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27/02/2014 | FRANCE | N°13LY00056

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 27 février 2014, 13LY00056


Vu la requête, enregistrée le 9 janvier 2013 au greffe de la Cour, présentée pour M. et Mme B...A..., domiciliés 14 rue Fantin Latour à Paris (75016) ;

M. et Mme A...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102075 du 13 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, en droits et pénalités, et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 et 2005 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;
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Vu la requête, enregistrée le 9 janvier 2013 au greffe de la Cour, présentée pour M. et Mme B...A..., domiciliés 14 rue Fantin Latour à Paris (75016) ;

M. et Mme A...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102075 du 13 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, en droits et pénalités, et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 et 2005 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. et Mme A...soutiennent :

- que les plus values de cession réalisées par M.A..., dans le cadre de son activité de concepteur de logiciel, à titre indépendant, d'un montant de 40 000 euros en 2004 et 80 000 euros en 2005 entrent dans le champ d'application de l'article 151 septies du code général des impôts et doivent par suite être exonérées, puisqu'il exerce son activité depuis au moins cinq ans et que les recettes au titre des années 2004 et 2005 n'excèdent pas le seuil de 90 000 euros prévu par ledit article ;

- qu'en jugeant que M. A...ne justifiait pas que les biens cédés avaient été affectés à l'une des activités professionnelles visées à l'article 151 septies du code général des impôts, les premiers juges ont ajouté à la loi, en contradiction avec l'article 34 de la Constitution ;

- que l'administration ne pouvait, pour motiver la majoration de 40 % pour manquement délibéré aux impositions sur le revenu relatives aux salaires et aux plus-values, se borner à faire état de sa fonction de dirigeant et de l'importance des sommes prétendument éludées, sans prouver l'établissement conscient de l'omission ; qu'il n'a jamais été relevé d'insuffisance de déclaration de salaires dans le passé ; que l'importance de l'erreur est moindre que celle retenue par le vérificateur ; qu'en outre, Mme A...qui établissait les déclarations d'impôt sur le revenu se trouvait dans une grande fragilité psychologique et physique ;

- que s'agissant des majorations pour manquement délibéré appliquées sur les contributions sociales afférentes aux cessions de logiciel, ils n'ont jamais eu connaissance des notifications de redressement dont fait état l'administration, au soutien de son moyen sur le caractère répété des omissions ; qu'ils ne sont donc pas de mauvaise foi ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 mai 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre de l'économie et des finances soutient :

- que le bénéfice de l'article 151 septies n'est pas applicable car la cession des logiciels ne saurait être, au cas particulier, assimilée à une cession d'éléments d'actifs immobilisés puisqu'ils n'ont pas été affectés à l'activité professionnelle du requérant pendant une durée de cinq ans avant la cession ; qu'il s'agit de recettes d'exploitation qui ne peuvent pas bénéficier de cette exonération ;

- que la notification de redressement du 5 juin 2007 comporte les motifs de droit et de faits sur lesquels est fondée la majoration pour manquement délibéré de 40 % ; que le caractère délibéré est caractérisé par les précédentes insuffisances de déclaration au titre des contributions sociales de plus-values professionnelles réalisées dans le passé, par la fonction de président du conseil d'administration de M. A...au sein de l'entreprise et par le fait que les sommes éludées se sont respectivement élevées à 52 % et 50 % des sommes imposables à l'impôt sur le revenu en 2004 et 2005 ; que, par ailleurs, le manquement délibéré est caractérisé par le fait qu'en raison de sa fonction de dirigeant, M. A...ne pouvait ignorer le montant et l'origine des sommes qui lui étaient versées ; qu'en outre, les requérants avaient déjà fait l'objet de deux procédures de rectification au titre des années 2000, 2001 et 2002 en matière de contributions sociales sur les plus-values professionnelles ; que les circonstances que l'administration a fait une erreur sur le pourcentage de la base imposable non déclarée en 2004 et que Mme A...présente des difficultés d'ordre psychologique ne sont pas de nature à infirmer l'analyse de l'administration ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 23 juillet 2013, présenté pour M. et Mme A..., tendant aux mêmes fins que leur requête, par les mêmes moyens et font, en outre, état de ce que par jugement du 14 février 2013, devenu définitif, le Tribunal administratif de Paris, sur le fondement de l'article 151 septies du code général des impôts, leur a donné satisfaction, au titre des années 2008 à 2010 ;

