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19/02/2015 | FRANCE | N°13LY02390

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 19 février 2015, 13LY02390


Vu la requête, enregistrée le 2 septembre 2013, présentée pour Mme B...A..., domiciliée ... ;

Mme A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205854 du 11 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 juillet 2012 par laquelle le président du conseil général de l'Isère a refusé de renouveler son agrément d'accueillant familial, ensemble " la décision de refus du 4 octobre 2012 prise sur recours gracieux " ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) d'enjoind

re à l'administration de prendre une nouvelle décision accordant le renouvellement de l'agré...

Vu la requête, enregistrée le 2 septembre 2013, présentée pour Mme B...A..., domiciliée ... ;

Mme A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205854 du 11 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 juillet 2012 par laquelle le président du conseil général de l'Isère a refusé de renouveler son agrément d'accueillant familial, ensemble " la décision de refus du 4 octobre 2012 prise sur recours gracieux " ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre à l'administration de prendre une nouvelle décision accordant le renouvellement de l'agrément demandé dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge du département de l'Isère une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la décision du 4 octobre 2012 est illégale dès lors que l'avis de la commission de recours gracieux a été signé par la vice-présidente du conseil général de l'Isère qui n'a pas justifié d'une délégation de compétence au regard de l'article L. 3321-3 du code général des collectivités territoriales, que cet avis ne mentionne pas le nom des membres de la commission et leur qualité en méconnaissance de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, que les principes du contradictoire et du droit de la défense ont été méconnus par la commission de recours gracieux au motif que cette commission s'est fondée sur des pièces qui n'ont pas été préalablement et contradictoirement soumises à la discussion et a ignoré le mémoire et les pièces qu'elle a produits ;

- la décision du 23 juillet 2012 est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'elle est intervenue sans que soit mise en oeuvre la procédure d'injonction prévue à l'article L. 441-2 du code de l'action sociale et des familles, méconnaît le principe du contradictoire, viole l'article L. 441-1 alinéa 4 du code de l'action sociale et des familles, est entachée d'erreur de fait et d'erreur d'appréciation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance du 23 octobre 2013 fixant la clôture d'instruction au 6 décembre 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 novembre 2013, présenté pour le département de l'Isère, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme A...d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la requête qui n'est pas motivée au regard de la jurisprudence en l'absence de critique du bien-fondé du jugement attaqué, est ainsi irrecevable ;

- la demande présentée devant le Tribunal en tant qu'elle tend à l'annulation de la " décision du 4 octobre 2012 " est irrecevable dès lors que ce courrier ne contient pas de décision rejetant le recours gracieux mais informe seulement l'intéressée de l'avis émis par la commission de recours gracieux ;

- concernant la légalité de la " décision " du 4 octobre 2012, celle-ci est sans incidence sur le droit de la requérante au renouvellement de son agrément ; le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire est inopérant dès lors que la consultation préalable de la commission de recours gracieux et le respect d'une procédure contradictoire ne s'imposent pas dans le cadre de l'examen d'un recours gracieux et ne sont imposés par aucun texte ; le principe du contradictoire n'a pas été en outre méconnu ; les moyens tirés de ce que l'avis de la commission de recours gracieux méconnaît les dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 et de l'incompétence du signataire dudit avis sont inopérants ;

- concernant la légalité de la décision du 23 juillet 2012, les dispositions de l'article L. 441-2 du code de l'action sociale et des familles ne s'appliquent pas ; cette décision n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 441-1 alinéa 4 dudit code ; elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu l'ordonnance du 3 décembre 2013 reportant la clôture de l'instruction au 10 janvier 2014 ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 janvier 2014, présenté pour Mme A..., qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que :

- sa requête, qui est suffisamment motivée, est recevable ;

- le courrier du 4 octobre 2012 constitue une décision de refus pouvant être contestée ;

Vu l'ordonnance du 8 janvier 2014 portant réouverture de l'instruction en application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance du 3 juillet 2014 fixant la clôture d'instruction au 22 juillet 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 janvier 2015 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Morlat, avocat de Mme A...et de Me Riffard, avocat du département de l'Isère ;

