La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/07/2014 | FRANCE | N°12LY24986

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 03 juillet 2014, 12LY24986


Vu l'ordonnance n° 372825 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, attribué à la Cour administrative d'appel de Lyon le jugement de l'affaire n° 12MA04986 ;

Vu la requête, enregistrée le 18 décembre 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour M. B...D..., domicilié ...;

M. D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202340 du 22 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande

tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 juillet 2012 par lequel le préfet du Ga...

Vu l'ordonnance n° 372825 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, attribué à la Cour administrative d'appel de Lyon le jugement de l'affaire n° 12MA04986 ;

Vu la requête, enregistrée le 18 décembre 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour M. B...D..., domicilié ...;

M. D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202340 du 22 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 juillet 2012 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a désigné le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté du 31 juillet 2012 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Gard, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 196 euros au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- qu'elle est entachée d'erreur de droit en ce qu'elle se fonde sur l'absence de visa de son contrat de travail par les autorités compétentes alors même qu'il était déjà présent sur le territoire français et qu'il appartenait au préfet d'assurer lui-même la transmission du contrat au visa de la Direccte ;

- que le tribunal a substitué d'office, sans respecter le principe du contradictoire, la base légale tirée de l'article R. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- qu'elle est entachée d'erreur de droit en ce que le préfet, s'il lui a délivré une autorisation provisoire de séjour, s'est abstenu de lui remettre une autorisation de travail conformément aux dispositions de l'article R. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- qu'elle est entachée d'un vice d'incompétence à défaut de justification d'une délégation de signature régulière du préfet au profit de l'auteur de l'acte attaqué ;

- qu'elle est insuffisamment motivée du fait de l'inconventionnalité de l'article L. 511-1-I au regard de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 ;

- qu'elle est entachée d'une erreur de droit en ce que le préfet s'est cru lié par la décision portant refus de titre de séjour pour prendre une décision portant obligation de quitter le territoire français, méconnaissant ainsi l'étendue de sa compétence ;

Sur le délai de départ volontaire :

- que le préfet s'est abstenu de motiver le fait qu'il n'accordait pas un délai de départ volontaire supérieur à un mois ;

Vu l'arrêté et le jugement attaqués ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Marseille, en date du 14 mai 2013, admettant M. D...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu l'ordonnance en date du 16 décembre 2013 fixant la clôture d'instruction au 10 janvier 2014 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 juin 2014, présenté par le préfet du Gard postérieurement à la clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord du 9 octobre 1987 modifié entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume du Maroc ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application des articles L. 732-1 et R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2014 :

- le rapport de Mme Bourion, premier conseiller ;

- les observations de MeC..., substituant MmeA..., pour M.D... ;

1. Considérant que M.D..., ressortissant marocain, né en 1976, est entré pour la première fois en France en 2004 dans le cadre d'un contrat de travail saisonnier ; que, le 19 avril 2008, un titre de séjour valable jusqu'au 18 avril 2011, en qualité de travailleur saisonnier, lui a été accordé ; qu'il en a demandé le renouvellement le 15 mars 2011 ; qu'il n'a pas obtenu de réponse, mais a fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français en date du 24 novembre 2011 qui a été annulée par le Tribunal administratif de Nîmes le 1er mars 2012 ; que M. D...a alors sollicité le réexamen de sa situation en qualité de " salarié " ; qu'il relève appel du jugement en date du 22 novembre 2012, par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 31 juillet 2012 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français à destination du pays dont il a la nationalité, dans le délai d'un mois ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que le requérant soutient que le tribunal aurait substitué d'office à la base légale celle tirée de l'article R. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans respecter le principe du contradictoire ; qu'il résulte toutefois des termes de l'article R. 313-15 précité que : " Pour l'application du 1° de l'article L. 313-10, l'étranger qui demande la carte de séjour mention " salarié " présente, outre les pièces prévues à l'article R. 313-1 à l'exception du certificat médical prévu au 4° de cet article, un contrat de travail conclu pour une durée égale ou supérieure à douze mois avec un employeur établi en France " ; qu'ainsi, le Tribunal administratif n'a pas procédé à une substitution de base légale mais s'est borné à appliquer le texte précité pris en application de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le jugement du tribunal serait irrégulier doit être écarté ;