Vu le mémoire en défense complémentaire, enregistré le 29 octobre 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances qui conclut au rejet de la requête et soutient, en outre, que les requérants ne peuvent pas utilement invoquer le jugement du Tribunal administratif de Paris qui concerne les années 2008 à 2010 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 janvier 2014 :

- le rapport de Mme Bourion, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Chevalier-Aubert, rapporteur public ;

1. Considérant que M.A..., dirigeant de la SA Eole, a fait l'objet d'un contrôle sur pièces au titre des revenus des années 2004 et 2005, à l'issue duquel le service, estimant qu'il ne pouvait prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 151 septies du code général des impôts, a imposé la cession de logiciels à la société, selon le régime de l'article 39 terdecies du même code et assujetti M. A...à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu, au titre des années 2004 et 2005 ; que les requérants relèvent appel du jugement en date du 13 novembre 2012, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 et 2005, ainsi que leur demande de décharge des pénalités de 40 % pour manquement délibéré ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 92 du code général des impôts dans sa version alors applicable : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus. 2. Ces bénéfices comprennent notamment : (...) 3° Les produits perçus par les inventeurs au titre soit de la concession de licences d'exploitation de leurs brevets, soit de la cession ou concession de marques de fabrique, procédés ou formules de fabrication (...) " ; qu'aux termes des dispositions du I de l'article 93 quater du même code : " (...) / Les plus-values réalisées sur des immobilisations sont soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies. Ce régime est également applicable aux produits de la propriété industrielle définis à l'article 39 terdecies quelle que soit la qualité de leur bénéficiaire ainsi qu'aux produits des cessions de droits portant sur des logiciels originaux par leur auteur, personne physique (...) " ; qu'aux termes de l'article 39 terdecies de ce code : " 1. Le régime des plus-values à long terme est applicable aux plus-values de cession de brevets, ou d'inventions brevetables, ainsi qu'au résultat net de la concession de licences d'exploitation des mêmes éléments. Il en est de même en ce qui concerne la plus-value de cession ou le résultat net de la concession d'un procédé de fabrication industriel qui remplit les conditions suivantes : a. Le procédé doit constituer le résultat d'opérations de recherche ; b. Il doit être l'accessoire indispensable de l'exploitation d'un brevet ou d'une invention brevetable ; c. Il doit être cédé ou concédé simultanément au brevet ou à l'invention brevetable dont il est l'accessoire et aux termes du même contrat que celui-ci. Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque les éléments mentionnés ci-dessus ne présentent pas le caractère d'éléments de l'actif immobilisé ou ont été acquis à titre onéreux depuis moins de deux ans (...) " ; qu'aux termes des dispositions du I de l'article 151 septies dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les plus values réalisées dans le cadre d'une activité artisanale, commerciale ou libérale sont, à condition que l'activité ait été exercée pendant au moins cinq ans et que le bien n'entre pas dans le champ d'application du A de l'article 1594-0 G, exonérés pour : a. La totalité de leur montant lorsque les recettes annuelles n'excèdent pas : (...) 2° 90 000 euros s'il s'agit d'autres entreprises ou de titulaires de bénéfices non commerciaux " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions, qui sont toutes issues de l'article 11 de la loi n° 76-660 du 19 juillet 1976 portant imposition des plus-values, que le législateur n'a pas entendu exclure du bénéfice de l'exonération prévue à l'article 151 septies du code général des impôts les produits perçus par les inventeurs au titre de la cession ou de la concession de leurs brevets ; que, cependant, pour bénéficier de l'exonération prévue par les dispositions précitées de l'article 151 septies du code général des impôts, le contribuable doit justifier que le bien dont la cession a dégagé une plus-value a été affecté à l'une des activités professionnelles visées à cet article et que celle-ci a été exercée pendant cinq ans avant la cession ;

4. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt sur le revenu ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., qui exerce une activité de concepteur de logiciels à titre indépendant, a cédé à la SA Eole dont il est le dirigeant, un logiciel pour un montant de 40 000 euros en 2004, puis un autre logiciel de réalisation automatisée de tableaux de bord et baromètres pour un montant de 80 000 euros en 2005 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction et n'est pas même allégué que les logiciels en cause auraient été immobilisés et affectés à l'exercice de l'une des activités professionnelles visées par les dispositions du I de l'article 151 septies pendant une durée d'au moins 5 années avant leurs cessions ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, cette condition n'est pas, ainsi que cela est susmentionné, " ajoutée à la loi " ; qu'ils ne peuvent pas utilement invoquer le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 14 février 2013, qui est relatif à des plus-values réalisées au titre des années 2008 à 2010 ; que, par suite, M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que les plus-values réalisées au titre de la cession de logiciels en 2004 et 2005 devaient être exonérées en application des dispositions précitées de l'article 151 septies ;

Sur l'application de la majoration pour manquement délibéré :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...), la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration " ;

7. Considérant, en premier lieu, que pour motiver le caractère délibéré des insuffisances de déclaration de M. et Mme A...en matière d'impôt sur le revenu, l'administration a retenu qu'en raison des fonctions de responsabilité de M.A..., dans la société Eole, ce dernier ne pouvait ignorer le caractère imposable de ses rémunérations et de la plus-value de cession de logiciels ; qu'en omettant ainsi, au titre de l'année 2004, de déclarer un salaire de 41 637 euros, alors qu'il figurait sur la déclaration annuelle des salaires (relevé DAS) de la société ainsi qu'une plus-value de cession de logiciel de 40 000 euros et, au titre de l'année 2005, de déclarer une plus-value de cession de logiciel d'un montant de 80 000 euros, M. A...a éludé 52 % des sommes imposables à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2004 et 50 % au titre de l'année 2005 ; qu'ainsi, l'administration fiscale, qui a suffisamment motivé sa décision, établit, alors même qu'il n'avait pas été relevé d'insuffisance de déclaration de salaires durant les années précédentes, que M. et Mme A...ont volontairement procédé à une déclaration inexacte de leurs revenus, en vue d'éluder l'impôt ; que les circonstances que l'administration a fait une erreur sur le pourcentage de la base imposable non déclarée en 2004 et que Mme A...a rencontré des difficultés d'ordre psychologique ne sont pas de nature à remettre en cause le manquement délibéré des insuffisances de déclaration ; que, dès lors, M. et Mme A...ne sont pas fondés à contester l'application de la majoration de 40 %, visée à l'article 1729 du code général des impôts, aux impositions supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à leur charge au titre des années 2004 et 2005 ;

8. Considérant, en second lieu, que s'agissant des majorations pour manquement délibéré appliquées aux contributions sociales afférentes aux cessions de logiciel, M. et Mme A... font valoir qu'ils n'ont jamais eu connaissance des notifications et propositions de redressement du 1er mars 2002 et du 18 septembre 2003 dont fait état l'administration, au soutien de son moyen sur le caractère répété des omissions et qu'au titre de l'année 2004, ils ont déclaré un montant de plus-value de cession de logiciel de 40 000 euros sur leur déclaration de revenus, mais ont omis de reporter le montant de cette plus-value dans la catégorie des revenus à imposer aux contributions sociales ; que, toutefois, l'administration fait valoir qu'au titre des années 2000, 2001 et 2002, M. et Mme A...avaient déjà fait l'objet de redressements relatifs aux contributions sociales au motif du non report des sommes imposables dans la case idoine ; que s'ils font valoir ne pas avoir eu communication des notifications de redressement correspondantes, ils les ont, eux-mêmes, jointes à l'appui de leur requête de première instance et ne soutiennent pas ne pas avoir été imposés au titre de ces redressements ; que, dans ces conditions, l'administration établit, au vu de la répétition de ces carences et de leur importance, le caractère intentionnel et la volonté délibérée d'éluder le paiement de l'impôt exigible ; que, dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à contester l'application de la majoration de 40 % aux rappels de contributions sociales mis à leur charge au titre des années 2004 et 2005 en application des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, en droits et pénalités, et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 et 2005 ; que par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...A...et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2014 à laquelle siégeaient :

Mme Mear, présidente,

Mme Bourion, premier conseiller,

M. Meillier, conseiller.

Lu en audience publique, le 27 février 2014.

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N° 13LY00056


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00056
Date de la décision : 27/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-05-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices non commerciaux. Personnes, profits, activités imposables.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: Mme Isabelle BOURION
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : CABINET LM LAURANT et MICHAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-02-27;13ly00056 ?
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