1. Considérant que le président du conseil général de l'Isère a délivré en 1995 à Mme A... un agrément d'accueillant familial l'autorisant à accueillir des personnes âgées à temps complet et à titre permanent ; que cet agrément a été renouvelé plusieurs fois, le dernier agrément pour l'accueil de 3 personnes étant valable du 1er août 2007 au 31 juillet 2012 ; que Mme A...a sollicité le 18 avril 2012 le renouvellement de cet agrément ; que le président du conseil général a alors transmis cette demande à l'association ASMI afin de recueillir les éléments d'appréciation nécessaires à l'instruction de la demande, conformément aux dispositions de l'article R. 441-8 du code de l'action sociale et des familles ; que la commission technique d'agrément a, le 11 juillet 2012, émis un avis défavorable au renouvellement de cet agrément ; que, par un arrêté du 23 juillet 2012, le président du conseil général de l'Isère a refusé de renouveler cet agrément en estimant que les conditions d'accueil fixées à l'article L. 441-1 du code de l'action sociale et des familles n'étaient pas garanties du fait, d'une part, d'un manque d'hygiène sur le lieu d'accueil lié à la présence d'un nombre important de chiens et, d'autre part, d'une rigidité d'encadrement avec un non respect des rythmes et des besoins des personnes accueillies ; que Mme A...a formé un recours gracieux contre cette décision par un courrier du 25 juillet 2012 reçu par le département de l'Isère le 30 juillet 2012 ; que, par un courrier du 4 octobre 2012, la directrice adjointe de la santé et de l'autonomie a informé l'intéressée de ce que la commission de recours gracieux " a confirmé le refus de renouvellement d'agrément " et lui a transmis une copie de l'avis émis par cette commission ; que Mme A...a alors saisi le Tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à l'annulation de la décision initiale de refus du 23 juillet 2012 et " de la décision de refus du 4 octobre 2012 prise sur recours gracieux " ; que Mme A...relève appel du jugement du 11 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur la fin de non recevoir opposée à la requête par le département de l'Isère :

2. Considérant que Mme A...a présenté, dans le délai de recours, devant la Cour de céans, une requête d'appel qui ne constituait pas la seule reproduction littérale de son mémoire de première instance et énonçait à nouveau, de manière précise les critiques adressées aux décisions dont elle avait demandé l'annulation au tribunal administratif ; qu'une telle motivation répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée du défaut de motivation opposée par le département de l'Isère ne peut être accueillie ;

Sur la fin de non recevoir opposée par le département de l'Isère à la demande présentée devant le Tribunal :

3. Considérant que si, comme le soutient le département de l'Isère, le courrier du 4 octobre 2012 ne constitue pas une décision rejetant le recours gracieux formé par Mme A...mais a pour seul objet de lui notifier l'avis émis le 2 octobre 2012 par la commission de recours gracieux et ne fait pas ainsi grief à l'intéressée, il ressort des pièces du dossier qu'une décision implicite de rejet du recours gracieux est nécessairement née le 30 septembre 2012 à minuit en raison du silence gardé pendant plus de deux mois par l'autorité administrative sur ce recours et de l'absence de décision expresse prise par l'administration ; que la demande présentée par Mme A... devant les premiers juges dirigée contre " la décision de refus du 4 octobre 2012 prise sur recours gracieux " doit être ainsi regardée comme étant en réalité dirigée contre la décision implicite du 30 septembre 2012 rejetant ce recours gracieux ; que, par suite, Mme A..., qui n'est pas recevable à contester une " décision du 4 octobre 2012 portant rejet de son recours gracieux" devant le Tribunal et la Cour de céans, est en revanche recevable, tant devant le Tribunal que devant la Cour, à demander l'annulation non seulement de la décision initiale de refus du 23 juillet 2012 mais aussi de la décision implicite du 30 septembre 2012 confirmant ce refus de renouvellement d'agrément qui lui fait grief ;

Sur la légalité des décisions :

