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15/05/2014 | FRANCE | N°12LY22514

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 15 mai 2014, 12LY22514


Vu l'ordonnance n° 373441 du 4 décembre 2013 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, attribué à la Cour administrative d'appel de Lyon le jugement de l'affaire n° 12MA02514 ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 22 juin 2012, présentée pour Mme A...B..., domiciliée... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200815 du 24 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejet

é sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2012/65 du 20 février 2012 du...

Vu l'ordonnance n° 373441 du 4 décembre 2013 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, attribué à la Cour administrative d'appel de Lyon le jugement de l'affaire n° 12MA02514 ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 22 juin 2012, présentée pour Mme A...B..., domiciliée... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200815 du 24 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2012/65 du 20 février 2012 du préfet du Gard refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant comme pays de destination le pays dont elle a la nationalité ou tout autre pays pour lequel elle établit être légalement admissible ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que le refus de titre de séjour a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, en l'absence de consultation préalable de la commission du titre de séjour ; qu'il méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

- que l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ; qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 février 2014, présenté par le préfet du Gard, qui conclut au rejet de la requête ;

Le préfet du Gard fait valoir, d'une part, qu'il n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour et, d'autre part, que les autres moyens de la requête ne sont pas fondés ;

Vu les ordonnances en date des 28 janvier et 13 février 2014, fixant la clôture d'instruction au 12 février 2014 et la reportant au 3 mars 2014, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement dispensant le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application des articles L. 732-1 et R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2014 :

- le rapport de M. Meillier, conseiller ;

1. Considérant que Mme A...B..., ressortissante marocaine née le 10 juillet 1985, déclare être entrée en France le 21 mai 2001 ; qu'une première demande de régularisation de sa situation a donné lieu à une décision de refus, intervenue en 2003 ; qu'elle a sollicité le 16 mai 2008 la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " et a fait l'objet, le 4 février 2009, d'un arrêté de refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'elle a sollicité le 10 octobre 2011 la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 20 février 2012, le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné comme pays de destination le pays dont elle a la nationalité ou tout autre pays pour lequel elle établit être légalement admissible ; que, par jugement du 24 mai 2012, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ; que Mme B... relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que si Mme B...soutient être entrée en France le 21 mai 2001, alors qu'elle était mineure et inscrite sur le passeport de son père, les pièces qu'elle produit, à savoir un courrier en date du 17 septembre 2002 par lequel son père a demandé à la MSA de l'inscrire sur sa carte d'assuré social, un certificat d'immatriculation à son nom au consulat du Maroc à Montpellier en date du 21 octobre 2002, une lettre du 10 décembre 2002 d'une assistante sociale de l'Association SSAÉ relative à une demande de régularisation et diverses attestations de membres de sa famille et d'amis, ne permettent d'établir sa présence qu'à compter, au plus tôt, de l'automne 2002 ; que ce n'est d'ailleurs que le 11 octobre 2001, soit postérieurement à la date d'entrée alléguée, que sa mère a autorisé son père à l'emmener avec lui en France ; qu'elle ne conteste en revanche pas être entrée en France sans visa et sans respecter la procédure de regroupement familial dont elle relevait du fait de sa minorité et du séjour régulier en France de son père ; qu'elle s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français malgré les refus de titre de séjour qui lui ont été opposés en 2003 et 2009 et la mesure d'éloignement assortissant le second de ces refus ; qu'elle est célibataire et sans enfant ; qu'alors que son père réside régulièrement en France, elle a toutefois vécu pendant plusieurs années chez une cousine, MmeC..., avant de s'installer chez son père ; que si elle indique avoir tissé des liens forts avec la familleC..., et notamment avecD..., enfant handicapé dont elle se serait occupée et qui se serait attaché à elle, elle ne justifie cependant pas que sa présence serait indispensable à cet enfant, alors qu'elle ne vit plus aujourd'hui au domicile de la familleC..., quand bien même Mme C...souffrirait de problèmes de santé l'empêchant de s'occuper de son fils de la même manière que par le passé ; que, d'ailleurs, la promesse d'embauche consentie par M. C... à Mme B... est relative à un emploi d'aide-ménagère et à des tâches de préparation des repas, de repassage et d'entretien ménager et non à la prise en charge du jeuneD... ; qu'elle-même ne fait état que d'un vague projet professionnel consistant à suivre une formation afin de pouvoir travailler auprès d'autres personnes handicapées ; qu'enfin, elle ne justifie pas être dépourvue d'attaches personnelles et familiales au Maroc, son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de dix-sept ans et où vit notamment sa mère ; que, dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour de l'intéressée en France, et alors même qu'elle était mineure au moment de son entrée sur le territoire national et qu'elle maîtriserait la langue française, le refus de titre de séjour qui lui a été opposé n'a pas porté, eu égard aux buts qu'il poursuit, une atteinte disproportionnée au droit de Mme B...au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que, pour les mêmes raisons, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de la requérante ;

5. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du même code : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ;

6. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, Mme B...ne justifie pas de sa présence en France avant, au plus tôt, l'automne 2002 ; que, dès lors, à la date de l'arrêté attaqué, elle ne résidait pas habituellement en France depuis plus de dix ans et, par suite, n'entrait pas dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article L. 313-14, sur le fondement duquel, au demeurant, sa demande n'a été ni présentée par elle ni même examinée par le préfet ; que, par ailleurs, pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 312-2, le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'il résulte de ce qui précède que la requérante ne pouvait prétendre de plein droit à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait, en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, entachée d'un vice de procédure, ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, Mme B... n'est pas fondée à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité du refus de titre de séjour ;

8. Considérant, en second lieu, qu'au vu de ce qui a été dit précédemment et en l'absence de circonstance particulière, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle et familiale de Mme B...doivent être écartés ;

En ce qui concerne le choix du pays de destination :

9. Considérant que Mme B...n'invoque aucun moyen spécifique à l'encontre de la mesure de fixation du pays de destination ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

11. Considérant que le présent arrêt de rejet n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par Mme B...doivent être rejetées ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

12. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par Mme B...doivent, dès lors, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 10 avril 2014 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

Mme Mear, président assesseur,

M. Meillier, conseiller.

Lu en audience publique, le 15 mai 2014.

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N° 12LY22514


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY22514
Date de la décision : 15/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: M. Charles MEILLIER
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : CHABBERT MASSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-05-15;12ly22514 ?
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