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17/04/2014 | FRANCE | N°13LY01837

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 17 avril 2014, 13LY01837


Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2013 présentée pour la commune de Montélimar, représentée par son maire en exercice ;

La commune de Montélimar demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0905395 du 15 mai 2013 du Tribunal administratif de Grenoble qui a rejeté sa requête tendant à ce que les sociétés Etandex et Bétrec IG soient solidairement condamnées à lui payer la somme de 308 687,93 euros TTC, à ce que le montant des frais d'expertise soit fixé à la somme de 8 872,78 euros TTC et à ce que le montant des prestations juridiques avancées pa

r la commune et à lui rembourser soit fixé à la somme de 10 487,28 euros TTC ;

2°...

Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2013 présentée pour la commune de Montélimar, représentée par son maire en exercice ;

La commune de Montélimar demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0905395 du 15 mai 2013 du Tribunal administratif de Grenoble qui a rejeté sa requête tendant à ce que les sociétés Etandex et Bétrec IG soient solidairement condamnées à lui payer la somme de 308 687,93 euros TTC, à ce que le montant des frais d'expertise soit fixé à la somme de 8 872,78 euros TTC et à ce que le montant des prestations juridiques avancées par la commune et à lui rembourser soit fixé à la somme de 10 487,28 euros TTC ;

2°) de condamner solidairement les sociétés Etandex et Bétrec IG à lui payer la somme de 308 687,93 euros en réparation des dommages qu'elle estime avoir subis ;

3°) de mettre à la charge solidaire des sociétés Etandex et Bétrec IG la totalité des dépens qui s'élèvent à la somme de 8 872,78 euros TTC ;

4°) de mettre à la charge des sociétés Etandex et Bétrec IG une somme de 18 950,05 euros TTC au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ;

La commune de Montélimar soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularités dès lors qu'il ne vise pas le mémoire en date du 30 janvier 2013 par lequel elle a répondu à la lettre du tribunal en date du 15 janvier 2013 informant les parties que la décision à intervenir était susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;

- le jugement est entaché d'irrégularités dès lors qu'il ne vise pas les dispositions législatives ou réglementaires dont il fait application ; que s'il justifie le rejet de la demande au motif qu'elle ne serait pas fondée à soutenir que les malfaçons constatées engagent la responsabilité du constructeur et des concepteurs à l'égard du maître de l'ouvrage sur la base des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 1792-4-1 du code civil, ces dispositions, non applicables en l'espèce, ne permettent pas de justifier le rejet de sa demande ;

- le jugement est insuffisamment motivé s'agissant des raisons qui l'ont conduit à ne pas retenir, comme il était soutenu par la requérante, que l'ouvrage était impropre à sa destination ;

- le tribunal a entaché son jugement d'erreur de fait et d'appréciation dès lors, d'une part, qu'il a omis d'analyser l'impropriété du dispositif de membrane posé par la société Etandex, alors que cette membrane peut aussi être qualifiée d'ouvrage et entraîner l'impropriété de tout le bâtiment ; dès lors, d'autre part, qu'il n'a pas pris la pleine mesure des constats effectués par l'expert, notamment la généralisation des dommages consécutifs au défaut d'étanchéité de la membrane ; dès lors, enfin, qu'il n'a pas pris en compte la recommandation de l'expert selon laquelle il est nécessaire de procéder à des travaux de réfection importants et qui n'écarte la solution d'une réparation à l'identique qu'au motif que cette solution serait disproportionnée par rapport aux travaux de l'existant, faisant ainsi fi du principe de la réparation intégrale des dommages subis ;

- le tribunal a considéré à tort que les désordres ne pouvaient être considérés comme portant atteinte à la solidité de l'ouvrage ou le rendre impropre à son usage dans un délai prévisible, alors que l'expert remet précisément en cause les choix retenus par la société Etandex ;