4. Considérant qu'aux termes du 4ème aliéna de l'article L. 441-1 du code de l'action sociale et des familles : " Pour accueillir habituellement à son domicile, à titre onéreux, des personnes âgées ou handicapées adultes n'appartenant pas à sa famille jusqu'au quatrième degré inclus et, s'agissant des personnes handicapées adultes, ne relevant pas des dispositions de l'article L. 344-1, une personne ou un couple doit, au préalable, faire l'objet d'un agrément, renouvelable, par le président du conseil général de son département de résidence qui en instruit la demande. / La personne ou le couple agréé est dénommé accueillant familial. / La décision d'agrément fixe, dans la limite de trois, le nombre de personnes pouvant être accueillies. / L'agrément ne peut être accordé que si les conditions d'accueil garantissent la continuité de celui-ci, la protection de la santé, la sécurité et le bien-être physique et moral des personnes accueillies, si les accueillants se sont engagés à suivre une formation initiale et continue organisée par le président du conseil général et si un suivi social et médico-social de celles-ci peut être assuré. Tout refus d'agrément est motivé. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 441-1 du même code : " Pour obtenir l'agrément mentionné à l'article L. 441-1 du présent code, la personne ou le couple proposant un accueil à son domicile, à titre habituel et onéreux, de personnes âgées ou handicapées adultes doit : 1° Justifier de conditions d'accueil permettant d' assurer la santé, la sécurité, le bien-être physique et moral des personnes accueillies (...) 5° Accepter qu'un suivi social et médico-social des personnes accueillies puisse être assuré, notamment au moyen de visites sur place. " ; que l'article R. 441-7 de ce code ajoute que : " Dans l'année qui précède la date d'échéance de la décision d'agrément ou de renouvellement d'agrément, le président du conseil général indique, par lettre recommandée avec avis de réception, à l'accueillant familial qu'il doit présenter une demande de renouvellement d'agrément quatre mois au moins avant ladite échéance s'il entend continuer à en bénéficier. / La demande de renouvellement de l'agrément est déposée et instruite dans les mêmes conditions que la demande initiale. (...) " ; que l'article R. 441-8 du même code prévoit que : " Pour réunir les éléments d'appréciation nécessaires à l'instruction des demandes d'agrément ou de renouvellement, le président du conseil général peut faire appel au concours de personnes morales de droit public ou de droit privé relevant des 6° et 7° du I de l'article L. 312-1 du présent code ayant conclu à cet effet une convention avec le département. / Les accueillants familiaux sont tenus de fournir aux services départementaux ainsi qu'aux institutions ou organismes qu'ils désignent à cet effet tous les renseignements qui leur sont demandés et sont en relation directe avec l'accomplissement de leurs missions. " ;

5. Considérant, en premier lieu, que pour refuser le renouvellement de l'agrément, le président du conseil général de l'Isère s'est fondé sur un motif tiré d'un manque d'hygiène sur le lieu d'accueil lié à la présence d'un nombre important de chiens ;

6. Considérant que le département expose, à l'appui de ce motif, que la fille d'une personne accueillie par Mme A...avait déposé une plainte auprès des services du conseil général le 28 avril 2011 pour notamment un manque d'hygiène de la maison en raison de la présence d'un nombre important d'animaux, soit dix-sept petits chiens et un grand chien ; que le département relève ensuite que l'association Asmi, en charge du suivi des agréments, a effectué une visite au domicile de l'intéressée le 16 mai 2011 à la suite de cette plainte et a alors relevé dans un courrier du 7 juin 2011 la présence en surnombre de chiens dans les lieux de vie communs, ainsi que dans la partie extérieure sur laquelle donne la chambre du rez-de-chaussée réservée à l'accueil, en soulignant que " les questions d'hygiène sont également à interroger " ; que le département fait enfin valoir que le chef d'autonomie du territoire a signalé, le 3 juillet 2012, avoir reçu le rapport établi par la référente du centre communal d'action sociale (CCAS) de Fontaine venue en visite pour voir une personne accueillie et dont il résulte que Mme A... élevait une " vingtaine de chiens ", que ces animaux utilisaient des espaces communs de l'habitation, que la personne accueillie avait montré à cette référente des coussins pleins de poils de chiens, qu'il y avait une forte odeur de chien dans l'habitation ;

7. Considérant qu'il ressort cependant des pièces du dossier que tant les services du département de l'Isère que les familles ont toujours eu connaissance de la présence de chiens, dont un seul était de " grande taille ", dans la propriété, composée d'une maison et d'un terrain de 500 m², de la requérante qui avait un agrément depuis 1995, que la plupart de ces animaux vivaient dans un espace séparé des lieux de vie, seuls quatre petits chiens de race Chihuahua ainsi que le chien de " grande taille " étant présents dans ces espaces de vie ; qu'il ressort en outre de deux attestations de deux vétérinaires que les chiens de l'intéressée étaient régulièrement suivis, qu'ils étaient en excellent état sanitaire et étaient bien tenus, l'un des vétérinaires déclarant en outre avoir constaté une hygiène et une propreté d'un " niveau très appréciable " lors de ses visites, et mentionnant par ailleurs que Mme A...avait décidé de réduire le nombre de ses animaux ; que l'intéressée, qui fait valoir qu'elle a accueilli 13 personnes au cours des années 1995 à 2012, a produit en outre de nombreux témoignages de personnes accueillies et des membres de leurs familles ne relevant aucun manque d'hygiène, aucune autre plainte de familles n'ayant été relevée concernant la présence de ces chiens ; que les attestations faites par les professionnels de santé intervenant chez l'intéressée pour s'occuper des personnes accueillies ne relèvent pas davantage de manquement de la part de Mme A...concernant les soins apportés et ne signalent pas de manquements à des règles d'hygiène, aucun signalement provenant de professionnels de santé ni aucune observation de la part des services du département n'ayant été effectué à raison de la présence de chiens avant la plainte de 2011 ;

