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22/05/2014 | FRANCE | N°13LY02608

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 22 mai 2014, 13LY02608


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 30 septembre 2013, présentée par la préfète de la Loire ;

La préfète demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306019 du 28 août 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 21 mai 2013 par lequel la préfète de la Loire a obligé M. C...B...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé l'Arménie comme pays de destination en cas d'exécution d'office de cette mesure d'éloignement et l'a enjointe de délivrer sans délai à M. B...une autorisation pro

visoire de séjour et de réexaminer sa situation dans un délai de dix jours à compter de...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 30 septembre 2013, présentée par la préfète de la Loire ;

La préfète demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306019 du 28 août 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 21 mai 2013 par lequel la préfète de la Loire a obligé M. C...B...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé l'Arménie comme pays de destination en cas d'exécution d'office de cette mesure d'éloignement et l'a enjointe de délivrer sans délai à M. B...une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans un délai de dix jours à compter de la notification de ce jugement et a condamné l'Etat à verser à son conseil la somme de 800 euros sous réserve qu'il renonce à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C...B...devant le Tribunal administratif de Lyon ;

La préfète soutient :

- que le jugement est entaché d'une erreur de droit ; que c'est à tort que le magistrat délégué a retenu que l'obligation de quitter le territoire français contestée avait été prononcée en méconnaissance des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sa demande d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile ayant été rejetée par le préfet du Rhône par décision du 15 janvier 2013 notifiée le 22 janvier 2013 ;

- à titre principal, que les décisions contestées ne sont entachées d'aucune illégalité ; que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision du 15 janvier 2013 refusant son admission provisoire au séjour est inopérant ;

- subsidiairement, que le moyen d'exception d'illégalité d'une décision individuelle ne peut être utilement soulevé à l'appui d'une demande d'annulation que dès lors que cette décision n'est pas devenue définitive comme en l'espèce s'agissant du refus d'admission provisoire au séjour qui n'a pas été contesté dans le délai de recours de deux mois suivant sa notification ; que les dispositions de l'article 10 de la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2006, transposées en droit français, ne sont pas directement invocables pour contester le caractère définitif de cette décision ;

- à titre infiniment subsidiaire, que le refus d'admission provisoire au séjour n'est entaché d'aucune illégalité ; qu'il n'est pas entaché d'une incompétence du signataire, ni d'une insuffisance de motivation ; que le préfet du Rhône ne s'est pas cru en situation de compétence liée pour refuser d'admettre provisoirement au séjour M. B...ayant recherché si, malgré le fait qu'il était originaire d'un pays sûr, il ne pouvait, à titre exceptionnel, être admis provisoirement au séjour dans le cadre de sa demande d'asile ;

- que les décisions préfectorales du 21 mai 2013 ne sont entachées ni d'incompétence de l'auteur de l'acte, ni d'une violation du droit d'être entendu ; que la décision fixant le pays de destination n'est pas entachée d'une insuffisance de motivation ; que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas dépourvue de base légale dès lors que le refus de titre de séjour n'est pas illégal ; que les dispositions de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont pas été méconnues ; que la décision fixant le pays de destination n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'intéressé ne démontrant pas être exposé à des risques de traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 décembre 2013 présenté pour M. B..., domicilié ...qui conclut au rejet de la requête de la préfète de la Loire et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 2 000 euros au profit de son conseil MeA..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n°91-647du 10 juillet 1991 modifiée ;

M. B...soutient que :

- l'erreur commise par les premiers juges est une simple erreur matérielle ; que le Tribunal a estimé que la préfète de la Loire n'apportait pas la preuve, qui lui incombe, de la notification régulière de la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides ;

- l'association Renaître confirme le défaut de notification de la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides après vérification de ses tableaux d'enregistrement entre le 11 avril et le 3 mai 2013, aucun avis de passage ni aucun pli n'ayant été déposé à son attention durant cette période ; que la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides étant irrégulière, la préfète de la Loire ne pouvait prendre à son encontre une mesure d'éloignement sur le fondement avancé ; que les premiers juges ont à bon droit estimé que les dispositions de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avaient été méconnues ;

- la transposition des dispositions de l'article 10 de la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2006 en droit interne étant incomplète, il est fondé à exciper sur le fondement de cet article de la directive de l'illégalité du refus d'admission provisoire à l'encontre des décision contestées, décision mentionnée dans les motifs de l'arrêté contesté du 21 mai 2013 et qui en est bien le fondement ;

