette date ; son époux vit régulièrement en France sous couvert d'une carte de résident algérien de dix ans valable jusqu'au 30 novembre 2016 et a toute sa famille en France ;

- l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'impose pas que les documents produits doivent comporter l'indication qu'elle ne peut voyager sans risque vers son pays d'origine ; il appartient au préfet de s'assurer que l'état de santé d'un étranger ne s'oppose pas à son éloignement ; elle a déposé une demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade le 1er avril 2014 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 mai 2014, présenté pour Mme B... qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

elle soutient, en outre, que :

- elle produit un nouveau certificat médical qui atteste que, quelles que soient les possibilités de traitement dans son pays d'origine, le retour dans son pays risque d'entraîner une aggravation de son état ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2014, présenté par le préfet de l'Isère qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- le refus de titre de séjour et l'obligation du quitter le territoire ne porte pas atteinte à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation ;

- la mesure d'éloignement n'est pas contraire à l'article L. 511-4-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la décision du 23 mai 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section cour administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme B...;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 février 2015 :

- le rapport de Mme Courret, président-assesseur ;

-

1. Considérant que les requêtes susvisées n° 14LY00666 et n° 14LY01210 présentées pour Mme B... épouseC..., concernent la situation d'un même étranger et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que MmeB..., de nationalité algérienne, est entrée en France le 22 octobre 2010 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa chinois ; qu'elle a sollicité le 28 octobre 2010 son admission au séjour au titre de l'asile, demande rejetée par une décision du 18 février 2011 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; qu'elle a sollicité, le 18 mars 2011, la délivrance d'un certificat de résidence algérien mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ; que par un arrêté du 16 juillet 2013, le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination ; que, la requérante n'ayant pas mis à exécution la mesure d'éloignement du 16 juillet 2013, le préfet, par un arrêté du 19 mars 2014, l'a assignée à résidence dans le département de l'Isère pour une durée maximale de quarante cinq jours ; que Mme B...relève appel d'une part, du jugement du 27 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour, ainsi que les décisions prises par l'arrêté du 16 juillet 2013 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination et d'autre part, du jugement du 1er avril 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mars 2014 par lequel le préfet de l'Isère a décidé son assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours ;

Sur la légalité de la décision de refus de délivrance de titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, que si le silence gardé par l'administration sur un recours gracieux fait naître une décision implicite de rejet qui peut être déférée au juge de l'excès de pouvoir, une décision explicite de rejet intervenue postérieurement se substitue à la première décision ; que, par suite, la requête de MmeB... tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour doit être regardée comme dirigée uniquement contre la décision explicite du 16 juillet 2013 ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

5. Considérant que MmeB... fait valoir qu'elle est mariée avec M. C...depuis le 14 août 2007 et que jusqu'à son arrivée en France en 2010, il venait régulièrement lui rendre visite en Algérie ; que son époux est titulaire d'une carte de résident algérien valable dix ans jusqu'au 30 novembre 2016 et possède toutes ses attaches familiales en France ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier, que la requérante est entrée en France le 22 octobre 2010 soit depuis moins de trois ans avant la date de la décision attaquée ; que le couple n'a pas d'enfant ; qu'avant d'arriver en France, l'intéressée a vécu jusqu'à l'âge de vingt-deux ans en Algérie, où elle n'allègue pas être dépourvue d'attaches familiales ; que si elle produit un certificat médical daté du 30 janvier 2014 d'une interne du pôle pluridisciplinaire de médecine du centre hospitalier universitaire de Grenoble qui atteste qu'elle est atteinte d'un syndrome dépressif, de troubles somatoformes et d'un symptomatologie évocatrice d'attaques de panique, ce certificat rédigé postérieurement à la date de la décision attaquée, ne suffit pas à établir qu'elle doit demeurer en France pour s'y faire soigner, ni que son état de santé serait tel qu'il rendrait indispensable la présence de son époux ; qu'eu égard aux conditions de son séjour en France, en édictant la décision de refus de séjour en litige, le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences qu'elle est susceptible d'entraîner pour l'intéressée ;

6. Considérant, enfin, que comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'arrêté attaqué, que le préfet n'a pas opposé à la requérante un refus de séjour au seul motif qu'elle n'entrait pas dans la catégorie des bénéficiaires du regroupement familial ; que cette circonstance n'a, au contraire, été évoquée que dans le cadre d'une appréciation d'ensemble de sa vie privée et familiale ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...). " ;

8. Considérant que MmeB... qui n'avait pas, à la date de la décision attaquée, demandé de titre de séjour en qualité d'étranger malade, produit en appel des certificats médicaux postérieurs à la date de la décision litigieuse, qui mentionnent notamment que son état de santé nécessite des soins spécialisés appropriés et que si les possibilités de traitement dans son pays d'origine ne sont pas connues du praticien qui en est l'auteur, un retour risquerait d'entraîner une aggravation de son tableau psychopathologique ; que l'inexistence d'un traitement approprié à sa pathologie en Algérie n'étant pas apportée, il n'est pas établi que son retour en Algérie pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour sa santé ;

9. Considérant, en second lieu, que pour les mêmes motifs que ceux susmentionnés relatifs à la légalité de la décision portant refus de titre de séjour, la requérante n'est fondée à soutenir ni que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni qu'elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de l'assignation à résidence :

10. Considérant, en premier lieu, que compte tenu de ce qui vient d'être dit, le moyen tiré par la voie de l'exception d'illégalité, de ce que la décision d'assignation à résidence serait illégal en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français sur laquelle elle se fonde doit être écarté ;

11. Considérant, en second lieu, que la décision susmentionnée ne porte par elle-même aucune atteinte au droit de MmeB... à mener une vie familiale normale ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par cette décision des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas fondé ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Grenoble et le magistrat désigné par le président de ce Tribunal ont rejeté ses demandes ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l 'Etat des frais exposés par elle et non compris dans les dépens doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de Mme B... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...épouse C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 17 février 2015 à laquelle siégeaient :

M. Martin, président de chambre,

Mme Courret, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 10 mars 2015.

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N° 14LY00666,...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00666
Date de la décision : 10/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTIN
Rapporteur ?: Mme Catherine COURRET
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : BORGES DE DEUS CORREIA

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-03-10;14ly00666 ?
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