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05/03/2015 | FRANCE | N°14LY03087

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 05 mars 2015, 14LY03087


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 octobre 2014, présenté par le préfet de la Côte-Or ;

Le préfet de la Côte-d'Or demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1302030 du 15 septembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 8 juillet 2013, par lequel il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. B...A..., lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a désigné le pays à destination duquel il pourra être éloigné, et lui a enjoint de réexaminer la situation de l'intéressé ;

Il sou

tient :

- que l'arrêté n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 octobre 2014, présenté par le préfet de la Côte-Or ;

Le préfet de la Côte-d'Or demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1302030 du 15 septembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 8 juillet 2013, par lequel il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. B...A..., lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a désigné le pays à destination duquel il pourra être éloigné, et lui a enjoint de réexaminer la situation de l'intéressé ;

Il soutient :

- que l'arrêté n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation de M. A...;

- que la situation de M. A...a fait l'objet d'un examen particulier ;

- que l'intervention du directeur de l'agence régionale de santé n'était pas exigée ;

- que le refus d'admission au séjour n'a méconnu ni les articles L. 313-11-7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- que la décision portant obligation de quitter le territoire n'est pas entachée d'illégalité par voie d'exception ;

- qu'il ne s'est pas cru tenu de prendre cette décision ;

- que cette décision n'a pas méconnu l'état de santé de l'intéressé ;

Vu l'ordonnance en date du 16 décembre 2014 fixant la clôture d'instruction au 9 janvier 2015 ;

Vu l'arrêté et le jugement attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 février 2015 :

- le rapport de M. Pruvost, président ;

1. Considérant que M.A..., ressortissant géorgien né le 1er octobre 1962, est, selon ses déclarations, entré en France le 9 novembre 2010 avec son épouse et leurs deux enfants ; qu'il a présenté une demande d'asile, laquelle a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 30 avril 2012, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 5 mars 2013 ; qu'il a obtenu un titre de séjour au titre de son état de santé ; que, par un arrêté du 8 juillet 2013, le préfet de la Côte d'Or a refusé de renouveler ce titre de séjour en assortissant cette décision d'une obligation de quitter le territoire français ; que le préfet de la Côte d'Or relève appel du jugement du 15 septembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé cet arrêté ;

2. Considérant que la décision rejetant la demande de renouvellement du titre de séjour présentée par M. A...a été prise au vu d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé, émis le 22 mai 2013, mentionnant que l'état de santé de M. A...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas de traitement approprié dans son pays d'origine ; que le préfet a cependant estimé, sur le fondement d'une attestation du médecin référent de l'ambassade de France en Géorgie, selon laquelle des traitements pour les affections psychiatriques et les maladies cardiaques et sanguines sont disponibles dans ce pays, que l'intéressé pouvait être soigné en Géorgie ; qu'il ressort des certificats médicaux produits au dossier que le cancer du rein avec néphrectomie dont souffre également M. A...a été opéré et ne nécessitait plus qu'une surveillance annuelle ; que l'intéressé, qui était porteur du virus de l'hépatite C, n'a pas fourni d'élément probant sur la gravité et l'évolution de sa maladie à la date de l'arrêté attaqué ; que, s'il s'est prévalu devant les premiers juges d'une analyse du 29 octobre 2013, d'ailleurs postérieure à cet arrêté, faisant état d'une charge virale importante, le certificat médical du 11 décembre 2013 qu'il a également versé au dossier se bornait à faire état d'une probabilité de lien entre l'amaigrissement et l'hépatite C et ne comportait aucun élément relatif à l'indication thérapeutique nécessitée par son état ; que compte tenu des éléments relatifs aux capacités locales en matière de soins, la circonstance que le coût du traitement de cette maladie serait élevé au regard du revenu moyen par habitant en Géorgie n'est pas, en soi, de nature à établir qu'en refusant de renouveler son titre de séjour, le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. A...: qu'il suit de là que le préfet de la Côte d'Or est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a estimé que le refus de renouvellement du titre de séjour dont il a été l'objet était entaché d'illégalité pour ce motif ;

3. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le Tribunal administratif de Dijon ;

4. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté susvisé vise les textes dont il fait application, mentionne la demande de titre de séjour présentée par M.A..., précise les circonstances de fait tenant à la situation personnelle de l'intéressé en rapport avec l'objet de cette demande et énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; que, par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de l'intéressé doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que la décision rejetant la demande d'admission au séjour présentée sur le fondement du 11° de l 'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été prise au vu d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé émis le 22 mai 2013, selon lequel l'état de santé de M. A...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas de traitement approprié dans son pays d'origine ; que M.A..., qui, dans sa demande de renouvellement de titre de séjour, n'avait pas fait état de circonstances humanitaires exceptionnelles, ne peut utilement soutenir que cette décision a été prise selon une procédure irrégulière faute pour le préfet d'avoir préalablement consulté pour avis le directeur de 1'agence régionale de santé ;

6. Considérant, en troisième lieu, que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ; et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l 'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d 'autrui. " ;

8. Considérant que M. A...n'établit pas que son appartenance à la minorité yézide aurait pour effet de le priver de la possibilité d'avoir accès à un traitement approprié à son état de santé en Géorgie ; que, s'il fait valoir que ses deux enfants majeurs vivent avec lui sur le territoire français, il n'est pas dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où résident ses parents et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de quarante-huit ans ; qu'ainsi, compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France, et quand bien même des membres de la famille du requérant, étaient, à la date de l'arrêté attaqué, dans l'attente de convocation de la Cour nationale du droit d'asile saisie de recours contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 10 juin 2013, le préfet de la Côte d'Or ne peut être regardé comme ayant porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en refusant de renouveler son titre de séjour ; que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ;

9. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant, qui a demandé un titre de séjour en qualité d'étranger malade a également invoqué l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet de la Côte-d'Or n'ayant pas non plus examiné sa demande sur ce fondement, le requérant ne peut utilement invoquer la méconnaissance de ces dispositions à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision prise sur son droit au séjour ;

10. Considérant, en sixième lieu, que, compte tenu de ce qui vient d'être dit, M. A... n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire contenue dans l'arrêté attaqué ;

11. Considérant, en septième lieu, que, contrairement à ce qui est soutenu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Côte d'Or se serait estimé tenu de prendre une mesure d'éloignement à l'encontre de M. A...après lui avoir refusé le droit au séjour ;

12. Considérant, en huitième lieu enfin, que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus sur la possibilité du requérant d'accéder à un traitement approprié dans son pays d'origine, le moyen tiré de ce que le préfet a méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en décidant de le renvoyer en Géorgie ne peut qu'être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Côte d'Or est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté susvisé ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1302030 du 15 septembre 2014, du Tribunal administratif de Dijon est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Dijon est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de 1'intérieur. Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Côte d'Or.

Délibéré après l'audience du 5 février 2015 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

M. Meillier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 mars 2015.

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N° 14LY03087


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY03087
Date de la décision : 05/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Dominique PRUVOST
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-03-05;14ly03087 ?
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