- le refus d'admission provisoire au séjour ayant été notifié par voie postale, il ne l'a pas été avec le concours d'un interprète alors qu'il ne parle pas le français ; que l'administration n'établit pas l'avoir informé dans une langue qu'il comprend en début de procédure par la communication d'un document d'information des demandeurs d'asile en arménien ;

- du fait de ce vice de procédure, le délai de recours contre la décision de refus d'admission provisoire au séjour n'a pas commencé à courir et qu'elle n'est donc pas devenue définitive ; qu'il peut donc exciper de son illégalité à l'encontre de l'arrêté contesté ;

- l'arrêté du 15 janvier 2013 est entaché d'une incompétence de l'auteur de l'acte en l'absence de précision du prénom de son signataire et ne satisfait pas aux dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, irrégularité substantielle de nature à justifier son annulation ;

- il reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en premier instance dirigés contre l'arrêté préfectoral du 21 mai 2013 tiré de l'incompétence du signataire, de l'insuffisance de motivation de la décision fixant le pays de destination, du vice de procédure entachant l'obligation de quitter le territoire français pour non respect de son droit d'être entendu et du principe général du droit de l'Union européenne de droit de la défense et de bonne administration, du défaut de base légale de l'obligation de quitter le territoire français, de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la décision fixant le pays de destination ;

- les moyens soulevés par la préfète ne sont pas fondés ;

Vu le mémoire enregistré le 14 avril 2014, présenté par la préfète de la Loire qui persiste dans ses écritures ;

Elle soutient, en outre, que les éléments fournis par M. B...dans son mémoire en défense ne sont pas de nature à remettre en cause le caractère effectif et régulier de la notification de la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dont elle a apporté la preuve par la production du pli recommandé adressé par cet Office régulièrement notifié à M. B...le 10 avril 2013 ; que le moyen invoquant, par voie d'exception, l'illégalité de la décision portant refus d'admission provisoire au séjour est inopérant à l'appui d'un recours dirigé contre les décisions par lesquelles le préfet, après notification du rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de la demande d'asile traitée dans le cadre de la procédure prioritaire, refuse le séjour et oblige l'étranger à quitter le territoire français ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) en date du 19 décembre 2013 admettant M. C... B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, et notamment son article 41 ;

Vu la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, modifiée ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative par le président de la formation de jugement ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 22 avril 2014 :

- le rapport de Mme Terrade, premier conseiller ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant arménien né le 4 janvier 1981, entré en France, selon ses déclarations, le 26 décembre 2012, a sollicité, le 27 décembre 2012, son admission provisoire au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 15 janvier 2013, le préfet du Rhône a rejeté cette demande ; que le 3 avril 2013, M. B... a été entendu par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lequel, par décision du 4 avril 2013, a rejeté sa demande d'asile ; que, par l'arrêté litigieux du 21 mai 2013, la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français à destination du pays dont il a la nationalité ; que l'intéressé a contesté ces décisions par requête enregistrée le 6 août 2012 au greffe du Tribunal administratif de Lyon ; que, par décision du 22 août 2013, la préfète de la Loire a ordonné le placement en rétention de M. B...qui a contesté cette décision, par une requête enregistrée le 23 août 2013 au greffe du Tribunal administratif de Lyon ; que, saisi en application des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles R. 776-1 et R. 776-14 du code de justice administrative, des conclusions présentées le 6 août 2013 tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination dont il a fait l'objet par l'arrêté préfectoral du 21 mai 2013, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a, par jugement du 28 août 2013, annulé ces décisions ; que, par la présente requête, la préfète de la Loire relève appel de ce jugement dont elle demande l'annulation pour erreur de droit ;

Sur la légalité des décisions contestées :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant que le droit constitutionnel d'asile, qui a le caractère d'une liberté fondamentale, a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié ; que, si ce droit implique que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit en principe autorisé à demeurer sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande, ce droit s'exerce dans les conditions définies par l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui dispose que : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : / (...) 2° L'étranger qui demande à bénéficier de l'asile a la nationalité (...) d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr. Un pays est considéré comme tel s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande " ; qu'aux termes de l'article L. 742-6 du même code : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office. (...) " ;