- la responsabilité tant de la société Etandex que de la société Bétrec IG peut valablement être engagée sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 1792-4-1 du code civil dès lors qu'il ne fait aucun doute que les désordres constatés sont en lien direct avec les prestations réalisées par la société Etandex ; que la responsabilité de la société Bétrec IG, à laquelle avait été confiée une mission de direction de l'exécution des travaux, doit de même être engagée en sa qualité de maître d'oeuvre dès lors qu'il lui appartenait de vérifier que le procédé de pose du revêtement d'étanchéité réalisé par la société Etandex, titulaire du lot, était conforme aux règles de l'art, ce qu'elle n'a pas fait ;

- le montant des frais d'expertise doit être ramené du montant de 12 320,81 euros TTC à celui de 8 872,78 euros TTC, dès lors que les frais prétendument exposés par la Saur à la demande de l'expert ne concernent aucunement l'expertise diligentée par le tribunal administratif, à l'exception d'une somme de 711,77 euros TTC ;

- le coût des prestations juridiques assurées pour le compte de la ville de Montélimar s'établit à la somme de 18 950,05 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2013, présenté pour la société anonyme Etandex, dont le siège est situé zone d'activité de Saclay (91400), représentée par son président directeur général en exercice, qui conclut, à titre principal, à la confirmation du jugement duTribunal administratif de Grenoble du 15 mai 2013 et au rejet de la requête de la commune de Montélimar ; à titre subsidiaire à ce qu'un partage de responsabilité soit opéré avec la société Bétrec IG et à ce qu'il soit fait droit à sa demande tendant à être relevée et garantie par le maître d'oeuvre de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre ; de condamner les sociétés Max Perles et Socotec à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre ; en tout état de cause, à fixer le montant des frais d'expertise à la somme de 8 872,78 euros TTC et de les mettre à la charge de la commune de Montélimar ; à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune de Montélimar en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- la requête aux fins d'appel de la commune de Montélimar est irrecevable dès lors qu'elle ne produit pas l'autorisation d'ester en justice donnée à son maire par le conseil municipal ;

- les moyens tirés de l'irrégularité du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 15 mai 2013 doivent être écartés dès lors que le tribunal a bien analysé la délibération du 31 mars 2008 quand bien même n'a-t-il pas mentionné dans le visa de la note en délibérée de la commune transmise par télécopie du 11 avril 2013, l'analyse de son contenu ; que s'il a de manière erronée cité l'article 2270 du code civil, il a bien fondé sa décision sur les principes dont s'inspire l'article 1792 du code civil relatif à la responsabilité décennale des constructeurs et a suffisamment motivé son jugement en qualifiant la nature des désordres ;

- c'est à bon droit que le tribunal a rejeté la demande de la commune de Montélimar dès lors qu'après avoir justement qualifié le revêtement de la cuve d'élément dissociable du château d'eau ne pouvant donc être assimilé à l'ouvrage ou à l'un de ses éléments indissociables, il a estimé que les désordres affectant le château d'eau n'entrent pas dans le champ d'application de la responsabilité décennale du constructeur ;

- contrairement à ce que soutient la commune requérante, il ressort clairement du rapport d'expertise que l'ouvrage n'est pas en péril et que les désordres ne le rendent pas impropre à sa destination ; que le Tribunal a en conséquence fait une juste appréciation de l'état de l'ouvrage ;

- le tribunal n'a en conséquence pas commis d'erreur d'appréciation en ce qui concerne les conséquences dommageables des infiltrations ;

- la commune de Montélimar ne démontre pas que la solution préconisée par l'expert tendant à récupérer le réservoir en l'état et de mettre en oeuvre sur l'étanchéité existante un " Liner " ne permettrait pas régler les problèmes d'étanchéité ;

- c'est à tort que la commune de Montélimar soutient qu'elle n'aurait pas respecté les règles de l'art en matière de pose de revêtement d'étanchéité alors que le maître d'oeuvre a accepté les fixations utilisées et n'a effectué aucune remarque ni observation lors de la réalisation des travaux et que les dispositions particulières de la mise en place de ces fixations, non décrites dans le cahier des charges établi par la société Max Perles, ont été définies et validées par cette dernière et par la société Socotec à travers des plans détaillés d'exécution ;

