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29/01/2015 | FRANCE | N°14LY01228

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 29 janvier 2015, 14LY01228


Vu la requête, enregistrée le 18 avril 2014 présentée pour Mme A...B..., demeurant ...;

Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1307353 du 14 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 8 juillet 2013, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel elle sera reconduite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions sus

mentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal de lui délivrer un...

Vu la requête, enregistrée le 18 avril 2014 présentée pour Mme A...B..., demeurant ...;

Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1307353 du 14 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 8 juillet 2013, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel elle sera reconduite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire de réexaminer sa demande et, dans l'attente, de la munir d'une autorisation provisoire de séjour assortie d'un droit au travail;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que ce dernier renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;

MmeB... soutient que ;

S'agissant de la décision lui refusant le droit au séjour :

- la décision est entachée d'erreur de droit, dès lors que, puisqu'elle était victime de violences conjugales le préfet aurait dû lui appliquer les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux victimes de violence survenues entre leur entrée sur le territoire et la délivrance d'un titre de séjour puisque, contrairement à ce qu'ont considéré les services de la préfecture et les premiers juges, sa demande n'était pas une demande de renouvellement d'un titre précédemment délivré mais une première demande de carte de séjour ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que la rupture de la communauté de vie est bien la conséquence des violences conjugales qu'elle a subies et eu égard à l'importance des attaches privées et familiales qui sont les siennes en France ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à l'importance des attaches privées et familiales qui sont celles en France de la requérante ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour qui la fonde ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à l'importance de ses attaches privées et familiales en France ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 3 juillet 2014 fixant la clôture d'instruction au 24 juillet 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations ;

Vu la décision du 18 février 2014, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme B...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2015 le rapport de

M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur ;

1. Considérant que Mme A...B..., née le 30 août 1992 à Menzel Kamel (Tunisie) de nationalité tunisienne, a épousé dans cette ville, le 1er juillet 2011, un ressortissant français ; que Mme B...a bénéficié d'un visa de long séjour portant la mention " vie privée et familiale " valable du 30 mars 2012 au 31 mars 2013 délivré par le consulat de France à Tunis ; qu'elle a sollicité le 25 mars 2013 un titre de séjour sur le fondement de l'article 10 bis alinéa a) de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ; que, par décisions en date du 8 juillet 2013, le préfet du Rhône a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera renvoyée ; que Mme B...demande l'annulation du jugement n° 1307353 du 14 janvier 2014, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 8 juillet 2013 ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête ;

En ce qui concerne le refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié : " Sans préjudice des dispositions du b) et du d) de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français " ; qu'aux termes de l'article L. 313-12 du même code : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger en raison des violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative peut accorder le renouvellement du titre. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale ". (...) " ;

3. Considérant que si Mme B...soutient qu'elle a été, en mai et juin 2012, victime de violences de la part de son époux telles qu'elle ne pouvait reprendre une vie conjugale au sein du domicile familial, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des mentions contenues dans le procès-verbal d'audition de Mme B...par les services du commissariat de police de Vénissieux/St Fons/Feyzin dressé le 5 mars 2013, soit neuf mois après les faits, que la communauté de vie entre les époux B...ait été rompue ou rendue impossible en raison de violences conjugales; que la réalité des violences alléguées ne résulte pas plus des certificats médicaux produits qui se bornent à retranscrire les déclarations de la requérante ; que, par suite Mme B...n'est, en tout état de cause, pas fondée à se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si Mme B...fait valoir qu'elle a en France un frère, un oncle et une tante ainsi que des cousins et qu'elle a entrepris une formation d'aide à la personne financée par le conseil régional, elle dispose d'attaches familiales importantes dans son pays d'origine où résident ses parents et où elle a passé la plus grande partie de sa vie avant son arrivée récente en France ; que, dans ces conditions, le préfet du Rhône n'a pas, en prenant sa décision, porté au droit au respect de la vie privée et familiale de la requérante une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise ; que, par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision attaquée n'est pas plus entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, que, comme il a été dit ci-dessus, la décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme B...n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen soulevé à l'encontre de la décision d'éloignement et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la précédente décision, doit être écarté ;

7. Considérant en second lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposés dans le cadre de l'examen du refus de titre, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision du 8 juillet 2013 portant obligation de quitter le territoire méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions attaquées, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, une quelconque somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées sur ce fondement par Mme B...doivent, par suite, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 8 janvier 2015 à laquelle siégeaient :

M. Wyss, président de chambre,

M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

Mme Samson Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 janvier 2015.

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N° 14LY01228


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01228
Date de la décision : 29/01/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: M. Olivier MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : ZOCCALI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-01-29;14ly01228 ?
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