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10/04/2014 | FRANCE | N°11LY22139

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 10 avril 2014, 11LY22139


Vu l'ordonnance n° 372825 du 18 novembre 2013 en tant que le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a décidé d'attribuer à la Cour administrative d'appel de Lyon le jugement de la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 31 mai 2011 sous le n° 11MA02139, en application des dispositions de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, ainsi que les documents visés par celle-ci, enregistrés au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon sous le n° 11LY22139 ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour

administrative d'appel de Marseille le 31 mai 2011, présentée pou...

Vu l'ordonnance n° 372825 du 18 novembre 2013 en tant que le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a décidé d'attribuer à la Cour administrative d'appel de Lyon le jugement de la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 31 mai 2011 sous le n° 11MA02139, en application des dispositions de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, ainsi que les documents visés par celle-ci, enregistrés au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon sous le n° 11LY22139 ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 31 mai 2011, présentée pour M. A...B..., domicilié moins trois mois en Algérie ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902581 du 27 janvier 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de la défense du 8 juin 2009 rejetant sa demande de reconnaissance du statut de victime de la captivité en Algérie ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- il justifie qu'il a été détenu en Algérie, entre le 3 septembre 1962 et février 1963, soit au moins trois mois après le 2 juillet 1962 ;

- une expertise médicale pourra être ordonnée, qui permettra de confirmer l'existence d'un lien entre ses blessures et sa captivité en Algérie ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 6 décembre 2011, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Marseille a accordé l'aide juridictionnelle totale à M.B... ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 juin 2012, présenté par le ministre de la défense et des anciens combattants qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que le requérant ne justifie pas avoir été capturé au moins trois mois après le 2 juillet 1962 et qu'il remplirait ainsi les conditions prévues à l'article L. 319-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

Vu la lettre en date du 21 février 2014 par laquelle les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré de ce que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité au motif que la demande de M.B..., qui n'entrait pas dans le champ d'application de l'article R. 222-13 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article R. 811-1 du même code, relevait d'une formation collégiale du Tribunal et n'était pas au nombre de ceux sur lesquels le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mars 2014 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Vigier Carrière, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B..., qui a servi au sein des groupes mobiles de sécurité en Algérie du 24 janvier 1959 au 1er juillet 1962, a sollicité le 9 juin 2006 le statut de victime de la captivité en Algérie prévu à l'article L. 319-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; que, par une décision du 8 juin 2009, le ministre de la défense a rejeté cette demande au motif que l'intéressé ne remplit pas les conditions fixées par l'article L. 319-1, 1° dudit code dès lors qu'il n'est pas établi qu'il a été détenu au moins trois mois en Algérieaprès le 2 juillet 1962 ; que M. B... a contesté le 21 septembre 2009 ce refus devant le Tribunal administratif de Nîmes ; que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a, par un jugement du 27 janvier 2011, rejeté cette demande ; que M. B... relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 222-1 du code de justice administrative : " Les jugements des tribunaux administratifs (...) sont rendus par des formations collégiales, sous réserve des exceptions tenant à l'objet du litige ou à la nature des questions à juger. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 222-13 du même code : " Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (moins trois mois en Algérie) statue (moins trois mois en Algérie) : (...) 3° Sur les litiges en matière de pensions (...) " ; qu'il résulte du deuxième alinéa de l'article R. 811-1 dudit code que le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort sur les litiges mentionnés, notamment, au 3° de l'article R. 222-13 ;

