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30/04/2014 | FRANCE | N°12LY20413

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 30 avril 2014, 12LY20413


Vu l'ordonnance n° 372825 du 18 novembre 2013 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Lyon sous le n° 12LY20413 le dossier de la requête présentée pour la communauté de communes des Hautes-Terres, dont le siège est situé route de la Chaldette La Gonze à Fournels (48310) enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 30 janvier 2012 sous le n° 12MA00413 ;

La communauté de communes des Hautes-Terres

demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100258 du 24 nov...

Vu l'ordonnance n° 372825 du 18 novembre 2013 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Lyon sous le n° 12LY20413 le dossier de la requête présentée pour la communauté de communes des Hautes-Terres, dont le siège est situé route de la Chaldette La Gonze à Fournels (48310) enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 30 janvier 2012 sous le n° 12MA00413 ;

La communauté de communes des Hautes-Terres demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100258 du 24 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à ce que la société Semat soit condamnée à lui verser la somme de 54 798,32 euros TTC ;

2°) de condamner la société Semat à lui verser la somme de 54 798,32 euros TTC, ainsi que les intérêts au taux légal en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi en raison du manquement par cette société à son obligation de conseil ainsi que sur le fondement de la garantie des vices cachés ;

3°) de condamner la société Semat aux entiers dépens ;

4°) de condamner la société Semat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que ;

- la société Semat a manqué à son obligation de conseil en n'attirant pas son attention sur le risque lié à l'utilisation d'un système de préhension frontale des conteneurs d'ordures ménagères lors de la commande d'une benne par marché conclu en décembre 2006 ; que cette obligation de conseil à la charge du vendeur porte à la fois tant sur le choix du bien dont le vendeur doit s'assurer de l'aptitude à répondre au besoin de l'acheteur que sur les précautions d'emploi qu'appelle le même bien pour que son utilisation soit conforme à sa destination ; que tel n'a pas été le cas en l'espèce alors que la nature précise du système de levage des conteneurs d'ordures ménagères par le camion de ramassage n'était aucunement imposée au fournisseur par la communauté de communes ;

- elle est fondée à demander la somme de 54 798,32 euros TTC pour l'indemnisation de son préjudice, à savoir, d'une part, un préjudice matériel lié à la dégradation des conteneurs d'un montant de 30 677,40 euros TTC et à l'obligation pour elle de changer de système de préhension pour un coût de 1 487,96 euros TTC, d'autre part, un préjudice d'exploitation évalué à la somme de 9 423,35 euros TTC au jour du dépôt de la requête, montant à parfaire, un préjudice du fait des frais d'expertise, d'avocats et d'huissier engagés par elle, évalué à un montant de 5 209,61 euros TTC, enfin, un préjudice moral évalué à la somme de 8 000 euros ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 juillet 2012, présenté pour la communauté de communes des Hautes-Terres, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par la reprise des mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que :

- contrairement à ce que le tribunal a jugé, la garantie prévue à l'article 6 du cahier des clauses administratives particulières afférent au marché du 19 janvier 2007 ne pouvait se substituer à la garantie des vices cachés ; qu'elle est par suite fondée à engager la responsabilité de la société Semat sur le fondement des dispositions de l'article 1641 du code civil ; que l'action engagée par la communauté de communes des Hautes-Terres sur le fondement de ces dispositions n'était pas prescrite dès lors que c'est moins de deux ans après l'admission du matériel que la communauté de communes a informé la société de l'inadéquation de ce dernier et a sollicité, en référé, la désignation d'un expert ; que l'article 6 du cahier des clauses administratives particulières afférent au marché du 19 janvier 2007 ne pouvait valablement réduire la durée de cette garantie;

Vu le mémoire, enregistré le 7 décembre 2012, présenté pour la communauté de communes des Hautes-Terres qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par la reprise des mêmes moyens et qui produit, en outre, la copie de l'ordonnance du 8 novembre 2012 du juge des référés de la Cour administrative d'appel de Marseille condamnant la société Semat à lui verser une provision d'un montant de 20 000 euros ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 janvier 2013, présenté pour la société anonyme Semat, dont le siège est 335 avenue jean Guiton, La Rochelle (17000), représentée par son président en exercice, qui conclut au rejet de la requête et qu'il soit mis à la charge de la communauté de communes des Hautes-Terres la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société Semat soutient que :

