Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 2014 au greffe de la Cour, présentée pour Mme C... A...épouseD..., domiciliée... ;
Mme A...épouse D...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1304490 du 30 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 16 juillet 2013 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de sa destination ;
2°) d'annuler cet arrêté du préfet de l'Isère ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, d'une part, si la décision attaquée devait être annulée pour un motif de forme, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir, et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; d'autre part, si la décision devait être annulée pour un motif de fond, d'enjoindre à ce préfet de lui délivrer le certificat de résidence sollicité lui permettant d'exercer une activité salariée en France, dans les trente jours de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros au profit de son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;
La requérante soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur de fait en ce qu'elle mentionne qu'elle aurait mis fin à la communauté de vie avec son mari et qu'une procédure de divorce serait en cours alors qu'elle n'a pas quitté le domicile familial de sa propre initiative ; cette décision méconnaît les stipulations de l'article 6 5. de l'accord franco-algérien modifié et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et d'un défaut d'examen de sa situation compte tenu de l'excellence de ses efforts d'intégration en France et du fait qu'elle ne dispose plus, en tant que femme divorcée, d'un espoir de réintégration dans sa communauté en Algérie ;
- les décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant l'Algérie comme pays de son renvoi sont illégales en raison de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur sa situation personnelle ; le préfet n'avait pas compétence liée pour prendre à son encontre une obligation de quitter le territoire français ;
Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;
Vu l'ordonnance en date du 8 avril 2014 fixant la clôture d'instruction au 16 mai 2014 à 16 heures 30, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 mai 2014, présenté par le préfet de l'Isère, qui conclut au rejet de la requête comme étant non fondée ;
Il soutient que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés pour les mêmes motifs que ceux mentionnés dans son mémoire en défense produit en première instance ;
Vu l'ordonnance en date du 19 mai 2014 reportant l'instruction du 16 mai 2014 au 6 juin 2014 à 16 heures 30, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de Grande Instance de Lyon (section administrative d'appel), en date du 18 février 2014, accordant à Mme C...A...épouse D...l'aide juridictionnelle totale ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application des articles L. 732-1 et R. 732-1-1 du code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2014 :
- le rapport de Mme Mear, président-rapporteur ;
1. Considérant que Mme C...A...épouseD..., ressortissante algérienne, née le 7 juillet 1983, a épousé en Algérie le 23 janvier 2011 un ressortissant français, M. B... D... ; qu'elle a obtenu un certificat de résidence algérien mention " vie privée et familiale " en qualité de conjointe d'un ressortissant français valable du 9 avril 2012 au 8 avril 2013 ; que, par un arrêté du 16 juillet 2013, le préfet de l'Isère a refusé de renouveler ce certificat de résidence au motif d'une rupture de la communauté de vie des époux depuis le 6 avril 2012 ; que Mme A...épouse D...relève appel du jugement n° 1304490 du 30 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du préfet de l'Isère ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que Mme A...épouse D...soutient que la décision attaquée est entachée d'une erreur de fait en ce qu'elle mentionnerait qu'elle serait à l'origine de la rupture de la vie commune avec son mari alors qu'elle aurait en réalité été ramenée de force en Algérie par sa belle-famille ; que, toutefois, la décision en cause se borne à mentionner que " l'intéressée a quitté le domicile conjugal le 6 avril 2012 pour revenir en Algérie " et ce faisant ne précise ni qu'elle serait responsable de la rupture de sa communauté de vie avec son époux ni les motifs et les conditions de son retour en Algérie ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision litigieuse serait entachée d'une erreur de fait ne peut qu'être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A...épouse D...est entrée en France le 27 décembre 2011 sous couvert d'un visa de quatre vingt dix jours pour rejoindre son mari avec lequel elle s'était mariée en Algérie le 23 janvier 2011; qu'elle est repartie dans ce pays le 6 avril 2012 ; que son époux a déposé une requête en divorce le 27 avril 2012 ; qu'elle a obtenu un certificat de résidence algérien en qualité de conjointe de français valable du 9 avril 2012 au 8 avril 2013 ; qu'elle est revenue en France le 6 novembre 2012 ; que la communauté de vie a cessé avec son mari dès le 6 avril 2012 ; qu'une ordonnance de non conciliation a été rendue le 11 décembre 2012 ; qu'ainsi, à la date de la décision attaquée, le 16 juillet 2013, la requérante, qui vivait séparée de son mari, ne résidait en France, que depuis huit mois ; que, dans ces conditions, compte tenu notamment de la rupture de sa communauté de vie avec son mari et de la durée de sa présence en France, la requérante, dont la famille, soit ses parents, ses frères et sa soeur résident en Algérie et qui n'a pas d'attaches familiales en France, n'est pas fondée à soutenir, nonobstant ses réels efforts d'intégration et les difficultés de réinsertion dans la société algérienne en qualité de future femme divorcée dont elle fait état, que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des objectifs de cette mesure ; qu'elle n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que cette décision a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni, en tout état de cause, celles de l'article 6 5. de l'accord franco-algérien modifié ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que Mme A...épouse D...n'est pas fondée à soutenir que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ; qu'elle n'est pas davantage fondée pour les motifs susmentionnés à soutenir que cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi :
6. Considérant, en premier lieu, que, compte tenu de ce qui vient d'être exposé, le moyen tiré par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour doit être écarté ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) " ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A...épouse D...s'est vu refuser le renouvellement d'un titre de séjour par décision du 16 juillet 2013 ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 16 juillet 2013, elle était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ; qu'il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet de l'Isère ne s'est pas estimé en situation de compétence liée pour prendre sa décision d'obligation de quitter le territoire français et a procédé à un examen particulier de sa situation avant de prendre sa décision ;
9. Considérant, en troisième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux invoqués en ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, les moyens tirés de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur sa situation personnelle doivent être écartés ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...épouse D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 16 juillet 2013 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A...épouseD..., n'appelle pas de mesures d'exécution ; que ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent, dès lors, être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que la demande présentée par le conseil de Mme A...épouse D...tendant à l'application à son profit des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peut qu'être rejetée dès lors que la requérante est la partie perdante à l'instance ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...épouse D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...épouse D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 9 octobre 2014 à laquelle siégeaient :
Mme Mear, président,
Mme Bourion, premier conseiller,
M. Meillier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 octobre 2014.
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N° 14LY00169
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