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24/04/2014 | FRANCE | N°13LY01317

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 24 avril 2014, 13LY01317


Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2013, présentée pour M. B... H...A..., domicilié... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000720 du 29 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Voiron à lui verser une somme de 208 750 euros en réparation du préjudice résultant d'une faute commise dans cet établissement le 19 juin 2006 ou le 30 mai 2007 ;

2°) de prononcer la condamnation demandée ;

3°) subsidiairement, d'ordonner une nouvelle expertis

e par un chirurgien dentiste et un anesthésiste ;

4°) de mettre à la charge du centre ho...

Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2013, présentée pour M. B... H...A..., domicilié... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000720 du 29 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Voiron à lui verser une somme de 208 750 euros en réparation du préjudice résultant d'une faute commise dans cet établissement le 19 juin 2006 ou le 30 mai 2007 ;

2°) de prononcer la condamnation demandée ;

3°) subsidiairement, d'ordonner une nouvelle expertise par un chirurgien dentiste et un anesthésiste ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Voiron une somme de 1 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que son médecin traitant et son chirurgien dentiste estiment, contrairement au premier expert et au sapiteur, que les fractures radiculaires et de l'armature métallique du bridge ne peuvent provenir que de l'introduction forcée dans la cavité buccale d'un corps étranger ;

- que le compte-rendu opératoire du chirurgien, qui a une valeur supérieure à celui de l'anesthésiste, mentionne une intubation orotrachéale, et non nasotrachéale, qui est à l'origine des fractures constatées le 10 juillet 2007 ; que le rapport d'expertise ne s'explique pas sur les contradictions de son dossier médical ;

- que le second expert est anesthésiste, et non chirurgien dentiste ;

- que la fracture peut avoir été causée par l'intubation orotrachéale difficile pratiquée lors de la première intervention du 19 juin 2006 ;

- que le second expert a mentionné un défaut d'information du risque de bris dentaire lors de l'anesthésie ;

- que son préjudice présente le degré de gravité exigé par l'article D. 1142-1 du code de la santé publique ;

- qu'il correspond à des frais de reconstitution dentaire de 8 000 euros, des soins dentaires provisoires pour 750 euros et des préjudices personnels pour 200 000 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure adressée à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère le 24 septembre 2013 en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 octobre 2013, présenté pour le centre hospitalier de Voiron qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que M. A...n'apporte pas la preuve d'une faute, non plus que de l'existence d'un lien de causalité entre une éventuelle faute et le dommage ; qu'aucune pièce du dossier ne permet de faire un lien entre, d'une part, l'anesthésie du 30 mai 2007 et, d'autre part, le traumatisme dentaire et le bris prothétique ;

Vu l'ordonnance du 15 janvier 2014 fixant au 17 février 2014 la date de clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2014 :

- le rapport de M. Clot, président ;

- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

1. Considérant que M.A..., alors âgé de 77 ans, a subi le 19 juin 2006 au centre hospitalier de Voiron une intervention chirurgicale pour traiter un adénocarcinome de l'angle colique gauche ; qu'une nouvelle intervention a été réalisée le 30 mai 2007, dans le même établissement, en raison de la survenance d'une éventration sur la cicatrice ; que M. A... a par la suite souffert de douleurs dentaires ; que le 6 juillet 2007, son chirurgien dentiste a constaté une fracture prothétique entre les deux incisives supérieures et une fracture de la racine de deux dents qu'il a extraites et qu'il a ultérieurement procédé à l'extraction d'autres dents ; que l'intéressé impute ces dommages aux interventions des 19 juin 2006 et 30 mai 2007 ; que, sur sa demande, un premier expert, désigné par le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble, a rédigé son rapport en janvier 2009 ; que M. A... a saisi le tribunal administratif le 19 février 2010 d'une demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Voiron à lui verser une indemnité en réparation de son préjudice ; que par jugement du 9 décembre 2011, le Tribunal a ordonné une nouvelle expertise ; que le second expert a rédigé son rapport le 26 mai 2012 et l'a complété le 27 juin 2012 ; que M. A... fait appel du jugement du 29 mars 2013 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction alors applicable : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. II. - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou de la durée de l'incapacité temporaire de travail. Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'incapacité permanente supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret. " ;

3. Considérant que si le compte-rendu de l'opération du 19 juin 2006 mentionne qu'a été pratiquée une intubation orotrachéale (OT), il ne résulte pas de l'instruction que les dommages dont se plaint M.A..., depuis le mois de juin 2007, présentent un lien avec l'intervention chirurgicale effectuée un an plus tôt ;

4. Considérant que, s'agissant de l'intervention du 30 mai 2007, le compte-rendu de l'anesthésiste mentionne un intubation nasale, ce que confirment les deux experts et le sapiteur ; que selon ces experts, les lésions prothétique et dentaires subies par M. A...sont sans lien avec l'acte d'anesthésie effectué pour l'intervention du 30 mai 2007 ; qu'il est vrai que le requérant se prévaut des avis, d'une part, de son médecin traitant, pour qui, au contraire, " la relation de cause à effet semble évidente " et, d'autre part, de son chirurgien dentiste, selon lequel il ne présentait pas de prédispositions à la survenance de tels dommages ; que ces éléments ne sont pas, toutefois, suffisants pour permettre de remettre en cause les appréciations portées, dans le cadre de procédures contradictoires, par les deux experts, dont l'un a bénéficié du concours d'un anesthésiste, l'autre étant également anesthésiste ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. (...) Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel. (...) " ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. A...ait été informé des risques inhérents à une intubation orotrachéale ; que toutefois, en l'absence de lien entre le dommage et les intubations pratiquées, cette circonstance n'est pas de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier de Voiron ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article D. 1142-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction alors applicable : " Le pourcentage mentionné au dernier alinéa de l'article L. 1142-1 est fixé à 24 %. Un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale présente également le caractère de gravité mentionné à l'article L. 1142-1 lorsque la durée de l'incapacité temporaire de travail résultant de l'accident médical, de l'affection iatrogène ou de l'infection nosocomiale est au moins égale à six mois consécutifs ou à six mois non consécutifs sur une période de douze mois. A titre exceptionnel, le caractère de gravité peut être reconnu : 1° Lorsque la victime est déclarée définitivement inapte à exercer l'activité professionnelle qu'elle exerçait avant la survenue de l'accident médical, de l'affection iatrogène ou de l'infection nosocomiale ; 2° Ou lorsque l'accident médical, l'affection iatrogène ou l'infection nosocomiale occasionne des troubles particulièrement graves, y compris d'ordre économique, dans ses conditions d'existence. " ; qu'il ne résulte de l'instruction ni que les dommages subis par M. A...soient imputables aux anesthésies pratiquées les 19 juin 2006 et 30 mai 2007 au centre hospitalier de Voiron, ni que ces dommages présentent le degré de gravité exigé par ces dispositions ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner un nouvelle expertise, M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... H...A..., à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère et au centre hospitalier de Voiron. Il en sera adressé copie à M. B... F..., expert, M. G...D..., sapiteur et M. E...C..., expert.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2014, à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique le 24 avril 2014.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01317
Date de la décision : 24/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : KUMMER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-04-24;13ly01317 ?
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