- la communauté de communes des Hautes-Terres, ainsi qu'elle le reconnaît, s'est abstenue de définir ses besoins et n'a pas déterminé les spécifications techniques s'appliquant au système de préhension des conteneurs à ordures, de sorte que la société Semat n'a pas à endosser la carence de la communauté à formuler des réserves lors de la réception du matériel et à en relever les éventuelles incompatibilités avec les conteneurs existants ;

- la société Semat n'était pas attributaire du précédent marché de sorte qu'elle ne connaissait pas la nature des équipements précédemment en service au sein de la communauté de communes des Hautes-Terres ;

- la communauté de communes des Hautes-Terres a indiqué que seuls quelques conteneurs étaient munis d'un système de préhension ventrale et qu'elle les supprimerait au fur et à mesure de sorte que la société Semat ne saurait être regardée comme l'ayant induite en erreur quant au choix du système de préhension des conteneurs ;

- la communauté de communes des Hautes-Terres a notifié trop tardivement à l'exposante l'existence des problèmes en relation avec les conteneurs à ordures ménagères alors que l'article 5 du cahier des clauses administratives particulières afférent audit marché prévoyait un délai d'un mois à compter de la livraison pour réaliser les vérifications quantitatives et qualitatives des fournitures ;

- le délai d'un an de prescription de la garantie contractuelle étant expiré, cette garantie ne saurait dès lors et en tout état de cause s'appliquer en l'espèce ;

- la communauté de communes des Hautes-Terres n'est pas davantage fondée à engager la responsabilité de l'exposante sur le fondement de la garantie des vices cachés dès lors, d'une part, que l'inadaptation du système de préhension ne saurait constituer un tel vice; dès lors, d'autre part, qu'un tel vice n'était nullement caché lors de la vente et qu'aucune impropriété de la benne à ordures ménagères n'était à déplorer, dès lors, enfin, que la communauté de communes ne saurait être considérée comme profane en la matière ;

- la demande indemnitaire de la communauté de communes des Hautes-Terres est exorbitante, dépassant ainsi le montant du marché qu'elle a conclu avec l'exposante ; l'évaluation des dommages allégués est erronée s'agissant de la comptabilisation des conteneurs endommagés mais non pourvus de système de préhension frontale, s'agissant de la comptabilisation des conteneurs endommagés pour d'autres causes que le système de préhension et dès lors, que la communauté de commune en poursuivant la collecte des ordures avec les conteneurs équipés d'un système de préhension ventrale a contribué à l'aggravation des dommages ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 décembre 2013, présenté pour la communauté de Communes des Hautes-Terres qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance en date du 9 décembre 2013 fixant la clôture d'instruction au 13 janvier 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 janvier 2013, présenté pour la société anonyme Semat et non communiqué ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2014 :

- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;

- et les observations de MeA..., représentant la société Semat ,

1. Considérant que par avis d'appel public à la concurrence publié le 4 décembre 2006, la communauté de communes des Hautes-Terres dont le siège est à Fournels (48310) a lancé, en procédure adaptée, une consultation en vue de l'acquisition d'un camion équipé d'une benne à ordures ménagères d'une contenance minimale de 12 m³ et adaptable sur châssis avec un système de levage, une trémie arrière de remplissage et un lève-conteneurs ; que la société Semat a présenté une offre concernant la livraison d'une " benne à compression continue, non basculante, Type Cargopac II de 12 m3 " assortie du montage d'un " peigne à préhension et verrouillage frontal, équipé d'un dispositif de centrage de bacs " ; que la communauté de communes des Hautes-Terres a attribué le marché à la société Semat ; que les matériels ont été livrés le 27 décembre 2007 et mis en service le 8 janvier 2008 ; qu'il a été constaté par la suite que certains conteneurs à ordures ménagères se trouvaient endommagés au niveau de la barre de préhension ventrale dont ces bacs sont équipés ; que la communauté de communes des Hautes-Terres a informé, le 31 juillet 2009, la société Semat du problème qui semblait provenir de la préhension des bacs par le système de levage de la benne ; que suite à la saisine par la communauté de communes, le 3 février 2010, du juge des référés du Tribunal de grande instance de Mende, l'expert désigné a conclu dans le rapport qu'il a déposé le 29 juillet 2010 que le système de préhension frontale dont était équipé la benne à ordures ménagères n'était pas adapté aux conteneurs utilisés ; que la communauté de communes des Hautes-Terres a saisi le Tribunal administratif de Nîmes aux fins d'obtenir l'indemnisation de son préjudice ; que le Tribunal administratif de Nîmes, par un jugement du 24 novembre 2011, a rejeté sa requête ; que la communauté de communes des Hautes-Terres relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions indemnitaires :

