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04/12/2014 | FRANCE | N°14LY01498

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 04 décembre 2014, 14LY01498


Vu la requête, enregistrée le 9 mai 2014, présentée par le préfet du Rhône ;

Le préfet de du Rhône demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400395 du 8 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 14 novembre 2013 portant refus de délivrer un titre de séjour à M. B...A..., l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et fixant le pays de destination, lui a enjoint de délivrer à M. A...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux m

ois à compter de sa notification et a mis à sa charge une somme de 800 euros à vers...

Vu la requête, enregistrée le 9 mai 2014, présentée par le préfet du Rhône ;

Le préfet de du Rhône demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400395 du 8 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 14 novembre 2013 portant refus de délivrer un titre de séjour à M. B...A..., l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et fixant le pays de destination, lui a enjoint de délivrer à M. A...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de sa notification et a mis à sa charge une somme de 800 euros à verser à Me Zoccali au titre des frais non compris dans les dépens ;

2°) de rejeter la demande de M. A...;

Il soutient que :

- son appel est recevable car présenté dans le délai de recours contentieux ;

- c'est à tort que le Tribunal a estimé que les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile étaient méconnues, en considérant que la prise en charge médicale appropriée n'était pas disponible en Guinée, dès lors que la circonstance que les documents qu'il avait produits étaient anciens ne pouvait suffire à les écarter comme insuffisamment probants, que les structures sanitaires et les soins pour toutes les pathologies existent en Guinée et sont à même d'apporter un suivi à l'intéressé, que M. A...n'a pas de traitement médical en cours ;

- la Cour, saisie dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, fera droit à ses conclusions aux fins de rejet développées en première instance ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2014, présenté pour M. B...A...qui conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge de renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Il soutient que c'est à juste titre que le Tribunal a fait droit à sa demande, que les pièces produites par le préfet ne démontrent pas l'existence d'un traitement approprié, le caractère d'exceptionnelle gravité de son état de santé n'étant pas contesté et la gravité et la complexité de la pathologie dont il est atteint étant établies ;

Vu la décision du 18 juillet 2014, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. A...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 2014 :

- le rapport de Mme Samson-Dye, premier conseiller,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,

- les observations de MeC..., représentant le préfet du Rhône et de Me Zoccali, représentant M. A...;

1. Considérant que le préfet du Rhône relève appel du jugement du 8 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 14 novembre 2013 portant refus de délivrer un titre de séjour à M. B...A..., l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et fixant le pays de destination ;

Sur la légalité de l'arrêté en litige :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) " ;

3. Considérant que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;

4. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

5. Considérant que, pour annuler le refus de titre de séjour, le Tribunal a relevé que M. A...souffrait de problèmes hépatiques dont le caractère d'extrême gravité n'était pas contesté et que la disponibilité des soins appropriés en Guinée n'était pas établie ;

6. Considérant que, par avis du 18 septembre 2013, le médecin inspecteur de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de M. A... nécessitait une prise en charge dont le défaut pouvait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'un traitement approprié n'existait pas dans son pays d'origine, et que les soins nécessités par son état de santé devaient être poursuivis pendant une durée de douze mois ;

7. Considérant que le préfet fait valoir qu'à la date de la décision litigieuse, M. A... ne bénéficiait d'aucun traitement mais faisait seulement l'objet d'un suivi ; que, cependant, une surveillance est susceptible d'être regardée comme une prise en charge médicale, au sens des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le suivi régulier auquel M. A...est assujetti, qui inclut notamment diverses analyses portant sur la présence du virus de l'hépatite B constitue, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, un préalable indispensable à l'éventuelle mise en oeuvre d'un traitement médicamenteux adapté ;

8. Considérant que, pour remettre en cause la pertinence de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé quant à l'existence d'une prise en charge appropriée en Guinée, le préfet n'apporte aucun élément précis relatif au diagnostic et au suivi des troubles hépatiques, mais seulement des éléments généraux sur la prise en charge médicale en Guinée ; que, dans les circonstances de l'espèce, et eu égard à la nature et à la spécificité des catégories de pathologies susceptibles d'être en cause, ces éléments généraux ne peuvent être regardés comme suffisants pour établir l'existence d'une prise en charge appropriée en Guinée ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions en litige ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Zoccali, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Zoccali de la somme de 1 000 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet du Rhône est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Me Zoccali une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Zoccali renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...A....

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 13 novembre 2014, où siégeaient :

- M. Wyss, président de chambre,

- M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

- Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 décembre 2014.

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N° 14LY01498

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01498
Date de la décision : 04/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : ZOCCALI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-12-04;14ly01498 ?
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