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15/05/2014 | FRANCE | N°12LY22389

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 15 mai 2014, 12LY22389


Vu l'ordonnance n° 373441 du 4 décembre 2013 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, attribué à la Cour administrative d'appel de Lyon le jugement de l'affaire n° 12MA02389 ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 13 juin 2012, présentée pour M. B... A..., domicilié... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200693 du 24 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejet

sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° REG/04/2012/031 du préfet de V...

Vu l'ordonnance n° 373441 du 4 décembre 2013 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, attribué à la Cour administrative d'appel de Lyon le jugement de l'affaire n° 12MA02389 ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 13 juin 2012, présentée pour M. B... A..., domicilié... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200693 du 24 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° REG/04/2012/031 du préfet de Vaucluse, en date du 3 février 2012, refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse de lui délivrer un certificat de résidence dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 196 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

M. A...soutient :

- que le refus de titre de séjour a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, en l'absence de consultation préalable de la commission du titre de séjour ; qu'il méconnaît les stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien ; qu'il méconnaît les stipulations des articles 6-5 du même accord et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

- que l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ; qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 février 2014, présenté par le préfet de Vaucluse, qui conclut au rejet de la requête, en faisant valoir qu'aucun moyen de celle-ci n'est fondé ;

Vu les ordonnances en date des 28 janvier et 25 février 2014, ayant respectivement pour objet de fixer la clôture d'instruction au 12 février 2004 et de reporter cette clôture au 10 mars 2014, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 27 novembre 2012, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Marseille (section administrative d'appel) a admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leur famille ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement dispensant le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application des articles L. 732-1 et R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2014 :

- le rapport de M. Meillier, conseiller ;

1. Considérant que M. B...A..., ressortissant algérien né le 11 mars 1974, est entré en France le 22 juin 2001, muni d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour à entrées multiples, valable du 23 mai au 22 novembre 2001 pour une durée de trente jours ; qu'il a sollicité le 12 juillet 2001 son admission au séjour au titre de l'asile territorial ; que sa demande d'asile territorial a été rejetée le 21 mars 2003 par le ministre de l'intérieur ; que le préfet des Bouches-du-Rhône a pris à son encontre le 30 juin 2003 une décision de refus de titre de séjour l'invitant à quitter le territoire dans un délai d'un mois ; que M. A... a déposé le 29 novembre 2007 auprès des services de la préfecture de Vaucluse une demande de régularisation de sa situation, implicitement rejetée du fait du silence gardé par le préfet, de même qu'une nouvelle demande présentée le 10 novembre 2008 ; que, par courrier en date du 20 juin 2011, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien ; que, par arrêté du 3 février 2012, le préfet de Vaucluse a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ; que, par jugement du 24 mai 2012, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ; que M. A... relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / 1. Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ; qu'il résulte de ces stipulations qu'un ressortissant algérien peut justifier par tout moyen qu'il réside habituellement en France depuis plus de dix ans ; que la condition de résidence habituelle qu'elles prévoient doit faire l'objet d'une appréciation globale et ne va pas jusqu'à exiger un séjour continu et ininterrompu ;

3. Considérant que M. A... ne produit aucune pièce de nature à établir sa présence sur le territoire français entre, d'une part, les 28 et 30 août 2002, dates auxquelles il a été soigné au centre hospitalier d'Avignon et s'y est vu délivrer des médicaments, et, d'autre part, le 27 janvier 2003, date à laquelle il a été convoqué par le préfet dans le cadre de sa demande d'asile territorial à un entretien qui a effectivement eu lieu le 3 février 2003 ; qu'il ne justifie pas avoir été, ainsi qu'il l'affirme, en possession d'autorisations provisoires de séjour durant cette période, le récépissé qu'il produit lui ayant été délivré le 4 février 2003 seulement ; qu'en outre, il ne produit aucun élément relatif à la période allant du 28 juillet 2003, date à laquelle la Poste lui a adressé une nouvelle carte bancaire, au 20 mai 2004, date à laquelle il a commencé à être hébergé par l'Entraide protestante de Montélimar ; qu'enfin, il ne produit, pour la période du 27 novembre 2004, date à laquelle il s'est domicilié... ; qu'ainsi, sa présence physique en France, même ponctuelle, n'est pas attestée pendant trois périodes de respectivement cinq mois, dix mois et quatorze mois ; que, dans ces conditions, quand bien même il établirait sa présence pour le surplus des périodes alléguées et notamment à compter de février 2006, M. A... ne justifie pas avoir, à la date de l'arrêté attaqué, résidé habituellement en France pendant une durée de plus de dix ans ; que, dès lors, il ne remplissait pas les conditions de délivrance d'un certificat de résidence d'un an en application de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de cet article ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant, d'une part, que la demande de titre de séjour de M. A... n'a été ni présentée ni expressément examinée sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ; qu'ainsi, l'intéressé ne peut utilement invoquer les stipulations dudit article ;

6. Considérant, d'autre part, et en tout état de cause, qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. A..., s'il est entré en France pour la première fois le 22 juin 2001, ne justifie pas y avoir résidé de façon habituelle avant, au plus tôt, février 2006 ; que sa demande d'asile territorial a été rejetée ; qu'hormis la période où il a bénéficié, du fait de l'examen de sa demande d'asile, d'un récépissé, il s'est toujours maintenu irrégulièrement sur le territoire ; qu'il est célibataire et sans enfant ; que seul son cousin réside en France ; qu'en revanche, il n'est pas dépourvu d'attaches personnelles et familiales en Algérie, son pays d'origine, qu'il n'a quitté pour la première fois qu'à l'âge de vingt-sept ans et où vivent sa mère et ses huit frères et soeurs ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour de l'intéressé en France, et alors même qu'il aurait tissé des " liens sociaux " très forts en France, notamment au sein d'associations dont il est bénévole, et y aurait de nombreux amis, et que ses liens avec les membres de sa famille demeurés en Algérie se seraient distendus, le refus de titre de séjour qui lui a été opposé n'a pas porté, eu égard aux buts qu'il poursuit, une atteinte disproportionnée au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et de celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ;

7. Considérant, en troisième lieu, que, pour les mêmes raisons, le refus de titre de séjour n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé ;

8. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d' asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du même code : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ; que, pour l'application de ces dispositions, le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 313-11 ou par les stipulations équivalentes d'un accord bilatéral auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, M.A..., qui ne justifie pas avoir, à la date de l'arrêté attaqué, résidé habituellement en France pendant une durée de plus de dix ans, ne pouvait pas prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait, en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, entachée d'un vice de procédure, ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant, en premier lieu, que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, M. A... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité du refus de titre de séjour ;

10. Considérant, en second lieu, qu'au vu de ce qui a été dit précédemment et en l'absence de circonstance particulière, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'arrêté attaqué sur la situation personnelle et familiale de M. A...ne peuvent qu'être écartés ;

En ce qui concerne le choix du pays de destination :

11. Considérant que M. A...n'invoque aucun moyen spécifique à l'encontre de la mesure de fixation du pays de destination ;

12. Considérant qu'il résulte de tout de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. Considérant que le présent arrêt de rejet n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. A... doivent être rejetées ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

14. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante ou son conseil du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. A...doivent, dès lors, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.

Délibéré après l'audience du 10 avril 2014 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

Mme Mear, président assesseur,

M. Meillier, conseiller.

Lu en audience publique, le 15 mai 2014.

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N° 12LY22389


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY22389
Date de la décision : 15/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: M. Charles MEILLIER
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : CHABBERT MASSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-05-15;12ly22389 ?
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