Sur la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail (...) La carte porte la mention "salarié" lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. Elle porte la mention "travailleur temporaire" lorsque l'activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois.(...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum (...) reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention "salarié". (...) " ; que le titre de séjour délivré en vertu de ces stipulations équivaut au titre de séjour portant la mention " salarié " prévu par les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans que puisse être opposée la situation de l'emploi ; qu'aux termes de l'article R. 313-15 du même code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 313-10, l'étranger qui demande la carte de séjour mention " salarié " présente, outre les pièces prévues à l'article R. 313-1 à l'exception du certificat médical prévu au 4° de cet article, un contrat de travail conclu pour une durée égale ou supérieure à douze mois avec un employeur établi en France. Ce contrat est conforme au modèle fixé par arrêté du ministre chargé du travail et est revêtu du visa de ses services. / (...) " ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 341-2 du code du travail, repris à l'article L. 5221-2 du même code : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / (...) 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-3 du code du travail, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'autorisation de travail peut être constituée par l'un des documents suivants : (...) 6° La carte de séjour temporaire portant la mention salarié ", délivrée sur présentation d'un contrat de travail d'une durée égale ou supérieure à douze mois conclu avec un employeur établi en France, en application du 1° de l'article L. 313-10 du même code ; " ; qu'aux termes de l'article R. 5221-11 du code du travail : " La demande d'autorisation de travail relevant des 5°, 6°, 7°, 8°, 9°, 12° et 13° de l'article R. 5221-3 est faite par l'employeur ." et qu'aux termes de l'article R. 5221-15 du même code : " Lorsque l'étranger est déjà présent sur le territoire national, la demande d'autorisation de travail mentionnée à l'article R. 5221-11 est adressée au préfet de son département de résidence. " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. D...a bénéficié d'un titre de séjour de trois ans valable jusqu'au 18 avril 2011, en qualité de travailleur saisonnier ; que sa demande de renouvellement, en date du 15 mars 2011, n'a pas abouti ; que le préfet du Gard, par l'arrêté contesté du 31 juillet 2012, a refusé, suite à une nouvelle demande de réexamen de la situation du requérant en qualité de salarié, en date du 7 juin 2012, de lui délivrer le titre de séjour demandé en raison de l'absence de présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes ;

5. Considérant qu'il ressort des mentions de l'arrêté du 31 juillet 2012 contesté que le préfet du Gard, à qui M. D...avait présenté une promesse d'embauche, s'est estimé saisi d'une demande de délivrance de carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ; qu'il est constant que ce contrat de travail n'était pas visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail, reprises à l'article L. 5221-2 du même code ; qu'en application des dispositions combinées de l'article R. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, du 6° de l'article R. 5221-3 et de l'article R. 5221-11 du code du travail, il appartient au seul employeur de l'étranger ou à la seule personne que l'employeur habilite à cet effet de solliciter auprès de l'autorité administrative compétente le visa du contrat de travail ou l'autorisation de travail ; qu'en conséquence, le préfet pouvait légalement opposer au requérant le fait qu'il ne détenait pas un contrat de travail visé par l'autorité compétente ; qu'est sans incidence la circonstance que la pratique en préfecture de l'Hérault et du Languedoc-Roussillon consisterait pour la Direccte à renvoyer les étrangers qui s'adressent directement à elle vers la préfecture, dès lors que M. D...n'établit ni avoir déposé sa demande de titre de séjour en qualité de salarié auprès du préfet, ni que son employeur aurait communiqué son dossier à la Direccte ; que, par suite, le préfet de Vaucluse a pu légalement opposer à M. D...la circonstance qu'il ne présentait pas de contrat de travail visé par la Direccte ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Le récépissé de la demande de renouvellement d'une carte de séjour permettant l'exercice d'une activité professionnelle autorise son titulaire à travailler. " ; que M. D...soutient que le préfet du Gard, suite à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français du 24 novembre 2011, par le Tribunal administratif de Nîmes le 1er mars 2012, a procédé à un réexamen de sa situation sans lui délivrer d'autorisation de travail ; que M. D...soutient que le préfet a commis une erreur de droit et méconnu les dispositions de l'article R. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, le requérant ne peut utilement invoquer le bénéfice des dispositions de l'article précité à l'encontre du refus de titre de séjour qui lui est opposé et qui fait suite à une nouvelle demande d'examen de sa situation en qualité de salarié ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;

Sur l'obligation de quitter le territoire :

7. Considérant, en premier lieu, que la décision attaquée a été signée par M. D'Isserno, secrétaire général de la préfecture du Gard, qui bénéficiait d'une délégation de signature en vertu d'un arrêté préfectoral n° 2012-HB 2-1 du 4 juin 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de juin 2012, n° 70, afin de signer tous actes, arrêtés ou décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département, sous réserve d'exceptions ne concernant pas l'entrée et le séjour des étrangers en France ; que le moyen tiré du vice d'incompétence doit dès lors être écarté ;

8. Considérant, en second lieu, que M. D...reprend en appel les moyens déjà développés en première instance, relatifs à l'inconventionnalité de l'article L. 511-1-I au regard de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 et au fait que le préfet se serait cru lié par la décision portant refus de titre de séjour pour adopter la décision portant obligation de quitter le territoire français, dans le délai d'un mois, sans procéder à un examen particulier de sa situation personnelle et familiale ; que, pour les motifs retenus par le Tribunal administratif de Nîmes, qu'il y a lieu pour la Cour administrative d'appel d'adopter, ces moyens doivent être écartés ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 juillet 2012 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office ; que ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2014, à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Bourion, premier conseiller.

Lu en audience publique le 3 juillet 2014.

''

''

''

''

2

N° 12LY24986

mpd


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY24986
Date de la décision : 03/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: Mme Isabelle BOURION
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-07-03;12ly24986 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award