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24/04/2014 | FRANCE | N°13LY00664

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 24 avril 2014, 13LY00664


Vu la requête, enregistrée le 18 mars 2013 au greffe de la Cour, présentée pour la société Investim, dont le siège est au 1 Impasse des orfèvres à Vienne (38200), représentée par son gérant en exercice ;

La société Investim demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805099 du 31 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clo

s le 31 août 2004 dans les rôles de la commune de Vienne et des pénalités y afférentes ;

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Vu la requête, enregistrée le 18 mars 2013 au greffe de la Cour, présentée pour la société Investim, dont le siège est au 1 Impasse des orfèvres à Vienne (38200), représentée par son gérant en exercice ;

La société Investim demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805099 du 31 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 août 2004 dans les rôles de la commune de Vienne et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'elle a réalisé tous les travaux qui ont été facturés à la SCI Montée Saint-Marcel pour la réhabilitation de son immeuble comportant 17 logements répartis en un programme PST et un programme OPAH ; que les factures produites ne comportent aucune incohérence ; que les prestations visées ne sont pas identiques ; que c'est à tort que les premiers juges et l'administration ont estimé que seuls 3 logements sur 17 ont été réalisés alors que la réalisation partielle de logements correspond au seul programme PST, soit trois logements sur 9 ; que l'ANAH n'a exigé qu'un reversement partielle de la subvention ; que l'avoir litigieux trouve sa cause dans la nécessaire indemnisation des préjudices qu'elle a causés à la SCI du fait de retard et de défectuosité dans les travaux réalisés au niveau des façades extérieures et des coursives métalliques situées sur une partie de l'immeuble de la SCI ; que le montant de l'avoir a été taxé comme revenu foncier de la SCI et validé par l'administration à l'issue de la vérification de comptabilité de la SCI ; que l'administration fiscale n'apporte pas la preuve d'un manquement délibéré ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que les prestations qui auraient été effectuées par la société Investim au cours de la période prescrite n'ont pas été réalisées ; que, contrairement aux allégations de la requérante, ce ne sont pas 3 logements sur 9 qui ont été réhabilités, comme le soutient à tort la requérante, mais bien trois sur 17 ; que si la requérante fait grief à l'administration d'avoir évalué de manière arbitraire, dans la proposition de rectification le montant des détériorations alléguées à la somme de 24 407 euros, il y a lieu de préciser que c'est bien le gérant de la société Investim, M. A...et non le vérificateur, qui, à la lumière de la nature des travaux figurant sur la note d'avoir, a verbalement identifié des ouvrages facturés sur la période prescrite pour le montant de 24 407 euros ; que les déclarations du contribuable sur l'identité de l'entreprise ayant réalisé les travaux ont varié dans le temps et au cours de la procédure ; qu'en l'espèce, compte tenu de l'étroite communauté d'intérêts entre la société Investim et la SCI du 12 Montée St Marcel qui avaient le même dirigeant au cours des années vérifiées, la requérante ne pouvait ignorer que les sommes initialement facturées à sa cliente ne correspondaient pas à des prestations réellement exécutées par elle et, que, dans ces conditions, leur remboursement sous forme d'avoir n'était pas davantage justifié ; qu'ainsi le caractère délibéré de l'infraction est, en conséquence, avéré ;

Vu le mémoire, enregistré le 1er août 2013, présenté pour la société Investim, tendant aux mêmes fins que la requête susvisée par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance en date du 12 novembre 2013 fixant la clôture d'instruction au 4 décembre 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire enregistré le 2 avril 2014, présenté par le ministre de l'économie et des finances ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2014 :

- le rapport de M. Bourrachot, président,

- et les conclusions de M. Levy Ben Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant que la société Investim, qui a pour activité la rénovation et l'amélioration de logements, a fait l'objet, en 2006, d'une vérification de comptabilité qui a porté en matière d'impôt sur les sociétés sur les exercices clos le 31 août des années 2003, 2004 et 2005 ; qu'à l'issue du contrôle, l'administration fiscale a réintégré au bénéfice de l'exercice clos le 31 août 2004 une somme de 169 673,93 euros correspondant à un avoir accordé sans contrepartie à une société avec laquelle elle était liée ; que la rectification proposée 1e 19 décembre 2006, puis confirmée le 12 mars 2007 a conduit, au titre de l'exercice clos le 31 août 2004, à un supplément d'impôt sur les sociétés et de contribution à cet impôt, assorti de la majoration pour manquement délibéré, mis en recouvrement le 16 janvier 2008, après avis favorable de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, pour un montant de 52 992 euros en droits et 27 893 euros en pénalités ; que la société Investim a contesté cette imposition supplémentaire par une réclamation du 20 février 2008 qui a fait l'objet d'une décision de rejet en date du 9 septembre de la même année ; que la société Investim a, alors, porté le litige devant le Tribunal administratif de Grenoble qui, par un jugement du 31 décembre 2012 a rejeté sa requête ; qu'elle relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;