3. Considérant que M. B...a demandé au Tribunal administratif de Nîmes l'annulation de la décision du ministre de la défense lui refusant le bénéfice du statut de victime de la captivité en Algérie prévu à l'article L. 319-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; qu'un tel litige, lié à l'application d'un texte portant reconnaissance d'un statut, ne constitue pas un litige en matière de pensions au sens du 3° de l'article R. 222-13 du code de justice administrative, quand bien même l'acquisition de ce statut permet à la victime de la captivité ou à ses ayants cause de pouvoir bénéficier, lorsqu'ils ne peuvent prétendre à pension militaire d'invalidité, des pensions de victime civile au titre des blessures reçues ou des maladies contractées ou aggravées du fait de mauvais traitements ou de privations subis en captivité ; que cette demande ne relève pas non plus des autres litiges visés par l'article R. 222-13 ; qu'ainsi, la demande de M.B..., qui n'entrait pas dans le champ d'application de l'article R. 222-13 précité du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article R. 811-1 du même code, relevait d'une formation collégiale du Tribunal et n'était pas au nombre de ceux sur lesquels le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort ; qu'il suit de là que le jugement attaqué, qui a été rendu par un magistrat statuant seul en application des dispositions précitées de l'article R. 222-13 du code de justice administrative, est entaché d'irrégularité et doit, en conséquence, être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer immédiatement et de statuer sur la demande de M. B...;

Sur la légalité de la décision refusant l'attribution du statut de victime de la captivité en Algérie :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 319-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Le statut de victime de la captivité en Algérie est attribué aux personnes remplissant les conditions suivantes : 1°) Avoir été capturé après le 2 juillet 1962 et détenu pendant au moins trois mois en Algérie, en raison des services rendus à la France, et notamment de leur appartenance à une formation régulière ou supplétive de l'armée française. Toutefois, aucune durée minimale de détention n'est exigée des personnes qui se sont évadées ou qui présentent, du fait d'une blessure ou d'une maladie, une infirmité dont le taux atteint au moins le minimum indemnisable et dont l'origine est reconnue imputable par preuve à la captivité ; 2°) Être arrivé en France avant le 10 janvier 1973 ou apporter la preuve qu'il en a été empêché pour des raisons indépendantes de sa volonté ; 3°) Posséder la nationalité française à la date à laquelle le bénéfice du présent statut est sollicité. Le statut est également attribué, quelle que soit la durée de la détention, aux personnes mentionnées au 1° qui sont décédées en détention, sur demande de leurs ayants cause remplissant les conditions posées par le 2° et le 3°" ;

6. Considérant que M. B... soutient qu'à la suite de l'indépendance de l'Algérie, il a été capturé et fait prisonnier entre le 2 septembre 1962 et février 1963, qu'il a été ainsi envoyé durant sa captivité à la " ligne Morice " pour procéder au déminage de la " frontière algéro-marocaine ", qu'il a été blessé en janvier-février 1963 après avoir marché sur une mine et en a conservé des séquelles, qu'il a été abandonné et a pu rejoindre son domicile ;

7. Considérant toutefois que, ni les deux témoignages recueillis en Algérie, produits par le requérant, rédigés en termes identiques et qui se bornent à déclarer que l'intéressé a été victime d'une explosion d'une mine sur la " ligne Morice " à la " frontière algéro-marocaine " vers janvier ou février 1963, sans contenir de précisions circonstanciées sur la captivité alléguée de l'intéressé et sur les conditions dans lesquelles ils ont pu connaître de cet évènement, ni les deux pièces médicales datées de 2006 produites par l'intéressé, décrivant les lésions à sa jambe et son pied gauches en indiquant que ces lésions semblent bien venir d'un traumatisme violent provoqué par un objet métallique type mine anti-personnelle, ni les autres pièces produites au dossier ne permettent de regarder la détention alléguée de M. B...entre le 2 septembre 1962 et février 1963 comme établie ; que, par suite, c'est à bon droit que, pour refuser l'attribution du statut de victime de captivité en Algérie à M.B..., le ministre de la défense a estimé que la condition relative à une détention d'au moins trois mois en Algérie après le 2 juillet 1962 n'est pas remplie ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du ministre de la défense du 8 juin 2009 lui refusant le statut de victime de la captivité en Algérie ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que l'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de M. B...tendant l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0902581 du 27 janvier 2011 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Nîmes est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions de M. B... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de la défense.

Délibéré après l'audience du 20 mars 2014 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 avril 2014.

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N° 11LY22139


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY22139
Date de la décision : 10/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : CABINET FONTAINE et FLOUTIER ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-04-10;11ly22139 ?
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