- dans l'hypothèse où la Cour retiendrait sa responsabilité, elle devra opérer un partage de responsabilité avec la société Bétrec IG et faire droit à sa demande d'être relevée et garantie par le maître d'oeuvre de toute condamnation qui serait prononcée contre elle dès lors que celui-ci avait précisément pour mission de surveiller l'utilisation des chevilles utilisées pour fixer le revêtement et qu'il pouvait s'opposer à l'utilisation des chevilles Spit Iso s'il jugeait que cette utilisation n'était pas conforme aux prescriptions ce qu'il s'est abstenu de faire ;

- dans l'hypothèse où la Cour retiendrait sa responsabilité, elle est fondée à demander à être relevée et garantie de toute condamnation qui serait prononcée contre elle par les sociétés Max Perles, fabricant du procédé d'étanchéité et Socotec, contrôleur technique, dès lors qu'existe un problème de conception des fixations qui lui est étranger ;

- les frais d'expertise doivent être laissés à la charge de la commune de Montélimar et réduits en tout état de cause à la somme de 8 872,78 euros ;

- la demande de la commune de Montélimar d'être couverte des frais de prestations juridiques à hauteur de 18 950,05 euros ainsi que des frais non compris dans les dépens devra être rejetée ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 décembre 2013, présenté pour la société anonyme Max Perles et compagnie, dont le siège social est 4 rue du Professeur René Dubos, Meru (60110), représentée par son président directeur général en exercice, qui conclut, à titre principal, à la confirmation du jugement du Tribunal administratif de Grenoble et au rejet des demandes formulées à son encontre par la société Etandex ; à titre subsidiaire, à la condamnation des sociétés Bétrec IG et Socotec à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ; en tout état de cause, à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Etandex en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 15 mai 2013 devra être confirmé dès lors qu'ainsi qu'indiqué par l'expert dans son rapport, les désordres dénoncés ne sont pas de nature à mettre l'ouvrage en péril ;

- les demandes de la société Etandex dirigées contre elle sont irrecevables dès lors qu'existe entre cette société et elle un contrat de droit privé ; que les demandes de la société Etandex sont dès lors présentées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

- la société Etandex demeure principalement responsable des désordres constatés dès lors, et ainsi que le relève l'expert dans son rapport, cette société n'a pas suivi ses préconisations s'agissant de la nature des chevilles à mettre en place ; que la société Etandex ne saurait sérieusement prétendre qu'elle aurait visé un carnet de détail qui aurait validé la solution qu'elle a appliquée alors qu'il apparaît que la société Etandex a délibérément choisi de ne pas suivre les préconisations qui lui avaient été faites et qu'elle n'a jamais indiqué qu'elle avait modifié celles-ci ;

- si, par impossible, la Cour la condamnait à garantir la société Etandex des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, elle devra elle-même être garantie par les sociétés Socotec et Bétrec IG qui ont failli à leurs missions respectives de contrôle des chevilles mises en place par la société Etandex ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 13 décembre 2013, présenté pour la commune de Montélimar, qui conclut aux mêmes fins que la requête par la reprise des mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 février 2014, non communiqué, présenté pour la société anonyme Etandex, qui conclut au rejet de la requête, pour les mêmes motifs que précédemment ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 mars 2014, présenté pour la société à actions simplifiée Bétrec IG, dont le siège est situé 4 avenue Doyen Weil à Grenoble (38000), représentée par son président directeur général en exercice, qui conclut, à titre principal, à la confirmation du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 15 mai 2013 et au rejet de la requête de la commune de Montélimar ; à titre subsidiaire à ce que la société Etandex soit déboutée de sa demande de partage de responsabilité et d'appel en garantie dirigée contre elle et à ce qu'il soit fait droit à sa demande tendant à être relevée et garantie par la société Etandex de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre ; à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la commune de Montélimar en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que les moyens par lesquels la commune de Montélimar critique la régularité du jugement ne pourront qu'être rejetés ; que la membrane d'étanchéité constitue un élément d'équipement du réservoir et ne saurait être qualifiée d'ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil ; que les désordres constatés ne sont pas de nature à porter atteinte à la solidité de l'ouvrage et ne le rendent pas impropre à sa destination ; que les courriers de la SAUR ne sont pas de nature à contredire les observations de l'expert ; qu'en tout état de cause, les désordres ne lui sont pas imputables ; que les sommes réclamées par la commune devront être réduites ; qu'elle doit être intégralement garantie par la société Etandex compte tenu des fautes retenues à sa charge par l'expert ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 mars 2014, présenté pour la commune de Montélimar qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du27 mars 2014 :

- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;

- et les observations de MeA..., pour la commune de Montélimar, MeB..., pour la société Etandex, MeD..., pour la société Bétrec IG et de Me C...pour la société Max Perles ;

1. Considérant que la commune de Montélimar fait appel du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 15 mai 2013 qui a rejeté sa demande tendant notamment à ce que les sociétés Etandex et Bétrec IG soient solidairement condamnées à lui payer la somme de 306 687,93 euros ;

Sur la recevabilité de la requête de la commune de Montélimar :

2. Considérant que la commune de Montélimar a produit par mémoire du 25 janvier 2013 la copie du registre des délibérations du conseil municipal dans sa séance du 31 mars 2008 au cours de laquelle l'assemblée délibérante a donné au maire de la commune délégation pour intenter au nom de celle-ci les actions en justice ou de la défendre dans les actions intentées contre elle devant toutes les juridictions pour tout type de recours et contentieux ; que la fin de non recevoir opposée à la requête de la commune de Montélimar par la société Etandex au motif que la commune n'aurait pas produit l'autorisation d'ester en justice donnée à son maire par le conseil municipal manque dès lors en fait et doit être écartée ;

Sur les conclusions aux fins d'indemnisation :

En ce qui concerne la responsabilité encourue :

3. Considérant qu'il résulte des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil que des dommages apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent la responsabilité des constructeurs sur le fondement de la garantie décennale, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans ; que la responsabilité décennale d'un constructeur peut être recherchée à raison des dommages qui résultent de travaux de réfection réalisés sur les éléments constitutifs d'un ouvrage, dès lors que ces dommages sont de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination ;

4. Considérant que par un marché public d'un montant de 395 615,00 euros HT, soit 477 111,69 euros TTC notifié le 3 septembre 1999, la commune de Montélimar a confié à la société Etandex le lot n° 1 du marché de réfection du château d'eau de La Biole ; que ce lot concernait les travaux de remise à neuf du réservoir consistant notamment en la pose d'un revêtement intérieur assurant l'étanchéité de la cuve ; que les travaux ont été réceptionnés sans réserve le 3 février 2000 ; que des ruissellements d'eau se sont cependant rapidement manifestés ; que la commune de Montélimar a en conséquence sollicité du Tribunal administratif de Grenoble une expertise judiciaire ; que l'expert, désigné par ordonnance du président du tribunal du 15 mai 2006, a rendu son rapport le 11 août 2009 ; que la commune de Montélimar demande la condamnation solidaire des sociétés Etandex et Betrec IG à l'indemniser du dommage subi à hauteur de la somme de 308 687, 93 euros TTC ;

5. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que de nombreuses traces d'infiltrations sont apparues sous la voûte du fond du réservoir et se sont généralisées sur toute la périphérie de la base de celle-ci ; que le volume d'eau des fuites ainsi constatées tel que recueilli par un drain a été évalué par l'expert à 28 gouttes par minute ; que ces infiltrations trouvent leur origine dans une fixation inadéquate du revêtement époxy stratifié placé à l'intérieur du réservoir ; que la visite de l'intérieur du réservoir du château d'eau a permis de constater l'existence de nombreuses reprises des fixations du revêtement ainsi que des fissurations de ce dernier en plusieurs endroits en périphérie basse sur une hauteur d'environ 2,00 mètres, les fissures apparentes du revêtement présentant des amplitudes variables de 5 cm à 20 cm toujours au droit des fixations ; que certaines des zones de décollement en cloquage du revêtement couvrent des surfaces du réservoir d'environ 0,15 à 0,40 m2 ; que les désordres ayant ainsi affecté la fixation du revêtement intérieur époxy stratifié sur les parois de la cuve du réservoir ne rendent plus ce dernier étanche et conduisent à la persistance d'infiltrations entre le fond de la cuve et les dalles de béton assurant l'ossature du château d'eau ; qu'il ressort des relevés effectués par la société délégataire du service d'eau potable que la stagnation de dépôts d'eau entre le revêtement d'étanchéité la paroi du réservoir apparus du fait des fuites, crée un risque de développement de nids infectieux qui, à l'occasion des marnages quotidiens, peuvent entrer en contact avec l'eau du réservoir et par suite engendrer une pollution du réseau ; que dans le dernier état de ses écritures la commune de Montélimar atteste de l'apparition de traces d'écoulement d'eau en provenance du fond de la cuve également sur les parois extérieures de l'ouvrage, prouvant l'aggravation progressive des désordres ; que ces désordres qui peuvent remettre en cause le caractère potable de l'eau contenue dans le réservoir et envoyée dans le réseau, sont de nature à rendre le château d'eau impropre à sa destination et engagent la responsabilité des constructeurs sur le fondement de la garantie décennale, alors même qu'à ce jour, ainsi que l'a indiqué l'expert, les fuites ne compromettent pas la solidité de l'édifice et que celui-ci n'aurait pas cessé d'être exploité ; que, dès lors, la commune de Montélimar est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble n'a retenu aucune faute de nature à engager la responsabilité des constructeurs et a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de la société Etandex et de la société Bétrec IG ;

6. Considérant qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les conclusions indemnitaires présentées par la commune de Montélimar devant le Tribunal administratif de Grenoble dirigées contre la société Etandex et la société Betrec IG ;

7. Considérant qu'il résulte des conclusions de l'expert que l'origine du décollement du revêtement résulte de la réunion d'un ensemble de trois types de négligences commises par la société Etandex à laquelle a été confiée la réalisation de ces travaux d'étanchéité du réservoir ; qu'il apparaît ainsi que cette entreprise n'a pas respecté les indications portées sur le cahier des clauses techniques particulières du marché du 3 septembre 1999 traitant la question de l'interaction du support et a de même omis de vérifier, de percevoir ou de reconnaître suffisamment l'état de la structure existante du réservoir ; que la société Etandex a surtout omis de respecter les recommandations de l'entreprise Max Perles, fournisseur des attaches destinées à la fixation du revêtement sur les parois du réservoir qui préconisait le choix d'attaches Spit iso résistant à une force de 160 daN alors que la société Etandex a estimé suffisant le recours à des attaches Spit iso résistant à une simple force de 100 daN ; que la société Etandex, en sa qualité de titulaire du lot n° 1 du marché de réfection du château d'eau, n'établit pas davantage avoir effectué les vérifications que le maître d'oeuvre lui avait demander d'effectuer ; qu'il résulte également de l'instruction que la société Betrec IG, maître d'oeuvre, n'a pas exercé correctement sa mission de direction et de surveillance des travaux, particulièrement en ce qui concerne les fixations qui se sont révélées déficientes ;

En ce qui concerne la réparation des désordres :

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise qu'il pourra être mis fin aux problèmes d'étanchéité du réservoir par la pose d'un liner pour un montant de 139 200 euros ; qu'il y a lieu, en conséquence, de condamner solidairement les sociétés Etandex et Bétrec IG à payer à la commune de Montélimar cette somme de 139 200 euros TTC ;

En ce qui concerne les frais d'expertise :