8. Considérant que, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, en estimant que les conditions d'hygiène n'étaient pas remplies du fait de la présence de nombreux chiens au domicile de MmeA..., le président du conseil général s'est fondé sur un motif entaché d'une erreur d'appréciation ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que le département de l'Isère invoque un nouveau motif lié à la présence des chiens tiré des " risques de chute " ; que toutefois, et alors que la plupart des chiens vivaient dans un espace séparé des lieux de vie fréquentés par les personnes accueillies et que le département n'avait émis aucune observation au sujet d'un tel risque, la seule présence des chiens et leur nombre ne suffisent pas à regarder les personnes accueillies comme exposées à un risque de chute particulier conduisant à estimer que les conditions d'accueil ne permettaient pas d'assurer leur sécurité ;

10. Considérant, en troisième lieu, que pour refuser le renouvellement de son agrément, le président du conseil général s'est fondé sur un second motif tiré de la rigidité d'encadrement de Mme A...lié à un non-respect du rythme et des besoins des personnes accueillies ;

11. Considérant que le département se prévaut ainsi d'un courrier du 16 septembre 2007 du Service des soins infirmiers à domicile (SSIAD) de l'Association pour l'aide à domicile aux personnes âgées (ADPA) informant le directeur de l'ASMI/OMSR, de l'arrêt d'une intervention en raison d'exigences d'organisation du SSIAD pour partie difficiles à harmoniser avec le propre fonctionnement de la famille d'accueil et de ce que Mme A...n'avait pas systématisé la nécessité d'une sieste pour respecter la fatigabilité des personnes accueillies et prévenir les problèmes cutanés d'appui en dépit des demandes que le SSIAD avait formulées en ce sens ; qu'il expose par ailleurs que la plainte déposée le 28 avril 2011 par la fille d'une personne accueillie portait, outre sur la présence des chiens, sur les couchers, levers et petits-déjeuners trop tardifs, ainsi que le refus d'une chambre pour la sieste ; qu'il fait état en outre de ce que le directeur de l'ASMI/OMSR a indiqué le 7 juin 2011 à Mme A...qu'il était anormal qu'elle laisse une personne âgée dépendante avec une protection non changée entre 20 heures 30, heure du coucher, et 11 heures 30 - 12 heures le lendemain matin, heure d'intervention des infirmières, que les personnes accueillies devaient pouvoir circuler entre leur chambre et les lieux de vie communs à tout moment de la journée, et notamment avant le passage infirmier du matin, et insistait sur le fait qu'il n'était pas souhaitable que les personnes soient confinées dans leur chambre à l'étage jusqu'à l'arrivée de l'infirmière en fin de matinée, en rappelant que ce grief lui avait déjà été adressé en 2007 ; qu'il relève enfin que l'intéressée ne s'est pas remise en question dans son courrier en réponse du 20 juin 2011, que le rapport du référent social du CCAS de Fontaine a relevé qu'une personne accueillie se couchait à 23 heures, que cette personne ne pouvait se lever qu'à 10 heures en raison de ce coucher tardif, que Mme A...estimait que 12 heures d'intervalle entre coucher et lever étaient nécessaires, que l'infirmière ne passait qu'à 11 heures 30 pour la toilette, le département indiquant aussi que l'intéressée n'a pas autorisé les professionnels à entrer dans son domicile lors d'une visite inopinée le 10 juillet 2012 ;