3. Considérant que pour annuler, par le jugement attaqué, les décisions du 21 mai 2013 par lesquelles la préfète de la Loire a obligé M. B...à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il serait éloigné en cas d'exécution d'office de cette mesure, le magistrat délégué, en réponse au moyen soulevé par le requérant tiré de ce qu'il n'avait pas été destinataire de la décision du 4 avril 2013 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides avait rejeté sa demande d'asile, s'est fondé sur la circonstance que l'administration n'apportait pas la preuve qui lui incombe de la notification régulière de cette décision à l'intéressé, et en a déduit que la préfète de la Loire avait ainsi méconnu les dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile autorisant l'étranger à se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile sur le recours de l'intéressé ; qu'en appel, la préfète soutient que les dispositions de cet article n'étaient pas applicables en l'espèce, et que la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de sa demande d'asile avait, à la date des décisions litigieuses, été régulièrement notifiée à M. B... ;

4. Considérant que, pour la première fois en appel, la préfète de la Loire produit la copie de la lettre recommandée avec accusé réception adressée à M. B...le 10 avril 2013 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides lui a notifié le rejet de sa demande d'asile ; qu'il ressort des mentions figurant sur ce document, dont la validité n'est pas sérieusement contestée par M.B..., que le pli recommandé mentionnait de manière parfaitement lisible les nom et prénom du destinataire ainsi que l'adresse de l'association Renaître auprès de laquelle il avait élu domicile, et que, bien qu'avisé le 11 avril 2013, M. B...s'est abstenu de le retirer, dans le délai de quinze jours, au bureau de poste où il avait été mis en instance, la poste l'ayant, par conséquent, retourné à l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides à l'expiration de ce délai ; qu'ainsi, la preuve, qui lui incombe, de la notification régulière à M.B..., le 11 avril 2013, de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides doit être regardée comme apportée par l'autorité compétente, cette preuve n'étant pas sérieusement contredite par la production en défense d'une attestation établie par le directeur de l'association Renaître selon laquelle, ni le courrier de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ni l'avis de passage adressés à M. B...n'auraient été réceptionnés par ses services ; que, dans ces conditions, au regard des dispositions précitées de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. B... ne disposait plus, à la date des décisions litigieuses, du droit de se maintenir légalement sur le territoire français ; que la préfète de la Loire a ainsi pu, sans méconnaître les dispositions de cet article, assortir son refus de lui délivrer un titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français et fixer le pays à destination duquel il serait reconduit en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement à l'expiration du délai de départ volontaire ; qu'ainsi, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur ce motif pour annuler les décisions de la préfète de la Loire ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B...tant devant le Tribunal administratif de Lyon que devant la Cour ;

6. Considérant que l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale ; que s'agissant d'un acte réglementaire, une telle exception peut être formée à toute époque, même après l'expiration du délai du recours contentieux contre cet acte ; que s'agissant d'un acte non réglementaire, l'exception n'est, en revanche, recevable que si l'acte n'est pas devenu définitif à la date à laquelle elle est invoquée, sauf dans le cas où l'acte et la décision ultérieure constituant les éléments d'une même opération complexe, l'illégalité dont l'acte serait entaché peut être invoquée en dépit du caractère définitif de cet acte ;

7. Considérant que les décisions par lesquelles le préfet refuse, en fin de procédure, le séjour à l'étranger dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et l'oblige à quitter le territoire français ne sont pas prises pour l'application de la décision par laquelle le préfet statue, en début de procédure, sur l'admission provisoire au séjour ; que la décision prise sur l'admission au séjour ne constitue pas davantage la base légale du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ; que par suite, le moyen invoquant, par voie d'exception, l'illégalité du refus d'admission provisoire au séjour opposé à un demandeur d'asile, notamment pour défaut de remise du document d'information prévu au dernier alinéa de l'article R. 742-1, ne peut être utilement invoqué à l'appui d'un recours dirigé contre les décisions par lesquelles le préfet, après la notification du rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de la demande d'asile traitée dans le cadre de la procédure prioritaire, refuse le séjour et oblige l'étranger à quitter le territoire français ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, (...), lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...)/ La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office.(...) " ;

9. Considérant que l'arrêté préfectoral du 21 mai 2013 a été signé par M. Patrick Ferin, secrétaire général de la préfecture de la Loire, qui disposait à cette date, en vertu de l'article 1er de l'arrêté préfectoral n°12-42 du 8 octobre 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du même jour, d'une délégation de signature de la préfète de la Loire à cet effet ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions de cet arrêté doit être écarté comme manquant en fait ;