2. Considérant, d'une part, que si la communauté des communes recherche la responsabilité de la société Semat sur le fondement de la garantie des vices cachés prévu à l'article 1641 du code civil, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que les dommages provoqués sur les conteneurs étaient provoqués par la présence sur certains d'entre eux d'une barre métallique utilisée dans l'ancien système de préhension ventrale, laquelle rigidifie le conteneur qui se fissure à l'extrémité de la fixation métallique, et non par le système de préhension frontale de la benne qui fonctionnait parfaitement ; que, par suite, en l'absence de tout vice du produit fourni, les conclusions présentées par la communauté de commune sur ce fondement ne peuvent qu'être écartées ;

3. Considérant, d'autre part, que la communauté de communes, organisme spécialisé dans la collecte des déchets, dont la compétence lui permettait d'apprécier les caractéristiques de la benne qu'elle souhaitait acquérir et à qui il appartenait de définir avec précision ses besoins compte tenu de son parc de conteneurs en application de l'article 5 du code des marchés publics ne peut utilement se prévaloir des principes dont s'inspirent les articles 1602 du code civil et L. 111-1 du code de la consommation ; que l'appel d'offres ne comportait aucune précision sur le mode de préhension souhaité ni sur le parc de conteneurs existant ; qu'en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que la société Semat connaissait de manière précise le parc de conteneurs de la communauté de communes pour avoir, treize ans auparavant, fourni une benne au SIVOM de Fournels à qui la communauté de communes des Hautes-Terres a succédé et aurait commis une faute en n'indiquant pas à la communauté de communes qu'elle devait ôter ces barres métalliques avant d'utiliser les conteneurs avec le nouveau système ; qu'au contraire, la communauté de communes ne conteste pas avoir indiqué au responsable commercial de la société Semat au moment de l'achat de la benne que, si quelques bacs étaient munis de préhension ventrale, ils seraient supprimés au fur et à mesure, ainsi qu'il est rapporté dans un courrier de la société à la communauté de communes en date du 12 octobre 2009 ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la communauté de communes des Hautes-Terres n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

Sur les frais d'expertise :

4. Considérant que la responsabilité de la société Semat n'étant nullement engagée, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la communauté de communes des Hautes-Terres tendant à ce que les frais d'expertise soient mis à la charge de ladite société ; que les frais d'expertise doivent donc être laissés à la charge de la communauté de communes des Hautes-Terres ;

Sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions de la communauté de communes des Hautes-Terres doivent être rejetées ;

6. Considérant, en second lieu, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la communauté de communes des Hautes-Terres une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Semat et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la communauté de communes des Hautes-Terres est rejetée.

Article 2 : La communauté de communes des Hautes-Terres est condamnée à verser à la société Semat la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes des Hautes-Terres, à la société Semat et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 27 mars 2014 à laquelle siégeaient :

M. Wyss, président de chambre,

M. Gazagnes, président-assesseur,

M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

Lu en audience publique, le 30 avril 2014.

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N° 12LY20413


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY20413
Date de la décision : 30/04/2014
Type d'affaire : Administrative

Analyses

39-06-01-02 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité contractuelle.


Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: M. Olivier MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SCP SCHEUER - VERNHET et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-04-30;12ly20413 ?
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