10. Considérant que, par jugement du 29 avril 2010, le Tribunal administratif de Grenoble a ramené de 12 310,81 euros à 8 872,78 euros le montant des frais et honoraires dus à l'expert ; qu'il y a lieu, par suite, de fixer à cette somme le montant des frais d'expertise et de les mettre à la charge solidaire de la société Etandex et de la société Bétrec IG ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant en premier lieu que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge solidaire de la société Etandex et de la société Betrec IG une somme de 3 000 euros à verser à la commune de Montélimar, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

10. Considérant, en deuxième lieu, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Etandex une somme de 2 000 euros à verser à la société Max Perles, au titre desdits frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

11. Considérant, en dernier lieu, que les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Montélimar, la société Bétrec IG et la société Max Perles, qui ne sont pas les parties perdantes en la présente instance, soient condamnées à verser à la société Etandex les sommes qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

En ce qui concerne les appels en garantie :

- S'agissant des appels en garantie formés par la société Etandex contre la société Max Perles et la société Socotec :

12. Considérant que le litige né de l'exécution d'un marché de travaux publics relève de la compétence de la juridiction administrative, sauf si les parties en cause sont unies par un contrat de droit privé ; qu'il ressort de l'instruction, que la société Max Perles, fabricant du procédé d'étanchéité mis en oeuvre par la société Etandex à l'occasion de la réalisation des travaux d'étanchéité du réservoir, d'une part, et la société Socotec, d'autre part, sont liées à celle-ci par un contrat privé; que, par suite la juridiction administrative est incompétente pour statuer sur les conclusions d'appel en garantie que la société Etandex présente à l'encontre de la société Max Perles et de la société Socotec ;

- S'agissant des appels en garantie réciproque formés par la société Etandex et la société Bétrec IG :

13. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, les dommages affectant l'étanchéité de la cuve du château d'eau de la Biole ont pour origine les négligences commises par la société Etandex, titulaire du lot en cause du marché de réfection, dans le choix des attaches destinées à la fixation du revêtement sur les parois du réservoir ; que la société Etandex ne peut utilement invoquer le fait qu'elle n'aurait pas été suffisamment contrôlée par le maître d'oeuvre dans la mise en oeuvre des fixations litigieuses pour demander à être garantie par ce dernier alors qu'il lui avait été recommandé d'avoir recours à d'autres attaches ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Bétrec IG est dès lors fondée à demander à être intégralement garantie par la société Etandex de la totalité des sommes mises à sa charge ; qu'en revanche, l'appel en garantie de la société Etandex ne peut qu'être rejeté ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble, 15 mai 2013 est annulé.

Article 2 : La société Etandex et la société Betrec IG sont solidairement condamnées à payer à la commune de Montélimar la somme de 139 200 euros TTC.

Article 3 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 8 872,78 euros TTC, sont mis à la charge solidaire des sociétés Etandex et Bétrec IG.

Article 4 : Les conclusions de la société Etandex tendant à être garantie de toute condamnation par la société Betrec IG sont rejetées.

Article 5 : Les sociétés Etandex et Betrec IG verseront à la commune de Montélimar une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : La société Etandex versera à la société Max Perles une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : La société Etandex est condamnée à garantir la société Betrec IG de la totalité des condamnations prononcées à son encontre.

Article 8 : Les conclusions de la société Etandex tendant à être garantie de toute condamnation par la société Max Perles et par la société Socotec sont rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 9 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 10 : le présent arrêt sera notifié à la commune de Montélimar, à la société Etandex, à la société Bétrec IG, à la société Max Perles et à la société Socotec.

Délibéré après l'audience du 27 mars 2014 à laquelle siégeaient :

M. Wyss, président de chambre,

M. Gazagnes, président-assesseur,

M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

Lu en audience publique, le 17 avril 2014.

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N° 13LY01837


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01837
Date de la décision : 17/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04-03-01 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité décennale. Désordres de nature à engager la responsabilité décennale des constructeurs. N'ont pas ce caractère.


Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: M. Olivier MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : STRAT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-04-17;13ly01837 ?
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