10. Considérant que M. B...se borne à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour décidé le même jour à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français, sans toutefois assortir son moyen d'aucune précision permettant au juge d'en apprécier le bien-fondé ;

11. Considérant que lorsqu'il oblige un étranger à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions sont issues de la transposition en droit national de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, le préfet doit appliquer les principes généraux du droit de l'Union européenne, dont celui du droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle défavorable ne soit prise à son encontre, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; que ce droit n'implique pas systématiquement l'obligation, pour l'administration, d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales ; que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, y compris au titre de l'asile, l'étranger, du fait même de l'accomplissement de cette démarche qui vise à ce qu'il soit autorisé à se maintenir en France et ne puisse donc pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement forcé, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il sera en revanche susceptible de faire l'objet d'une telle décision ; qu'en principe il se trouve ainsi en mesure de présenter à l'administration, à tout moment de la procédure, des observations et éléments de nature à faire obstacle à l'édiction d'une mesure d'éloignement ; qu'enfin, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision faisant grief que si la procédure administrative en cause aurait pu, en fonction des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, aboutir à un résultat différent du fait des observations et éléments que l'étranger a été privé de faire valoir ;

12. Considérant que M. B...fait valoir qu'il n'a pas été informé par la préfète de la Loire de ce qu'il était susceptible de faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et n'a de ce fait pas été mis en mesure, en violation de son droit à être entendu, de présenter ses observations préalablement à l'édiction de cette mesure ; qu'il ne ressort toutefois des pièces du dossier ni qu'il ait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux, ni qu'il ait été empêché de présenter spontanément des observations avant que ne soit prise la décision d'éloignement, ni même, au demeurant, qu'il disposait d'éléments pertinents tenant à sa situation personnelle susceptibles d'influer sur le sens de la décision ; que le moyen ne peut dès lors qu'être écarté ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

13. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que la décision fixant le pays de renvoi constitue une mesure de police qui est au nombre des décisions qui doivent être motivées, en droit et en fait, en application des dispositions précitées des articles 1er et 3 de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;

14. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de la lecture même de l'arrêté litigieux que la décision contestée, en tant qu'elle fixe l'Arménie comme pays de destination est suffisamment motivée en droit par le visa des dispositions susmentionnées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient que la décision portant obligation de quitter le territoire français " fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office " de cette mesure s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire ; que cette décision doit par ailleurs être regardée comme suffisamment motivée en fait par l'indication que l'intéressé " a déclaré que son épouse résidait en Arménie et qu'ainsi il n'est pas dénué d'attaches dans son pays d'origine " et que " M. B...n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme en cas de retour dans son pays d'origine " ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait insuffisant motivée en droit et dépourvue de l'énoncé de considérations de fait propres à la situation de M.B..., manque en fait et doit être écarté ;

15. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ; que, si M. B...soutient qu'il a été battu par les forces de police arméniennes et menacé de représailles et que son habitation a été incendiée par des personnes non identifiées, il n'apporte aucune précision, ni aucun élément à l'appui de ses allégations ; que, par suite, il n'établit pas la réalité de risques encourus en cas de retour dans ce pays ;

En ce qui concerne la décision de placement en rétention administrative :

16. Considérant que M. B...n'assortit ses conclusions aux fins d'annulation de la décision de placement en rétention administrative d'aucun moyen ; que par suite, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la préfète de la Loire est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 21 mai 2013, lui a enjoint de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. B...et de procéder au réexamen de sa situation dans le délai de 10 jours, et a mis à la charge de l'Etat la somme de 800 euros à verser au conseil de M. B...;

Sur les conclusions de M. B...aux fins d'injonction :

18. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, verse au conseil de M.B..., la somme sollicitée au titre des frais non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°1306019 du 28 août 2013 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Lyon et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié au ministre de l'intérieur et M. C... B.... Copie en sera adressée à la préfète de la Loire.

Délibéré après l'audience du 22 avril 2014, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Samson, président-assesseur,

Mme Terrade, premier conseiller.

Lu en audience publique le 22 mai 2014.

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N° 13LY02608


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY02608
Date de la décision : 22/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TERRADE
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : ME PIALOU AURÉLIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-05-22;13ly02608 ?
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