12. Considérant qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que le courrier en date du 16 septembre 2007 du Service des soins infirmiers à domicile (SSIAD) dont se prévaut le département a également mentionné qu'il reconnaissait les qualités d'accueil et de prise en compte des besoins des personnes accueillies par MmeA..., même s'il était opposé sur les critères de respect de la personne et de qualité des soins ; que la lettre du 4 octobre 2012 du conseil général de l'Isère notifiant l'avis de la commission de recours gracieux, mentionnait également que si la requérante ne correspondait " plus au cadre de l'accueil familial ", elle reconnaissait " la grande qualité d'accueil " qu'elle a pu proposer " pendant plusieurs années " ; qu'il ressort en outre des diverses attestations des professionnels de santé intervenus au domicile de l'intéressée pour suivre les personnes accueillies produites par la requérante tant en première instance qu'en appel que ces professionnels ont relevé la qualité des soins et des services prodigués par la requérante à ces personnes, le médecin les qualifiant d'irréprochables ; que, notamment, les infirmières ont relevé, concernant le rythme des personnes accueillies, confirmant en cela les déclarations de l'intéressée, qu'outre le fait que le nombre de leur passage était effectué en collaboration avec le médecin et le besoin de la personne accueillie, Mme A... pouvait intervenir si besoin était entre les changes et qu'aucun manquement à ce sujet n'a été relevé, notamment pour la personne la plus fragile pour laquelle elles relèvent un état cutanée parfait et une absence d'escarres ; qu'elles ont en outre précisé, concernant la liberté de circulation dans la maison, que les conditions de déplacement sont liées à l'état d'invalidité des pensionnaires, et qu'ainsi les personnes à l'étage prenaient leur petit-déjeuner dans leur chambre, en attendant leur arrivée, quand leur mobilité ne leur permettait pas de se déplacer, en soulignant que les faire descendre pour déjeuner puis monter pour les soins en l'espace d'un petit laps de temps " serait impossible ", inutile voire " trop fatiguant ", et que les personnes se déplaçaient librement ; que, concernant la plainte du 28 avril 2011 dont fait état le département, ces mêmes infirmières ont attesté s'être occupée de la personne âgée concernée durant cinq jours comme MmeA..., que cette personne prise en charge avait une mobilité très réduite contrairement aux descriptions faites par sa fille, qu'elle avait de gros problèmes d'incontinence et était " peu coopérante ", sa prise en charge s'étant révélée " très compliquée et inattendue pour MmeA... " ; qu'il ne ressort pas en outre des pièces du dossier que d'autres plaintes provenant de familles des personnes accueillies aient été formulées contre l'intéressée et il est constant que, pour l'accueil de ces personnes, Mme A... se faisait aider par une auxiliaire de vie deux heures par jour pour la prise des repas et l'aide aux personnes accueillies, ainsi que pour le ménage ; que, par ailleurs, Mme A..., qui a procédé aux corrections demandées par le département concernant l'aménagement des locaux pour répondre aux besoins des pensionnaires, fait état sans être sérieusement contredite de ce que, concernant le fait qu'une des personnes se couchait tard, à 23 heures 30, et se levait ensuite tard, ni cette personne, ni un membre de sa famille ne lui a jamais signalé qu'elle souhaitait suivre un autre rythme, cette personne l'ayant seulement signalé à l'assistante sociale lors d'une visite ; qu'il ressort enfin des nombreux témoignages produits par la requérante qu'à l'exception de la plainte portant sur une pensionnaire qui n'est restée chez elle que cinq jours, les familles étaient satisfaites et ont déclaré que l'accueil était d'une grande qualité ;

13. Considérant que, compte tenu de tous ces éléments, et même si l'intéressée pouvait améliorer ses conditions d'accueil notamment concernant la prise en compte des rythmes et des besoins des personnes accueillies, le président du conseil général, en estimant que les conditions d'accueil n'étaient pas assurées en raison d'une rigidité d'encadrement de l'intéressée par le non-respect du rythme et des besoins des personnes accueillies, a entaché sa décision d'erreur d'appréciation ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 juillet 2012 par laquelle le président du conseil général de l'Isère a refusé de procéder au renouvellement de son agrément d'accueillant familial, ainsi que de la décision implicite du 30 septembre 2012 confirmant ce refus ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution." ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 dudit code : "Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet." ;

16. Considérant que le présent arrêt, qui annule la décision de refus de renouvellement de l'agrément de Mme A...et la décision implicite confirmant ce refus, implique nécessairement, eu égard au motif sur lequel elle se fonde, que le président du conseil général de l'Isère, qui n'invoque aucun changement dans les circonstances de fait et de droit qui s'y opposerait, délivre l'agrément sollicité ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au président du conseil général de l'Isère de délivrer à Mme A...cet agrément dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que, d'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que MmeA..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse au département de l'Isère une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département de l'Isère le paiement à ce titre, à MmeA..., d'une somme de 1 500 euros ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1205854 du 11 juillet 2013 du Tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : La décision du 23 juillet 2012 par laquelle le président du conseil général de l'Isère a refusé de procéder au renouvellement de l'agrément d'accueillant familial de Mme A..., ainsi que la décision implicite du 30 septembre 2012 confirmant ce refus sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au président du conseil général de l'Isère de délivrer à Mme A...l'agrément d'accueillant familial dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le département de l'Isère versera à Mme A...une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A...et au département de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 29 janvier 2015 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 février 2015.

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N° 13LY02390


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY02390
Date de la décision : 19/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

04-02 Aide sociale. Différentes formes d'aide sociale.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : DAUPHIN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-02-19;13ly02390 ?
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