3. Considérant que la société Investim, qui a réalisé des travaux sur un immeuble appartenant à la société civile immobilière " 12 montée Saint-Marcel " avec laquelle elle a des relations étroites, notamment en la personne de leur dirigeant commun, a payé à la SCI une somme de 179 006 euros le 22 janvier 2004 qu'elle a ensuite comptabilisée sous forme d'avoir à la clôture de l'exercice le 31 août 2004 avant de facturer de nouvelles prestations au cours de l'exercice suivant ; que l'écriture comptable correspondante était justifiée par une note d'avoir intitulée " indemnisation des ouvrages détériorés suite à abandon de chantier " ; qu'en se référant à un constat d'huissier établi au cours de l'année 2006 et aux décisions de l'ANAH exigeant le remboursement partiel des subventions versées pour la réalisation de l'opération, l'administration n'établit pas que les travaux précédemment facturés par la société Investim n'auraient pas été réalisés, ce qui au demeurant justifierait leur remboursement à la SCI et leur déduction en charge indépendamment de l'émission de toute facture rectificative, la preuve d'une telle charge pouvant être apportée par tous moyens ;

4. Considérant, toutefois, que la société Investim ne fournit aucune explication sur les circonstances qui l'ont conduite à rembourser une note d'avoir plus de six mois avant de l'établir et d'en connaître le montant ; qu'elle n'explique pas non plus pour quelles raisons elle a continué à facturer des travaux suite à l'abandon du chantier ; que la société Investim ne justifie pas de l'exactitude de l'avoir qu'elle a consenti à sa cliente alors qu'elle n'établit ni la réalité des retards de chantier qu'elle invoque, ni, à les supposer établis, qu'ils lui seraient imputables ; que la société Investim n'établit pas non plus que cet avoir trouverait sa cause dans la détérioration des travaux qu'elle a facturés ; qu'elle ne justifie pas davantage que les dégradations dont elle fait état seraient intervenues alors qu'elle avait la garde de l'ouvrage ; qu'enfin et au surplus, elle n'invoque aucun intérêt commercial justifiant cet avoir ; que, par suite, l'administration était en droit de réintégrer l'avantage consenti sous forme d'avoir dans le résultat de la société Investim comme ne s'inscrivant pas dans le cadre d'une gestion commerciale normale et présentant le caractère d'un avantage consenti sans contrepartie ; que l'absence de rectification des résultats de la SCI ne constituant pas une prise de position formelle sur la situation respective des deux sociétés, la société Investim n'est pas fondée à se prévaloir sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales de ce que le résultat déclaré par la SCI, comportant le montant de l'avoir, n'aurait pas été remis en cause ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40% si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (....) " ;

6. Considérant que pour apporter la preuve qui lui incombe, en application de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales, de la mauvaise foi de la société Investim, l'administration se borne à faire valoir que, compte tenu de l'étroite communauté d'intérêts entre la société Investim et la SCI du 12 Montée St Marcel qui avaient le même dirigeant au cours des années vérifiées, la requérante ne pouvait ignorer que les sommes initialement facturées à sa cliente ne correspondaient pas à des prestations réellement exécutées par elle et, que, dans ces conditions, leur remboursement sous forme d'avoir n'était pas davantage justifié ; que de tels faits restent étrangers à la rectification en litige constituée par la reprise d'une note d'avoir intitulée " indemnisation des ouvrages détériorés suite à abandon de chantier " ; que si, ainsi qu'il a été dit au point 4, la requérante n'apporte pas la preuve du bien fondé de cette note d'avoir, il n'en demeure pas moins qu'elle avait fait l'objet d'une comptabilisation explicite et d'une déclaration de la part des deux sociétés mettant l'administration à même d'exercer son pouvoir de contrôle ; que, dès lors, l'administration n'apporte pas la preuve de l'intention de la société Investim d'éluder l'impôt ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Investim est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de décharge des pénalités afférentes à la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et de contribution à cet impôt à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2004 ;

8. Considérant qu'en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, la somme de 1 000 euros que demande la société Investim au titre des frais d'instance exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La société Investim est déchargée des pénalités afférentes à la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et de contribution à cet impôt à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2004.

Article 2 : Le jugement n° 0805099 du 31 décembre 2012 du Tribunal administratif de Grenoble est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à la société Investim la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Investim est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Investim et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 8 avril 2014, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Samson, président-assesseur,

M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 avril 2014.

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N° 13LY00664

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00664
Date de la décision : 24/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations - Pénalités pour manquement délibéré (ou mauvaise foi).

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : MOULINIER, DULATIER ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-04-24;13ly00664 ?
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